Olivier Roland - tagged with Management-et-Leadership http://www.olivier-roland.fr/feed en-us http://blogs.law.harvard.edu/tech/rss Sweetcron [email protected] Les livres de Yuval Noah Harari pour penser l’humanité d’hier, d’aujourd’hui et de demain http://www.olivier-roland.fr/items/view/13308/Les-livres-de-Yuval-Noah-Harari-pour-penser-lhumanit-dhier-daujourdhui-et-de-demain
  1. Yuval Noah Harari : portrait d'un historien visionnaire, méditatif et engagé

Yuval Noah Harari : Portrait d'un historien visionnaire - CC BY-NC-SA 2.0

De Haïfa à la scène internationale : la vie de Yuval Noah Harari

L'histoire de Yuval Noah Harari commence en 1976 dans une banlieue tranquille de Haïfa, en Israël.

Né dans une famille de la classe moyenne, rien ne prédestinait ce jeune garçon discret à devenir l'un des intellectuels les plus influents de notre époque. Pourtant, dès son plus jeune âge, Yuval se distingue par une curiosité insatiable et une capacité remarquable à poser les bonnes questions sur le monde qui l'entoure.

Son parcours scolaire laisse rapidement entrevoir, chez lui, un esprit brillant et méthodique. Après avoir terminé ses études secondaires avec brio, Yuval Noah Harari s'inscrit à l'Université hébraïque de Jérusalem où il entame des études d'histoire. C'est là que sa passion pour les grandes questions de l'humanité prend véritablement forme. Il obtient son diplôme de licence en 1998, puis poursuit avec un master en histoire médiévale en 2000.

Mais c'est véritablement lors de son doctorat que le jeune historien trouve sa voie. Sous la direction du professeur Benjamin Z. Kedar, il se spécialise dans l'histoire militaire médiévale et soutient sa thèse en 2002 sur "L'Histoire des ordres militaires croisés de 1099 à 1291". Cette période d'études approfondies lui enseigne une méthode rigoureuse d'analyse historique qui marquera profondément sa future approche de la recherche.

Désireux d'élargir ses horizons, Yuval Noah Harari traverse l'Atlantique pour rejoindre l'Université d'Oxford en tant que post-doctorant. Cette expérience britannique, de 2002 à 2005, s'avère déterminante pour lui. Au contact de chercheurs internationaux et dans l'atmosphère stimulante d'Oxford, il commence à développer cette vision panoramique de l'histoire qui caractérise aujourd'hui son œuvre.

De retour en Israël, il intègre le département d'histoire de l'Université hébraïque de Jérusalem en tant que maître de conférences en 2005. Sa carrière académique prend alors son envol : il devient professeur associé en 2011, puis professeur titulaire en 2015. Parallèlement, il enseigne également à l'École de guerre de l'armée israélienne, où il partage sa passion pour l'histoire militaire.

C'est en 2011 que sa vie bascule véritablement. Yuval Noah Harari publie en hébreu un livre destiné au grand public : "Kitzur Toldot Ha-Enoshut" ("Brève histoire de l'humanité"). Traduit en anglais sous le titre "Sapiens : A Brief History of Humankind" en 2014, puis en français sous le titre de "Sapiens : une brève histoire de l'humanité" en 2015, l'ouvrage devient rapidement un phénomène mondial. Traduit dans plus de 60 langues et vendu à plus de 23 millions d'exemplaires, "Sapiens" propulse son auteur sur la scène internationale.

Le succès de "Sapiens" ouvre à Yuval Noah Harari les portes d'une nouvelle carrière.

En 2016, il sort "Homo Deus : A Brief History of Tomorrow" (publié en français sous le titre de "Homo Deus : une brève histoire du futur" en 2017) : une réflexion audacieuse sur l'avenir de l'humanité.

Puis en 2018, "21 Lessons for the 21st Century" (publié en 2018 en français sous le titre de "21 leçons pour le XXIème siècle" la même année) confirme son statut d'intellectuel incontournable.

Son dernier ouvrage, "Nexus" (2024), poursuit cette démarche d'exploration des défis contemporains en se concentrant sur les réseaux d'information et leur impact sur nos sociétés.

Au-delà de ses publications, Yuval Noah Harari devient une figure médiatique recherchée. Ses conférences TED cumulent des millions de vues, et il est régulièrement invité dans les plus grands forums internationaux, du Forum économique mondial de Davos aux universités les plus prestigieuses. Des dirigeants politiques comme Emmanuel Macron, Angela Merkel ou Barack Obama citent ses travaux, tandis que des entrepreneurs comme Mark Zuckerberg ou Bill Gates recommandent publiquement ses livres.

Qui est vraiment Yuval Noah Harari ?

Derrière le succès international se cache un homme aux convictions profondes et à la personnalité singulière.

Yuval Noah Harari s'est imposé un mode de vie qui tranche avec l'agitation du monde qu'il analyse. Pratiquant assidu de la méditation Vipassana, il consacre chaque année deux mois complets à des retraites silencieuses. Cette pratique, qu'il a découverte à l'âge de 24 ans, influence profondément sa méthode de réflexion et sa capacité à prendre du recul sur les événements contemporains.

L'historien israélien revendique également son homosexualité et vit depuis de nombreuses années avec son compagnon Itzik Yahav, qui est aussi son agent et co-fondateur de leur société de production. Cette transparence sur sa vie privée s'inscrit dans sa vision d'un monde plus ouvert et inclusif, où les différences individuelles sont acceptées et valorisées.

Au cœur de la pensée d'Yuval Noah Harari se trouve une approche interdisciplinaire révolutionnaire. Contrairement aux historiens traditionnels qui se concentrent sur des périodes ou des régions spécifiques, il adopte une perspective macro-historique embrassant l'ensemble de l'aventure humaine. Sa méthode consiste à identifier les grandes révolutions qui ont façonné l'humanité : la révolution cognitive (il y a 70 000 ans), la révolution agricole (il y a 12 000 ans) et la révolution scientifique (il y a 500 ans).

Cette vision panoramique lui permet d'analyser les défis contemporains avec une profondeur rare. Qu'il s'agisse de l'intelligence artificielle, du changement climatique, de la montée des populismes ou de l'avenir du travail, Yuval Noah Harari excelle à replacer ces enjeux dans leur contexte historique pour mieux comprendre leurs implications futures.

Son engagement intellectuel se double d'une conscience aiguë des responsabilités qui accompagnent sa notoriété. Fervent défenseur de la démocratie libérale et de la coopération internationale, il n'hésite pas à critiquer les dérives autoritaires et les tentations nationalistes. Ses prises de position sur la guerre en Ukraine, la situation au Moyen-Orient ou les dangers de la désinformation témoignent d'un intellectuel qui refuse la tour d'ivoire académique.

Yuval Noah Harari se distingue également par sa capacité unique à vulgariser des concepts complexes sans jamais sacrifier la rigueur scientifique. Cette qualité pédagogique exceptionnelle explique en grande partie le succès planétaire de ses ouvrages. Il maîtrise l'art de raconter l'histoire de l'humanité comme une épopée captivante, parsemée d'anecdotes éclairantes et de réflexions profondes.

Enfin, l'auteur de "Sapiens" incarne une nouvelle génération d'intellectuels mondialisés, capables de s'adresser simultanément aux élites dirigeantes et au grand public. Sa vision humaniste et son optimisme mesuré face aux défis du XXIe siècle en font une voix particulièrement écoutée dans un monde en quête de repères et de sens.

  1. De "Sapiens" à "Nexus" : les livres qui ont fait de Yuval Noah Harari un phénomène mondial

L'œuvre littéraire de Yuval Noah Harari témoigne d'une évolution frappante : d'abord centrée sur des travaux académiques pointus, elle s'est ouverte au grand public avec des essais qui ont bouleversé notre regard sur l'humanité.

Les livres de l'historien se caractérisent par une approche interdisciplinaire unique. Ils mêlent histoire, anthropologie, biologie et prospective et partagent ainsi une vision globale des défis humains d'hier, d'aujourd'hui et de demain.

Initialement concentré sur l'histoire militaire médiévale, l'auteur israélien a progressivement élargi son champ d'investigation pour embrasser l'ensemble de l'aventure humaine. Cette transition s'est concrétisée avec la publication de "Sapiens" en 2011, un ouvrage qui marque le début d'une trilogie devenue incontournable dans le paysage intellectuel contemporain. Chaque ouvrage traite d'une temporalité différente : le passé avec "Sapiens", l'avenir avec "Homo Deus", et le présent avec "21 Lessons for the 21st Century".

Voici la bibliographie complète de Yuval Noah Harari :

Ouvrages académiques spécialisés :

"Special Operations in the Age of Chivalry, 1100-1550" (2007).

"The Ultimate Experience: Battlefield Revelations and the Making of Modern War Culture, 1450-2000" (2008).

"Renaissance Military Memoirs: War, History and Identity, 1450-1600" (2004).

Essais grand public :

"Sapiens: A Brief History of Humankind" (2014) - Version anglaise de "Kitzur Toldot Ha-Enoshut" publié en hébreu en 2011 - Version française : "Sapiens : Une brève histoire de l’humanité".

"Homo Deus: A Brief History of Tomorrow" (2016) - Version française : "Homo Deus : Une brève histoire de l’avenir".

"21 Lessons for the 21st Century" (2018) - Version française : "21 leçons pour le XXIe siècle".

"Nexus: A Brief History of Information Networks from the Stone Age to AI" (2024) - Version française : "Nexus : Une brève histoire des réseaux d'information, de l’âge de pierre à l’IA" (2024)

Livres pour enfants et adolescents :

Adaptation de "Sapiens" en bande dessinée co-écrite avec David Vandermeulen :

"Sapiens: A Graphic History - Volume 1: The Birth of Humankind" (2020) - - Version française : "Sapiens - Une histoire graphique - Tome 1 : La naissance de l’humanité" (2020)

"Sapiens: A Graphic History - Volume 2: The Pillars of Civilization" (2021) - Version française : "Sapiens - Une histoire graphique - Tome 2 : Les piliers de la civilisation" (2021)

"Sapiens: A Graphic History - Volume 3: The Masters of History" (2022) - Version française : "Sapiens - tome 3 (BD): Les Maîtres de l'Histoire" (2023)

Adaptation de "Sapiens" en version jeunesse :

"Unstoppable Us, Volume 1: How Humans Took Over the World" (2022) - Version jeunesse de Sapiens - Version française : "Nous les indomptables - tome 1: Comment les humains ont conquis le monde" (2022).

"Unstoppable Us, Volume 2: Why the World Isn't Fair" (2024) - Version française : "Nous les indomptables - tome 2: Pourquoi le monde est-il injuste ?" (2024)

Articles et contributions :

Nombreux articles dans des revues académiques spécialisées en histoire médiévale.

Contributions régulières à The Guardian, Financial Times, The New York Times.

Chroniques dans Haaretz et autres publications internationales.

3. Mini-résumés et idées clés des 4 livres majeurs de Yuval Noah Harari

"Sapiens | Une brève histoire de l’humanité"

Par Yuval Noah Harari, 2015, 512 pages.

Titre original : “Sapiens. A Brief History of Humankind”, 2014.

Le livre "Sapiens | Une brève histoire de l’humanité" en quelques mots

Dans ce premier opus magistral, Yuval Noah Harari nous embarque dans un voyage extraordinaire à travers 70 000 ans d'histoire humaine.

L'historien développe alors une thèse passionnante : ce qui a permis à Homo sapiens de dominer la planète n'est ni sa force physique ni son intelligence supérieure, mais sa capacité unique à créer et croire en des histoires communes.

Yuval Noah Harari divise l'aventure humaine en trois révolutions majeures :

La révolution cognitive, survenue il y a 70 000 ans, a donné naissance au langage et aux mythes partagés.

La révolution agricole, il y a 12 000 ans, que l'auteur qualifie ironiquement de "plus grande imposture de l'histoire", a sédentarisé l'humanité au profit du blé qui nous a en réalité domestiqués.

Enfin, la révolution scientifique, débutée il y a 500 ans, a propulsé notre espèce vers une expansion technologique sans précédent.

L'auteur démontre avec brio comment nos sociétés reposent, en fait, sur des réalités intersubjectives - dieux, nations, argent, droits de l'homme - qui n'existent que dans notre imagination collective mais permettent une coopération massive.

Cette analyse décapante remet en question nos certitudes sur la religion, le capitalisme et même la notion de bonheur humain.

Quatre points clés à retenir du livre "Sapiens | Une brève histoire de l’humanité" de Yuval Noah Harari

La révolution des fictions : les humains sont les seuls animaux capables de coopérer massivement grâce à des mythes partagés. Religions, nations et systèmes économiques ne sont que des constructions imaginaires qui facilitent la coordination sociale.

L'agriculture comme piège évolutif : contrairement aux idées reçues, l'agriculture n'a pas libéré l'humanité mais l'a asservie. Le blé a domestiqué les humains en les forçant à travailler davantage pour moins de sécurité alimentaire.

Le paradoxe du progrès : malgré nos avancées technologiques spectaculaires, nous ne sommes pas nécessairement plus heureux que nos ancêtres chasseurs-cueilleurs. Le progrès bénéficie souvent plus à l'espèce qu'aux individus.

Mon avis sur le "Sapiens | Une brève histoire de l’humanité"

"Sapiens" est un livre pionnier qui redéfinit notre compréhension de l'histoire humaine. Yuval Noah Harari y excelle dans l'art de rendre accessible des concepts complexes tout en remettant en question nos certitudes les plus profondes.

Un must-read pour quiconque souhaite comprendre d'où nous venons et questionner notre présent.

Points forts et points faibles de "Sapiens | Une brève histoire de l’humanité"

Points forts :

L'approche interdisciplinaire brillante.

Le style narratif captivant et accessible.

Les thèses audacieuses et stimulantes.

Les exemples concrets et parlants.

Points faibles :

La généralisation qui peut être parfois excessive.

Certaines hypothèses discutables scientifiquement.

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"Homo Deus | Une brève histoire du futur"

Par Yuval Noah Harari, 2017, 459 pages.

Titre original : “Homo Deus. A Brief History of Tomorrow”, 2016.

Le livre "Homo Deus | Une brève histoire du futur" en quelques mots

Après avoir exploré notre passé, Yuval Noah Harari se tourne vers l'avenir dans ce deuxième tome visionnaire.

L'auteur part d'un constat : l'humanité a largement maîtrisé les trois fléaux historiques que sont la famine, les épidémies et la guerre. Désormais, nous nous efforçons d'atteindre trois nouveaux objectifs : l'immortalité, le bonheur suprême et la divinité.

L'historien israélien explore trois voies possibles vers cette transformation :

Le génie biologique,

L'hybridation cyborg,

La création d'êtres inorganiques.

Il analyse également comment la révolution des données et l'intelligence artificielle remettent en question les fondements de l'humanisme libéral, notamment les concepts de libre arbitre et d'individualité.

Yuval Noah Harari dépeint un futur où les algorithmes pourraient nous connaître mieux que nous-mêmes, où une élite d'Homo deus pourrait émerger, créant des inégalités non plus seulement économiques mais aussi biologiques. Il examine aussi l'apparition du dataïsme, nouvelle religion qui place les flux d'information au centre de l'univers.

Le livre se termine sur trois questions cruciales :

Les organismes sont-ils vraiment des algorithmes ?

L'intelligence ou la conscience est-elle plus précieuse ?

Que se passera-t-il quand des algorithmes non conscients nous connaîtront mieux que nous-mêmes ?

Quatre points clés à retenir du livre "Homo Deus | Une brève histoire du futur" de Yuval Noah Harari

La fin de l'humanisme libéral : les découvertes scientifiques remettent en cause les notions de libre arbitre et d'individu, sapant ainsi les fondements philosophiques de nos démocraties occidentales.

L'émergence d'une élite divine : les technologies NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, informatique, sciences cognitives) pourraient créer une caste d'"Homo deus" aux capacités augmentées, et alors creuser des inégalités biologiques inédites.

La révolution des données : les algorithmes d'intelligence artificielle commencent à nous surpasser dans de nombreux domaines, questionnant par là notre utilité et notre contrôle sur l'avenir.

Le dataïsme comme nouvelle religion : cette idéologie émergente considère l'univers comme un flux de données et valorise le traitement d'information au-dessus de la conscience humaine.

Mon avis sur le livre "Homo Deus | Une brève histoire du futur"

"Homo Deus" construit une réflexion vertigineuse sur notre futur immédiat.

Yuval Noah Harari y manie prospective et philosophie avec une maîtrise remarquable. Il nous force alors à repenser nos certitudes sur l'humanité et la technologie. Une lecture certes dérangeante mais ô combien pertinente pour appréhender les enjeux du XXIe siècle.

Points forts et points faibles de "Homo Deus | Une brève histoire du futur"

Points forts :

La vision prospective audacieuse d'un auteur devenu une référence mondiale.

L'analyse fine des enjeux technologiques.

Le questionnement philosophique profond et des concepts clairement expliqués.

La vulgarisation scientifique exemplaire avec beaucoup d'exemples, d'images et même d’humour.

Points faibles :

Des hypothèses parfois spéculatives.

Ma note : ★★★★★

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"21 leçons pour le XXIe siècle"

Par Yuval Noah Harari, 2018, 375 pages.

Titre original : “21 Lessons for the 21st Century”, 2018.

Le livre "21 leçons pour le XXIe siècle" en quelques mots

Dans ce troisième opus, Yuval Noah Harari quitte la grande histoire pour se concentrer sur notre présent immédiat. Après avoir exploré le passé ("Sapiens") et le futur ("Homo Deus"), l'historien analyse les défis contemporains les plus urgents de notre époque.

L'ouvrage se structure autour de cinq grandes thématiques :

Le défi technologique examine comment l'intelligence artificielle et l'automatisation transforment le travail et menacent la liberté.

Le défi politique étudie les crises de la démocratie face au populisme et aux migrations.

La section désespoir et espoir aborde terrorisme, guerre et humilité.

La partie vérité questionne notre rapport à l'information dans l'ère post-vérité.

Enfin, résilience propose des pistes pour naviguer dans ce monde complexe.

Yuval Noah Harari ne se contente pas de diagnostiquer les problèmes : il partage des clés de compréhension pour mieux appréhender notre époque troublée. Il s'intéresse à des sujets aussi variés que l'avenir du travail, les fake news, le sens de l'existence, l'éducation ou encore l'importance de la méditation.

L'auteur termine par un chapitre personnel sur sa propre pratique méditative, source de sa clarté intellectuelle.

Quatre points clés à retenir du livre "21 leçons pour le XXIe siècle" de Yuval Noah Harari

La disruption du marché du travail : l'intelligence artificielle menace de rendre obsolètes de nombreux emplois et nécessaire une refonte complète de notre système éducatif et social.

La crise de l'information : entre fake news et algorithmes de recommandation, nous perdons notre capacité à distinguer vérité et fiction. Une menace pour la démocratie.

L'importance de l'adaptabilité : dans un monde en mutation accélérée, la flexibilité mentale et l'apprentissage continu deviennent des compétences vitales.

La méditation comme outil de connaissance : Yuval Noah Harari prône l'observation de soi et la pleine conscience pour mieux comprendre notre fonctionnement mental et résister aux manipulations.

Mon avis sur le livre "21 leçons pour le XXIe siècle"

"21 leçons pour le XXIe siècle" représente le volet le plus accessible et pratique de la trilogie d'Harari. L'auteur excelle à rendre compréhensibles des enjeux complexes tout en apportant des perspectives concrètes. Une lecture essentielle à quiconque souhaite mieux comprendre et garder les idées claires dans notre époque troublée et agitée.

Points forts et points faibles de "21 leçons pour le XXIe siècle"

Points forts :

L'organisation claire par chapitres thématiques.

Les exemples nombreux et passionnants.

Le ton pédagogique, accessible, agréable avec un brin d'humour.

Un livre qui prolonge parfaitement bien ses deux précédents "Sapiens" et "HomoDeus" en traitant des questions restées en suspens.

Points faibles :

Je n'en ai pas trouvé.

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"Nexus | Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA"

Publié en 2024, 576 pages.

Titre original : "Nexus. A Brief History of Information Networks from the Stone Age to AI", 2024.

Le livre "Nexus | Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA" en quelques mots

Dans son ouvrage le plus récent, Yuval Noah Harari se penche sur la question brûlante de l'intelligence artificielle à travers le prisme des réseaux d'information. L'historien développe une thèse centrale : ce qui compte n'est pas tant la quantité d'information que la façon dont elle circule et structure nos sociétés.

L'ouvrage s'articule alors en trois parties majeures :

La première explore comment mythologie, bureaucratie et mécanismes d'autocorrection ont façonné les réseaux humains depuis l'âge de pierre. Yuval Noah Harari montre comment les histoires partagées, puis l'écriture et enfin les institutions démocratiques ont permis la coopération humaine à grande échelle.

La deuxième partie examine l'émergence des réseaux inorganiques basés sur l'intelligence artificielle. Pour la première fois dans l'histoire, des entités non humaines peuvent créer, décider et influencer de façon autonome. Cette révolution redéfinit fondamentalement nos sociétés.

La troisième partie, consacrée à la politique informatique, explique comment démocraties et régimes totalitaires peuvent gérer ces transformations. Yuval Noah Harari introduit le concept de "rideau de silicium", nouvelle fracture géopolitique qui pourrait diviser l'humanité.

Il conclut sur un appel à développer de nouveaux mécanismes d'autocorrection pour maîtriser ces technologies révolutionnaires.

Quatre points clés à retenir du livre "Nexus | Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA" de Yuval Noah Harari

L'information comme force créatrice : contrairement à la vision naïve, l'information ne se contente pas de représenter la réalité mais la façonne activement en créant des liens et des réseaux.

L'IA comme première technologie autonome : pour la première fois, des machines peuvent prendre des décisions, créer du contenu et manipuler les humains sans supervision directe.

Le rideau de silicium : la fracture numérique entre blocs géopolitiques pourrait remplacer les anciens clivages idéologiques et créer de nouveaux risques de conflits.

L'urgence de nouveaux mécanismes d'autocorrection : face au pouvoir croissant de l'IA, nous devons développer des institutions capables de préserver la vérité et la démocratie.

Mon avis sur le livre "Nexus | Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA"

"Nexus" représente l'aboutissement de la réflexion de Yuval Noah Harari sur les enjeux contemporains. L'auteur y déploie une analyse magistrale des défis posés par l'intelligence artificielle, mêlant histoire, politique et prospective. Un autre livre pépite d'Harari que je recommande vivement pour bien saisir les mutations en cours et les choix décisifs qui nous attendent.

Points forts et points faibles de "Nexus | Une brève histoire des réseaux d’information de l’âge de pierre à l’IA"

Points forts :

L'écriture fluide et accessible sur des sujets pourtant complexes.

L'approche historique très éclairante.

L'analyse fine des enjeux de l'IA.

La perspective géopolitique originale.

La réflexion sur les institutions démocratiques.

Point faible :

Je n'en vois pas.

Ma note : ★★★★★

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4. Citations de Yuval Noah Harari

"Nos institutions et nos technologies ont changé, mais nos émotions viennent de l’âge de pierre."

"Tel est précisément le plus grand impact de l'écriture sur l'histoire humaine : elle a progressivement changé la façon dont les hommes pensent et voient le monde. (...) À sa naissance, l'écriture était la servante de la conscience humaine ; de plus en plus, elle en est la maîtresse."

"Toutes ces distinctions - entre personnes libres et esclaves, entre Blancs et Noirs, entre riches et pauvres - s’enracinent dans des fictions. (...) Une des règles d’airain de l'histoire est que toute hiérarchie imaginaire désavoue ses origines fictionnelles et se prétend naturelle et inévitable."

"En vérité, nos idées de ce qui est "naturel" et "contre nature" ne viennent pas de la biologie, mais de la théologie chrétienne. (...) La plupart des lois, normes et obligations qui définissent masculinité et féminité sont un reflet de l'imagination humaine plutôt que de la réalité biologique."

"Si ce sont les attentes qui déterminent le bonheur, il est fort possible que les deux piliers de notre société - les médias et la publicité - épuisent à leur insu les réserves de contentement de notre planète."

"L’IA est la première technologie de l’histoire humaine qui ne soit pas un outil mais un agent."

"C’est un pari extrêmement dangereux que de créer quelque chose de plus intelligent que soi-même."

"C'est l'une des marques distinctives de l'histoire comme discipline universitaire : mieux on connaît une période donnée, plus il est dur d’expliquer pourquoi les choses se sont passées ainsi et pas autrement."

"Le terrorisme est un show. Les terroristes montent un terrifiant spectacle de violence qui frappe notre imagination et nous donne le sentiment de régresser dans le chaos du Moyen Âge. Par voie de conséquence, les États se sentent souvent obligés de réagir au théâtre du terrorisme par un étalage de mesures de sécurité, orchestrant d'immenses déploiements de force, allant même jusqu'à persécuter des populations entières ou envahir d'autres pays."

"Le capitalisme fut d'abord une théorie du fonctionnement de l'économie. Cette théorie était à la fois descriptive et prescriptive (...). Peu à peu, cependant, le capitalisme devint bien plus qu'une simple doctrine économique : il comprend désormais une éthique, un ensemble de doctrines sur la façon dont les individus doivent se conduire, éduquer leurs enfants et même penser. Son principal dogme est que la croissance économique est le bien suprême, parce que tout le reste en dépend : la justice, la liberté et même le bonheur."

"Acquérir la peur de nouveaux dangers prend du temps."

"Les problèmes mondiaux appellent des réponses mondiales."

"De même que les politiciens en campagne serrent les mains et embrassent les bébés, de même, dans un groupe de chimpanzés, les aspirants à la position la plus haute passent beaucoup de temps à embrasser, taper sur le dos et bisouiller les bébés."

"Nos livres d'enfants et nos écrans de télévision sont encore pleins de girafes, de loups et de chimpanzés, alors qu'en réalité il en reste fort peu. On compte à peu près 80 000 girafes contre 1,5 milliard de bestiaux ; juste 200 000 loups gris pour 400 millions de chiens domestiques ; et seulement 250 000 chimpanzés pour plusieurs milliards d'êtres."

"Les animaux sont les principales victimes de l'histoire, et leur traitement par l'élevage industriel est peut-être le pire crime de tous les temps."

"Les fidèles de chaque religion sont convaincus que seule la leur est vraie. Peut-être les fidèles d'une religion ont-ils raison."

"La monnaie est le système de confiance mutuelle le plus universel et le plus efficace qui ait jamais été imaginé."

"En vérité, le chambardement écologique pourrait mettre en danger la survie même de l'Homo sapiens. Le réchauffement climatique, la fonte de la calotte glaciaire, la montée des océans et la pollution généralisée pourraient rendre la Terre moins hospitalière aux nôtres. Dès lors, l'avenir pourrait nous réserver une spirale infernale, une course poursuite entre la puissance de l'homme et les catastrophes naturelles qu'il provoque."

"Il semble que la famille et la communauté aient plus d'impact que l'argent et la santé sur notre bonheur. (...) Dès lors, on ne saurait exclure la possibilité que l'immense amélioration des conditions matérielles au cours des deux derniers siècles ait été annulée par l'effondrement de la famille et de la communauté."

"Les types idéaux de monnaie permettent aux gens de transformer une chose en une autre, mais aussi de stocker la richesse. Bien des choses de valeur ne peuvent se stocker : ainsi du temps ou de la beauté."

"Les idées ne changent le monde que lorsqu'elles changent notre comportement."

"Le silence n'est pas la neutralité ; c'est le soutien au statu quo."

"Il n'y a pas de dieux dans l'univers, pas de nations, pas d'argent, pas de droits de l'homme, ni lois ni justice hors de l'imagination commune des êtres humains."

"Auparavant, écrire une lettre, indiquer l’adresse, la timbrer et la porter à la boîte était un gros travail. Il fallait des jours ou des semaines, voire des mois, pour recevoir une réponse. Désormais, je peux rédiger en quatrième vitesse un mail qui va faire un demi-tour du monde et, si mon destinataire est en ligne, recevoir une réponse une minute après. Autant de soucis épargnés et de temps gagné, mais ma vie est-elle plus détendue ? Hélas, non."

"Tandis que le système global de traitement de données devient omniscient et tout-puissant, la connexion au système devient la source de tout sens. Les hommes veulent se fondre dans le flux de données parce que, lorsque vous en faites partie, vous appartenez à quelque chose de bien plus grand que vous."

"La révolution scientifique a été non pas une révolution du savoir, mais avant tout une révolution de l'ignorance. La grande découverte qui l'a lancée a été que les hommes ne connaissent pas les réponses à leurs questions les plus importantes."

"D'un point de vue scientifique, pour autant qu'on puisse le dire, la vie humaine n'a absolument aucun sens. Les hommes sont le résultat de processus évolutifs aveugles qui n'ont ni fin ni but. Nos actions ne relèvent pas d'un plan divin cosmique. Si la planète Terre devait sauter demain, probablement l'univers suivrait-il son cours comme à l'ordinaire."

"L'homme de science qui dit que sa vie a du sens parce qu'il augmente le savoir humain, le soldat qui déclare que sa vie a du sens parce qu'il se bat pour défendre sa patrie, et l'entrepreneur qui trouve du sens dans le lancement d'une nouvelle société ne s'illusionnent pas moins que leurs homologues du Moyen Âge qui trouvaient du sens dans la lecture des Écritures, les Croisades ou la construction d'une nouvelle cathédrale."

"Tu ne convaincras jamais un chimpanzé de te donner sa banane en lui promettant qu'elle lui sera rendue au centuple au paradis des singes. Aucun chimpanzé ne croira jamais une telle histoire. Seuls les Sapiens le pourraient. C'est pourquoi ils peuvent coopérer avec des millions d'étrangers, contrairement aux chimpanzés sceptiques."

"Ce qui paraît le plus important aux gens d'une époque est totalement dépourvu de sens pour leurs descendants."

"Nous pouvons aller en vacances dans des milliers d'endroits plus stupéfiants les uns que les autres. Mais, où que nous allions, nous jouerons probablement avec notre Smartphone au lieu de voir réellement les lieux. Nous n'avons jamais eu autant le choix, mais à quoi bon ce choix quand nous avons perdu la capacité d'y faire réellement attention ?"

"Nos ancêtres du Moyen Âge étaient-ils donc heureux parce qu'ils trouvaient un sens à la vie dans des illusions collectives sur l'au-delà ? Oui. Tant que personne ne ruina leurs chimères, pourquoi pas ?"

"Même si les guerres restent une affaire peu rentable au XXIe siècle, cela ne devrait pas nous donner une garantie de paix absolue. Ne sous-estimons jamais la bêtise humaine. Tant sur le plan personnel que collectif, les hommes sont enclins aux activités destructrices. (...) La bêtise humaine est une des forces les plus importantes de l'histoire."

"L'instinct qui nous pousse à engloutir des aliments très caloriques est profondément inscrit dans nos gènes. Nous pouvons bien habiter aujourd'hui de grands immeubles équipés de réfrigérateurs pleins à craquer, notre ADN croit encore que nous sommes dans la savane."

"Celui qui a une raison de vivre, disait Nietzsche, peut endurer n'importe quelle épreuve ou presque". Une vie qui a du sens peut être extrêmement satisfaisante même en pleine épreuve, alors qu'une vie dénuée de sens est un supplice, si confortable soit-elle."

"Il n'existe rien qui ressemble à des droits en biologie, juste des organes, des facultés et des traits caractéristiques. Si les oiseaux volent, ce n'est pas qu'ils aient le droit de voler, mais parce qu'ils ont des ailes."

"Tout comme le choc de deux notes de musique jouées ensemble donne son élan à un morceau de musique, la discorde de nos pensées, idées et valeurs nous oblige à penser, à réévaluer et critiquer. La cohérence est le terrain de jeu des esprits bornés."

"L’histoire est une chose que fort peu de gens ont faite pendant que tous les autres labouraient les champs et portaient des seaux d’eau."

"Parmi les plus grandes créatures du monde, les seuls survivants du déluge humain sont les hommes eux-mêmes et les animaux de ferme réduits à l'état de galériens dans l'arche de Noé."

"Les individus savent terriblement peu de choses du monde. Au fil de l’histoire, ils en ont su de moins en moins. Un chasseur-cueilleur de l’âge de pierre savait faire ses vêtements, allumer le feu, chasser des lapins et échapper aux lions. Nous croyons en savoir bien plus de nos jours mais, en tant qu’individus, nous en savons beaucoup moins. Pour presque tous nos besoins, nous comptons sur le savoir-faire des autres."

"Il est dangereux de confier notre avenir aux forces du marché, parce que ces forces font ce qui est bon pour le marché et non ce qui est bon pour l’humanité ou pour le monde. La main du marché est aveugle aussi bien qu’invisible ; livrée à elle-même, elle pourrait bien rester passive devant la menace du réchauffement climatique ou les dangers potentiels de l’intelligence artificielle."

"Les intellectuels ont tendance à apprécier davantage les compétences intellectuelles que les compétences motrices et sociales. Mais en fait, il est plus facile d'automatiser le jeu d'échecs que, par exemple, la vaisselle."

"Les humains sont des animaux et tout ce qui s’est passé dans l’histoire est soumis aux lois de la physique, de la chimie et de la biologie."

"Le fait que les bébés humains soient si impuissants fut en réalité une bénédiction ! Cela a obligé les humains à développer leurs compétences sociales."

"Les terroristes sont pareils à une mouche qui essaierait de détruire un magasin de porcelaine. Elle est trop faible pour bouger ne serait-ce qu'une tasse de thé. Elle trouve un éléphant, se glisse dans son oreille et se met à vrombir. L'éléphant enrage de peur et de colère, et détruit le magasin de porcelaine."

"Il faut beaucoup de courage pour combattre les partis pris et les régimes oppressifs ; il en faut encore plus pour admettre son ignorance et s'aventurer dans l'inconnu."

"La démocratie repose sur le principe d'Abraham Lincoln : "On peut duper tout le monde un certain temps, et certaines personnes tout le temps, mais on ne peut duper tout le monde tout le temps."

"De même que la Révolution agricole, la croissance de l’économie pourrait bien apparaître comme une colossale imposture. L’espèce humaine et l’économie mondiale peuvent poursuivre leur croissance, cela n’empêche pas que beaucoup vivent dans la faim et dans le besoin."

"Tout au long de l'histoire, prophètes et philosophes ont soutenu que, si les humains cessaient de croire en un grand projet cosmique, c'en serait fini de l'ordre public. Aujourd'hui, pourtant, ceux qui menacent le plus l'ordre mondial sont ceux qui continuent de croire en Dieu et à ses projets qui englobent tout."

"Les éthiques capitaliste et consumériste sont les deux côtés de la même médaille, la fusion de deux commandements. Le commandement suprême du riche est : "Investis !" Celui du commun des mortels : "Achète !""

"Même si quelqu'un est né avec un talent particulier, celui-ci demeurera généralement latent s'il n'est pas encouragé, entretenu et cultivé. Tout le monde ne reçoit pas les mêmes chances de cultiver et d'affiner ses capacités. Que l'occasion soit donnée de le faire dépendra habituellement de la place de chacun dans la hiérarchie imaginaire de la société."

"Ce sont les algorithmes qui décideront pour nous qui nous sommes et ce que nous devons savoir sur nous. Nous avons encore le choix pour quelques décennies. Si nous faisons l'effort, nous pouvons encore étudier qui nous sommes vraiment. Si nous voulons saisir cette occasion, mieux vaudrait le faire maintenant."

"Ce n'est pas pour comprendre le futur que nous étudions l'histoire, mais pour élargir nos horizons, comprendre que notre situation actuelle n'est ni naturelle ni inévitable et que, de ce fait, les possibilités qui nous sont ouvertes sont bien plus nombreuses que nous ne l'imaginons."

Et vous, avez-vous déjà lu un livre de Yuval Noah Harari ? Que vous a-t-il apporté ? Quel est celui que vous avez préféré ? Partagez vos avis dans les commentaires !

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Mon, 01 Dec 2025 17:00:00 +0100 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13308/Les-livres-de-Yuval-Noah-Harari-pour-penser-lhumanit-dhier-daujourdhui-et-de-demain
Cal Newport : le penseur qui réinvente notre rapport au travail http://www.olivier-roland.fr/items/view/13292/Cal-Newport-le-penseur-qui-rinvente-notre-rapport-au-travail
  1. Qui est Cal Newport ?

Cal Newport, l'homme qui réconcilie excellence et équilibre

L'histoire de Cal Newport commence en 1982 dans une famille qui valorise autant la réflexion que l'action concrète.

Né à New York puis élevé dans la banlieue de Washington D.C., le jeune Cal grandit dans un environnement où l'excellence académique n'est pas une fin en soi, mais un moyen de comprendre le monde et d'y apporter sa contribution unique.

Dès le lycée, Cal Newport se distingue par une approche peu conventionnelle du travail. Alors que ses camarades passent leurs nuits à bachoter frénétiquement, lui développe déjà des stratégies d'efficacité qui lui permettent d'obtenir d'excellents résultats tout en préservant son équilibre personnel. Cette obsession précoce pour l'optimisation et la productivité réfléchie devient rapidement sa signature.

En 2000, Cal Newport intègre Dartmouth College, une institution prestigieuse du New Hampshire. C'est là qu'il commence à théoriser ses méthodes d'apprentissage et à documenter ses stratégies de réussite. Contrairement aux étudiants qui glorifient les nuits blanches et le stress constant, Cal, lui, développe une philosophie radicalement différente : il est possible d'exceller sans se détruire.

Cette période universitaire est, en fait, déterminante. Cal Newport ne se contente pas d'appliquer ses méthodes, il les teste, les affine et commence à les partager. En 2004, il lance son premier blog, Study Hacks, qui deviendra rapidement une référence pour les étudiants en quête d'efficacité authentique. Son premier livre, "How to Win at College", publié la même année alors qu'il n'a que 22 ans, fait sensation. Voici enfin un étudiant qui ose remettre en question les dogmes de la culture du surmenage académique !

Diplômé summa cum laude (= le plus haut niveau de distinction attribué à un étudiant, qui signifie en latin "avec les plus grands honneurs") en sciences informatiques de Dartmouth en 2004, Cal Newport poursuit ses études au Massachusetts Institute of Technology (MIT). C'est dans ce temple de l'innovation technologique qu'il obtient son doctorat en informatique en 2009, après s'être spécialisé dans les algorithmes distribués. Paradoxalement, c'est également au MIT qu'il affine sa critique de la technologie mal maîtrisée et de ses effets sur la concentration humaine.

Sa thèse de doctorat, consacrée aux algorithmes de consensus, révèle déjà sa capacité à penser différemment. Plutôt que de suivre les tendances académiques du moment, Cal Newport choisit des problèmes complexes qui nécessitent une réflexion profonde et une approche méthodique. Cette même rigueur intellectuelle se retrouvera plus tard dans tous ses ouvrages sur la productivité et la concentration.

En 2011, il rejoint la Georgetown University en tant que professeur assistant en informatique. Cette nomination dans l'une des universités les plus prestigieuses des États-Unis marque le début d'une double carrière exceptionnelle : chercheur reconnu d'un côté, auteur à succès de l'autre.

Cal Newport, le penseur de la concentration, entre science et sagesse

Cal Newport incarne une contradiction fascinante de notre époque : il est à la fois un professeur d'informatique qui prône la déconnexion numérique, un chercheur de haut niveau qui dénonce la culture de l'urgence, et un intellectuel qui valorise le travail manuel et l'artisanat.

Cette apparente contradiction révèle en réalité une cohérence profonde. Cal Newport n'est pas un technophobe : il maîtrise parfaitement les outils numériques et leurs potentialités. Il est plutôt un humaniste technologique qui refuse que la technologie dicte nos rythmes de vie et nos modes de pensée. Pour lui, nous devons reprendre le contrôle et utiliser la technologie à nos conditions, pas l'inverse.

Sa personnalité se caractérise par un pragmatisme radical. Cal Newport ne se contente jamais de théories abstraites : chacune de ses idées est testée, mesurée, éprouvée dans la réalité. Cette approche scientifique de la productivité le distingue nettement des "gourous" du développement personnel qui promettent des transformations miraculeuses.

Son style de vie reflète parfaitement ses convictions. Cal Newport ne possède pas de comptes sur les réseaux sociaux, utilise un téléphone basique et organise ses journées autour de blocs de temps dédiés au travail profond. Il habite avec sa famille dans une maison sans distractions numériques excessives, privilégiant les activités physiques, la lecture et les conversations authentiques.

Ce qui frappe chez Cal Newport, c'est sa capacité à réconcilier des mondes apparemment opposés. Il publie des articles scientifiques pointus sur les algorithmes tout en écrivant des livres accessibles sur la productivité. Il enseigne les technologies de pointe tout en prônant un retour aux fondamentaux humains. Cette polyvalence n'est pas accidentelle : elle découle de sa conviction que l'excellence dans un domaine nourrit l'excellence dans les autres.

Ses idées fortes gravitent autour de quelques principes fondamentaux.

D'abord, la qualité prime toujours sur la quantité : mieux vaut produire moins mais exceptionnellement bien.

Ensuite, la concentration est devenue la ressource la plus précieuse de notre époque, plus rare que l'argent ou le temps.

Enfin, la maîtrise d'un domaine nécessite des années de pratique délibérée, sans raccourci possible.

Cal Newport défend également l'idée révolutionnaire que la passion ne doit pas guider nos choix de carrière. Contrairement au mythe du "follow your passion", il soutient qu'il faut d'abord développer des compétences rares et précieuses, puis utiliser ces compétences pour créer une carrière épanouissante. Cette approche contre-intuitive bouscule les croyances populaires sur la réussite professionnelle.

Son influence dépasse largement le cercle académique. Des dirigeants d'entreprise aux artistes indépendants, en passant par les étudiants et les travailleurs du savoir, des milliers de personnes appliquent ses méthodes pour retrouver le contrôle de leur vie professionnelle.

Cal Newport a su identifier et articuler des besoins profonds de notre société : celui de ralentir, de se concentrer et de créer du sens dans un monde qui pousse constamment à l'accélération et à la dispersion.

  1. Biographie de Cal Newport : l'auteur derrière les concepts de "Deep Work" et de "Slow Productivity"

Depuis ses premiers écrits étudiants jusqu'à ses derniers bestsellers, l'œuvre de Cal Newport met en lumière une progression cohérente : celle d'un chercheur qui transforme ses découvertes académiques en conseils pratiques pour évoluer dans notre monde hyperconnecté.

Sa bibliographie témoigne de son évolution : parti de guides étudiants pragmatiques, Cal Newport a progressivement élargi sa réflexion pour aborder les défis contemporains du travail intellectuel. Chaque ouvrage approfondit et enrichit les thèmes précédents, créant un écosystème cohérent de stratégies pour reprendre le contrôle de notre attention et de notre productivité.

Au fil du temps, Cal Newport s'est imposé comme l'une des voix les plus influentes sur la productivité et la concentration. Il est aujourd'hui notamment reconnu dans le monde entier pour avoir popularisé deux concepts devenus incontournables : le "deep work", ou travail en profondeur, et la "slow productivity". Deux approches sur la productivité qu’il a largement diffusés à travers ses bestsellers traduits dans de nombreuses langues. Et qui ont profondément influencé notre manière de penser la concentration, le rapport au temps et la quête de sens dans le travail.

Voici la liste complète des ouvrages de Cal Newport :

"How to Win at College: Surprising Secrets for Success from the Country's Top Students" (2005)

"How to Become a Straight-A Student: The Unconventional Strategies Real College Students Use to Score High While Studying Less" (2007)

"How to Be a High School Superstar: A Revolutionary Plan to Get into College by Standing Out (Without Burning Out)" (2010)

"So Good They Can't Ignore You: Why Skills Trump Passion in the Quest for Work You Love" (2012) - Version française : "Ils ne pourront plus se passer de toi" (2023)

"Deep Work: Rules for Focused Success in a Distracted World" (2016) - Version française : "Deep Work | Retrouver la concentration dans un monde de distractions" (2017)

"Digital Minimalism: Choosing a Focused Life in a Noisy World" (2019) - Version française : "Réussir (sa vie) grâce au minimalisme digital" (2020)

"A World Without Email: Reimagining Work in an Age of Communication Overload" (2021)

"Slow Productivity: The Lost Art of Accomplishment Without Burnout" (2024) - Version française : "Slow Productivity : retrouver efficacité, équilibre et goût du travail dans un monde d'excès" (2024).

3. Mini-résumés et points clés de 4 livres emblématiques de Cal Newport

Il s'agit des 4 seuls livres de Cal Newport qui ont été traduits en français.

"Slow productivity : retrouver efficacité, équilibre et goût du travail dans un monde d’excès"

Par Cal Newport, 2024, 285 pages.

Titre original : "Slow Productivity : The Lost Art of Accomplishment Without Burnout", 2024, 240 pages.

Le livre "Slow productivity" en quelques mots

Dans cet ouvrage, Cal Newport s'attaque à l'un des maux de notre époque : cette obsession de l'hyperactivité qui nous fait confondre agitation et véritable productivité.

L'auteur part d'un constat troublant : nous vivons dans une société où être constamment occupé est devenu synonyme de réussite professionnelle, alors que cette approche nous épuise sans créer de valeur réelle.

À ce propos, Cal Newport raconte notamment l'histoire de John McPhee, journaliste au New Yorker, qui passa deux semaines allongé sur une table de jardin à observer un frêne avant de trouver la structure parfaite pour son article. Cette anecdote illustre parfaitement la philosophie de la "slow productivity" : prendre le temps nécessaire pour produire un travail d'exception.

Au fil des pages, l'auteur démonte méthodiquement ce qu'il appelle la "pseudo-productivité" : cette illusion selon laquelle multiplier les emails, réunions et tâches urgentes nous rend plus efficaces. En réalité, cette approche fragmentée nous empêche d'atteindre nos véritables objectifs.

Cal Newport propose alors une alternative révolutionnaire basée sur trois principes fondamentaux :

En faire moins mais mieux,

Respecter notre rythme naturel,

Faire de la qualité une obsession.

Il nous montre comment les plus grands esprits de l'histoire ont toujours travaillé selon ces principes, alternant périodes d'intense concentration et moments de récupération.

Quatre points clés à retenir du livre "Slow productivity" de Cal Newport

La pseudo-productivité nous piège : confondre activité visible et véritable efficacité conduit à un épuisement sans résultats tangibles. L'hyperactivité moderne n'est qu'une illusion de performance.

Moins c'est plus : réduire délibérément ses engagements permet paradoxalement d'accomplir davantage, en évitant la surcharge cognitive et les coûts indirects qui sabotent notre efficacité.

Respecter nos rythmes biologiques est nécessaire à notre efficacité et créativité : notre cerveau n'est pas conçu pour fonctionner à plein régime toute l'année. L'alternance entre périodes d'intensité et de récupération est essentielle à la créativité.

L'obsession de la qualité libère : viser l'excellence dans ses domaines clés devient un levier puissant pour gagner en autonomie professionnelle et choisir son mode de vie.

Mon avis sur le livre "Slow productivity"

Je recommande vivement cette lecture à tous ceux qui se sentent pris dans l'engrenage de l'urgence perpétuelle. Cal Newport partage ici une réflexion profonde et salutaire sur notre rapport au travail, avec des stratégies concrètes pour retrouver sens et efficacité.

"Slow productivity" est un livre qui réconcilie performance durable et bien-être personnel.

Points forts et points faibles de "Slow productivity"

Points forts :

Une critique fondamentale de la pseudo-productivité moderne.

Des principes ancrés dans notre réalité anthropologique et physiologique.

Beaucoup d’exemples concrets, historiques et contemporains pour illustrer les idées développées.

Les stratégies pratiques et applicables immédiatement proposées.

Points faibles :

Une philosophie difficile à appliquer dans tous les environnements.

Certaines stratégies accessibles exclusivement aux professions indépendantes.

Ma note : ★★★★★

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"Deep work | Retrouver la concentration dans un monde de distractions"

Par Cal Newport, 2017, 302 pages.

Titre original : “Deep Work: Rules for Focused Success in a Distracted World”, 2016, 304 pages.

Le livre "Deep work" en quelques mots

Cal Newport frappe fort avec ce manifeste contre la dispersion de l'attention qui caractérise notre époque. Il part d'une observation simple mais alarmante : nous sommes devenus des "routeurs humains", constamment interrompus par emails, notifications et sollicitations diverses, au détriment de notre capacité à produire un travail de qualité.

L'auteur nous fait alors découvrir le concept de "deep work" : cette capacité à se concentrer intensément sur une tâche cognitive exigeante sans distraction.

Il nous raconte comment des personnalités comme Woody Allen, JK Rowling ou Bill Gates ont bâti leur succès en protégeant farouchement leurs moments de concentration profonde. Woody Allen a ainsi réalisé 44 films en 44 ans, JK Rowling s'isolait du monde lors de l'écriture d'Harry Potter, et Bill Gates organisait des "semaines de réflexion" loin de toute perturbation.

Cal Newport démontre que, dans notre économie du savoir, la concentration devient un super-pouvoir. Ceux qui maîtrisent cet art rare prennent une longueur d'avance considérable sur leurs concurrents. Il partage ensuite quatre règles pratiques pour développer cette capacité :

Apprendre à travailler en profondeur,

Éliminer les distractions,

Dire non aux réseaux sociaux non essentiels,

Fuir la superficialité.

Chaque règle s'accompagne de stratégies concrètes, de la création de rituels de concentration à la gestion intelligente de nos outils numériques.

Quatre points clés à retenir du livre "Deep work" de Cal Newport

Le "deep work" devient rare et précieux : dans un monde d'hyperconnexion, la capacité à se concentrer profondément devient un avantage concurrentiel décisif pour créer de la valeur.

La fragmentation tue la performance : passer constamment d'une tâche à l'autre épuise notre attention résiduelle et réduit drastiquement notre efficacité cognitive.

Les quatre règles du travail profond : travailler en profondeur, éliminer l'ennui par la concentration, bannir les réseaux sociaux non essentiels, et fuir systématiquement la superficialité.

La pratique délibérée transforme : comme un muscle, notre capacité d'attention se développe par un entraînement méthodique et des défis progressifs.

Mon avis sur le livre "Deep work"

"Deep work" est un antidote nécessaire à notre époque de distraction permanente. Cal Newport y expose une méthode claire et scientifiquement fondée pour retrouver notre pouvoir de concentration. C'est une lecture essentielle pour quiconque veut accomplir des choses importantes dans un monde qui conspire contre la profondeur.

Points forts et points faibles de "Deep work"

Points forts :

Le concept révolutionnaire du "deep work"

Les méthodes concrètes et applicables pour faire face au problème des distractions digitales.

Les exemples inspirants de personnalités connues accomplies

L’analyse scientifique des mécanismes d'attention utiles pour nous permettre de changer.

Points faibles :

Le ton parfois moins conversationnel.

Manque d'exemples pratiques, notamment pour améliorer notre concentration.

Ma note : ★★★★★

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"Réussir (sa vie) grâce au minimalisme digital"

Par Cal Newport, 2020, 256 pages.

Titre original : "Digital Minimalism: choosing a focused life in a noisy world"

Le livre "Réussir (sa vie) grâce au minimalisme digital" en quelques mots

Cal Newport nous alerte sur l'une des addictions les plus insidieuses de notre temps : notre dépendance aux outils numériques.

Il révèle comment les géants de la Silicon Valley investissent des milliards pour capter notre attention, utilisant les mêmes mécanismes que les casinos pour nous maintenir connectés.

L'auteur dénonce l'illusion selon laquelle ces outils nous rendent plus libres. En réalité, ils fragmentent notre temps en micro-doses de plaisir qui nous éloignent de ce qui compte vraiment.

À ce sujet, Cal Newport raconte combien il était nécessaire à Abraham Lincoln de s'isoler régulièrement dans son cottage pour penser en profondeur aux décisions majeures de son mandat, ou comment Henri David Thoreau découvrit, dans sa cabane de Walden, que "moins peut signifier plus".

Le minimalisme digital n'est pas un rejet de la technologie, mais une utilisation intentionnelle de ces outils.

Cal Newport propose alors une cure de désintoxication de 30 jours suivie d'une réintroduction sélective des technologies selon trois critères stricts : elles doivent servir quelque chose d'important, être le meilleur moyen d'atteindre cet objectif, et être encadrées par des règles d'usage précises.

L'auteur nous guide ensuite vers une reconquête de la solitude, de la conversation authentique et des loisirs de qualité. Il nous montre comment remplacer le scroll passif par des activités enrichissantes : artisanat, sport, lecture, relations sociales réelles. Le but : retrouver notre autonomie attentionnelle face à l'économie de l'attention qui nous manipule.

Quatre points clés à retenir du livre "Réussir (sa vie) grâce au minimalisme digital" de Cal Newport

L'économie de l'attention nous manipule : les plateformes numériques utilisent des techniques d'addiction comportementale pour monopoliser notre temps et notre attention au détriment de nos objectifs réels.

Le minimalisme digital comme philosophie : choisir consciemment ses outils technologiques selon leur vraie valeur ajoutée, plutôt que de subir leur prolifération anarchique.

La cure de désintoxication de 30 jours : méthode structurée pour reprendre le contrôle en supprimant temporairement les technologies optionnelles, puis les réintroduire selon des critères stricts.

Retrouver solitude et conversation : protéger des moments de réflexion personnelle et privilégier les échanges authentiques face-à-face plutôt que les connexions superficielles en ligne.

Mon avis sur le livre "Réussir (sa vie) grâce au minimalisme digital"

"Réussir (sa vie) grâce au minimalisme digital" est un guide libérateur pour tous ceux qui se sentent esclaves de leurs écrans !

Cal Newport partage une approche équilibrée, ni technophobe ni naïve, pour reprendre le contrôle de notre vie numérique. Ses conseils pratiques permettent de transformer concrètement notre rapport à la technologie.

Points forts et points faibles de "Réussir (sa vie) grâce au minimalisme digital"

Points forts :

La philosophie claire et des conseils pour la mettre en œuvre.

La méthode structurée de désintoxication, compatible avec l'activité professionnelle en ligne.

Une vision critique mais non radicale

Points faibles :

Aucun point faible notable identifié.

Ma note : ★★★★★

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"Ils ne pourront plus se passer de toi"

Par Cal Newport, 2023, 288 pages.

Titre original : "So good, they can’t ignore you", 2012, 304 pages.

Le livre "Ils ne pourront plus se passer de toi" en quelques mots

Cal Newport s'attaque ici à l'un des mythes les plus tenaces de notre époque : l'idée qu'il faut "suivre sa passion" pour réussir professionnellement.

En analysant le parcours de Steve Jobs, il fait notamment remarquer que le cofondateur d'Apple ne suivait nullement une passion technologique dans sa jeunesse : il s'intéressait davantage à la danse et au mysticisme oriental !

L'auteur nous raconte également l'histoire de Thomas, un moine bouddhiste qui, malgré l'accomplissement de son rêve, réalise que suivre sa passion ne garantit pas le bonheur. Cette prise de conscience bouleverse nos certitudes sur l'épanouissement professionnel. Car en effet, Cal Newport démontre que les passions professionnelles sont, en réalité, rares et qu'elles naissent généralement de la compétence, non l'inverse.

À travers les cas d'Alex Berger (scénariste TV) et de Mike Jackson (investisseur), l'auteur illustre sa théorie du capital professionnel : ce sont les "compétences rares et précieuses" qui nous permettraient d'accéder aux trois critères d'un travail épanouissant, à savoir : la créativité, l'impact et le contrôle.

Cal Newport nous invite alors à adopter l'état d'esprit de l'artisan, focalisé sur l'excellence et la pratique délibérée.

L'auteur attire ensuite notre attention sur les deux pièges du contrôle :

Chercher l'autonomie trop tôt sans capital suffisant,

Se laisser freiner par la résistance de l'employeur une fois que l'on est devenu un élément précieux à ses yeux.

Il conclut par l'importance de se construire une mission qui émerge naturellement de notre expertise approfondie, testée par de "petits paris" et rendue visible par la "loi de remarquabilité".

Les points clés à retenir du livre "Ils ne pourront plus se passer de toi" de Cal Newport

Le mythe de la passion débunké : suivre sa passion est un mauvais conseil de carrière. La passion naît de l'excellence, pas l'inverse, et peut même conduire à l'insatisfaction chronique.

Le capital professionnel comme clé : développer des compétences rares et précieuses est la seule voie vers un travail épanouissant c'est-à-dire qui apporte créativité, impact et contrôle.

L'état d'esprit de l'artisan comme exemple : se concentrer sur ce qu'on peut apporter au monde plutôt que sur ce que le travail peut nous apporter, en visant constamment l'excellence.

Les pièges du contrôle à éviter : ne pas chercher l'autonomie sans capital professionnel suffisant, et savoir résister aux pressions quand on devient indispensable.

La mission émerge de l'expertise : une carrière porteuse de sens ne se décrète pas mais naît naturellement de la maîtrise approfondie d'un domaine.

Mon avis sur le livre "Ils ne pourront plus se passer de toi"

"Ils ne pourront plus se passer de toi" est un livre qui bouscule nos croyances sur la réussite professionnelle. Cal Newport remplace les conseils "romantiques" par une approche pragmatique et scientifique de la carrière. C'est une lecture indispensable pour construire un parcours professionnel solide et épanouissant sans tomber dans les pièges du "follow your passion".

Points forts et points faibles du livre "Ils ne pourront plus se passer de toi"

Points forts :

La déconstruction brillante du mythe de la passion et la perspective à contre-courant mais saine et réaliste sur la réussite professionnelle.

L’état d’esprit pragmatique et durable encouragé.

Les témoignages, études et exemples réels inspirants.

Les stratégies concrètes de développement de carrière professionnelle.

Points faibles :

Certaines idées contre-intuitives peuvent déstabiliser.

Certaines répétitions dans l'argumentation.

Ma note :

★★★★☆

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Quelques citations de Cal Newport pour…

Travailler intensément, intelligemment, sans distraction

"Être occupé ne produit pas de valeur ajoutée."

"Si vous ne produisez pas, vous ne réussirez pas, quels que soient vos talents et vos compétences."

"Vous ne pouvez pas espérer faire de réels progrès sans accepter que allez devoir investir beaucoup d’efforts et de temps."

"Quand tu travailles, travaille dur. Quand tu as fini, finis vraiment."

"Pour être productif au maximum de vos capacités, vous devez travailler pendant de longues périodes en vous concentrant pleinement sur une seule tâche, sans distraction."

"Essayer de travailler un peu plus le soir pourrait réduire votre efficacité le lendemain, au point d'être moins productif que si vous aviez respecté un confinement."

"La forme de maîtrise la plus précieuse n'est pas la connaissance, mais la capacité à penser et à travailler de manière autonome."

"Pour conserver sa place dans notre économie, il faut maîtriser l'art d'apprendre rapidement des choses complexes."

"Il s'avère que trois à quatre heures par jour, cinq jours par semaine, de concentration ininterrompue et soigneusement dirigée peuvent produire des résultats très utiles."

"La distraction nuit à la profondeur."

"La capacité à effectuer un travail profond se raréfie, au même moment où elle prend de plus en plus de valeur dans notre économie. Par conséquent, les rares personnes qui cultivent cette compétence et en font le cœur de leur vie professionnelle prospéreront."

Vous désintoxiquer des réseaux sociaux et des distractions digitales

"Impossible de bâtir un empire de plusieurs milliards de dollars comme Facebook si l'on passe des heures chaque jour à utiliser un service comme Facebook."

"Personne n'a jamais changé le monde, créé une nouvelle industrie ou amassé une fortune grâce à la rapidité de ses réponses par e-mail."

"Le minimalisme numérique ne rejette pas les innovations de l'ère Internet, mais plutôt la manière dont tant de personnes utilisent actuellement ces outils."

"Des centaines de milliards de dollars ont été investis dans des entreprises dont le seul but est de capter votre attention au maximum et de la diriger vers des cibles optimisées pour créer de la valeur pour un petit nombre de personnes en Californie du Nord."

"Les humains ne sont pas faits pour être constamment connectés."

"Les clics et le défilement incessants génèrent un bourdonnement d'anxiété."

"Plus vous passez de temps à vous connecter à ces services, plus vous risquez de vous sentir isolé.

"Nous avons accepté avec enthousiasme ce que la Silicon Valley nous proposait, mais nous avons vite compris qu'en agissant ainsi, nous dégradions accidentellement notre humanité."

"Notre socialité est tout simplement trop complexe pour être externalisée vers un réseau social ou réduite à des messages instantanés et des émojis."

"Comment les entreprises technologiques encouragent l'addiction comportementale : renforcement positif intermittent et recherche d'approbation sociale."

"Les réseaux sociaux sont une arme à double tranchant. Ils peuvent être bénéfiques avec modération, mais peuvent devenir toxiques s'ils prennent trop d'ampleur."

"Dans de nombreux cas, ces propriétés addictives des nouvelles technologies ne sont pas le fruit du hasard, mais plutôt des caractéristiques de conception soigneusement conçues."

"Passez du temps loin de votre téléphone la plupart du temps. Ce moment peut prendre différentes formes, d'une petite course matinale à une sortie en soirée, selon votre niveau de confort."

"Les magnats des réseaux sociaux doivent cesser de se faire passer pour des dieux geeks amicaux qui construisent un monde meilleur et admettre qu'ils ne sont que des cultivateurs de tabac en t-shirts vendant un produit addictif aux enfants."

"C'est ma principale préoccupation concernant les grands conglomérats de l'économie de l'attention comme Twitter et Facebook : ce n'est pas qu'ils soient inutiles, mais plutôt qu'ils sont conçus pour être aussi addictifs que possible."

"Nous ne sommes pas faits pour la vie numérique, c'est pourquoi les excès d'activités en ligne nous laissent souvent dans un état de confusion et d'épuisement."

"Je n'ai encore jamais rencontré quelqu'un qui se sente exalté après une soirée passée à attraper des appâts à clics."

"L'envie de consulter Twitter ou de rafraîchir Reddit devient un tressaillement nerveux qui fragmente le temps ininterrompu en fragments trop petits pour soutenir la présence nécessaire à une vie intentionnelle."

"Les nouvelles technologies émergentes depuis une dizaine d'années sont particulièrement propices aux addictions comportementales, poussant les gens à les utiliser bien plus qu'ils ne le jugent utile ou sain."

"N'utilisez pas Internet parce que vous le pouvez, utilisez-le uniquement lorsque vous avez une bonne raison."

Vous concentrer vraiment

"L'attention est rare et fragile."

"Il s'agit d'une analyse 80/20 de base : faire moins, mais se concentrer sur une meilleure qualité, peut générer davantage de valeur totale."

"Aujourd'hui, le véritable succès est le fruit d'un travail approfondi, d'un effort intense, précieux et créatif qui fait avancer les choses."

"La capacité de concentration devient la denrée la plus rare du XXIe siècle."

"Concentrez-vous sur des activités à la fois significatives et utiles, même si elles ne correspondent pas à celles de tout le monde."

"Vos efforts pour approfondir votre concentration seront vains si vous ne vous libérez pas simultanément de la distraction."

"La clé pour un travail en profondeur est de créer des systèmes et des routines qui facilitent la concentration sans distraction."

"Ce que vous êtes, ce que vous pensez, ressentez et faites, ce que vous aimez, voilà ce sur quoi vous vous concentrez."

"Ce sur quoi nous choisissons de nous concentrer et ce que nous choisissons d'ignorer influence la qualité de notre vie."

"Faites moins de choses, travaillez à un rythme naturel et privilégiez la qualité."

"Il semble que les êtres humains atteignent leur apogée lorsqu'ils sont plongés dans une aventure stimulante."

"La capacité à se concentrer sans distraction est un superpouvoir à l'ère de la distraction."

"Accepter une offre entraîne des frais administratifs importants : courriels, réunions permanentes tous les mercredis… Si vous acceptez trop de demandes, ces frais généraux s'accumulent."

Adopter « slow productivity » et viser plutôt la qualité

"Travail de haute qualité produit = (temps passé) x (intensité de concentration)."

"Une productivité lente produit de bons résultats. Elle ne fait pas que rendre les travailleurs plus heureux."

"Si vous proposez des activités à faible impact, vous perdez du temps que vous pourriez consacrer à des activités à plus fort impact. C'est un jeu à somme nulle."

"Le changement constant de contexte est le principal problème de santé mentale du travail intellectuel."

"La productivité lente est ma tentative de créer une éthique sophistiquée du travail dont on est réellement fier… qui est important… qui a du sens."

"Travailler sur moins de tâches, mais les réaliser avec plus de qualité et de responsabilité, peut être la base d' une productivité nettement accrue."

"L'objectif du travail en profondeur n'est pas seulement de terminer une tâche rapidement, mais de produire des résultats de haute qualité."

"Deux compétences essentielles pour prospérer dans la nouvelle économie : 1. La capacité à maîtriser rapidement des tâches complexes. 2. La capacité à produire à un niveau d'excellence, tant en termes de qualité que de rapidité."

"Les variations d'intensité sont parfaitement compatibles avec une performance exceptionnelle."

"Au fond, l'être humain est un artisan. Nous éprouvons une grande satisfaction à créer quelque chose de précieux qui n'existait pas auparavant."

"Quitter les masses distraites pour rejoindre une minorité concentrée est, à mon avis, une expérience transformatrice."

Simplifier et revenir à l’essentiel

"Faites le bien dans le monde, simplement parce que vous souhaitez contribuer à la solution."

"Une vie riche est une vie agréable."

"La clarté sur ce qui compte permet de comprendre ce qui ne compte pas."

"Avoir une mission, c'est avoir un objectif unificateur pour sa carrière."

"Le travail superficiel qui accapare de plus en plus le temps et l'attention des travailleurs du savoir est moins vital qu'il n'y paraît souvent."

"Passer trop de temps dans un état de superficialité frénétique réduit durablement votre capacité à effectuer un travail en profondeur."

Prendre le recul et la distance nécessaire à un travail de qualité

"Nous avons besoin de solitude pour nous épanouir en tant qu'êtres humains, et ces dernières années, sans même nous en rendre compte, nous avons systématiquement réduit cet élément crucial de nos vies."

"Des doses régulières de solitude, mêlées à notre mode de vie social par défaut, sont nécessaires à l'épanouissement humain."

"Attendre et s'ennuyer est devenu une expérience nouvelle dans la vie moderne, mais du point de vue de l'entraînement à la concentration, c'est extrêmement précieux."

"En évitant la solitude, vous passez à côté des bienfaits qu'elle apporte : la capacité à résoudre des problèmes difficiles, à réguler ses émotions, à développer son courage moral et à consolider ses relations."

"Offrez à votre cerveau le calme nécessaire pour mener une vie épanouissante."

"La connectivité n'est pas un mal, mais si vous ne l'équilibrez pas avec des moments réguliers de solitude, ses bienfaits s'amenuiseront."

"Prendre du temps loin du travail est précieux pour réfléchir à ce que vous avez accompli, évaluer ce que vous avez appris et planifier l'avenir."

"Votre volonté est limitée et s'épuise à mesure que vous l'utilisez."

Et vous, avez-vous déjà lu un livre de Cal Newport ? Que vous a-t-il apporté ? Quel est celui que vous avez préféré ? Partagez vos avis dans les commentaires !

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Mon, 24 Nov 2025 17:00:00 +0100 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13292/Cal-Newport-le-penseur-qui-rinvente-notre-rapport-au-travail
Merci mais non merci | Comment les femmes redessinent la réussite sociale http://www.olivier-roland.fr/items/view/13187/Merci-mais-non-merci-Comment-les-femmes-redessinent-la-russite-sociale

Résumé de "Merci mais non merci | Comment les femmes redessinent la réussite sociale" de Céline Alix : à travers une enquête approfondie, Céline Alix partage comment de plus en plus de femmes brillantes, en abandonnant leurs carrières prestigieuses - non pas par échec, mais pour créer un nouveau modèle de réussite - initient aujourd'hui une révolution silencieuse. En réinventant les espaces et temps de travail et en privilégiant le sens, l’équilibre, la sororité à la performance pure, ces femmes sont en train de redessiner les codes du monde professionnel.

Par Céline Alix, 2021, 224 pages.

Chronique et résumé de "Merci mais non merci | Comment les femmes redessinent la réussite sociale" de Céline Alix

Introduction | La tentation de l'échec

La tentation de l'échec et le sentiment de gâchis

L'auteure, Céline Alix commence son ouvrage "Merci mais non merci" en partageant son propre parcours et ses doutes.

Ancienne avocate d'affaires dans de prestigieux cabinets anglo-saxons, elle a choisi, un jour, de tourner le dos à sa carrière. Une décision radicale qui lui a longtemps laissé un sentiment d'échec. Elle revient, en effet, sans fard, sur la culpabilité qui l'a habitée d'avoir "baissé les bras" et "laissé la situation en plan" à sa fille et aux futures générations de femmes.

Même après avoir fondé un réseau de traductrices juridiques épanouissant et aligné avec ses valeurs, elle raconte comment elle est restée hantée par cette rupture, se laissant longtemps définir par ce qu'elle considérait comme un échec : "Lorsque l'on me demandait ce que je faisais dans la vie, je commençais toujours par dire : "Avant j'étais avocate", comme pour m'excuser de ce qui allait suivre", confie-t-elle.

Un phénomène répandu mais invisible

En observant autour d'elle, Céline Alix réalise que ce parcours n'est pas isolé.

Elle découvre que 76 % des hommes ayant prêté serment en 1996 étaient toujours avocats 20 ans plus tard, contre seulement 63 % des femmes. Plus frappant encore, parmi les 60 consœurs qu'elle avait côtoyées dans ses anciens cabinets, seules 9 d'entre elles (soit 15 %) ont continué à exercer ce métier.

Ce constat amène alors l'auteure à s'interroger sur un phénomène plus large : pourquoi tant de femmes abandonnent-elles des carrières en pleine progression ?

Céline Alix s'aperçoit, en effet, que dans son cercle d'amies et de connaissances, les "ex" (ex-avocates, ex-banquières, ex-consultantes...) sont partout, et qu'elles forment "un vaste mouvement qui, loin d'être anecdotique et de se limiter au seul métier d'avocat, constituait un véritable phénomène de société".

Une génération qui a eu toutes les chances

Née en 1973, l'auteure de "Merci mais non merci" rappelle qu'elle appartient à la génération qui a eu l'opportunité d'intégrer les dernières professions considérées comme typiquement masculines.

Elle souligne l'évolution positive de l'égalité professionnelle en France, avec aujourd'hui 55 % d'étudiantes dans l'enseignement supérieur et une proportion croissante de jeunes femmes diplômées accédant aux postes de cadres en début de carrière.

Un gâchis social ou une révolution silencieuse ?

Alors face à ces avancées, Céline Alix s'interroge : ces départs massifs représentent-ils un échec collectif ? Ne s'agit-il pas d'un "gâchis social, un gaspillage de talents" ? Et quel message ces femmes envoient-elles aux jeunes générations ?

Pour répondre à ces questions, l'auteure a mené des dizaines d'entretiens avec d'anciennes avocates, banquières et dirigeantes. Des femmes brillantes qui, elles aussi, ont changé de cap. Mais à la différence du mouvement d’opting-out observé aux États-Unis – où beaucoup de femmes quittent leur emploi pour se consacrer à leur foyer – elle a découvert que les Françaises, elles, ne rentrent pas "à la maison". Elles poursuivent leur activité professionnelle, mais à leurs conditions, en bâtissant un environnement de travail qui leur ressemble, libéré des codes masculins traditionnels.

C’est là que se dessine alors la thèse centrale du livre : ce que certains prennent pour une fuite est peut-être en réalité une révolution. Un nouveau modèle de réussite sociale, enraciné dans des valeurs contemporaines, fédératrices, plus durables et inclusives.

Dans la première partie de l’ouvrage, Céline Alix analyse les failles d’un monde du travail à bout de souffle. Dans la seconde, elle met en lumière l’alternative déjà en marche : un écosystème inventé par ces femmes, en parfaite résonance avec les enjeux de notre époque.

Première partie | Un monde du travail périmé

Céline Alix commence cette partie en s'appuyant sur une idée forte de l'écrivaine Yasmina Reza : dans nos sociétés, le métier que l’on exerce façonne profondément notre identité. Il nous définit, socialement et symboliquement.

Elle annonce aussi le fil rouge de son enquête, à savoir le parcours de ces femmes qui ont quitté des fonctions prestigieuses : un chemin qui s'est fait en 3 temps : intégration, désengagement et réinvention professionnelle.

Chapitre 1 - Une seule injonction : entrer dans le moule

Dans le premier chapitre de "Merci mais non merci", Céline Alix dresse le portrait des femmes qu'elle a interrogées pour son étude.

Toutes occupaient autrefois des postes en vue : directrices en entreprise, managers dans des cabinets de conseil, avocates, banquières d'affaires... Des carrières brillantes, construites dans des milieux exigeants, souvent masculins. Leur point commun ? Elles ont toutes suivi des études supérieures, performé dans leurs métiers, gravi les échelons… avant de faire le choix de tout réinventer.

Céline Alix insiste : ces femmes sont les premières à avoir réellement accédé à des positions historiquement réservées aux hommes. Elles incarnent cette égalité professionnelle longtemps théorique qui a mis du temps à se concrétiser, rendue finalement possible quelques décennies après l’obtention du droit de vote par les Françaises en 1944.

1.1 - Les jeunes filles modèles

Céline Alix revient ensuite sur son propre parcours d'avocate d'affaires dans un grand cabinet anglo-saxon. Elle se remémore ses longues nuits blanches à travailler, et ce moment-clé où, à cinq heures du matin, elle s'est interrogée sur l'absurdité de sa situation professionnelle.

Comme beaucoup des femmes qu’elle a interrogées, elle confie avoir longtemps suivi le script de la réussite sans jamais le remettre en question. Élève exemplaire et perfectionniste, elle visait toujours l’excellence : "Sérieuse, appliquée et travailleuse, j'étais très attentive en classe, j'aimais faire mes devoirs et récolter de bonnes notes, mes cahiers étaient impeccables, soulignés bien droit et avec les bonnes couleurs. Mes instituteurs, mes professeurs et mes parents étaient contents de moi, donc j’étais contente" se souvient-elle.

Ce comportement modèle s’est naturellement prolongé dans sa vie professionnelle : elle est devenue la "collaboratrice idéale", déterminée à donner le meilleur d'elle-même, investie corps et âme pour satisfaire aux attentes…

1.2 - Entre deux vagues féministes

L'auteure s'attarde ensuite sur l'influence décisive des mères sur le parcours professionnel de ces femmes.

Elle explique que sa génération, née entre 1965 et 1981, s'est trouvée à la croisée de deux courants féministes.

D'un côté, leurs mères - qu'elles aient été femmes au foyer ou actives - leur ont martelé l’importance de travailler pour gagner leur indépendance financière. De l'autre, la vague suivante leur a lancé un défi de taille, celui de tout avoir : une carrière brillante, une vie de couple épanouie et une maternité accomplie.

Céline Alix souligne aussi comment les mères au foyer dissuadaient activement leurs filles de suivre leur exemple. Elle rapporte le témoignage de Camille : "Ma mère, la seule chose qu'elle m'a répétée en boucle, c'est : "tu travailleras ma fille, tu travailleras ma fille, tu travailleras ma fille"".

Quant aux filles de femmes ayant déjà construit des carrières solides, elles héritaient, souvent sans le dire, de la mission de pousser le combat féministe encore plus loin. Être à la hauteur, et même au-delà.

1.3 - L'influence décisive des pères

Céline Alix met ensuite en lumière le rôle déterminant des pères dans le choix de carrière de ces femmes.

Si leurs mères leur transmettaient l’injonction de l’indépendance, ce sont bien souvent leurs pères - cadres supérieurs, médecins, ingénieurs ou avocats - qui incarnaient concrètement le modèle de réussite à suivre.

L'auteure raconte son propre parcours dans des cabinets d’avocats à Londres puis à Paris, où elle s’efforçait de marcher dans les pas de son père :

"Je menais exactement la vie professionnelle que j'avais vu mon père mener : je travaillais énormément, dans le monde des affaires, je me conformais en tout point à son modèle".

Pour Céline Alix, cette prévalence du modèle paternel s’explique par une réalité contextuelle : à l’époque, la réussite ne se conjuguait qu’au masculin. Il n’existait qu’une seule voie possible vers le prestige professionnel. Et si ces pères étaient souvent bienveillants, ils étaient loin d’imaginer les obstacles spécifiques que leurs filles rencontreraient dans des environnements pensés par et pour des hommes.

1.4 - Une ambition féminine incontestable

Céline Alix termine ce premier chapitre en démontant un mythe : celui d’un prétendu manque d’ambition chez les femmes.

Elle affirme qu'au contraire, toutes les femmes qu'elle a rencontrées ont toujours fait preuve d’un engagement sans failles. Exécutantes brillantes, elles ont déployé "une extraordinaire capacité de travail" en s'impliquant totalement dans leurs fonctions. Ces femmes ont obtenu des résultats impressionnants, ont vu leurs chiffres d'affaires "exploser", ont reçu des promotions à la chaîne et des responsabilités toujours plus importantes.

Des études récentes menées par McKinsey et le Boston Consulting Group vont d’ailleurs dans le même sens. Le BCG le dit sans détour :

"La théorie persistante selon laquelle les femmes sont moins ambitieuses que les hommes est tout simplement fausse".

Céline Alix conclut que ces femmes ont bel et bien atteint les sommets auxquels elles aspiraient, comblant l’écart entre les sexes dans l’accès aux postes de prestige. Mais une fois au sommet, elles se sont heurtées à une réalité désenchantée : un monde du travail figé, peu ouvert, emprisonné dans des mécanismes obsolètes. C’est là qu’elles ont compris : "la réussite qu'elles avaient atteinte n'était pas la bonne. Pas la leur."

Chapitre 2 - Un code et des pratiques d'un autre âge

Dans le chapitre 2 de "Merci mais non merci", Céline Alix analyse les raisons pour lesquelles les anciennes cadres brillantes qu'elle a interrogées ont fini par décrocher d'un monde professionnel dont les codes et les pratiques leur semblaient dépassés.

Ce qui les animait toutes, ce n’était pas le pouvoir ou la reconnaissance à tout prix, explique l'auteure, mais une motivation bien plus simple : l’efficacité. Leur idéal ? "Faire le travail et le faire efficacement". Aller droit au but, produire du concret, être utile.

C’est justement cette exigence d’efficacité qui les a portées vers les plus hauts niveaux de responsabilité. Et, paradoxalement, c’est aussi elle qui les a poussées à s’en détourner. Car plus elles gravissaient les échelons, plus elles constataient l’inefficacité criante, les jeux de pouvoir absurdes, les pratiques usées jusqu’à la corde. Ce système-là, elles ne pouvaient plus y croire.

2.1 - "The American Dream" : le mirage de la vie de working girl

Céline Alix replonge ici dans son parcours d’avocate d’affaires, d’abord dans un cabinet londonien réputé, puis au sein d’une firme new-yorkaise encore plus intense.

À l’époque, elle est persuadée de mener "la belle vie" : "nous gagnions extrêmement bien notre vie, nous partions en week-end à l'étranger, nous faisions des fêtes dans notre grand appartement". Tout semblait cocher les cases de la réussite.

Mais son passage par New York amorce une fissure, marque le début d'une prise de conscience. Peu à peu, elle supporte de moins en moins "de passer ses soirées au cabinet lorsque cela n'était pas vraiment nécessaire" et toutes ces heures perdues à donner le change. L’inefficacité du système lui saute aux yeux. Le vernis craque.

Un épisode en particulier reste gravé : pour préserver un week-end personnel qu’elle s’était promis, elle ment à son supérieur. Découverte, elle fond en larmes. "Ce jour-là, pour la première fois, j'ai ressenti une sensation d'emprisonnement" raconte l'ancienne avocate.

La cage dorée venait de révéler ses barreaux.

2.2 - Manœuvres politiques, fanfaronnades et sexisme quotidien

Céline Alix met ici en évidence la frustration unanime des femmes interrogées face aux jeux politiques en entreprise.

Toutes dénoncent les stratégies d'influence, les alliances de couloirs, la cooptation et les manœuvres destinées à s'attirer les faveurs de la hiérarchie... Pour elles, ces pratiques ne sont pas seulement inefficaces, elles sont "injustes" et profondément "contraires à leur éthique de travail".

Une ancienne directrice de communication résume avec amertume : "Dans les grosses boîtes, avant de commencer à lever le petit doigt pour faire un truc, tu as déjà perdu tellement d'énergie à essayer d'aligner tout le monde (...) c'est épuisant."

L'auteure de "Merci mais non merci" identifie trois dérives particulièrement contestées par ces femmes :

Les manœuvres politiques, perçues comme une perte de temps chronophage et stérile.

Les fanfaronnades et la vantardise, cette surenchère d'autopromotion considérée comme improductive et fatigante.

Le sexisme quotidien, qui va des remarques déplacées à l'invisibilisation plus insidieuse.

Le témoignage de Béatrice, ex-avocate d’affaires devenue directrice d’école, illustre bien ce ras-le-bol : elle a claqué la porte de son poste d’associée avec, confie-t-elle, un sentiment d'être de trop, celui "de ne pas être à ta place et donc d'occuper un bout de strapontin parce qu'on a bien voulu te le donner".

2.3 - Le culte du présentéisme

Parmi toutes les critiques adressées au monde de l’entreprise, une est dénoncée systématiquement et avec virulence par les interviewées : celle du présentéisme.

Le présentéisme est ici présenté comme le symbole d’un système archaïque et stérile. À ce propos, Céline Alix s’appuie sur les mots de la sociologue américaine Anne-Marie Slaughter qui condamne cette "culture des heures macho", cette compétition silencieuse à "qui reste le plus tard et qui comptabilise le plus de nuits blanches".

Pourtant, précise l’auteure, ces femmes n’ont jamais fui la charge de travail inhérente à leurs fonctions en elle-même. Ce qu’elles remettaient en question, c’est tout ce qui gravite autour : "le temps de bureau qui n'était pas consacré au travail en tant que tel et qui se perdait dans les à-côtés, les rites officieux et les pratiques périphériques du monde des affaires". Autrement dit, tout ce temps passé au bureau sans réelle utilité : réunions tardives superflues, rendez-vous décalés organisés pour la forme, pots informels où "tout se décide"… mais toujours en dehors des horaires compatibles avec une vie équilibrée.

C’est cette perte de sens - et non l’effort - qui a fini par les épuiser.

2.4 - "Leur" problème : la prise en charge de la sphère domestique

Céline Alix rappelle ici que la société française n'a jamais mené de débat national sur l'articulation travail-famille, contrairement aux pays nordiques ou aux Pays-Bas.

Elle observe que cette question cruciale - à savoir, comment gérer les conséquences de la féminisation du travail - a été laissée aux femmes elles-mêmes : "C'était "leur problème". C'était à elles de le régler." La société n’a pas su - ou voulu - adapter ses structures. La charge mentale et organisationnelle du quotidien est restée dans le camp féminin.

Certes, certaines entreprises ont récemment mis en place des dispositifs : horaires aménagés, crèches d’entreprise, réseaux de soutien entre femmes. Mais pour l’auteure, ces mesures, aussi bienvenues soient-elles, restent fondamentalement limitées. Tant qu’elles ciblent exclusivement les femmes, elles ne font que renforcer l’idée que le défi de la conciliation vie pro / vie perso reste une affaire de femmes. Et tant que cette logique perdure, l’égalité restera, elle aussi, un vœu pieux.

2.5 - L'obligation d'excellence sur tous les plans

Ce deuxième chapitre de "Merci mais non merci" se conclut sur ce que l'auteure nomme un "backlash" : parallèlement à l'entrée massive des femmes sur le marché du travail, la société a développé l'"idéologie de la maternité intensive", imposant toujours plus d'investissement personnel de la part des mères. Être mère, désormais, exige un dévouement total, presque sacrificiel.

Céline Alix décrit le choc ressenti par ces femmes confrontées à un double standard parental : la naissance d'un enfant n'avait aucun impact sur la carrière de leurs conjoints, mais bouleversait complètement la leur.

Une ancienne avocate devenue entrepreneure résume ce sentiment partagé : "De tous les côtés, on attend de toi que tu sois parfaite (...) au bureau, avec mon mari, avec mes copines, il faut que je sois la bonne mère, la bonne fille, la bonne sœur, celle qui est toujours nickel."

L'auteure conclut que ces femmes se sont retrouvées piégées dans cette injonction intenable "de faire à la maison comme si le travail n'existait pas et de faire au travail comme si les enfants n'existaient pas", un système absurde, usant, encore trop ancré dans des codes périmés.

Chapitre 3 - La nécessité d'un nouveau modèle féminin

Dans le troisième chapitre de "Merci mais non merci", Céline Alix analyse pourquoi sa génération a besoin de créer un nouveau modèle professionnel féminin.

L'auteure commence par définir ce qu'est un "rôle modèle" : une personne dont les comportements et attributs spécifiques inspirent les autres et donnent envie d’être suivis. Pour remplir ce rôle, deux conditions sont essentielles : l'attractivité (on veut lui ressembler) et la proximité (on pense pouvoir y arriver).

3.1 - L'absence de modèles inspirants

Selon Céline Alix, les femmes de sa génération (nées entre le milieu des années 1960 et le début des années 1980) n'ont eu accès qu'à trois types de modèles professionnels imparfaits :

Le "modèle ambigu" de leurs mères, qui travaillaient peu ou pas, tout en les investissant de la difficile mission d'aller plus loin qu'elles.

Le "modèle irréaliste" de leurs pères, inconscients des défis particuliers que leurs filles affronteraient.

Le "modèle extrême" des premières femmes dirigeantes, présentées comme des "femmes plus hommes que les hommes" ou des "superwomen" qui semblaient tout réussir... au prix d'une surcharge insoutenable.

L'auteure émet l'hypothèse que c'est précisément la rencontre avec ces figures de "femme caricaturalement masculine" ou de "sur-femme" (trop dures, trop lointaines, trop irréalistes) qui a conforté les interviewées dans leur décision de quitter le système pour tracer leur propre voie.

3.2 - Le rejet des modèles féminins extrêmes

Céline Alix détaille ici pourquoi ces modèles extrêmes, ces figures féminines de pouvoir qui leur étaient proposées, ont été massivement rejetés par ses interlocutrices.

Camille, ancienne directrice marketing, résuma parfaitement cette réaction : "Je manageais avec beaucoup de générosité parce que j'étais en totale opposition avec les modèles féminins durs et insensibles qu'il y avait au-dessus de moi (...) je ne voulais pas être un homme dans un corps de femme."

Ce rejet était d’autant plus fort que ces comportements tyranniques paraissaient encore plus incompréhensibles, choquants, presque trahissants, lorsqu’ils venaient de femmes, pas d'hommes.

Autre figure tout aussi disqualifiée : celle de la "superwoman", capable de tout gérer, tout réussir, sur tous les fronts, sans faillir. Une ancienne senior manager dans un Big Four raconte : "On se disait, avec une collègue, quand on nous l'a présentée, que déjà au bout de la première phrase, on était fatigué. C'était la femme qui faisait tout (...) On ne pouvait pas s'identifier à ça, c'était trop."

Pour Céline Alix, ces modèles extrêmes sont le reflet d’une période de transition. Les premières femmes à accéder aux hautes sphères ont dû s’aligner sur les codes masculins pour exister, quitte à s’y fondre totalement.

Elle cite la féministe Mary Beard qui affirme que "notre modèle intellectuel et culturel de personne puissante reste résolument masculin". Et tant que ce modèle restera inchangé, il sera difficile pour les femmes d’y trouver leur place sans s’y perdre.

3.3 - Ni "opteuses-out", ni "mompreneuses"

Céline Alix souligne que les femmes qu'elle a rencontrées ne rentrent dans aucune des cases classiques.

Elles ne sont pas ces "opteuses-out" à l’américaine (selon les termes de la sociologue Pamela Stone) qui quittent leur emploi pour se consacrer entièrement à leur foyer. Les Françaises, au contraire, n’ont jamais cessé de travailler à temps plein. Elles ont juste choisi de le faire autrement.

Elles ne font pas non plus partie du mouvement des "mompreneuses", ces mères entrepreneures qui lancent des activités centrées sur la maternité ou la féminité et travaillent depuis leur domicile. L'auteure est catégorique : "il est clairement ressorti des entretiens que les interviewées n'avaient pas construit leur nouveau projet professionnel à partir et autour de leur rôle maternel."

En fait, la plupart de ces femmes sont restées dans leur domaine d’origine, mais avec une autre approche. Elles ont réfléchi en entrepreneures : "évalué les besoins du marché, élaboré des business plans, (...) cherché et trouvé des investisseurs". Leur objectif ? Créer une activité alignée avec leurs valeurs, sans renoncer à l’ambition ni à la rigueur. Juste en redessinant les contours d’un travail qui leur ressemble.

3.4 - Au-delà de l'égalité professionnelle : la troisième voie

Céline Alix place le phénomène qu'elle étudie dans une perspective historique du féminisme.

Elle s'appuie alors sur les travaux de Catherine Hakim, sociologue à la London School of Economics, qui distingue trois profils de femmes dans les sociétés modernes : 20 % de femmes tournées sur la famille, 20 % centrées sur leur carrière, et 60 % qui tentent de concilier les deux sphères.

Pour l'auteure, la démarche des femmes qu'elle a interrogées représente "un espoir, un progrès, voire un aboutissement".

Leur trajectoire, soutient-elle, incarne bien plus qu’une réaction individuelle : c’est un pas de plus dans l’émancipation. Ces femmes ont gravi les sommets de la réussite “classique”, puis ont choisi de s’en écarter pour inventer leur propre modèle. Une double réussite qui marque un tournant dans la féminisation du travail, bien au-delà de la seule question de l’égalité des droits.

Céline Alix situe alors cette évolution dans ce qu'elle nomme une quatrième vague féministe : une génération qui, forte des conquêtes précédentes, peut désormais "consacrer une partie de son combat à améliorer et faciliter la situation spécifique et individuelle des femmes au quotidien". Consacrer son énergie à rendre les choses vivables, fluides, réparées au quotidien.

L’enjeu n’est plus seulement d’avoir accès aux mêmes postes que les hommes, mais de repenser l’ensemble du système pour qu’il prenne enfin en compte les réalités, les désirs et les rythmes des femmes elles-mêmes.

3.5 - Pour une réussite inclusive

Céline Alix identifie deux piliers fondamentaux du nouveau modèle de réussite que ces femmes sont en train de construire :

Le premier, c’est l’harmonisation des différents temps de vie. Pour elles, réussir ne signifie plus faire acte de présence au bureau jusqu’à pas d’heure "juste pour montrer qu'on fait des heures". Et encore moins culpabiliser d’avoir une vie en dehors du travail. Leur définition du succès est plus globale, plus humaine : "Pour ces femmes, le vrai succès, c'est d'exister par son action publique et par son action privée."

Le second, c’est une redéfinition du pouvoir. Fini les logiques de compétition pure et dure, où il faut forcément qu’il y ait un gagnant et un perdant. Une ancienne directrice juridique le formule clairement : "Dans les grands groupes (...) tout est basé sur le rapport de force (...) le modèle, c'est le modèle de la gagne. Ce n'est pas que j'ai envie de perdre, mais je pense que l'on ne peut pas être porté par ça."

Pour Céline Alix, le vrai problème du plafond de verre n’est donc pas que les femmes manquent d'ambition, mais qu'elles ne veulent pas du pouvoir tel qu'il est exercé actuellement. En sortant de ce système dominant, ces femmes ne renoncent pas : elles "ouvrent une porte dans les consciences" et posent les bases d'un nouveau modèle de réussite qui, selon elle, correspond mieux aux aspirations contemporaines.

Deuxième partie | Le nouvel écosystème professionnel féminin

Dans un contexte où le mal-être au travail devient de plus en plus visible, Céline Alix observe un mouvement de fond : la société entière commence à questionner le sens et la finalité de l’engagement professionnel.

C’est dans cette brèche que s’inscrivent les femmes qui ont choisi de quitter des carrières ascendantes classiques. Plutôt que de renoncer, elles ont inventé autre chose : un nouvel écosystème professionnel, bâti sur trois piliers : une approche sororale des relations, une redéfinition des espaces-temps de travail, et le choix du collectif.

Chapitre 4 - Une approche sororale de la relation professionnelle

Céline Alix débute ce nouveau chapitre de "Merci mais non merci" en citant l'essayiste Mona Chollet qui décrit "cette façon qu'ont les femmes de se tendre la main, de se faire la courte échelle". Un esprit d'entraide qu'elle dit être "le contraire parfait de la logique du "plein la vue"" et de la performance solitaire.

L'auteure révèle avoir pris conscience, très tôt, du potentiel considérable que pouvait revêtir un rapport professionnel purement féminin. Une intuition confirmée tout au long de sa carrière.

4.1 - Women only : vers une sororité refuge

Céline Alix commence par raconter la création de Claritas, le réseau de traductrices juridiques qu’elle a cofondé en 2013 avec d’anciennes avocates.

Ce projet, né d'une collaboration informelle entre professionnelles en reconversion, s'est structuré progressivement, naturellement, sans hiérarchie rigide, dans le respect de l'indépendance de chacune. Aujourd'hui composé de huit traductrices, Claritas fonctionne sur deux fondations simples mais puissantes : un principe d'efficacité et de confiance totale.

Céline Alix observe que Claritas n'est pas un cas isolé. Elle constate l'émergence de nombreuses structures exclusivement féminines - cabinets d'avocats, start-ups, fonds d'investissement - ainsi que des clubs professionnels féminins qui proposent des espaces de travail, d'échange et de réseautage.

Mais ce réseau n’est pas un cas isolé. L’auteure constate l’émergence, un peu partout, d’initiatives similaires 100 % féminines : cabinets d’avocates, start-ups fondées entre femmes, fonds d’investissement portés par des entrepreneures, clubs professionnels réservés aux femmes. Ces espaces ne sont pas seulement des lieux d’entraide et de réseautage : ils deviennent des environnements de travail à part entière, où se tissent des liens, se prennent des décisions, se construisent des carrières.

L'auteure souligne le caractère inédit de ces initiatives :

"Pour la première fois dans l'histoire du travail tertiaire, des décisions et des interactions professionnelles ne sont prises ou ne se déroulent qu'entre femmes."

4.2 - Quand le diable s'habillait en Prada

Céline Alix retrace l’évolution historique des relations entre femmes au travail, longtemps marquées par la méfiance, voire l’hostilité. Elle revient, pour illustrer ses propos, sur plusieurs expériences difficiles ou négatives que ses interlocutrices lui ont rapportées avoir eues avec des collègues ou des supérieures féminines.

Exemple, cette ancienne trader qui témoigne : "Les femmes, contrairement aux hommes, "ne se tenaient pas chaud", et ceci contribuait largement à ralentir, voire à neutraliser, leur progression dans les professions typiquement masculines."

Elle cite également Anne-Marie Slaughter qui, dans un acte de sororité, a reconnu avoir parfois affiché un sentiment de supériorité face à d'autres femmes qui n'avaient pas réussi aussi bien qu'elle. Un sentiment autrefois courant qu’elle n’aurait pas éprouvé face à des hommes.

Ce constat fait écho à ce que la journaliste Florence Sandis appelle "le syndrome de la Reine des Abeilles" : cette figure de femme de pouvoir isolée, parfois tyrannique, prête à écraser ses semblables pour atteindre le sommet. Ce stéréotype incarné notamment par l’archétype de la working girl glaciale à la "Le diable s’habille en Prada", a longtemps imprégné l’imaginaire collectif.

Toutefois, pour Céline Alix, ce modèle touche à sa fin. La rivalité féminine dans la sphère professionnelle laisse progressivement place à une solidarité assumée : une sororité réelle, construite, et non plus théorique.

4.3 - Le temps de la sororisation générale

L'auteure de "Merci mais non merci" décrit ensuite l'extraordinaire élan de solidarité qu'elle a rencontré pendant ses recherches.

Elle a été frappée par la chaleur et l'ouverture manifestées par toutes ses interlocutrices, établissant avec elles "une connexion immédiate, comme un signe d'acquiescement, de reconnaissance, né d'une expérience difficile commune".

Ce qui l’a frappée, au-delà des témoignages, c’est la chaleur humaine, la bienveillance et l’ouverture spontanée de toutes les femmes qu’elle a rencontrées. À chaque entretien, une forme de "connexion immédiate" s’établissait, "comme un signe d'acquiescement, de reconnaissance, né d'une expérience difficile commune", celle d’avoir traversé les mêmes épreuves, d’avoir résisté aux mêmes injonctions.

Pour Céline Alix, la fin de la concurrence entre femmes et cette bascule vers la solidarité féminine s’explique par deux phénomènes majeurs :

Une simple réalité arithmétique : les femmes sont désormais bien plus nombreuses dans les professions traditionnellement masculines. Il n’est plus nécessaire d’être la seule, "l'unique élue". Cette logique d’exception n’a plus lieu d’être.

Une évolution générationnelle : les jeunes femmes sont de plus en plus conscientes de l’importance de la sororité, portée par les idées de la quatrième vague féministe. La compétition a alors laissé place à la coopération.

Céline Alix cite l'écrivaine Chloé Delaume qui appelle à une "sororisation générale" et définit la sororité comme "une démarche consciente, un rapport volontaire à l'autre (...) Ne jamais nuire volontairement à une femme. Ne jamais critiquer publiquement une femme, ne jamais provoquer le mépris envers une femme."

4.4 - Les nouveaux réseaux féminins

Céline Alix souligne l’essor impressionnant des réseaux professionnels féminins en France : on en compte aujourd’hui près de 500. Ce chiffre témoigne d’un besoin fort de se retrouver entre femmes, d’échanger, de se soutenir, de partager des expériences.

Mais derrière cet engouement, certaines voix s’élèvent. Plusieurs femmes interrogées expriment leurs réserves face à des réseaux qui, en cherchant à reproduire les codes des cercles d’influence masculins, passent à côté de ce que les femmes attendent vraiment.

Face à cette inadéquation, certaines ont alors créé des structures alternatives.

Aude, une ancienne juriste devenue paysagiste, a organisé chez elle des rencontres informelles entre professionnelles de différents horizons, sans ordre du jour ni présentations formatées. D'autres, comme Nathalie, ont mis en place des déjeuners réguliers avec de jeunes collaboratrices pour créer un espace d'échange sécurisant.

Ces initiatives illustrent une autre façon de réseauter : plus souple, plus humaine, plus alignée avec les besoins réels des femmes.

4.5 - Manuel de sororité au bureau

Dans la dernière partie de ce chapitre, Céline Alix partage les pratiques concrètes de sororité mises en œuvre par ses interlocutrices :

La discrimination positive : privilégier une femme à compétences égales avec un homme. Une ancienne trader confie : "Dès que je pouvais, je recrutais des stagiaires filles. Avec le mal que j'ai eu pour entrer en salle de marché, je me disais : si je peux en sauver une ou deux, tant mieux."

Le mentoring : accompagner spontanément les plus jeunes femmes dans leur progression professionnelle.

Le soutien aux quotas : considérés comme un outil transitoire mais nécessaire, tant qu’un seuil critique - autour de 25 % de femmes dans une organisation - n’a pas été atteint pour faire bouger durablement les lignes.

Pour Céline Alix, la sororité dépasse désormais le simple soutien ponctuel : elle devient une véritable conscience professionnelle, comparable à l’éveil écologique de ces dernières décennies. Une façon d’agir au quotidien pour transformer en profondeur les règles du jeu.

Elle conclut en citant l’écrivaine Ursula K. Le Guin : "Lorsque nous, femmes, livrons notre expérience et la présentons comme notre vérité, comme la vérité humaine, toutes les cartes du monde s'en trouvent modifiées et de nouvelles montagnes se forment."

Chapitre 5 - Les nouveaux espaces-temps de travail

Le chapitre 5 de "Merci mais non merci" analyse comment les femmes qui quittent des carrières prestigieuses réinventent complètement leur rapport au temps et à l'espace professionnels.

Céline Alix observe que ce mouvement dépasse largement le cercle de ses interlocutrices. De plus en plus de salarié.es aspirent à des environnements de travail plus flexibles et responsabilisants, où l’on valorise la confiance et l’autonomie plutôt que la surveillance et le présentéisme.

Ce rejet de l’obsession du contrôle, des horaires rigides et du présentiel traduit un besoin de réconcilier travail et vie personnelle, et surtout de remettre du sens dans l’engagement professionnel.

5.1 - Il y a une vie après le bureau

Céline Alix revient ici sur une expérience marquante qu'elle a vécue à l’ambassade de France à Washington. Là-bas, elle découvre un tout autre rapport au travail : elle réalise qu'on "pouvait faire un travail intéressant en effectuant des horaires normaux et être reconnu indépendamment du nombre d'heures que l'on passait au bureau". Une révélation.

À son retour dans un cabinet d’avocats parisien, cette prise de conscience rend soudain intolérables les pratiques qu’elle acceptait autrefois sans broncher : les journées à rallonge, la culture du sacrifice, le culte du présentéisme.

Elle établit alors un parallèle avec l’œuvre de la psychanalyste Clarissa Pinkola Estés, qui compare les femmes aux louves : robustes, puissantes, débordantes d'énergie, conscientes de leur territoire, instinctives. Comme ces louves, les femmes qu’elle a rencontrées ressentent toutes ce besoin de liberté et d'espace, à l'image de l'animal sauvage qui s'étiole lorsqu'il est enfermé.

Ce besoin de mouvement, de protection de son espace vital, de respiration, d’équilibre entre l’intérieur et l’extérieur, devient un fil rouge dans leur façon de concevoir le travail. Avec, de fait, un refus clair : celui de l’enfermement.

5.2 - Ce que veulent les femmes

Ces femmes, indiquent alors Céline Alix, refusent de passer toutes leurs journées confinées derrière un bureau : elles veulent enchaîner les formats, alterner projets pro et moments perso.

Elles démontrent une confiance impressionnante en leur capacité à travailler efficacement en mode séquencé, comme l'illustre cette ancienne trader avec humour : "Les réunions qui n'en finissent pas, j'en ai vues. (...) On mettrait que des femmes, ça irait deux fois plus vite. Parce qu'une femme, elle gère son boulot, elle gère la maison, elle gère les enfants, donc la réunion, en trente minutes elle est terminée."

Contrairement à leurs homologues américaines qui, parfois, quittent le monde professionnel pour devenir mères au foyer, aucune des Françaises interviewées n'a envisagé d'arrêter complètement de travailler. Et leurs revendications sont finalement très modestes : pouvoir s’absenter une heure pour un rendez-vous médical avec un enfant, accompagner une sortie scolaire de temps en temps, ou caler une séance de sport dans leur journée.

Ce qu’elles réclament, ce n’est pas un traitement de faveur, mais la liberté de gérer leur emploi du temps sans avoir à se justifier constamment, tout en restant disponibles et engagées dans leur travail, pour leurs équipes ou leurs clients.

5.3 - Le statut d'indépendante, laboratoire du travail au féminin

Céline Alix constate que la majorité des femmes qu'elle a interrogées ont opté pour le statut d'indépendante.

Ce statut leur apporte un cadre légitime pour expérimenter d’autres manières de travailler, loin des rigidités du salariat classique. Ce mouvement s’inscrit d’ailleurs dans une tendance de fond : en 2017, 34 % des indépendants en France étaient des femmes, contre seulement 30 % en 2009.

L'auteure rapporte les réflexions d’Anne-Marie Slaughter, qui propose une vision plus souple de la carrière : "non pas comme une ascension en ligne droite, mais un escalier avec des marches irrégulières émaillé de paliers (et même parfois de creux)". Cette vision évolutive permet d'intégrer des périodes de ralentissement ou de reconversion qui enrichissent plutôt qu'elles ne pénalisent le parcours professionnel.

Ce choix de l’indépendance, cependant, n’a rien d’un confort. Céline Alix rapporte les mots de Stéphanie, entrepreneure : "Quand tu montes ta boîte, tu es nue. Le matin, tu te lèves et si tu ne fais rien, il ne se passe rien. Ça demande une discipline de vie beaucoup plus forte que l'autre."

Ce mode de travail, exigeant mais libre, devient pour beaucoup de femmes un espace d’émancipation. Un terrain d’expérimentation où elles peuvent enfin ajuster leurs rythmes, leurs règles et leurs priorités.

5.4 - L'art de l'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle

Dans la dernière partie du chapitre 5, l'auteure analyse les stratégies concrètes mises en place par ces femmes pour mieux concilier leurs différents temps de vie.

Si la plupart disposent d'un bureau extérieur, elles apprécient de pouvoir travailler ponctuellement de chez elles et de gérer librement leurs horaires.

Un autre phénomène retient l'attention de Céline Alix : plus d’un tiers de ces femmes sont ce qu’on appelle des "slasheuses", c’est-à-dire qu’elles cumulent plusieurs activités professionnelles.

Contrairement aux pluriactifs traditionnels qui cherchent à augmenter leurs revenus, ces femmes voient dans cette diversification une façon d'enrichir leur activité principale, en nourrissant leur expertise et leur énergie par la diversité.

Une ancienne directrice juridique, aujourd’hui entrepreneure et enseignante à l’université, raconte ainsi qu’elle consacre des journées spécifiques à chacune de ses activités, dans des lieux dédiés, tout en suivant un fil conducteur cohérent.

Céline Alix conclut que ces femmes ont finalement trouvé un mode de fonctionnement en adéquation avec leur nature profonde :

"En satisfaisant leur besoin de bouger, de travailler ici et là, à ce moment-ci ou plutôt à cet instant-là, en rendant plus poreuses les frontières entre leurs vies professionnelle et personnelle, les femmes qui se détournent du chemin de carrière classique ont marqué leur territoire et intégré leurs rythmes."

Chapitre 6 - L'attrait du collectif

Dans le dernier chapitre de son livre "Merci mais non merci", Céline Alix s'intéresse à une dimension clé du nouveau modèle professionnel que dessinent les femmes qu’elle a interrogées : leur approche fondamentalement collective et anti-individualiste du travail, à rebours de ce que valorisent souvent les sphères professionnelles traditionnelles.

Pour éclairer cette tendance, elle s’appuie sur les travaux de la professeure en sciences politiques Camille Froidevaux-Metterie. Celle-ci défend l'idée que les femmes seraient "naturellement anti-individualistes" et développeraient un style de management spécifique. Elles seraient, selon elle, dotées "d'une disposition à se projeter hors d'elles-mêmes" et animée par "une posture éminemment relationnelle".

Cette inclinaison vers le collectif se reflète alors dans leur manière de manager, de créer, de collaborer. Le pouvoir ne s’y exerce plus de façon verticale, mais circulaire ; la réussite n’est plus envisagée comme une compétition, mais comme une dynamique partagée.

6.1 - La disposition relationnelle des femmes

Céline Alix commence par rapporter les travaux de la professeure britannique Patricia Lewis qui a étudié l'entrepreneuriat féminin.

Celle-ci a identifié un profil d’entrepreneuses qu’elle qualifie de "entrepreneuses relationnelles" : des femmes qui refusent le modèle entrepreneurial classique, "centré sur la croissance" et la performance individuelle, au profit d’une logique fondée sur "les interactions humaines, l'empathie réciproque et l'empowerment mutuel".

Cette idée rejoint les conclusions du cabinet McKinsey, qui a constaté que les femmes dirigeantes mobilisent plus fréquemment 5 comportements de leadership positifs, dont "le développement des personnes" et "la prise de décision en mode participatif".

L’auteure illustre ce style de leadership par l’exemple de Christelle, ancienne directrice marketing dans la grande distribution. Lors d’une négociation importante, cette dernière choisit sciemment de s'écarter des conseils masculins reçus ("ne rien lâcher" et "y aller en force") pour privilégier la construction commune avec sa partenaire de négociation féminine : "On a démarré la négociation avec une immense envie de travailler ensemble... et on a fait une super-négociation."

Cette approche plus humaine, plus collaborative, bouscule les normes classiques du pouvoir. Comme le résume Eva, coach de dirigeants et dirigeantes, les femmes apportent dans l’univers professionnel "une espèce de douceur de ton, du regard sur l'autre" qui contraste avec les archétypes masculins basés sur la compétition et la mise en avant personnelle.

6.2 - Gagner moins mais trouver plus de sens

Céline Alix constate que pour la majorité des femmes qu'elle a interrogées, l'argent constitue une nécessité mais plus du tout une motivation.

Toutes ont perçu des revenus élevés dans leurs anciens postes. Aujourd’hui, elles gagnent en moyenne 30 % de moins, mais l’assument pleinement. Ce qu’elles recherchent, ce n’est plus l’ascension ni le statut, mais l’autonomie financière et la quête de sens.

Leïla, ex-analyste d'actions devenue professeure de mathématiques, résume bien le climat qu’elle a quitté : "Tout tournait autour de l'argent, l'argent te rendait intouchable et te définissait... À la fin, je trouvais que les gens ne parlaient que de ça."

À présent, leur moteur est ailleurs : avoir un impact, se sentir utile, vibrer pour ce qu’elles font. Véronique, ancienne productrice de télévision reconvertie en pâtissière, partage ainsi sa définition personnelle du "sens" : "c'est de se sentir bien quand on fait, c'est le chemin, ce n'est pas le résultat ; c'est vraiment te demander : est-ce que ça pétille quand tu fais ?"

L'auteure observe un parcours similaire chez toutes les femmes interrogées : un démarrage fulgurant, une progression linéaire, puis l'apparition de doutes qui conduisent à une prise de conscience radicale. Sans renier leurs premières années professionnelles qu'elles ont "adorées", elles ont compris que la course à l'argent et au pouvoir devait céder la place à l'impact et au sens.

6.3 - Transmettre : un horizon nécessaire

La transmission est un élément central du nouvel écosystème professionnel créé par ces femmes.

Pour beaucoup, elle est devenue une évidence, presque une nécessité. Céline Alix observe que deux tiers d’entre elles exercent aujourd’hui une activité de formation ou d’enseignement, soit comme activité principale, soit en parallèle d'autres occupations.

Ce besoin de partager, de transmettre ce qu’elles ont appris, parfois durement, s’inscrit dans une logique de continuité et de sens. Il ne s’agit pas seulement de savoir-faire, mais de valeurs, d’approches, de manières d’être au monde professionnel.

Céline Alix relate, par exemple, comment Marianne, ancienne cadre en marketing et RH, a intégré un cabinet de coaching après une initiative originale : la fondatrice avait organisé "une espèce de journée portes ouvertes de la transmission" pour trouver des personnes partageant ses valeurs et à qui confier progressivement sa clientèle.

Pour Céline Alix, cette volonté de transmission n’est pas un aboutissement, mais une extension logique du nouveau rapport au travail de ces femmes : travailler autrement, ensemble… et faire en sorte que ça dure.

6.4 - Le pari d'un monde du travail meilleur

L'auteure conclut en soulignant que les aspirations de ces femmes rejoignent, en fait, celles des nouvelles générations : le modèle dominant - compétitif, hiérarchique, individualiste - est de plus en plus remis en question, aussi bien par les femmes que par les jeunes en général.

Eva, une coach de dirigeants interrogée, le confirme : "Tous ces archétypes masculins, on les retrouve beaucoup moins chez les jeunes. Il y a vraiment quelque chose qui est en train de changer."

Une enquête du cabinet Deloitte, citée par l’auteure, appuie cette évolution : 83 % des millennials estiment que la réussite d'une entreprise ne doit pas se mesurer uniquement à l’aune de ses résultats financiers, mais aussi à son impact social.

Enfin, Céline Alix termine son ouvrage sur une note d'espoir :

"En quittant des carrières à succès pour travailler à leur manière, les femmes que j'ai interviewées se font les pionnières d'un monde du travail accessible aux deux sexes et fondé sur l'équilibre, l'ouverture et l'inclusion. Faisons le pari que les jeunes, hommes et femmes confondus, mèneront et achèveront sa transformation."

Conclusion | Prendre place

Céline Alix clôt son ouvrage en révélant ce qu’il représente pour elle : l’aboutissement d’un cheminement personnel de dix ans, amorcé le jour où elle a quitté sa carrière d’avocate d’affaires.

À travers cet ouvrage, elle transforme une série de parcours individuels en un mouvement collectif. Ce que l’on aurait pu lire comme des abandons isolés devient, avec le recul et la mise en récit, un acte fondateur :

"Seules et isolées, nous pouvions paraître des démissionnaires... Ensemble, nous devenons des bâtisseuses, des pionnières, des modèles."

Pour l’auteure, la cause féministe dans le monde du travail poursuit désormais deux dynamiques parallèles et complémentaires :

Celle du rattrapage, qui vise à réformer le système existant pour le rendre plus inclusif, plus accueillant ;

Et celle de l’invention, qui consiste à bâtir un modèle alternatif, entièrement nouveau, plus libre, plus aligné

Céline Alix finit en lançant un appel fort à la solidarité entre femmes, un appel à "bâtir un pont entre les femmes qui partent et les femmes qui restent". Elle nous encourage toutes à "dialoguer, partager nos expériences, nous épauler" et à "démontrer chaque jour la puissance des femmes unies."

Conclusion de "Merci mais non merci | Comment les femmes redessinent la réussite sociale" de Céline Alix

Les 4 idées fortes du livre "Merci mais non merci | Comment les femmes redessinent la réussite sociale"

1 : Le départ des femmes des carrières prestigieuses n'est pas un échec mais une révolution consciente, pas une fuite mais une réinvention.

Dans son travail d'enquête, Céline Alix démontre avec force que les femmes qu'elle a interrogées et qui ont quitté leur carrière n'ont pas fui leurs responsabilités : elles ont rejeté un système obsolète. Pour elle, ce départ n'est donc absolument pas un échec mais bien un acte volontaire, lucide et subversif.

Ces femmes ont gravi les échelons, atteint les sommets professionnels, affirme l'auteure, avant de réaliser que ce modèle de réussite traditionnelle ne leur ressemblait pas, qu'il ne correspondait pas à leurs valeurs profondes. Elles ont aussi compris qu’égaler les hommes selon leurs règles ne suffisait pas. Elles ont prouvé qu’elles en étaient capables, puis ont choisi de créer leurs propres règles du jeu.

Leur reconversion n’est donc pas un renoncement, mais un acte d'émancipation. Une forme de maturité féministe : non seulement elles peuvent occuper les places de pouvoir, mais elles peuvent aussi les redéfinir.

2 : La sororité devient un pilier fondamental du nouveau monde professionnel.

Autre point clé du livre "Merci mais non merci": cette révolution relationnelle que Céline Alix observe entre femmes.

Fini le temps de la concurrence et de la rivalité : ces professionnelles développent une approche collaborative inédite. Elles créent des réseaux d'entraide authentiques, pratiquent le mentoring spontané et privilégient la réussite collective. Cette sororité dépasse le simple soutien moral pour devenir un modèle économique viable, comme l'illustre parfaitement le réseau Claritas fondé par l'auteure elle-même.

3 : L'équilibre vie professionnelle-vie personnelle devient non négociable.

Pour les femmes interrogées par Céline Alix, le culte du présentéisme et la glorification des heures à rallonge n’ont plus lieu d’être. Elles rejettent avec force ces normes dépassées qui valorisent la disponibilité constante plutôt que le résultat.

Ce qu’elles revendiquent, ce n’est pas moins d’engagement, c'est le droit de gérer leur temps selon leurs priorités réelles et non selon des codes archaïques.

Cette liberté temporelle n’a rien à voir avec un manque d’ambition. Au contraire, c’est une nouvelle définition de l’efficacité : plus agile, plus alignée, plus humaine. En adoptant le statut d’indépendante ou en rejoignant des organisations plus flexibles, elles montrent qu’il est possible de conjuguer excellence et équilibre, sans renoncer ni à soi, ni à ses compétences.

4 : Le sens remplace l'argent comme moteur principal.

L’enquête de Céline Alix met enfin en lumière un basculement profond : le sens a supplanté l’argent comme ligne directrice dans la vie professionnelle. Les femmes qu’elle a interrogées ne cherchent plus à maximiser leurs revenus, mais à donner du relief à ce qu’elles font, et à ce qu’elles sont.

Ces femmes acceptent alors de gagner moins pour vibrer davantage. Elles privilégient l'impact à la reconnaissance, la transmission au pouvoir. Cette quête de sens se traduit concrètement par des activités d'enseignement, des projets entrepreneuriaux alignés et une approche plus humaine du leadership.

À travers leurs choix, Céline Alix montre que ces femmes incarnent une nouvelle forme de réussite. Elles dessinent les premiers contours d’une économie plus consciente, plus incarnée, où l’on travaille pour faire sens et non seulement pour faire carrière.

Qu'est-ce que la lecture de "Merci mais non merci" vous apportera ?

"Merci mais non merci" est un recueil de témoignages forts, mais c'est surtout un guide de transformation, à la fois professionnelle et intérieure.

Si vous vous sentez en décalage avec le monde du travail tel qu’il est, si vous vous interrogez sur votre parcours professionnel, ressentez cette dissonance entre vos aspirations profondes et les attentes sociétales, si vous avez l’intuition que votre parcours pourrait s’écrire autrement, ce livre vous apportera des repères clés pour mieux comprendre, assumer, et agir.

Au fil des pages, Céline Alix vous emmène à la rencontre de femmes qui ont osé remettre en question une réussite toute tracée, pour inventer une voie plus alignée avec leurs valeurs. Elle partage alors avec lucidité et concrètement comment ces femmes ont traversé ce moment : les étapes de cette transition, les pièges à éviter, les ressources à mobiliser, quelles stratégies adopter.

Avec cet ouvrage, vous apprendrez aussi à repenser votre rapport au temps, à construire des relations professionnelles plus authentiques et redonner du sens à votre engagement. Mais surtout, l’auteure vous y propose un nouveau référentiel de réussite, affranchi des modèles traditionnels, libéré des injonctions masculines traditionnelles, pour enfin poser votre propre définition du succès.

Pourquoi lire "Merci mais non merci" ?

"Merci mais non merci" de Céline Alix mérite, à mon sens, votre attention pour deux raisons majeures :

D'abord, il déconstruit brillamment les préjugés sur l'ambition féminine et transforme une culpabilité individuelle - ce qui était perçu comme une faiblesse : la démission, le doute, la remise en question - en force collective et acte de lucidité.

Mais aussi, parce qu'il va au-delà du constat : il vous propose des solutions concrètes et réalisables pour repenser votre rapport au travail, et ce, que vous soyez femme ou homme.

Je vous conseille cette lecture si vous sentez que les anciens modèles de travail ne vous conviennent plus, si vous êtes en plein dans une période de questionnement professionnel, si vous ne voulez plus subir les règles du jeu mais participer à les réinventer. Car avec son approche tout à la fois rigoureuse et humaine, "Merci mais non merci" devrait vous apporter des repères clairs, des témoignages inspirants et une direction nouvelle.

Points forts :

L’enquête journalistique très bien documentée, basée sur des dizaines d'entretiens authentiques.

L’analyse pertinente qui replace les parcours individuels dans un mouvement collectif et s'appuie sur des références sociologiques et historiques.

Le ton optimiste qui redonne confiance : pas de posture victimaire, des propos bienveillants et accessibles, sans jargon académique.

Les alternatives concrètes et les modèles inspirants pour réinventer sa carrière.

Point faible :

Le manque de diversité socio-économique dans les témoignages recueillis et le focus exclusif sur les professions de cadres supérieurs qui limitent, en somme, la portée universelle.

Ma note :

★★★★★

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Thu, 13 Nov 2025 17:00:00 +0100 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13187/Merci-mais-non-merci-Comment-les-femmes-redessinent-la-russite-sociale
Le journal d’un CEO http://www.olivier-roland.fr/items/view/13147/Le-journal-dun-CEO

Résumé du livre "Journal d'un CEO : les 33 lois du succès en entreprise et dans la vie" de Steven Bartlett : un condensé de bons conseils de développement personnel et professionnel pour réussir ce que vous avez toujours rêvé d'entreprendre sans jamais oser vous décider pour de bon.

Steve Bartlett, 2024 (2023).

Titre original : Diary of a CEO. The 33 Laws of Business and Life.

Chronique et résumé de "Journal d'un CEO : les 33 lois du succès en entreprise et dans la vie" de Steven Bartlett

Introduction : Qui suis-je pour écrire ce livre ?

Steven Bartlett est un entrepreneur qui a fondé ou dirigé plusieurs entreprises valorisées à plus d’un milliard de dollars. Il crée Flight Story, thirdweb et Flight Fund, tout en investissant dans plus de quarante sociétés. À 30 ans, il siège aux conseils d’administration de plusieurs leaders mondiaux.

L’auteur a conseillé des marques comme Apple, Nike ou Amazon sur leur stratégie marketing. Il a aussi mené plus de 700 heures d’entretiens avec des personnalités influentes en affaires, sport, arts et sciences. Ces conversations nourrissent son podcast The Diary Of A CEO, devenu l’un des plus écoutés au monde.

Il comprend que les réussites comme les échecs reposent sur des lois intemporelles. Celles-ci transcendent les secteurs et s’appliquent à toute personne voulant bâtir quelque chose de grand. Pour les appuyer, il s’appuie sur la psychologie, la science et des enquêtes auprès de milliers de personnes.

Steve Bartlett conçoit son livre avec cinq convictions :

Simplicité ;

Clarté ;

Force des images ;

Pouvoir des récits ;

Importance de la nuance.

Il veut transmettre l’essentiel, ni plus ni moins, à travers histoires et images marquantes. Son ambition est de livrer des vérités fondamentales accessibles à tous.

L’auteur définit quatre piliers de la grandeur.

Le premier, le soi, concerne la maîtrise de soi et la conscience personnelle.

Le second, l’histoire, met en lumière le pouvoir universel du storytelling.

Le troisième pilier, la philosophie, englobe croyances et valeurs qui dictent les comportements et mènent à la réussite.

Enfin, l’équipe rappelle qu’aucune grande réalisation n’existe sans un groupe soudé par une culture forte. Lorsque 1 + 1 = 3, l’extraordinaire devient possible.

Pilier 1 : Le soi

Loi 1 : Remplissez vos cinq seaux dans le bon ordre

Steven Bartlett raconte une rencontre surprenante avec Elon Musk. Cette anecdote illustre la puissance de ses cinq seaux, symboles des ressources qui définissent le potentiel humain. Musk les a remplis, ce qui rend crédibles ses ambitions extraordinaires.

Ces seaux représentent le savoir, les compétences, le réseau, les ressources et la réputation. L’auteur explique que leur ordre de remplissage est crucial pour bâtir des fondations solides. Il rappelle que vouloir sauter les deux premiers mène à des échecs durables.

Inspiré par un maître spirituel, il comprend qu’on ne peut rien offrir avec des seaux vides. Il insiste sur l’importance d’investir d’abord dans la connaissance, qui se transforme ensuite en compétences. Ce chemin ouvre naturellement l’accès aux réseaux, aux ressources et à la réputation.

L’entrepreneur illustre son propos avec l’histoire de Richard, jeune salarié devenu trop vite PDG. Privé de bases solides, Richard voit son entreprise s’effondrer en dix-huit mois, confirmant la loi des seaux. Pour Steve Bartlett, remplir les deux premiers reste l’investissement le plus rentable.

Il rappelle que la vie professionnelle est traversée de séismes imprévisibles : innovations disruptives, licenciements, faillites. Seule une fondation de savoir et de compétences permet de résister à ces secousses. Avec des seaux bien remplis, chacun peut bâtir durablement et affronter les crises.

"Il n'y a que deux choses qu'un tel séisme professionnel ne peut jamais détruire : il peut vous priver de votre réseau, il peut vous priver de vos ressources, il peut même nuire à votre réputation, mais il ne peut jamais vous priver de vos connaissances et il ne peut jamais vous faire perdre vos compétences." (Journal d'un CEO, Loi 1)

Loi 2 : Pour maîtriser un sujet, vous devez vous donner l'obligation de l'enseigner

À 14 ans, Steven Bartlett vit un cauchemar sur scène, paralysé par le trac devant un public scolaire. Dix ans plus tard, il prend la parole partout dans le monde, aux côtés de personnalités comme Barack Obama. Il attribue cette transformation à une loi simple : créer une obligation d’enseigner.

Inspiré par Yogi Bhajan, il décide à 21 ans de publier chaque jour une idée en ligne. Cette discipline, transformée en contrat social avec son audience, devient un moteur puissant. Les retours reçus l’aident à progresser et bâtir une communauté de près de dix millions de personnes.

L’auteur souligne l’importance du skin in the game : avoir quelque chose à perdre pousse à l’action. L’obligation publique, qu’elle soit sociale ou financière, accélère l’apprentissage. La peur de perdre pèse plus fort que l’envie de gagner, et cette tension nourrit la constance.

Il adopte aussi la technique de Feynman : apprendre, simplifier, enseigner, revoir. Réduire une idée à l’essentiel prouve qu’on la comprend vraiment. Pour lui, partager régulièrement oblige à clarifier, à simplifier et à approfondir ses savoirs.

Steven Bartlett rappelle que tous les grands penseurs, anciens ou modernes, ont suivi cette loi. Enseigner en public, par écrits, discours ou contenus numériques, les a rendus maîtres de leur art. On devient maître non en gardant le savoir, mais en le libérant.

Loi 3 : Vous ne devez jamais être en désaccord

Steven Bartlett raconte les disputes interminables de ses parents, puis celles avec son ex-compagne. Dans les deux cas, la communication échoue et le conflit s’envenime. Il découvre que ce modèle de réponse, basé sur la fuite ou la confrontation directe, détruit les relations.

Il souligne que tout conflit repose sur la communication. Les études de Tali Sharot montrent que le cerveau s’ouvre quand il perçoit un accord, mais se ferme face au désaccord. Les arguments, aussi rationnels soient-ils, échouent lorsqu’ils commencent par « tu as tort ».

La clé est de partir d’un terrain commun. En montrant d’abord ce que l’on comprend et partage, on garde l’autre réceptif. C’est ainsi qu’un argument devient audible, qu’une négociation avance, et qu’un conflit renforce plutôt qu’il ne détruit.

L’auteur rappelle que les meilleurs communicateurs placent l’écoute au premier plan. Faire sentir à l’autre qu’il est entendu et compris ouvre la voie au dialogue. Cette loi – ne jamais commencer par un désaccord – transforme la communication et les relations personnelles comme professionnelles.

"Les conflits sains renforcent les relations, car les personnes impliquées s'attaquent ensemble à un problème ; les conflits malsains affaiblissent les relations, car les personnes impliquées s'opposent les unes aux autres." (Journal d'un CEO, Loi 3)

Loi 4 : Ne choisissez pas ce que vous croyez

Steven Bartlett explique que nous ne choisissons pas nos croyances. Même sous menace, il serait impossible de croire à volonté. Nos convictions reposent toujours sur des preuves, parfois objectives, parfois biaisées, mais elles restent façonnées par l’expérience et la confiance.

L’auteur montre que ces croyances évoluent grâce à de nouvelles preuves directes ou à l’autorité de personnes crédibles. Voir, entendre et vivre soi-même une expérience reste le levier le plus puissant. Sans cela, aucune donnée, image ou discours ne peut ébranler des certitudes profondes.

Les recherches de Tali Sharot révèlent que la force d’une croyance dépend de la confiance accordée aux preuves existantes et nouvelles. Le biais de confirmation nous pousse à rejeter toute information trop éloignée de nos idées actuelles. Pourtant, nous changeons plus facilement d’avis quand les nouvelles preuves ressemblent à de bonnes nouvelles.

Steven Bartlett insiste sur deux méthodes efficaces. La première consiste à implanter de nouvelles preuves positives plutôt que d’attaquer celles déjà ancrées. La seconde repose sur l’auto-analyse détaillée, qui réduit la certitude d’une conviction en exposant ses failles. Ces approches s’appliquent aussi aux croyances limitantes sur soi.

Son propre parcours illustre ce processus. Il a vaincu son trac sur scène en accumulant des expériences réussies, générant des preuves nouvelles et solides. Selon lui, sortir de sa zone de confort et agir reste la seule voie durable pour transformer ses croyances.

Zones de confiance, de croissance et de panique

Loi 5 : Vous devez vous adapter à des comportements étranges

Steven Bartlett décrit l’erreur fatale de nombreux dirigeants : ignorer le changement. Le patron d’une grande chaîne musicale croyait que l’amour des CD garantissait son avenir. Apple lança iTunes, et son empire s’effondra.

Il rappelle d’autres erreurs célèbres : mépris de l’automobile, du smartphone ou d’Internet. Ces exemples illustrent le danger de « leaning out », posture défensive qui refuse d’écouter et d’apprendre. Ce réflexe découle de la dissonance cognitive, qui pousse chacun à rejeter ce qui contredit son identité ou ses certitudes.

L’auteur a vécu ce rejet lorsqu’il proposait le marketing sur les réseaux sociaux. Moqué par les marques, il persista, bâtit une entreprise florissante et vit ses détracteurs sombrer. Pour lui, la critique d’une innovation est souvent le signe de son potentiel.

Il fonde ensuite thirdweb dans la blockchain, convaincu que l’hostilité cache une révolution technologique. Selon lui, les idées dérangeantes doivent attirer plutôt que repousser. Ne pas comprendre est une invitation à creuser, pas à fuir.

Pour devenir un « lean-in person », il faut accepter la nuance, supporter l’inconfort et oser questionner ses propres croyances. Rejeter l’inconnu condamne à l’obsolescence. Embrasser l’étrangeté, au contraire, ouvre la voie à l’avenir.

Loi 6 : Ne racontez pas, demandez !

Steven Bartlett illustre le pouvoir d’une simple question avec l’exemple de Ronald Reagan en 1980. Plutôt que d’attaquer Jimmy Carter avec des faits, Reagan demanda aux Américains : « Êtes-vous mieux aujourd’hui qu’il y a quatre ans ? ». Cette question changea l’élection et fit de lui le 40ᵉ président des États-Unis.

Les chercheurs confirment cet effet : poser une question déclenche une réponse active, là où une affirmation passe inaperçue. Dire « Je vais manger des légumes » motive moins que demander « Vais-je manger des légumes aujourd’hui ? ». Cette technique influence les comportements jusqu’à six mois après.

L’effet est plus fort avec des questions fermées, répondant par oui ou non, et alignées sur l’identité de la personne. Formuler avec « will » (futur proche : "vais-je") renforce encore l’engagement, car cela implique action et responsabilité. Pour l’auteur, transformer des déclarations en questions est un outil simple et puissant pour provoquer le changement.

"Ce qui est formidable avec les questions fermées, c'est qu'elles ne vous laissent aucune marge de manœuvre pour vous mentir à vous-même. Elles vous obligent à vous engager dans un sens ou dans l'autre." (Journal d'un CEO, Loi 6)

Loi 7 : Ne sacrifiez jamais votre histoire personnelle

Steven Bartlett montre que chacun construit une self-story, une histoire intime qui définit ses croyances et ses comportements. Le boxeur Chris Eubank Jr illustre ce concept avec un combat brutal à Cuba. Refusant d’abandonner malgré la douleur, il forge une conviction durable : rien ne peut le faire renoncer.

Les recherches d’Angela Duckworth à West Point confirment ce rôle central de la persévérance. La réussite ne dépend pas tant de la force ou de l’intelligence que de la ténacité mentale. Ce « grit » prédit mieux que tout la capacité à surmonter les épreuves et atteindre les objectifs.

Mais l'histoire personnelle se nourrit aussi de l’environnement. Les stéréotypes négatifs, liés à l’origine ou au genre, peuvent affaiblir les performances. L’auteur raconte comment une remarque d’enfance l’a convaincu, à tort, qu’il ne pouvait pas nager. Il faudra des années pour briser cette croyance.

Les expériences scientifiques montrent qu’un simple rappel de race ou de genre suffit à réduire les résultats d’un test. Pourtant, adopter une nouvelle identité, même fictive, peut désarmer ces menaces et rétablir la performance. Changer de perspective permet de réécrire son récit intérieur.

Pour renforcer cette self-story, l’auteur insiste sur l’importance des preuves directes. Chaque petite victoire, comme finir une répétition difficile ou affronter une peur, écrit une nouvelle ligne dans l’histoire qu’on se raconte. Ces choix répétés bâtissent une identité résiliente.

Selon Steven Bartlett, il ne suffit pas d’espérer une meilleure version de soi. Il faut agir, prouver et accumuler les expériences positives. C’est ce processus qui transforme la perception de soi et offre la force nécessaire pour affronter les plus grands défis.

L'amélioration de sa confiance et de son histoire personnelle

Loi 8 : Ne combattez jamais une mauvaise habitude

Steve Bartlett montre que les mauvaises habitudes ne disparaissent pas en les combattant. Son père, fumeur depuis quarante ans, arrête sans effort après avoir remplacé ses cigarettes par des sucettes. Le secret n’était pas la volonté, mais la substitution d’un nouveau système de récompense dans la boucle de l’habitude.

La science confirme que réprimer une envie renforce le risque de rebond. Plus on essaie de ne pas penser à une action, plus on y pense. L’auteur compare cela à la conduite : fixer les voitures garées, c’est se diriger vers elles. Pour changer, il faut donc se concentrer sur le nouveau comportement souhaité.

Le sommeil joue aussi un rôle crucial. Fatigue et stress affaiblissent la résistance et favorisent les pulsions. Un esprit reposé rend les nouvelles habitudes plus durables. Les recherches montrent également que la volonté s’épuise comme un muscle : multiplier les résolutions mène à l’échec.

Pour lui, la règle est claire : ne jamais combattre une habitude, mais la remplacer. Choisir un seul objectif à la fois, trouver des récompenses positives et préserver son énergie. Ces petits changements, répétés, façonnent durablement l’avenir.

Loi 9 : Donnez toujours la priorité à votre première fondation

Steve Bartlett partage une leçon essentielle à travers une métaphore de Warren Buffett. Comme une voiture unique pour la vie, notre corps est le seul que nous possédons. Si nous ne l’entretenons pas, tout s’effondre avec lui.

La pandémie de Covid-19 bouleverse ses priorités. Face à la mort, il comprend que sa santé est le socle de toutes ses autres réussites. Travail, relations ou possessions reposent sur cette base fragile. Sans elle, tout s’écroule.

Depuis, l’auteur change radicalement son mode de vie. Il réduit sucre et aliments transformés, s’entraîne six jours par semaine et hydrate davantage. Résultat : énergie, confiance et équilibre renforcent son quotidien. Sa conviction est claire : la santé doit toujours être la première fondation.

Pilier 2 : L'histoire

Loi 10 : L'absurdité inutile vous définira davantage que les aspects pratiques utiles

Steven Bartlett raconte comment un toboggan bleu géant, installé dans son premier bureau, devint son outil marketing le plus puissant. Peu utilisé par ses employés, il attira pourtant journalistes et caméras du monde entier, transformant une dépense immature en un coup de génie médiatique. L’absurde communiquait mieux que n’importe quelle campagne.

Il observe que cette logique fonctionne partout. Un ami lui vante une salle de sport grâce à son mur d’escalade de 30 mètres, jamais utilisé. Tesla applique la même stratégie avec ses modes de conduite « Ludicrous » ou son « Bioweapon Defense Mode ». Ces détails absurdes génèrent plus de conversations que les caractéristiques pratiques.

BrewDog a fait pareil avec des frigos à bière dans ses douches d’hôtel. Personne ne s’en sert, mais tout le monde en parle. Pour Steve Bartlett, l’absurde inutile définit une marque bien plus que l’utile rationnel. Il exige courage et prise de risque, mais il attire l’attention, raconte une identité et fait vendre.

Loi 11 : Évitez à tout prix de faire tapisserie

Steven Bartlett explique que capter l’attention est vital pour raconter, vendre ou convaincre. Le cerveau filtre automatiquement ce qu’il juge banal, un phénomène appelé habituation. Nous cessons de percevoir une odeur, un mot répété ou une image trop vue, car l’esprit se concentre sur la nouveauté utile à sa survie.

Cette saturation, aussi appelée satiété sémantique (semantic satiation), vide les mots de leur sens quand ils sont trop répétés. C’est pourquoi certains termes marketing, comme « Black Friday » ou « révolutionnaire », perdent leur impact après surexploitation. Pour éviter l’effet « papier peint », il faut surprendre, émouvoir ou créer de la peur, car ces stimuli résistent mieux à l’habituation.

Steven Bartlett illustre ce principe avec son podcast. La formule « like and subscribe » n’avait aucun effet, trop entendue. En la remplaçant par une statistique précise et intrigante, il a brisé le filtre d’habituation. Sa règle est claire : fuir le banal et formuler des messages capables de réveiller un cerveau qui s’endort.

L'effet papier peint (relation signification/exposition)

Loi 12 : Vous devez énerver les gens

Steven Bartlett montre que vouloir plaire à tout le monde mène à l’indifférence, le pire ennemi d’une marque. Des auteurs comme Mark Manson ont prouvé qu’un titre provocateur capte l’attention et suscite des réactions fortes. Même si certains lecteurs rejettent ce style, d’autres y adhèrent passionnément, et ce contraste génère du succès.

Il cite Jane Wurwand, fondatrice de Dermalogica, qui affirme qu’un produit plaît à tous, mais qu’une marque doit diviser. Accepter d’irriter 80 % pour séduire 20 % crée un attachement bien plus puissant que la neutralité. Pour elle, la médiocrité résulte d’une volonté d’être universellement acceptable.

Steven Bartlett prévient cependant que toute stratégie émotionnelle s’use avec le temps. Les jurons en couverture ont fini par perdre leur effet à force d’être copiés. Mais le principe reste valable : mieux vaut provoquer amour ou haine que devenir un fond de décor. Choquer vaut mieux qu’ennuyer.

Loi 13 : Commencez par viser haut sur le plan psychologique

Steven Bartlett révèle que de petites touches superficielles peuvent créer une immense valeur perçue. Son coiffeur, par exemple, utilisait toujours un faux « dernier coup de ciseaux » pour donner l’illusion d’un travail plus minutieux. Ce geste, insignifiant en pratique, renforçait pourtant sa réputation de perfectionniste.

Il montre que des marques comme Uber, Domino’s ou McDonald’s bâtissent leur succès sur ces « moonshots psychologiques ». Atténuer l’incertitude, occuper l’attente, donner une impression de contrôle ou souligner la proximité d’un objectif change totalement l’expérience client. La perception prime sur la réalité.

Selon Steven Bartlett, investir dans la psychologie coûte moins cher et rapporte plus que transformer un produit. Des détails comme un bouton d’ascenseur placebo, un pic de service agréable ou un écran interactif façonnent notre vérité. Le secret est clair : modeler l’histoire perçue plutôt que la réalité brute.

"Les « moonshots » psychologiques permettent aux marques de créer une valeur perçue considérable à partir de changements minimes, souvent gratuits et superficiels. Ils constituent le premier recours des entrepreneurs, des spécialistes du marketing et des créatifs qui cherchent à créer – ou plutôt à donner l'illusion de créer – de la valeur." (Journal d'un CEO, Loi 13)

Loi 14 : La friction peut créer de la valeur

Steven Bartlett montre que parfois, ajouter de la friction augmente la valeur perçue d’un produit. Red Bull, par exemple, renforce son image énergisante en ayant volontairement un goût amer, proche du médicament. Ce désagrément crédibilise son efficacité auprès des consommateurs.

Il cite aussi Betty Crocker : en retirant l’œuf de ses préparations pour gâteaux, la marque a obligé les clientes à en ajouter un. Cette étape supplémentaire a transformé un produit trop simple en expérience valorisante, boostant les ventes. De même, des restaurants augmentent la satisfaction en laissant les clients cuire eux-mêmes leur steak sur une pierre chaude.

Pour Steven Bartlett, même les attentes en ligne sont manipulées. Les comparateurs ralentissent volontairement leurs recherches pour donner l’impression d’un travail plus complet. La leçon est claire : la valeur n’est pas une réalité objective, mais une construction psychologique nourrie par nos attentes et par l’effort perçu.

"La "valeur" n'existe pas. C'est une perception que nous atteignons grâce aux attentes que nous satisfaisons." (Journal d'un CEO, Loi 14)

Loi 15 : Le cadre compte plus que l'image

Steven Bartlett explique que la valeur perçue d’un produit dépend surtout de son cadre de présentation. Il raconte avoir perdu son attachement à une marque de vêtements en découvrant une vidéo de sa production industrielle. L’image de pièces uniques et artisanales s’est brisée face à la réalité de la fabrication de masse.

Il rappelle des exemples célèbres comme le Pepsi Challenge, où l’emballage changeait la préférence gustative. Apple illustre aussi cette puissance du cadre : ses magasins ressemblent à des galeries d’art, avec peu de produits exposés, renforçant l’impression de rareté et de prestige. Même l’espace vide autour des objets ajoute à leur valeur perçue.

D’autres marques jouent avec le framing. WHOOP refuse d’afficher l’heure pour rester un outil d’élite santé, et Tesla parle de « cuir vegan » plutôt que de plastique. Pour Steven Bartlett, tout dépend du contexte : changer le cadre peut transformer la signification d’un produit. Un bon cadrage, plus que la réalité, détermine l’histoire que les clients choisissent de croire.

Loi 16 : Utilisez l'effet "Boucle d'or" à votre avantage

Steven Bartlett montre comment l’effet Goldilocks (boucle d'or) influence nos choix sans que nous en ayons conscience. Son agent immobilier lui avait proposé trois biens : un trop petit, un hors de prix et un troisième équilibré. Sans surprise, il choisit celui du milieu, perçu comme le compromis idéal.

Cet effet repose sur le biais d’ancrage. Placé entre deux extrêmes, le choix médian paraît à la fois sûr, raisonnable et de bonne qualité. Panasonic l’a utilisé avec succès dans les années 1990, en boostant les ventes de son micro-ondes moyen de gamme.

Pour Steven Bartlett, cette stratégie prouve que les décisions humaines ne sont pas rationnelles, mais façonnées par le contexte et les repères. Offrir plusieurs options – économique, standard et premium – oriente naturellement les clients vers l’offre cible. En marketing, la perception compte autant, sinon plus, que la réalité.

Loi 17 : Laissez-les essayer et ils achèteront

Steven Bartlett montre la force de l’effet de dotation : on valorise davantage ce que l’on croit posséder. Il raconte comment un cadeau échangé entre ses neveux est devenu précieux simplement parce qu’ils l’avaient tenu dans leurs mains.

Les marques exploitent ce biais. Apple laisse les clients manipuler librement ses produits, renforçant attachement et désir d’achat. Build-A-Bear mise sur la participation active des enfants, qui construisent et s’approprient leur peluche avant même de l’acheter.

Des études confirment ce phénomène. Une étude menée à Duke University pendant le tournoi March Madness montre que les étudiants tirés au sort pour obtenir un billet de basketball refusaient de le vendre à moins de 2 400 dollars. Ceux qui n’avaient pas gagné étaient prêts à payer seulement 175 dollars. Les gagnants valorisaient donc leur billet près de 14 fois plus que les perdants, illustrant la puissance de l’effet de dotation !

Pour Steven Bartlett, laisser essayer un produit, c’est déjà commencer à le vendre : l’ordinaire devient extraordinaire par simple sentiment d’appropriation.

La puissance de l'effet de dotation (Journal d'un CEO, Loi 17)

Loi 18 : Luttez pour les cinq premières secondes

Steven Bartlett explique que la réussite en marketing, ventes et storytelling se joue souvent dans les cinq premières secondes. Il illustre cela avec ses conférences, où il commençait par une phrase percutante tirée d’une dispute avec sa mère, plutôt que par une présentation classique. Ces instants initiaux décident si l’audience s’accroche ou décroche.

Il compare cette règle aux vidéos de MrBeast, qui débute chacune par un « hook » clair et spectaculaire, accrochant immédiatement l’attention. À l’inverse, la majorité des marques perdent leur public en ouvrant par des logos, génériques ou longues explications. Dans un exemple concret, une campagne vidéo a triplé ses vues après avoir remplacé une introduction fade par cinq secondes captivantes.

Les recherches sur l’effondrement de l’attention montrent que l’humain moyen est moins concentré qu’un poisson rouge, et que 40 à 60 % des spectateurs quittent une vidéo dans les premières secondes. Le message est clair : capter l’attention rapidement est vital.

Vous devez gagner le droit à l’attention en ouvrant par un élément irrésistible : une promesse, un choc ou une émotion. Le reste de votre message en dépend.

Pilier 3 : La philosophie

Loi 19 : Vous devez suer sur les petits détails

Steven Bartlett affirme que la réussite repose sur une obsession des petits détails. Son podcast The Diary Of A CEO est devenu numéro un au Royaume-Uni et aux États-Unis non parce qu’il avait les meilleurs invités ou la meilleure réalisation, mais parce que son équipe a travaillé des milliers de micro-améliorations invisibles aux yeux du public. Chaque élément, du choix de la musique d’accueil à l’angle des titres YouTube, a été optimisé pour créer une expérience supérieure.

Cette philosophie rejoint le principe japonais du kaizen, qui prône l’amélioration continue par de petites actions quotidiennes. Toyota, grâce à ce système, a surpassé General Motors en productivité et en qualité, simplement en encourageant ses employés à proposer des ajustements mineurs mais constants. L’exemple de l’usine NUMMI montre comment une culture de suggestions et d’implication peut transformer un site autrefois chaotique en modèle mondial.

L’auteur insiste sur la puissance du 1 % d’amélioration quotidienne : sur une année, cette discipline multiplie la valeur par 37, tandis que négliger 1 % chaque jour mène à la ruine. Pour Bartlett, la vraie innovation n’est pas un miracle soudain, mais le fruit d’une accumulation patiente de progrès modestes.

"Si vous ne vous souciez pas des petits détails, vous produirez un travail médiocre, car un travail de qualité est le résultat de centaines de petits détails. Les personnes les plus prospères au monde accordent toutes une grande importance aux petits détails." (Journal d'un CEO, Loi 19)

Loi 20 : Un petit manque maintenant sera un gros manque plus tard

Steven Bartlett montre que la réussite dépend d’une discipline simple : de petits ajustements réguliers. Il prend l’exemple de Tiger Woods, qui a reconstruit son swing malgré 18 mois sans victoire. Sa patience et son approche kaizen l’ont mené à devenir le golfeur le plus titré de l’histoire.

L’auteur rapproche cette logique de l’évolution de Darwin et de la règle aéronautique du 1 in 60 : un petit écart entraîne un grand décalage avec le temps. En relations comme en affaires, les manques de correction créent de graves dérives.

Pour éviter ces écarts, Steven Bartlett a instauré des check-ins hebdomadaires avec sa partenaire, ses amis, ses directeurs et lui-même. Ces rendez-vous corrigent de minuscules tensions avant qu’elles ne deviennent des fractures, gardant chaque relation et projet sur la bonne trajectoire.

Loi 21 : Vous devez surpasser la concurrence

Steven Bartlett affirme que le succès dépend du taux d’échec. Plus une équipe échoue, plus elle apprend vite et progresse. Il montre que chaque erreur apporte un retour précieux, transformant l’échec en avantage compétitif.

Il cite IBM et son président Thomas J. Watson, qui voyait chaque erreur comme un investissement. Booking.com illustre cette logique en multipliant les tests quotidiens pour comprendre ses clients. Amazon adopte la même philosophie : ses échecs abondants financent ses plus grandes réussites, comme AWS ou Prime.

L’auteur raconte aussi l’histoire d’un père et d’un fils à la tête de deux marques. Le fils, en osant agir vite, multiplie les expériences et dépasse largement son père. Steven Bartlett identifie cinq leviers clés :

Supprimer la bureaucratie ;

Réaligner les incitations ;

Promouvoir les bons profils ;

Mesurer les expérimentations ;

Partager chaque échec.

Il conclut que la véritable perte vient de l’indécision et du temps gaspillé. Les gagnants ne craignent pas l’échec : ils l’accélèrent, le mesurent et en font leur moteur.

Loi 22 : Vous devez devenir un penseur de "plan A"

Steven Bartlett raconte l’histoire de Nando Parrado, rescapé du crash des Andes en 1972. Sans plan B, Parrado choisit d’avancer malgré tout, refusant de revenir vers l’insoutenable. Cette détermination sauve quatorze vies et inspire l’entrepreneur des années plus tard.

Dans sa propre vie, Steven Bartlett applique la même logique. Sans alternative, il concentre toute son énergie sur son Plan A, transformant la contrainte en force. Il affirme que l’absence de plan B nourrit la persévérance et empêche la tentation d’abandonner.

Des chercheurs confirment ce constat. Les étudiants sans plan de secours réussissent mieux, car leur motivation reste intacte. Un plan B réduit l’effort, atténue la peur de l’échec et affaiblit la performance. Steven Bartlett conclut que le risque calculé stimule la réussite, alors qu’un filet de sécurité peut freiner l’ambition.

Loi 23 : Ne faites pas l'autruche

Steven Bartlett décrit son plus grand échec professionnel : agir comme un autruche au lieu d’un lion. Face aux problèmes, il a trop souvent choisi l’évitement. Cette attitude, appelée ostrich effect (effet autruche), consiste à fuir l’inconfort et nier les vérités dérangeantes, en affaires comme en amour.

Les exemples sont multiples : passagers du Titanic refusant d’affronter la réalité, investisseurs évitant leurs comptes lors de baisses, dirigeants incapables d’admettre les signaux d’alerte. Steven Bartlett reconnaît que ses pires erreurs ne viennent pas de mauvaises décisions, mais des conversations cruciales qu’il n’a pas osé mener.

Il propose une méthode en quatre étapes pour ne plus céder à ce réflexe : pauser et reconnaître qu’un problème existe, s’inspecter soi-même pour identifier ses émotions, exprimer sa vérité avec responsabilité, puis chercher la vérité chez l’autre en écoutant sincèrement. Pour lui, affronter l’inconfort est une condition indispensable au succès durable.

Éviter l'effet autruche (Journal d'un CEO, Loi 23)

Loi 24 : Vous devez faire de la pression votre privilège

Steven Bartlett explique que la pression n’est pas un fardeau mais un privilège. Il cite Billie Jean King, qui voyait chaque attente comme une preuve de sa valeur. La pression révèle nos limites et nourrit notre progression, contrairement à une vie trop confortable qui finit par nous affaiblir.

L'auteur cite des études qui confirment que ce n’est pas le stress qui tue, mais la croyance qu’il est nocif. Ceux qui le perçoivent comme un allié vivent plus longtemps et performent mieux. Repenser son rapport à la pression transforme la peur en énergie, comme l’ont montré des expériences à Harvard.

Steven Bartlett adopte une méthode en quatre étapes :

Voir la pression ;

Partager son expérience ;

Reformuler son sens ;

L’utiliser comme carburant.

Les Navy SEALs s’entraînent ainsi dans des conditions extrêmes pour renforcer leur résilience. L’auteur conclut que fuir l’inconfort est une crise moderne, et que seule l’acceptation du difficile ouvre la voie à une vie pleine.

Loi 25 : La puissance de la manifestation négative

Steven Bartlett montre que la manifestation négative est un outil puissant pour éviter l’échec. Il raconte l’échec de son premier projet, Wallpark, dû à une absence de réflexion critique. La question qu’il aurait dû poser était simple : « Pourquoi cette idée va-t-elle échouer ? »

Il explique que cinq biais psychologiques nous empêchent d’anticiper les risques :

Optimisme ;

Confirmation ;

Auto-valorisation ;

Erreur de coût irrécupérable (Sunk-cost fallacy) ;

Pensée de groupe (Groupthink).

Ces biais favorisent l’aveuglement collectif et nourrissent l’illusion de réussite inévitable.

Steven Bartlett illustre ensuite l’efficacité de cette méthode avec son réseau de podcasts. En posant la question clé à son équipe, ils ont identifié les risques majeurs et choisi de ne pas lancer le projet. Ce choix permit de concentrer leurs ressources et d’obtenir une croissance spectaculaire.

Il recommande la méthode du pré-mortem, proposée par Gary Klein : imaginer qu’un projet a déjà échoué et en analyser les causes. Cette pratique améliore de 30 % la précision des prévisions et permet d’anticiper les échecs.

Enfin, Steven Bartlett insiste sur l’application de cette approche dans la vie personnelle : choix de carrière, de partenaire ou d’investissements. Visualiser l’échec pousse à identifier les signaux faibles et à bâtir des stratégies solides. Pour lui, accepter l’inconfort des conversations difficiles est la clé d’un avenir plus sûr et plus réussi.

Loi 26 : Vos compétences ne valent rien, mais votre contexte est précieux

Steven Bartlett explique que la valeur des compétences ne dépend pas de la compétence elle-même mais du contexte dans lequel elle est appliquée. Après avoir quitté son agence de marketing, il refuse d’y retourner jusqu’à ce qu’une entreprise de biotechnologie lui propose de diriger sa stratégie. Ses compétences, banales dans la mode ou la tech, deviennent précieuses et lui valent une offre de 6 à 8 millions de dollars.

L'entrepreneur en tire quatre leçons :

Une compétence n’a pas de valeur intrinsèque ;

Sa valeur dépend du secteur ;

De sa rareté perçue ;

De l’impact attendu.

L’exemple du violoniste Joshua Bell, ignoré dans le métro mais adulé en concert, illustre ce principe. Le même talent peut valoir presque rien ou des fortunes selon l’endroit où il s’exprime.

Steven Bartlett raconte aussi l’histoire d’un ami graphiste. En passant de flyers à Manchester à des projets pour le luxe et la blockchain à Dubaï, il multiplie ses revenus par trente. Pour l’auteur, repositionner ses compétences dans le bon contexte transforme leur valeur. Le contexte est le véritable multiplicateur de revenu et d’opportunités.

"Pour être considéré comme le meilleur dans votre secteur, vous n'avez pas besoin d'être le meilleur dans un domaine particulier. Vous devez exceller dans diverses compétences complémentaires et rares que votre secteur apprécie et que vos concurrents ne possèdent pas." (Journal d'un CEO, Loi 26)

Loi 27 : L'équation de la discipline – Mort, temps et discipline !

Steven Bartlett rappelle qu’il lui reste 17 228 jours à vivre s’il atteint l’espérance de vie moyenne. Cette prise de conscience du temps limité agit comme une alarme. Elle aide à concentrer son énergie sur ce qui compte vraiment et à rejeter les distractions. Penser à la mort peut sembler angoissant, mais cela rend plus reconnaissant et plus motivé.

Il illustre sa réflexion avec une métaphore : la vie est une partie de roulette, où chaque heure est un jeton dépensé pour toujours. Ces jetons peuvent être placés sur des activités vides comme les réseaux sociaux, ou sur des projets enrichissants comme la famille, la santé ou la créativité. Les choix d’allocation déterminent la qualité de l’existence.

L’auteur insiste : aucun outil de productivité ne remplace la discipline. Les techniques comme le pomodoro ou le time blocking échouent sans elle. La discipline repose sur une équation simple : valeur du but + plaisir de la poursuite – coût de la poursuite. Si la valeur et le plaisir surpassent les coûts, la discipline se maintient naturellement, même sans motivation constante.

Il donne des exemples concrets. En musique, son désir de devenir DJ et le plaisir de pratiquer l’ont poussé à répéter chaque semaine. Pour réduire le coût, il a laissé son matériel installé, supprimant toute friction. En sport, il a créé une compétition amicale avec ses amis pour transformer l’effort en jeu. Ces systèmes renforcent l’engagement et nourrissent la constance.

La clé est d’augmenter la valeur perçue du but, d’ajouter du plaisir au processus et de supprimer les obstacles. Discipline ne rime pas avec souffrance, mais avec choix conscients et alignement. Pour réussir, il faut placer chaque jeton avec intention, se rappeler la finitude de la vie et investir son temps dans ce qui construit un avenir significatif.

Pilier 4 : L'équipe

Loi 28 : Ne demandez pas comment, mais qui

Steven Bartlett raconte son échange avec Richard Branson, qui admet ne pas savoir distinguer bénéfice net et brut à 50 ans. Dyslexique, il s’est appuyé sur sa force : les relations humaines. Pour lui, l’essentiel est de bâtir la meilleure entreprise, en déléguant le reste.

Ce témoignage rassure l’entrepreneur. Lui aussi s’est longtemps senti illégitime, n’excellant ni en maths ni en gestion. Pourtant, son succès repose sur un principe simple : se concentrer sur ce qu’il aime et déléguer ce qu’il déteste. Jimmy Carr confirme : l’école valorise la médiocrité, mais la vie récompense ceux qui exploitent leurs talents naturels.

L'entrepreneur conclut que la clé d’une grande entreprise n’est pas le “comment”, mais le “qui”. Le rôle d’un fondateur est de recruter les meilleurs et de créer une culture où 1 + 1 = 3. Comme le disait en substance Steve Jobs, il faut embaucher des personnes brillantes non pour leur dicter quoi faire, mais pour qu’elles montrent le chemin.

Loi 29 : Créez une mentalité de secte

Steven Bartlett explique que les meilleures entreprises naissent souvent avec une énergie quasi sectaire, faite de dévouement total et d’obsession. Des fondateurs comme ceux de Facebook ou Apple décrivent leurs débuts comme un mouvement où chacun sacrifie confort et équilibre pour une mission commune. Cette phase initiale crée une force culturelle unique qui façonne durablement l’organisation.

Il distingue quatre étapes :

La phase “culte”, marquée par l’engagement extrême ;

La croissance, où le chaos interne coexiste avec l’excitation ;

La phase d’entreprise, plus stable et structurée ;

Puis le déclin, conséquence de la complaisance.

Le choix des dix premiers employés est décisif : chacun incarne 10 % de la culture, et leur alignement détermine l’avenir. Steve Jobs rappelait qu’un groupe d’“A players” attire et entretient l’excellence.

Une culture forte repose sur quatre ingrédients :

Un sentiment d’appartenance ;

Une mission partagée ;

Un leader inspirant ;

Une mentalité “nous contre eux”.

Pour la consolider, Bartlett propose dix principes, allant de la définition des valeurs à la création de mythes et symboles, en passant par la célébration des succès et la promotion de l’authenticité.

Mais il souligne aussi les dangers d’un excès de ferveur : une culture trop sectaire est intenable. À long terme, la réussite exige un environnement durable, basé sur l’autonomie, le progrès, la sécurité psychologique et des relations sincères. C’est cette alchimie entre passion initiale et engagement équilibré qui permet de bâtir des organisations solides et durables.

Loi 30 : Les trois "barres" pour construire des équipes formidables

Steven Bartlett montre que la clé d’un leadership durable réside dans la culture d’une organisation, bien plus que dans les talents individuels. Sir Alex Ferguson, figure emblématique de Manchester United, en a fait la démonstration : il plaçait la cohésion du club au-dessus des stars, n’hésitant pas à écarter Beckham, Keane ou van Nistelrooy lorsque leur comportement menaçait l’esprit collectif. Sa devise – « personne n’est plus grand que le club » – illustre cette conviction.

Cette logique vaut aussi pour l’entreprise. Richard Branson et Barbara Corcoran insistent sur la nécessité d’écarter les personnes toxiques, capables de contaminer une équipe entière. Des recherches menées par la Harvard Business Review confirment cet effet viral : un employé à la conduite douteuse augmente de 37 % la probabilité que ses collègues l’imitent. Le sociologue Will Felps a démontré qu’un seul « bad apple » pouvait suffire à détruire la dynamique d’un groupe, générant retrait, anxiété et perte de confiance.

Pour agir, S. Bartlett propose la méthode des trois barres. À chaque membre de l’équipe, il faut poser la question : si tous partageaient sa culture, son attitude et son niveau de talent, la barre serait-elle relevée, maintenue ou abaissée ? Ce filtre simple permet de savoir qui promouvoir, qui garder et qui écarter. L’objectif n’est pas l’uniformité des idées ou des expériences, mais l’alignement sur les valeurs et les standards qui définissent la culture.

Ainsi, qu’il s’agisse de football, de start-up ou de grandes entreprises, le principe demeure : une équipe solide repose d’abord sur une culture forte. Les leaders qui osent protéger cette culture, même au prix de décisions difficiles, bâtissent des organisations capables de durer et de prospérer.

Loi 31 : Tirer parti de la puissance du progrès

Steven Bartlett montre que la progression est la plus puissante source de motivation dans une équipe. Il cite David Brailsford, qui a transformé le cyclisme britannique grâce à sa théorie des « gains marginaux » : accumuler de petites améliorations quotidiennes pour créer un succès immense. Ces micro-progrès donnent l’impression d’avancer, entretiennent l’énergie collective et déclenchent un cercle vertueux d’idées et d’engagement.

La recherche confirme cette intuition. Teresa Amabile prouve que le sentiment d’avancer motive davantage que la reconnaissance seule. Même de petits pas renforcent la confiance et réduisent la procrastination. Karl Weick explique que les défis trop grands paralysent, alors que des victoires modestes encouragent l’action, attirent des alliés et dissipent la résistance.

Pour stimuler ce moteur, Bartlett partage cinq leviers : donner du sens au travail, fixer des objectifs clairs et atteignables, offrir de l’autonomie, supprimer les obstacles et célébrer les progrès visibles. Ces pratiques transforment la perception d’un projet, créent une atmosphère d’élan positif et soudent les équipes autour d’une vision commune.

En résumé, les grands leaders savent que l’essentiel n’est pas la perfection mais la progression continue. Ce sentiment de mouvement donne aux équipes l’envie de persévérer et d’innover, jusqu’à atteindre leurs ambitions les plus élevées.

Loi 32 : Vous devez être un leader incohérent

Steven Bartlett montre que le secret d’un grand leader n’est pas la cohérence, mais l’adaptation. L’exemple de Sir Alex Ferguson illustre ce principe : lors d’un match en 2007, il critiqua Patrice Evra, pourtant le meilleur joueur sur le terrain, pour envoyer un message à toute l’équipe. Sa sévérité ciblée visait à maintenir la concentration collective et à rappeler qu’aucun joueur n’était au-dessus de la culture du club.

Ses anciens joueurs soulignent sa capacité unique à traiter chacun différemment. Gary Neville explique qu’il savait puiser dans l’histoire personnelle de chaque joueur pour le motiver. Rio Ferdinand ajoute qu’il connaissait tout de leurs familles et savait jouer des émotions, parfois feignant la colère pour détourner la pression. Beckham, Giggs, Rooney ou Ronaldo rappellent qu’il ajustait son style, entre rigueur et bienveillance, selon la personnalité et le besoin du moment.

Contrairement aux manuels de management qui prônent uniformité et prévisibilité, Ferguson prouve que la vraie force réside dans l’inconsistance maîtrisée. Les individus sont émotifs, irrationnels et motivés par des leviers différents. Le rôle du leader est donc de devenir la pièce de puzzle complémentaire à chaque membre de son équipe. Être un grand manager, c’est savoir varier ton, attitude et intensité pour révéler le meilleur de chacun, même au prix de l’incohérence apparente.

"Les grands leaders sont fluides, flexibles et pleins de fluctuations. Ils prennent la forme qu'il faut pour vous motiver." (Journal d'un CEO, Loi 32)

Loi 33 : L'apprentissage ne finit jamais

Sans contenu, ce chapitre renvoie directement au site du livre.

Conclusion sur "Journal d'un CEO : les 33 lois du succès en entreprise et dans la vie" de Steven Bartlett :

Ce qu'il faut retenir de "Journal d'un CEO : les 33 lois du succès en entreprise et dans la vie" de Steven Bartlett :

Dans Le journal d'un CEO, Steven Bartlett propose bien plus qu’un simple manuel de management ou d’entrepreneuriat. À travers ses lois, il met en lumière les mécanismes psychologiques et émotionnels qui déterminent nos décisions, nos relations et nos succès. Loin des conseils formatés, l’auteur illustre chaque idée par des récits personnels, des exemples concrets et des témoignages de figures emblématiques comme Sir Alex Ferguson ou Richard Branson. On comprend ainsi que la réussite n’est pas qu’une affaire de compétences techniques, mais de culture, de discipline, de gestion des émotions et de capacité à affronter l’inconfort.

Les thèmes centraux – l’effet autruche, le pouvoir de la pression, l’importance des petits progrès, la valeur du contexte ou encore l’art d’un leadership adaptable – s’adressent à celles et ceux qui cherchent à exceller dans leur carrière ou à bâtir des organisations durables. Chefs d’entreprise, managers, étudiants ou toute personne aspirant à mieux comprendre les dynamiques de performance et de motivation y trouveront des outils pratiques et des réflexions puissantes.

Ce livre ne promet pas de recettes miracles. Il invite à changer de regard : voir les difficultés comme des alliées, le temps comme une ressource limitée, et la discipline comme le socle de tout accomplissement. Accessible, inspirant et profondément humain, il rappelle que le succès repose moins sur la perfection que sur la capacité à progresser chaque jour et à mobiliser les autres autour d’une vision. Un ouvrage à lire absolument pour quiconque veut transformer son potentiel en réalité tangible.

Points forts :

Steven Bartlett utilise un ton direct, des anecdotes personnelles et des exemples concrets qui rendent la lecture captivante.

Chaque loi est illustrée par des situations vécues ou des témoignages de figures reconnues, ce qui donne crédibilité et force aux enseignements.

L’ouvrage insiste sur l’importance des émotions, de la culture d’équipe et de la discipline, au-delà des seules compétences techniques.

Des concepts comme l’effet autruche, le pré-mortem ou les petits progrès offrent des méthodes immédiatement applicables.

Points faibles : 

Certaines idées reviennent plusieurs fois sous des formes différentes, ce qui peut donner une impression de répétition pour le lecteur attentif.

Ma note :

★★★★★

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Thu, 30 Oct 2025 17:00:00 +0100 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13147/Le-journal-dun-CEO
Création d’entreprise : 3 livres pour vous aider à monter un business http://www.olivier-roland.fr/items/view/13134/Cration-dentreprise-3-livres-pour-vous-aider-monter-un-business

La création d'entreprise fascine et effraie à la fois. Entre l'envie de liberté et la peur de l'inconnu, nombreux sont ceux qui rêvent de créer leur propre business mais ne savent pas par où commencer.

Que vous souhaitiez devenir freelance, développer une petite entreprise avec une identité forte, ou monter un business avec des bases solides, la réussite ne s'improvise pas. Elle nécessite une préparation minutieuse, une stratégie claire et les bons outils pour éviter les pièges courants.

J'ai donc sélectionné trois livres qui abordent tous la création d'entreprise mais sous des angles complémentaires : le premier vous guide dans l'aventure du freelancing et de l'indépendance, le second vous apprend à construire une marque forte pour votre petite entreprise, tandis que le troisième vous donne une méthode rigoureuse pour évaluer la viabilité de tout projet entrepreneurial.

Ces ouvrages seront parfaits pour vous accompagner dans votre aventure entrepreneuriale en vous donnant les clés pratiques pour transformer votre idée en projet viable et rentable.

  1. "Freelance, l’aventure dont vous êtes le héros" d’Alexis Minchella

Par Alexis Minchella, 2021, 282 pages.

Résumé du livre "Freelance, l’aventure dont vous êtes le héros" d’Alexis Minchella

Avec ce livre, l'auteur, Alexis Minchella nous emmène dans l'univers passionnant du freelancing. Créateur du podcast Tribu Indé, il démystifie la création d'entreprise et nous accompagne dans cette aventure entrepreneuriale en partageant son expérience personnelle et celle de nombreux indépendants.

Le livre "Freelance, l’aventure dont vous êtes le héros" débute par une réflexion profonde sur les peurs et croyances limitantes qui freinent souvent ceux qui souhaitent se lancer. Alexis Minchella nous rappelle que créer son entreprise en tant que freelance nécessite avant tout de surmonter ces obstacles psychologiques.

Il nous guide ensuite dans l'identification de nos compétences rares et utiles, socle indispensable pour monter un business viable.

L'auteur développe ensuite une méthode structurée pour construire son offre. Il explique comment définir son positionnement entre spécialiste et généraliste, comment identifier ses clients cibles et comprendre leurs besoins profonds grâce à des techniques concrètes d'analyse du marché.

La partie consacrée aux stratégies de vente détaille des pratiques éprouvées pour trouver ses premiers clients. Alexis Minchella présente trois modèles complémentaires : le réseau, la prospection et la création de contenu. Il insiste particulièrement sur l'importance de devenir son propre média pour attirer naturellement les clients.

Enfin, le livre aborde les aspects cruciaux de la tarification et de la relation client. L'auteur démontre pourquoi facturer au temps passé constitue un piège et comment déterminer un prix juste basé sur la valeur apportée.

Il partage également ses méthodes pour créer des systèmes simples qui permettent de ne pas devenir esclave de ses clients.

Quatre concepts clés développés dans "Freelance, l’aventure dont vous êtes le héros"

La méthode des 90 jours pour une organisation optimale : Alexis Minchella propose un système de planification trimestrielle qui permet d'alterner entre les rôles de stratège et de technicien. Cette approche évite la dispersion et maintient le cap vers les objectifs à long terme.

L'importance du positionnement en T ou 3T : plutôt que de choisir entre généraliste et spécialiste, l'auteur recommande de développer des compétences transversales (barre horizontale) tout en approfondissant une ou plusieurs expertises métier (barres verticales).

La création de contenu comme levier de croissance : développer sa marque personnelle et créer du contenu de qualité permet d'attirer naturellement les clients et de se positionner comme expert dans son domaine.

La tarification basée sur la valeur : abandonner la facturation au temps pour se concentrer sur la valeur apportée au client permet d'augmenter significativement sa rentabilité et de récompenser l'efficacité.

L'équilibre vie professionnelle/personnelle : l'auteur rappelle que devenir freelance vise aussi à améliorer sa qualité de vie, et propose des méthodes concrètes pour maintenir cet équilibre.

Mon avis sur le livre "Freelance, l’aventure dont vous êtes le héros" d’Alexis Minchella

Je recommande vivement ce livre à toute personne qui souhaite se lancer dans le freelancing ou améliorer son activité d'indépendant.

Alexis Minchella partage une approche pragmatique et humaine de la création d'entreprise en solo, loin des discours marketing superficiels. Ses conseils sont directement applicables et s'appuient sur une expérience réelle du terrain, enrichie par les témoignages de nombreux freelances.

Les points forts et points faibles du livre "Freelance, l’aventure dont vous êtes le héros"

Points forts :    

La présentation progressive et complète du parcours freelance.

La documentation riche basée sur l'expérience de l'auteur et les échanges avec de nombreux freelances du podcast Tribu Indé.

Les schémas et illustrations facilitant la compréhension.

Les points d'étapes synthétiques en fin de chapitre.

Point faible :      

Quelques répétitions dans le développement des concepts.

Ma note : ★★★★★

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  1. "Small business | Créer sa marque et son identité" de Sophie-Charlotte Chapman et Sandrine Franchet 

Par Sophie-Charlotte Chapman et Sandrine Franchet, 2017, 141 pages.

Résumé du livre "Small business" de Sophie-Charlotte Chapman et Sandrine Franchet 

Sophie-Charlotte Chapman et Sandrine Franchet nous plongent dans le monde stratégique de la création de marque pour les petites entreprises. Leur ouvrage constitue un excellent guide pratique pour tous ceux qui souhaitent créer un business avec une identité forte et différenciante.

Les auteures commencent par clarifier la notion de marque, expliquant qu'elle va bien au-delà d'un simple logo. Elles nous font comprendre que créer sa marque, c'est avant tout définir son identité, ses valeurs et sa mission d'entreprise. Cette approche holistique transforme la marque en véritable asset stratégique pour quiconque souhaite monter son business.

Le livre développe ensuite une méthode structurée pour raconter son histoire. Les auteures insistent sur l'importance de mettre sa créativité et sa personnalité au centre de son projet entrepreneurial. Elles nous guident dans la définition de notre mission d'entreprise et la création d'un univers de marque cohérent qui résonne avec notre audience cible.

Une partie consacrée au naming partage une méthodologie en 5 étapes pour trouver le nom parfait. Sophie-Charlotte Chapman et Sandrine Franchet reviennent sur les erreurs courantes à éviter et expliquent comment utiliser le storytelling pour faire vivre sa marque au quotidien. Elles montrent comment transformer chaque interaction client en expérience de marque mémorable.

L'aspect technique n'est pas oublié avec un chapitre entier dédié à la création de l'identité visuelle. Les auteures expliquent comment travailler efficacement avec un graphiste et déclinent cette identité sur tous les supports : print, packaging, digital. Elles insistent sur l'importance de la cohérence visuelle pour renforcer la reconnaissance de marque.

Enfin, le livre aborde les aspects juridiques souvent négligés de la protection de marque. Les auteures détaillent les démarches auprès de l'INPI et expliquent comment réagir en cas de contrefaçon, donnant ainsi aux entrepreneurs des clés pour sécuriser leur investissement.

Quatre points clés développés dans "Small business | Créer sa marque et son identité"

L'importance de l'introspection avant la création : avant de penser forme et design, il faut définir sa mission, ses valeurs et son positionnement. Cette phase de réflexion détermine la cohérence et l'authenticité de la marque.

La marque comme expérience globale : une marque ne se limite pas au logo mais englobe tous les points de contact avec le client : packaging, site web, communication, service client. Chaque élément doit contribuer à l'expérience de marque.

Le storytelling comme différenciateur : raconter son histoire, ses inspirations et ses valeurs permet de créer une connexion émotionnelle avec les clients et de se démarquer dans un marché concurrentiel.

La cohérence visuelle sur tous les supports : développer une charte graphique et s'y tenir sur l'ensemble des supports (print, digital, packaging) renforce la mémorisation et la reconnaissance de la marque.

La protection juridique comme investissement : déposer sa marque auprès de l'INPI protège l'investissement réalisé et constitue un actif valorisable pour l'entreprise.

Mon avis sur le livre "Small business" de Sophie-Charlotte Chapman et Sandrine Franchet 

Je considère cet ouvrage comme une excellente introduction au branding pour les entrepreneurs débutants.

Les auteures proposent une approche authentique qui privilégie les valeurs et la personnalité de l'entrepreneur plutôt qu'une simple stratégie marketing.

Le livre se lit facilement et fournit tous les outils nécessaires pour créer une marque forte, même avec un budget limité.

Les points forts et points faibles du livre "Small business | Créer sa marque et son identité"

Points forts :    

Un guide concis mais complet couvrant tous les aspects de la création de marque.

Les nombreux témoignages et cas pratiques concrets qui illustrent parfaitement la théorie.

L'approche valorisant l'authenticité et les valeurs personnelles.

Le carnet d'adresses de prestataires spécialisés.

Point faible :      

Quelques redondances dans le développement

Certains sujets mériteraient d'être approfondis comme la première phase de création de la marque.

Ma note : ★★★★☆

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  1. “The New Business Road Test” (Comment créer son entreprise) de John W. Mullins

Titre original : "The New Business Road Test"

Par John W. Mullins, 2006 (deuxième édition), 290 pages.

Résumé du livre "The New Business Road Test" de John W. Mullins

John W. Mullins révolutionne l'approche traditionnelle de la création d'entreprise avec sa méthode du "tour d'essai" entrepreneurial. Professeur à London Business School, il propose une grille d'analyse en 7 étapes pour évaluer la viabilité d'un projet avant même de rédiger le business plan.

L'auteur part d'un constat alarmant : la majorité des entreprises échouent parce que les entrepreneurs ne testent pas suffisamment leur idée avant de se lancer. Sa méthode s'articule alors autour de trois éléments fondamentaux : le marché (analyse micro et macro), l'industrie (analyse micro et macro) et les personnes clés qui composent l'équipe entrepreneuriale.

L'analyse du marché au niveau micro constitue le premier pilier. John W. Mullins nous guide pour identifier si notre segment cible présente un réel potentiel d'achat et si notre offre apporte des bénéfices clairs et supérieurs à la concurrence. Il insiste sur l'importance de définir précisément qui sont nos clients et comment ils se comportent.

L'analyse macro du marché élève ensuite la réflexion pour évaluer la taille du marché et ses perspectives de croissance. L'auteur explique comment les tendances démographiques, technologiques et socio-culturelles influencent l'évolution des marchés sur le long terme.

L'étude de l'industrie s'appuie sur le modèle des cinq forces de Porter pour évaluer l'attractivité concurrentielle. John W. Mullins illustre brillamment ces concepts avec l'exemple du stand de limonade de François, rendant accessible cette analyse stratégique fondamentale.

Au niveau micro de l'industrie, l'auteur explore la durabilité de l'avantage concurrentiel. Il explique comment identifier les facteurs de succès critiques spécifiques à chaque secteur et évalue la capacité de l'équipe à performer sur ces éléments déterminants.

Enfin, John W. Mullins analyse les motivations entrepreneuriales : mission, aspirations personnelles et propension au risque. Il montre comment ces éléments doivent s'articuler de manière cohérente pour supporter un projet d'entreprise viable.

Quatre points clés développés dans "The New Business Road Test"

La méthode des 7 domaines d'évaluation : plutôt qu'une simple checklist, John W. Mullins propose une analyse systémique où chaque domaine interagit avec les autres. Cette approche permet d'identifier les forces compensatrices et les faiblesses rédhibitoires.

L'importance du timing dans l'analyse : évaluer son projet avant d'investir temps et argent permet d'éviter de "miser sur le mauvais cheval" et d'orienter ses efforts vers les opportunités les plus prometteuses.

L'identification des facteurs de succès critiques : chaque industrie a ses spécificités. Comprendre quels sont les 2-3 éléments déterminants pour réussir dans son secteur permet de concentrer ses efforts et de recruter les bonnes compétences.

La segmentation comportementale comme différenciateur : au-delà des critères démographiques classiques, analyser comment les clients utilisent les produits met souvent en évidence des opportunités de repositionnement innovant.

Les 5 pièges entrepreneuriaux à éviter : John W. Mullins identifie les erreurs récurrentes qui causent l'échec : le piège du "large marché", celui du "meilleur piège à souris", celui du "business model non viable", du "moi-aussi" et de "la prétention démesurée".

Mon avis sur le livre "The New Business Road Test" de John W. Mullins

"The New Business Road Test" est un ouvrage vraiment utile à tout entrepreneur sérieux qui souhaite monter un business durable. John W. Mullins apporte une rigueur académique à la création d'entreprise tout en restant pragmatique et accessible.

Sa méthode permet de prendre des décisions en connaissance et d'éviter les écueils classiques qui mènent à l'échec entrepreneurial.

Les points forts et points faibles du livre "The New Business Road Test"

Points forts :    

La méthode structurée et claire en 7 étapes proposée pour créer un business.

Les nombreuses études de cas d'entreprises réelles (petites et grandes, connues et inconnues, ayant réussies ou échouées).

Une section dédiée aux investisseurs à la fin de chaque chapitre.

Les outils pratiques en seconde partie.

Points faibles :  

Style parfois académique avec quelques redondances.

Non traduit en français.

Ma note : ★★★★★

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Avec ces 3 ouvrages, vous devriez avoir une feuille de route complète pour réussir votre création d'entreprise, que vous visiez le freelancing, une petite entreprise ou un projet plus ambitieux. Chacun apporte sa perspective unique pour transformer votre idée en business viable et rentable.

Et vous, avez-vous d'autres ouvrages à conseiller pour monter un business ? Si oui, n'hésitez pas à les partager en commentaire et à faire part de votre expérience. Vos retours enrichiront cette sélection et aideront d'autres lecteurs dans leur projet de création d'entreprise !

Pour aller plus loin dans votre apprentissage entrepreneurial à l'ère du numérique, je vous recommande également de consulter notre sélection de livres dédiés aux stratégies entrepreneuriales dans un monde digital.

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Mon, 20 Oct 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13134/Cration-dentreprise-3-livres-pour-vous-aider-monter-un-business
Les principes du succès http://www.olivier-roland.fr/items/view/13128/Les-principes-du-succs

Résumé de "Les principes du succès" de Ray Dalio : dans ce livre, Ray Dalio partage son parcours, de la faillite à la réussite planétaire de Bridgewater, devenu l'un des plus grands fonds d’investissement au monde. Il y partage ses principes de vie et de travail pour atteindre le succès : accepter la réalité sans filtre, définir clairement ses objectifs, analyser ses erreurs, concevoir un plan d’action, et l'ajuster en continu. Il y prône l'"honnêteté radicale" et la "méritocratie des idées" pour instaurer une culture collective solide et progresser sans cesse.

Par Ray Dalio, 2020, 580 pages.

Titre original : "Principles: Life and Work", 2017, 592 pages.

Chronique et résumé de "Les principes du succès" de Ray Dalio

INTRODUCTION

Dans l’introduction de son livre "Les principes du succès", Ray Dalio pose d'emblée les bases de sa philosophie, et ce, avec une modestie désarmante.

Il se présente, en effet, comme un "pauvre con" qui a réussi grâce à sa capacité à gérer son ignorance plutôt qu'à ses connaissances.

L'auteur définit ses "principes du succès" comme des vérités essentielles permettant d'obtenir ce qu'on veut dans la vie, qu’on pourrait ainsi comparer à un "livre de recettes du succès".

Il nous explique que face au "blizzard de situations" quotidiennes, disposer de principes clairs permet de prendre de meilleures décisions plus rapidement. Pour lui, il est primordial de développer ses propres principes authentiques en réfléchissant par soi-même, avec humilité et ouverture d'esprit.

Son parcours d'investisseur et d'entrepreneur, ajoute-t-il, l'a lui-même mené à systématiser sa prise de décision, et à transformer ses principes en algorithmes informatiques.

"Les principes du succès", termine-t-il, s'articule en trois parties : son parcours personnel, ses Principes de Vie, et ses Principes de Travail. Ceux-ci qui détaillent notamment le fonctionnement unique de Bridgewater, le fonds d’investissement alternatif qu’il a fondé et basé sur la "méritocratie des idées".

PARTIE I - D'OÙ JE VIENS

Dans cette partie autobiographique, Ray Dalio nous explique que nos millions de décisions de vie sont comme des paris qui déterminent notre qualité de vie.

Il nous invite à dépasser son histoire personnelle pour comprendre les relations de cause à effet sous-jacentes et les principes qu'il en a tirés.

1.1 - L'appel de l'aventure : 1949-1967

Ray Dalio raconte son enfance ordinaire à Long Island, fils d'un musicien de jazz et d'une mère au foyer.

Élève médiocre à cause de sa mauvaise mémoire, il déteste l'école mais adore comprendre les choses par lui-même. Entrepreneur précoce, il enchaîne les petits boulots dès huit ans. À douze ans, il découvre la Bourse en travaillant comme caddy et réalise son premier investissement chanceux avec Northeast Airlines.

Cette période des années 60, marquée par l'optimisme américain et un marché boursier florissant, forge alors sa passion pour l'investissement.

Il préfère déjà prendre des risques plutôt que de vivre dans la médiocrité, suivant le rythme de son propre tambour.

1.2 - Franchir le seuil : 1967-1979

Cette période déterminante pour Ray Dalio, lui enseigne que le futur est généralement très différent du présent, contrairement à ce que croit la majorité.

Entre 1967 et 1979, les surprises économiques provoquent des chutes boursières considérables qui le prennent de court. Il découvre que les prix reflètent les attentes des gens et comprend l'importance d'étudier l'histoire pour anticiper l'avenir.

À l'université, Ray Dalio s'épanouit enfin. Il découvre la méditation transcendantale qui lui apporte une ouverture d'esprit sereine pour réfléchir plus clairement. Il se spécialise dans la finance et s'initie aux futures sur matières premières en utilisant l'effet de levier pour maximiser ses gains limités.

L'époque tumultueuse des années 60-70 le marque profondément : guerre du Vietnam, fin de l'étalon-or par Nixon en 1971, chocs pétroliers. Il apprend que tout est "redite" : les événements se répètent selon des relations logiques de cause à effet.

Diplômé de Harvard Business School, il travaille successivement chez Dominick & Dominick puis Shearson, d'où il est licencié pour son comportement rebelle.

En 1975, il fonde Bridgewater Associates depuis son deux-pièces. Il développe une approche unique : modéliser les marchés comme des machines avec des relations de cause à effet prévisibles. Cette méthode, d'abord appliquée aux marchés agricoles qu'il maîtrise parfaitement, lui permet de créer des règles de décision systématiques. Malgré des erreurs douloureuses qui lui enseignent qu'on n'est jamais sûr de rien, il commence à bâtir son succès sur cette philosophie d'humilité et d'analyse systémique.

1.3 - Mon abîme : 1979-1982

Entre 1979 et 1982, Ray Dalio traverse la période la plus difficile de sa carrière.

Anticipant une crise de la dette, il prédit publiquement une dépression similaire à celle des années 1930. Mais malgré sa rencontre avec Bunker Hunt et ses positions sur l'argent-métal, ses prévisions se révèlent catastrophiquement fausses : quand la Fed intervient après le défaut mexicain d'août 1982, l'économie rebondit de manière non-inflationniste et déclenche alors le plus long boom de l'histoire américaine.

Cette erreur publique ruine presque Bridgewater. Ray Dalio perd tous ses employés sauf lui-même, doit emprunter à son père et envisage de retourner à Wall Street.

Au final, cet échec lui enseigne trois leçons cruciales : bannir l'arrogance, étudier l'Histoire systématiquement et reconnaître la difficulté du timing.

Cette humiliation transforme aussi radicalement son approche : il développe une "ouverture d'esprit radicale", cherche activement les désaccords constructifs et pose les bases de Bridgewater comme "méritocratie des idées". Il comprend qu'il peut concilier risque faible et rendement élevé, découvrant par là son "Saint Graal de l'investissement".

1.4 - Mon chemin pavé d'épreuves : 1983-1994

Après sa faillite de 1982, Ray Dalio reconstruit progressivement Bridgewater sans vision entrepreneuriale ambitieuse : il se concentre d’abord, confie-t-il, sur le fait de "jouer son jeu".

L'acquisition d'ordinateurs modifie à ce moment-là complètement son approche : il développe des systèmes algorithmiques qui traduisent ses intuitions en critères logiques, puis les teste sur des données historiques remontant à plus d'un siècle. Cette méthode informatisée qui fonctionne en parallèle avec son analyse personnelle, se révèle alors supérieure à la prise de décision humaine pure.

Par ailleurs, Bridgewater diversifie ses activités : consulting, gestion de risques et vente de recherches. L'idée consiste à disséquer chaque entreprise-cliente en composants logiques, en séparant les bénéfices opérationnels et spéculatifs, et en établissant des positions "neutres au risque". Cette méthode révolutionnaire, précurseur de l'alpha overlay, attire des clients prestigieux comme la Banque mondiale (premier mandat de gestion de 5 millions), puis Kodak.

Mais la découverte majeure survient avec le "Saint Graal de l'investissement" : un graphique démontrant qu'avec 15-20 flux de rendements non-corrélés, on peut réduire drastiquement les risques sans diminuer les rendements. Cette révélation mène Ray Dalio au développement de Pure Alpha, stratégie révolutionnaire combinant les multiples classes d'actifs.

Parallèlement, Ray Dalio explore la Chine dès 1984 et crée Bridgewater China Partners en 1994 avant de l'abandonner par manque de temps. Il préfère en effet privilégier Bridgewater. Son fils Matt passe, lui, une année transformatrice à Pékin.

L'entreprise de Ray Dalio systématise également l'apprentissage par les erreurs via un "journal d'erreurs" obligatoire.

En 1993, une confrontation avec ses collaborateurs révèle l'impact négatif de sa franchise brutale sur le moral. Cette crise catalyse l'élaboration des « Principes de Travail » de Ray Dalio, qui définissent les comportements relationnels autour de trois piliers : honnêteté radicale, désaccords raisonnés et méthodes de décision préétablies.

L’auteur des "Principes du succès" comprend à ce moment-là l'importance de la neuropsychologie dans la gestion des "deux soi" - logique et émotionnel - qui gouvernent les comportements humains.

1.5 - Une aubaine inespérée : 1995-2010

Entre 1995 et 2010, Bridgewater connaît une croissance spectaculaire, passant de 42 employés et gérant 4,1 milliards à une institution majeure. Cette expansion repose sur une approche évolutive systématique : affronter les marchés, innover, analyser les erreurs, améliorer continuellement les méthodes. L'entreprise développe des systèmes informatiques sophistiqués qui lui permettent de traiter massivement les données et d'identifier des opportunités créatives.

Deux innovations majeures marquent cette période :

D'abord, la découverte des obligations indexées sur l'inflation : Ray Dalio crée une nouvelle classe d'actifs offrant des rendements équivalents aux actions avec moins de risques. Cette expertise mène à des consultations avec le Trésor américain, notamment avec Larry Summers.

Ensuite, le développement de la "Risk Parity" avec le portefeuille "All Weather", conçu pour performer dans toutes les conditions économiques en équilibrant quatre stratégies selon la croissance et l'inflation.

Par ailleurs, l'entreprise fait face au dilemme "croissance versus culture". Malgré les réticences de Giselle Wagner, Ray Dalio choisit l'expansion institutionnelle. Cette période voit alors la formalisation des Principes de Travail, l'introduction d'évaluations psychométriques (Myers-Briggs) et la création des "Baseball Cards" (fiches détaillées des collaborateurs). Ces outils visent à optimiser l'attribution des responsabilités selon les profils individuels.

La crise de 2008 confirme l'efficacité des systèmes de Bridgewater. Anticipant la bulle de dette grâce à leurs indicateurs, ils réalisent des performances exceptionnelles (+14% contre -30% pour beaucoup). Ray Dalio conseille alors les décideurs politiques américains et partage ses analyses macroéconomiques uniques.

En 2010, face à des rendements record (45 % pour Pure Alpha), Bridgewater lance "Pure Alpha Major Markets" pour gérer la croissance des actifs.

À 60 ans, Ray Dalio commence à préparer sa succession : il publie ses Principes en ligne pour démocratiser sa philosophie de gestion.

1.6 - Partager le trésor : 2011-2015

En 2011, Ray Dalio entame sa transition de la deuxième à la troisième phase de vie, passant du travail au plaisir de voir d'autres réussir sans lui. Il quitte ses fonctions de PDG le 1er juillet, remplacé par Greg Jensen et David McCormick, tout en conservant un rôle de mentor pour éviter le risque de "l'homme clé".

La transition révèle rapidement un "Ray gap" : le manque de "façonnage". Dalio étudie alors les façonneurs comme Steve Jobs, Elon Musk, Bill Gates, définissant leurs caractéristiques communes : esprits indépendants, vision large, capacité à voir schémas globaux et détails, créativité alliée au pragmatisme, passion intense pour leur mission. Paradoxalement, ils obtiennent de faibles scores en "souci des autres" car ils privilégient l'impact systémique sur l'empathie individuelle.

Cette analyse mène à la systématisation de la méritocratie des idées. Dalio réalise que contrairement aux investissements, le management de Bridgewater manque de systèmes algorithmiques. Il développe des outils comme le Dot Collector et les Baseball Cards pour objectiver l'évaluation des collaborateurs, transformant les principes en algorithmes décisionnels.

Parallèlement, Dalio conseille les dirigeants européens durant la crise de la dette 2010-2015. Anticipant la crise, il rencontre des responsables comme Luis de Guindos (Espagne) et Wolfgang Schäuble (Allemagne), expliquant le fonctionnement de la "machine économique". Il influence Mario Draghi vers l'assouplissement quantitatif de la BCE en janvier 2015, validant ses analyses. Ces expériences l'amènent à créer sa vidéo "Comment la machine économique fonctionne", visionnée par 5 millions de personnes.

Le chapitre explore aussi sa relation privilégiée avec Wang Qishan, dirigeant chinois, avec qui il échange sur les principes historiques et l'évolution. Influencé par "Le Héros aux mille et un visages" de Joseph Campbell, Dalio comprend qu'il arrive à l'étape du "partage du trésor" où transmettre son savoir devient prioritaire.

La philanthropie devient centrale : sa famille s'engage dans l'éducation (Barbara), l'exploration océanique (Ray et Mark), la santé mentale (Paul), la technologie pour pays émergents (Matt). Ils appliquent une approche d'investissement à leurs donations, cherchant un "rendement philanthropique" mesurable.

En juin 2015, Bridgewater fête ses 40 ans avec un succès inégalé dans le secteur. Dalio exprime sa vision finale : léguer une "méritocratie des idées opérationnelle" qui libère du "prison de son propre cerveau". Malgré cette réussite apparente, il pressent que l'année suivante sera difficile, annonçant de nouveaux défis pour son entreprise et sa succession.

1.7 - Ma dernière année et mon plus grand défi : 2016-2017

En 2016, la transition échoue : Greg Jensen abandonne son rôle de co-PDG, débordé par la double responsabilité PDG/investissements. Dalio reprend temporairement le poste avec Eileen Murray. Cette épreuve douloureuse enseigne l'importance d'une gouvernance formelle remplaçant le système informel du fondateur. Dalio quitte définitivement en avril 2017, achevant sa transition vers la troisième phase de vie.

1.8 - Prendre de la hauteur sur ses expériences passées

Ray Dalio explique l’évolution de sa perspective : initialement, chaque difficulté semblait dramatique et unique, mais l’expérience lui a appris à reconnaître les « redites » – des schémas récurrents gérables par des principes universels. Il perçoit désormais la réalité comme une machine sublime où causes et effets s’enchaînent. La satisfaction vient de la lutte elle-même, non des résultats. Ayant tout accompli, il constate que le bonheur dépend des besoins de base, non de l’abondance. Son nouveau combat : aider les autres à réussir en transmettant ses principes.

PARTIE II – PRINCIPES DE VIE

2.1 – Embrassez la réalité et faites-lui face

Ray Dalio préconise d’aborder la vie comme un jeu où chaque problème constitue une énigme à résoudre, révélant un principe (un « joyau ») qui améliore la prise de décision future. Cette approche permet de progresser vers des niveaux de difficulté supérieurs avec des enjeux croissants.

L’hyperréalisme comme fondement

Il faut être hyperréaliste plutôt qu'idéaliste. Comprendre, accepter et travailler avec la réalité est à la fois pragmatique et magnifique. La formule du succès : Rêves + Réalité + Détermination = Vie réussie. Les créateurs de grandes choses ne sont pas des rêveurs oisifs mais des personnes totalement enracinées dans la réalité. La vérité - une compréhension exacte de la réalité - constitue le pilier essentiel de tout bon résultat.

Ouverture d'esprit et transparence radicales

L'ouverture d'esprit et la transparence radicales sont indispensables pour un apprentissage rapide et une évolution authentique. Elles améliorent l'efficacité de la boucle de rétroaction en rendant actions et motivations évidentes. Bien qu'initialement inconfortable, cette approche procure finalement plus de liberté et des relations plus enrichissantes.

Leçons de la nature

La nature enseigne les lois universelles de la réalité. L'évolution constitue la plus grande force de l'Univers, la seule chose permanente qui fait tout avancer. Contrairement aux autres espèces agissant par instinct, l'homme peut prendre de la hauteur et s'étudier objectivement. La nature optimise pour le bien global, non individuel. Pour être "bonne", une chose doit fonctionner en cohérence avec les lois de la réalité et contribuer à l'évolution globale.

Croissance par la douleur

La formule fondamentale : Douleur + Réflexion = Progrès. Repousser ses limites est nécessairement douloureux, mais cette douleur signale les domaines nécessitant une amélioration. Il faut aller vers la douleur plutôt que l'éviter, pratiquant "l'affection exigeante" qui développe la force à long terme.

Vision systémique

Il faut évaluer les conséquences de deuxième et troisième ordre, pas seulement les effets immédiats. Assumer la responsabilité de ses résultats développe un "locus de contrôle interne" plus efficace. La capacité à s'observer comme une "machine" - distinguant le concepteur de l'intervenant - permet d'optimiser performances et objectifs.

Cinq décisions cruciales émergent : ne pas confondre souhaits et réalité, privilégier les objectifs sur l'apparence, considérer toutes les conséquences, ne pas laisser la douleur empêcher le progrès, et assumer ses responsabilités sans reporter la faute sur autrui.

2.2 - Appliquez ce Processus en 5 étapes pour obtenir ce que vous voulez de la vie

Ray Dalio présente un processus évolutif en cinq étapes distinctes qui forment une boucle itérative :

Avoir des objectifs clairs,

Identifier les problèmes,

Diagnostiquer leurs causes fondamentales,

Élaborer un plan,

Persévérer jusqu'à l'achèvement.

Les étapes cruciales de ce processus sont alors les suivantes :

Prioriser ses objectifs sans confusion avec les désirs immédiats.

Ne pas tolérer les problèmes identifiés.

Distinguer causes immédiates et raisons fondamentales lors du diagnostic.

Visualiser le plan comme un scénario de film détaillé.

Maintenir l'autodiscipline jusqu'à l'exécution complète.

Les limites personnelles en sont :

Chaque étape requiert des intelligences différentes que personne ne maîtrise totalement. Il faut identifier ses points faibles spécifiques et faire preuve d'humilité pour solliciter l'aide d'autrui. Le graphique "carte mentale vs humilité/ouverture d'esprit" aide à évaluer ses capacités. La combinaison optimale associe bonne connaissance personnelle et ouverture aux apports extérieurs.

2.3 - Soyez radicalement ouvert d'esprit

Ray Dalio identifie deux barrières principales qui peuvent empêcher de bonnes décisions : l'ego et les angles morts.

L'ego constitue un mécanisme de défense inconscient géré par l'amygdale (niveau inférieur du cerveau) qui résiste aux critiques, tandis que la logique réside dans le néocortex (niveau supérieur). Ces "deux vous" se battent constamment pour le contrôle, créant des conflits internes et interpersonnels.

L'ouverture d'esprit radicale consiste à reconnaître sincèrement qu'on pourrait se tromper et que gérer la "non-connaissance" est plus important que ce qu'on sait. Il faut séparer intégration d'informations et prise de décision, privilégier l'objectif sur l'apparence, et accepter qu'on ne puisse donner sans recevoir.

Le désaccord raisonné devient un outil puissant d'apprentissage. L'objectif n'est pas de convaincre mais d'identifier le point de vue correct. Dalio illustre ce principe par son expérience médicale : face à un diagnostic de cancer potentiel, il consulte plusieurs experts aux avis contradictoires, découvrant finalement l'absence de maladie grâce à cette approche.

Signes d'étroitesse d'esprit : refuser la contestation, faire des affirmations plutôt que poser des questions, chercher à être compris plutôt qu'à comprendre. À l'inverse, l'ouverture d'esprit développe curiosité et humilité.

Développement pratique : utiliser la douleur comme guide de réflexion, méditer, être factuel, et savoir quand faire confiance au consensus des personnes fiables. Cette transformation, nécessitant environ 18 mois d'habitude, augmente paradoxalement la confiance en soi en améliorant la probabilité d'avoir raison.

2.4 - Comprenez que les gens sont câblés de manières très diverses

Origine de l'intérêt de l’auteur pour les neurosciences

Ray Dalio développe sa fascination pour les neurosciences suite aux difficultés managériales rencontrées chez Bridgewater. Malgré le recrutement de diplômés brillants, les différences de fonctionnement intellectuel créent des incompréhensions profondes. Les "conceptuels" et les "pragmatiques" parlent des langues différentes, générant frustrations et échecs de projets. L'expérience avec son fils Paul, atteint de troubles bipolaires, confirme l'origine physiologique des comportements.

Comprendre le câblage cérébral

Le cerveau humain contient 89 milliards de neurones interconnectés par des billions de connexions. Il stocke des connaissances évolutives accumulées sur des millions d'années et suit une structure universelle commune aux mammifères. Son évolution "du bas vers le haut" comprend : le tronc cérébral (fonctions vitales), le cervelet (coordination), le système limbique (émotions) et le néocortex (pensée supérieure). Ce dernier, particulièrement développé chez l'homme, permet l'abstraction et la coopération sociale.

Mécanismes neurologiques fondamentaux

Dalio identifie plusieurs "batailles" cérébrales cruciales : conscient contre subconscient, sentiments (amygdale) contre réflexion (cortex préfrontal), cerveau gauche (logique séquentielle) contre cerveau droit (vision globale). L'amygdale provoque des "kidnappings émotionnels" rapides mais temporaires, tandis que les noyaux gris centraux contrôlent les habitudes. Comprendre ces mécanismes permet de développer de meilleures habitudes et de réconcilier émotions et logique.

Évaluations psychométriques

Pour dépasser les biais personnels, Bridgewater utilise des outils comme Myers-Briggs (MBTI), Workplace Personality Inventory, et Team Dimensions Profile. Ces évaluations révèlent les préférences : Introversion/Extraversion, Intuition/Déduction, Raisonnement/Ressenti, Organisation/Observation. Le TDP identifie cinq rôles : Créateurs (innovation), Affineurs (analyse critique), Stimulateurs (communication), Exécuteurs (mise en œuvre), Flexibles (adaptation).

Les "Baseball Cards"

Inspiré des cartes de baseball, Dalio crée des fiches détaillant les forces et faiblesses de chaque collaborateur. Malgré la résistance initiale, cet outil devient essentiel pour l'attribution optimale des responsabilités. Il permet d'éviter les erreurs coûteuses liées aux attentes inadéquates et de constituer des équipes complémentaires.

Archétypes et façonneurs

Dalio identifie des archétypes récurrents, particulièrement les "Façonneurs" : visionnaires capables de concrétiser leurs idées. Formule : Façonneur = Visionnaire + Penseur Pragmatique + Déterminé. Ces individus rares combinent vision globale et maîtrise des détails, pensée indépendante et détermination, connaissance de leurs limites et capacité à coordonner les équipes.

Application pratique

Le succès repose sur l'adéquation personnes-postes. Comme un chef d'orchestre, le leader doit exploiter les forces complémentaires de chacun. L'exemple du projet d'obligations illustre cette transformation : Bob Prince, excellent concepteur mais faible organisateur, s'entoure d'une adjointe douée pour la structuration et d'un gestionnaire de projet focalisé sur l'exécution. Cette approche systématique de la connaissance de soi et des autres devient la clé de l'efficacité organisationnelle.

2.5 - Apprenez à prendre des décisions efficacement

Ray Dalio identifie la prise de décision comme un processus en deux étapes : d'abord apprendre, puis décider.

Selon lui, les émotions constituent la principale menace à une bonne décision. L'apprentissage exige une ouverture d'esprit radicale et la consultation de personnes fiables. La décision implique d'évaluer les conséquences de premier, deuxième et troisième ordre.

Bien apprendre nécessite deux capacités cruciales :

Synthétiser la situation : distinguer les points importants des détails insignifiants, éviter "l'angoisse du détail". Choisir soigneusement ses sources d'information, ne pas croire aveuglément, prendre du recul pour gagner en perspective. Privilégier l'excellence sur la nouveauté et comprendre "dans l'ensemble" plutôt que de s'enliser dans la précision excessive.

Synthétiser dans le temps : analyser les schémas temporels en catégorisant les événements par type et qualité. Appliquer la règle des 80/20 pour identifier les facteurs clés et être "imperfectionniste" en évitant les détails marginaux.

Circuler entre les niveaux : naviguer efficacement entre vision globale et détails spécifiques, utiliser les termes "au-dessus/en dessous de la ligne" pour structurer les conversations.

Bien décider repose sur la logique et le bon sens plutôt que les émotions. Chaque décision devient un calcul de valeur escomptée : probabilité × récompense moins probabilité × pénalité. Il faut parfois prendre des risques même avec de faibles chances si la récompense potentielle justifie le coût.

Raccourcis pratiques : simplifier l'essentiel, utiliser des principes pour identifier les "redites", pondérer les décisions selon la fiabilité des sources. L'avenir combine intelligence humaine et artificielle : les ordinateurs excellent dans le traitement objectif des données, les humains apportent créativité et sens. Attention cependant aux dangers de l'IA sans compréhension approfondie des relations de cause à effet.

Principes de vie : une mise en cohérence

Ray Dalio conclut la deuxième partie de son livre "Les principes du succès" en synthétisant sa philosophie : face aux événements récurrents de la vie, un nombre limité de principes bien pensés suffit pour gérer toutes les situations.

L'auteur rappelle que l'acceptation de la réalité et l'ouverture d'esprit radicale constituent les fondements de l'évolution personnelle. Il souligne l'importance du processus en 5 étapes et du désaccord raisonné pour dépasser les barrières de l'ego. Enfin, il annonce que les "Principes de Travail" appliqueront cette même philosophie aux groupes.

Résumé et sommaire des Principes de Vie

Ray Dalio structure méthodiquement ses Principes de Vie sous forme d'un sommaire détaillé, en présentant chaque concept comme un système opérationnel. Il organise ses enseignements autour de cinq piliers fondamentaux :

Embrasser la réalité,

Appliquer le processus en 5 étapes,

Développer l'ouverture d'esprit radicale,

Comprendre les différences de câblage cérébral,

Maîtriser la prise de décision efficace.

Cette cartographie exhaustive permet aux lecteurs de comprendre facilement les concepts et de transposer la philosophie de l’auteur en actions concrètes. L'auteur démontre ainsi que ses principes forment un écosystème cohérent dans lequel chaque élément renforce les autres qui permettent de mettre en place une approche globale de l'épanouissement personnel.

PARTIE III - PRINCIPES DE TRAVAIL

Résumé et sommaire des Principes de Travail

Dans cette nouvelle partie du livre "Les principes du succès", Ray Dalio présente sa vision fondamentale de l'organisation comme une machine constituée de deux éléments indissociables : la culture et les équipes. Cette métaphore structure toute sa philosophie managériale développée chez Bridgewater Associates pendant plus de quarante ans.

Une organisation comme machine à deux composantes

L’auteur commence par décrire une organisation excellente : ainsi, il s’agit, selon lui, d’une organisation qui combine parfaitement d'excellentes personnes et une excellente culture.

Et pour lui, les bonnes personnes possèdent deux qualités essentielles :

Une excellente personnalité => sincérité radicale, transparence radicale et engagement profond dans la mission.

D’excellentes aptitudes => capacité et savoir-faire pour accomplir un travail remarquable.

Ray Dalio met en garde : "Les personnes qui ont l'un de ces éléments mais pas l'autre sont dangereuses ; il vaudrait mieux qu'elles quittent l'organisation."

Dans une excellente culture, explique-t-il, on identifie les problèmes et désaccords afin de les résoudre efficacement, tout en cultivant l'ambition de créer des réalisations inédites. Cette dynamique nourrit constamment l'évolution organisationnelle.

Le concept d'affection exigeante

Ray Dalio introduit ensuite un principe révolutionnaire : l'affection exigeante, qu'il illustre par l'exemple de Vince Lombardi, l'entraîneur légendaire des Green Bay Packers.

Cette approche permet en fait d'obtenir simultanément un excellent travail et d'excellentes relations. "Pour atteindre l'excellence, on ne fait aucun compromis sur les choses essentielles", souligne-t-il. Il précise également que placer le confort avant le succès génère des résultats néfastes pour tous.

L'auteur raconte enfin comment il considérait ses collaborateurs chez Bridgewater, à savoir comme sa famille élargie, les invitant chez lui, célébrant leurs événements personnels. Cette proximité permettait paradoxalement d'être plus exigeant : "Plus nous prenions soin les uns des autres, plus nous pouvions être durs entre nous - et plus nous étions exigeants, plus nos performances s'amélioraient."

La méritocratie des idées pondérée

Le système de prise de décision optimal selon Ray Dalio repose sur une méritocratie des idées pondérée par la fiabilité. Contrairement aux structures hiérarchiques traditionnelles, ce système rassemble des penseurs indépendants capables de débattre ouvertement pour parvenir aux meilleures décisions collectives.

Ainsi, cette méritocratie s'appuie sur trois piliers :

Sincérité radicale + transparence radicale + prise de décision pondérée par la fiabilité.

La sincérité radicale signifie ne pas filtrer ses pensées critiques, tandis que la transparence radicale donne à chacun accès aux informations nécessaires pour comprendre les situations par lui-même.

La spirale d'évolution auto-consolidatrice

Ray Dalio décrit le processus évolutif de Bridgewater en six étapes :

Partir d'un penseur indépendant pour créer un groupe de penseurs indépendants,

Établir une méritocratie des idées,

Systématiser les principes,

Générer succès et apprentissages,

Créer d'excellentes relations,

Attirer davantage de talents.

Ce cycle vertueux s'est répété pendant quatre décennies.

L'auteur conclut par son principe de travail fondamental :

"Faites en sorte que votre travail et votre passion ne soient qu'une seule et même chose, et entourez-vous de gens que vous appréciez vraiment."

Il distingue deux approches du travail : soit un travail pour financer sa vie, soit l'accomplissement de sa mission. Il recommande vivement la seconde option.

Ces principes s'adressent à ceux qui considèrent le travail comme le jeu passionnant qu'ils pratiquent pour vivre leur mission et accomplir leurs objectifs les plus ambitieux.

3.1 – Les principes de travail pour obtenir la bonne culture

Ray Dalio souligne ici qu'il est fondamental de travailler dans une culture qui vous convient, tant pour votre bonheur que pour votre efficacité. Cette culture doit également permettre de produire d'excellents résultats, sans quoi on n'obtient pas les récompenses psychologiques et matérielles nécessaires à la motivation.

L'auteur présente sa vision d'une méritocratie des idées efficace, qui repose sur trois piliers :

Communiquer ouvertement ses pensées,

Avoir des désaccords raisonnés

Respecter des principes préalablement définis pour résoudre les désaccords.

  1. Fiez-vous à la vérité et à la transparence radicales

L’auteur des "Principes du succès" explique que comprendre la vérité est essentiel pour le succès.

De même, être radicalement transparent sur tout, y compris les erreurs et faiblesses, aide, dit-il, à générer la compréhension qui mène au succès. Et appliquer cette approche, c’est enfin s’assurer que les questions importantes sont connues plutôt que cachées, c’est renforcer les bons comportements et maintenir l'excellence.

Pour Ray Dalio, la sincérité et transparence radicales s'avèrent fondamentales pour une véritable méritocratie des idées. Plus les gens voient ce qui se passe - le bon, le mauvais et le vraiment moche - plus ils deviennent efficaces pour décider comment bien gérer les situations.

L'auteur raconte l'exemple concret de la réorganisation du back office chez Bridgewater. Contrairement aux pratiques habituelles qui consistent à garder secrètes de telles décisions, Eileen Murray organisa immédiatement une réunion avec l'équipe concernée. "La seule manière de fonctionner est sincère et transparente, de sorte que les gens savent ce qui se passe vraiment", affirme Dalio. Cette approche créa certes de l'incertitude, mais évita les rumeurs destructrices.

Ray Dalio compare cacher la vérité aux gens à "laisser vos enfants atteindre l'âge adulte en croyant encore à la petite souris ou au Père Noël". Dissimuler la vérité rend peut-être les gens plus heureux à court terme, mais ne les rend ni plus intelligents ni plus confiants à long terme.

L'auteur des "Principes du succès" structure sa vision culturelle autour de six piliers fondamentaux : la vérité et transparence radicales, le sens du travail et des relations, l'apprentissage par l'erreur, la synchronisation permanente, la pondération des décisions par la fiabilité, et les mécanismes de dépassement des désaccords.

Ray Dalio insiste sur le fait qu'une culture d'excellence ne tolère aucun compromis sur l'essentiel tout en préservant des relations authentiques et enrichissantes.

  1. Donnez du sens à votre travail et à vos relations

L'auteur défend l'importance des relations pleines de sens dans la construction d'une culture d'excellence. Ces relations créent la confiance et le soutien nécessaires pour motiver mutuellement les équipes vers de grandes réalisations.

Ray Dalio affirme avoir voulu que Bridgewater ressemble à une entreprise familiale dont les membres doivent afficher d'excellentes performances sous peine d’être renvoyés. Il illustre cette philosophie par sa gestion des avantages salariaux : au lieu d'adopter une approche impersonnelle, il traitait ses employés comme faisant partie de sa famille élargie, se montrant généreux sur certains aspects tout en attendant qu'ils prennent leurs responsabilités personnelles sur d'autres.

  1. Créez une culture où les erreurs sont permises mais où il est interdit de ne rien en apprendre

"Nous faisons tous des erreurs", note Ray Dalio. La différence fondamentale réside dans le fait que les gens qui réussissent apprennent de leurs erreurs, contrairement à ceux qui échouent.

L'auteur raconte l'incident où Ross, directeur du trading, avait oublié de placer un trade coûteux. Plutôt que de le licencier, Ray Dalio choisit de créer avec lui un système d'apprentissage : le journal d'erreurs. Ce dernier est par la suite devenu l'un des outils les plus efficaces de Bridgewater.

  1. Synchronisez-vous et restez synchronisé

Ray Dalio explique qu'une organisation efficace nécessite un alignement à de nombreux niveaux : depuis la mission commune jusqu'aux comportements individuels. Cet alignement ne peut jamais être tenu pour acquis car les gens sont câblés différemment. L'auteur appelle ce processus d'alignement la "synchronisation".

L’auteur réfute l'idée que camoufler les différences maintient la paix. "En éludant les conflits, on s'interdit aussi de résoudre les différences", affirme-t-il. Le désaccord raisonné - un processus d'échange pratiqué avec ouverture d'esprit et fermeté - permet aux parties de voir des choses auxquelles elles étaient aveugles.

L'auteur illustre cette approche par des exemples concrets chez Bridgewater, notamment un e-mail particulièrement direct d'un collaborateur critiquant sa performance lors d'une réunion client. Cette transparence radicale dans la critique, même envers le dirigeant, exemplifie la culture de synchronisation recherchée.

Pour bien gérer les réunions, Ray Dalio recommande de piloter fermement les conversations : définir qui dirige et à qui sert la réunion, clarifier le type de communication selon les objectifs, naviguer entre différents niveaux de discussion. Il introduit des outils pratiques comme la "règle des deux minutes" pour éviter les interruptions répétées.

L'auteur compare une excellente collaboration au jazz : "1 + 1 = 3" lorsque deux personnes collaborent bien, mais précise que "3 à 5 vaut mieux que 20" car les grands groupes deviennent moins efficaces.

  1. Pondérez vos prises de décision par la fiabilité

Ray Dalio présente un système innovant : la méritocratie des idées pondérée par la fiabilité. Contrairement aux systèmes autocratiques ou démocratiques traditionnels, ce modèle surpondère les opinions des décideurs les plus compétents.

Les opinions les plus fiables proviennent de personnes qui ont accompli avec succès la tâche en question à plusieurs reprises et peuvent expliquer logiquement leurs conclusions. L'auteur met en garde :

"Si vous ne réussissez pas à faire une chose, ne croyez pas que vous allez pouvoir enseigner aux autres comment la faire."

Chez Bridgewater, la fiabilité est mesurée systématiquement grâce aux "Baseball Cards" et au "Dot Collector" qui enregistrent les performances. L'auteur raconte l'exemple de la crise de la dette européenne en 2012, où son équipe était divisée sur les actions de la Banque centrale européenne. Le vote pondéré par la fiabilité permit de trancher : Mario Draghi défierait l'Allemagne et imprimerait de la monnaie, ce qui s'avéra exact.

Dalio souligne l'importance de distinguer son rôle dans chaque situation : enseignant, étudiant ou pair. "Il est plus important que l'étudiant comprenne l'enseignant que l'inverse", précise-t-il, tout en maintenant que chacun a le droit de comprendre les choses importantes.

  1. Identifiez les moyens de dépasser les désaccords

Reconnaissant que les conflits ne se résolvent pas toujours à la satisfaction des deux parties, Dalio établit des processus structurés pour dépasser les désaccords. Comme dans un système judiciaire, Bridgewater dispose de procédures et lignes directrices pour déterminer ce qui est vrai.

Les principes ne peuvent être ignorés même sur accord mutuel - ils fonctionnent comme des lois. L'auteur insiste sur le fait que chacun doit respecter les mêmes critères de comportement, et qu'il faut distinguer le droit de se plaindre du droit de prendre des décisions.

Une fois qu'une décision est prise via le processus, elle doit être appliquée par tous, même par ceux qui ne sont pas d'accord. Dalio demande de "prendre de la hauteur" et de voir la situation comme un observateur objectif. "Le groupe est plus important que l'individu", rappelle-t-il.

L'auteur met en garde contre les dérives : empêcher les lynchages, éviter que la méritocratie sombre dans l'anarchie, et reconnaître que si les dirigeants refusent de suivre les principes, tout le système échoue.

3.2 – Les principes de travail pour avoir les bonnes personnes

Ray Dalio établit une vérité fondamentale qui remet totalement en question l'approche managériale traditionnelle : les personnes constituent l'élément le plus critique d'une organisation, plus encore que sa culture.

Cette partie du livre "Les principes du succès" détaille comment créer une symbiose parfaite entre la culture organisationnelle et le capital humain, de sorte que chaque élément se renforce mutuellement.

  1. Rappelez-vous que QUI est plus important que QUOI

L'auteur des "Principes du succès" démystifie une erreur managériale majeure : se concentrer sur les tâches plutôt que sur les personnes qui les exécutent. Il développe une philosophie innovante où identifier la bonne personne pour chaque responsabilité prime sur toute autre considération opérationnelle.

Ray Dalio illustre cette approche par une analogie musicale intéressante : comme un chef d'orchestre, le leader doit recruter des musiciens qui jouent mieux que lui leur instrument spécifique. Son objectif ultime consiste à créer une machine si excellente qu'elle fonctionne de manière autonome et qu’elle génère, au final, une beauté organisationnelle sans intervention constante.

La sélection des Personnes Responsables représente alors la décision la plus stratégique. Ces individus doivent posséder une vision globale, être capables de distinguer clairement les objectifs des tâches et assumer pleinement les conséquences de leurs décisions.

L'auteur encourage enfin à reconnaître les forces qui alimentent le succès organisationnel : comprendre quelles personnes spécifiques, avec quelles qualités particulières, créent des résultats exceptionnels.

2. Soignez vos recrutements car les conséquences d'une mauvaise embauche sont catastrophiques

Ray Dalio aborde le recrutement comme une science rigoureuse, abandonnant les méthodes intuitives traditionnelles. Il explique comment Bridgewater est passé d'un processus aléatoire - embaucher des personnes appréciées - à une approche systématique et basée sur les preuves.

La hiérarchie des critères constitue un élément particulièrement novateur : les valeurs passent en premier, les aptitudes en second et les compétences en dernier. Cette priorisation inverse complètement l'approche conventionnelle qui privilégie les compétences techniques. Les valeurs, étant pratiquement immuables, déterminent la compatibilité à long terme, tandis que les compétences peuvent s'acquérir relativement facilement.

L'auteur prône une approche scientifique du recrutement : questions structurées, critères prédéfinis, évaluations objectives plutôt que subjectives. Il recommande de rechercher des personnes brillantes plutôt que "le premier venu", et d'attendre que "ça clique" : cette correspondance parfaite entre profil personnel et exigences du poste.

Un aspect particulièrement innovant concerne l'utilisation des tests psychométriques pour comprendre les différentes façons de penser et de voir des candidats. Ray Dalio insiste sur l'importance de recruter des personnes complémentaires plutôt que similaires, évitant le piège de choisir des profils qui nous ressemblent.

  1. Formez, testez, évaluez et sélectionnez les gens en permanence

Cette section révèle la philosophie de l'évolution personnelle continue selon Dalio. Le processus ne s'arrête pas au recrutement mais devient un cycle perpétuel d'amélioration où formation, tests et évaluations s'entremêlent pour optimiser les performances individuelles et collectives.

L'évaluation avec exactitude plutôt qu'avec gentillesse représente un principe révolutionnaire. Dalio prône l'affection exigeante - cette forme d'attention difficile mais essentielle qui consiste à pointer les faiblesses pour permettre l'amélioration. Cette approche, bien qu'initialement inconfortable, génère des relations plus authentiques et des performances supérieures.

L'auteur développe des outils sophistiqués d'évaluation objective comme le Dot Collector et les Baseball Cards, permettant de capturer des données comportementales précises. Ces systèmes éliminent les biais personnels et créent une méritocratie basée sur les preuves plutôt que sur les préférences subjectives.

Le concept de "ne pas collectionner les personnes" illustre une approche pragmatique difficile : reconnaître quand quelqu'un n'est pas à sa place et prendre les décisions courageuses nécessaires. Dalio distingue clairement formation (développer les compétences), garde-fous (compenser les faiblesses) et licenciement (quand l'inadéquation est fondamentale), refusant catégoriquement la réhabilitation qui tente de changer les valeurs ou capacités profondes.

Cette section transforme fondamentalement la perception du management des ressources humaines, passant d'une approche administrative à une ingénierie sociale sophistiquée où chaque décision de personnel impacte directement l'excellence organisationnelle globale.

3.3 – Les principes de travail pour construire et faire évoluer votre machine

Dans cette troisième grande partie des Principes du travail, Ray Dalio développe une vision révolutionnaire du management organisationnel qui bouscule entièrement l'approche traditionnelle de la gestion d'entreprise.

L'auteur y établit un parallèle entre diriger une organisation et faire fonctionner une machine complexe, dans laquelle chaque élément doit être optimisé pour atteindre l'excellence.

  1. Soyez un manager qui fait fonctionner une machine pour atteindre un objectif

Ray Dalio redéfinit fondamentalement le rôle du manager moderne.

Pour lui, un excellent manager est avant tout un ingénieur en organisation qui envisage son entreprise comme une machine sophistiquée nécessitant un entretien et une amélioration constants. Cette approche requiert de prendre constamment de la hauteur pour comparer les résultats produits aux objectifs fixés, en analysant méthodiquement les écarts.

L'auteur insiste sur l'importance cruciale des indicateurs de performance. Ces outils de mesure objectifs permettent d'évaluer le fonctionnement de chaque composante organisationnelle et peuvent même, selon lui, suffire à manager efficacement lorsqu'ils sont suffisamment précis. Ray Dalio recommande de partir des questions essentielles plutôt que des données disponibles pour construire des indicateurs vraiment pertinents.

La distinction entre manager, micro-manager et ne pas manager constitue un point central de sa philosophie. Le bon manager orchestre comme un chef d'orchestre, guidant ses musiciens vers l'excellence collective sans jouer lui-même. Il développe une connaissance approfondie de ses équipes - leurs valeurs, capacités et motivations - pour adapter son style de management et déléguer efficacement.

  1. Identifiez les problèmes et ne les tolérez pas

Cette étape représente l'une des compétences les plus détestées mais essentielles du management selon Dalio. Il transforme notre perception des problèmes : plutôt que des obstacles, ils deviennent le charbon qui alimente le moteur du progrès. Chaque problème identifié constitue une opportunité d'améliorer la machine organisationnelle.

L'auteur prône une vigilance constante et systématique. Il recommande de concevoir des systèmes de détection efficaces, d'attribuer spécifiquement à certaines personnes la mission d'identifier les dysfonctionnements, et de créer des lignes de communication indépendantes pour éviter la censure. Les concepts de "goûter la soupe" et "faire sauter le bouchon" illustrent cette approche proactive de la détection des problèmes.

Une attention particulière est portée aux pièges psychologiques comme le syndrome de la "grenouille dans l'eau bouillante" ou la pensée de groupe, qui peuvent masquer des dégradations progressives. Dalio insiste sur l'importance d'être très spécifique dans l'identification des problèmes, évitant les généralisations qui diluent la responsabilité personnelle.

  1. Diagnostiquez les problèmes pour atteindre leurs raisons fondamentales

Le diagnostic constitue l'étape la plus critique pour Ray Dalio, qui observe que la plupart des échecs organisationnels proviennent d'un diagnostic insuffisant. Il propose une méthodologie structurée autour de trois questions fondamentales : le résultat est-il bon ou mauvais ? Qui en est responsable ? L'échec provient-il d'une incapacité personnelle ou d'un défaut conceptuel ?

L'auteur développe une approche systématique du questionnement, continuant à demander "pourquoi ?" jusqu'à atteindre les véritables causes fondamentales. Ces dernières se décrivent par des adjectifs (caractéristiques personnelles) plutôt que par des verbes (actions), car elles révèlent des schémas comportementaux récurrents chez les individus.

La technique du "drill down" représente un outil particulièrement puissant. Cette méthode permet d'obtenir une compréhension 80/20 des problèmes d'un département en quatre étapes : lister les problèmes spécifiques, identifier leurs raisons fondamentales, élaborer un plan de résolution, puis mettre ce plan à exécution avec un suivi transparent.

7. Apportez des améliorations à votre machine pour contourner vos problèmes

Une fois le diagnostic établi, Ray Dalio aborde la phase créative de conception des solutions. Il souligne que les meilleurs concepts naissent d'une compréhension riche des véritables problèmes, même si parfois il faut anticiper des difficultés potentielles plutôt que réagir à des problèmes avérés.

L'auteur recommande de systématiser ces principes et leur mise en application. Il imagine un avenir dans lequel les principes de management sont remplacés par des algorithmes informatiques, permettant ainsi une prise de décision plus objective et basée sur des preuves. Cette vision allie intelligence humaine et artificielle en vue d’optimiser les résultats.

Selon l’auteur, la conception organisationnelle doit suivre certains principes fondamentaux :

Construire l'organisation du haut vers le bas,

Organiser autour d'objectifs plutôt que de tâches,

Maintenir des ratios managers/subordonnés appropriés,

Créer des garde-fous intelligents quand nécessaire.

Il est aussi primordial, termine l’auteur, de ne pas concevoir l'organisation en fonction des personnes disponibles, mais de définir la structure optimale, puis de trouver les bonnes personnes.

8. Faites ce que vous aviez décidé de faire

L'exécution représente la cinquième étape clé du processus.

Ray Dalio observe que de nombreuses organisations excellent dans la planification mais échouent dans la mise en œuvre. Il analyse les motivations humaines qui poussent à persévérer : visualisation intense des résultats, sens des responsabilités, attachement à la communauté, besoin d'approbation ou récompenses financières.

L'auteur conseille de travailler sur des objectifs passionnants et de maintenir le lien entre tâches quotidiennes et vision globale. Il souligne l'importance de reconnaître que tout le monde a trop à faire, nécessitant des choix stratégiques en matière de priorités, de délégation et d'amélioration de la productivité.

9. Utilisez des outils et des protocoles pour façonner les méthodes de travail

Ray Dalio termine cette section en insistant sur le fait que les mots seuls ne suffisent pas pour changer les comportements. Il faut développer des outils et protocoles concrets qui transforment les bonnes intentions en habitudes durables. Cette approche s'avère particulièrement cruciale pour faire fonctionner une méritocratie des idées.

L'auteur évoque des innovations technologiques révolutionnaires développées chez Bridgewater : enregistrement de réunions pour créer des cas d'étude virtuels, systèmes experts analysant les styles de raisonnement, algorithmes guidant les décisions comme un GPS organisationnel. Ces outils permettent de capturer les données comportementales et de les transformer en conclusions et actions concrètes.

Cette vision futuriste du management combine transparence radicale et intelligence artificielle pour créer des systèmes de prise de décision plus justes et efficaces que les approches traditionnelles basées sur l'autorité et la subjectivité.

10. Et pour l'amour du Ciel, n'oubliez pas la gouvernance !

Ray Dalio souligne que tout ce qu'il a exposé précédemment n'aura aucune utilité sans une bonne gouvernance. La gouvernance constitue le système de supervision permettant d'écarter les participants et processus défaillants. Elle garantit que les principes et intérêts de la communauté priment toujours sur ceux d'un individu ou d'une faction.

L'auteur reconnaît avoir réalisé tardivement l'importance cruciale de cette gouvernance. En tant qu'entrepreneur-fondateur, il avait principalement fait ce qu'il pensait être le mieux, disposant du pouvoir lié à ses parts dans l'entreprise. "Certains diraient que j'étais un despote bienveillant", admet-il, car même avec tous les pouvoirs, il les exerçait de façon adaptée à une méritocratie des idées.

Toutes les organisations doivent avoir un système de contrôle et d'équilibre des pouvoirs pour réussir. Même les dirigeants bienveillants tendent à devenir autocratiques avec le temps. L'auteur insiste : personne ne doit être plus puissant que le système ou si important qu'il devient irremplaçable.

Ray Dalio présente la structure de gouvernance de Bridgewater avec ses cercles d'autorité distincts : directeurs généraux, présidents et conseil d'administration. Dans une méritocratie des idées, un directeur général unique n'est pas aussi efficace qu'un excellent groupe de dirigeants, d'où leur modèle de co-direction.

L'auteur conclut qu'aucun système de gouvernance ne peut remplacer un excellent partenariat entre dirigeants compétents, sages et engagés envers les principes communautaires.

Principes de travail : une mise en cohérence

Ray Dalio conclut en soulignant que la méritocratie des idées est la meilleure approche pour la prise de décision. Elle exige trois éléments fondamentaux : mettre ses pensées honnêtes sur la table, avoir des désaccords raisonnés pour trouver les meilleures réponses collectives, et respecter les méthodes permettant de dépasser les désaccords persistants.

L'auteur souhaite par-dessus tout que chacun puisse faire de son travail et de sa passion une seule chose, lutter efficacement avec les autres pour une mission commune, savourer ses combats et succès, et évoluer rapidement tout en apportant sa propre contribution significative. "À vous de décider ce que vous voulez obtenir de la vie et ce que vous voulez donner."

CONCLUSION

Ray Dalio conclut en espérant que ses principes aideront les lecteurs à visualiser leurs objectifs audacieux, à surmonter leurs erreurs douloureuses et à trouver de bons principes personnels.

Il souhaite par-dessus tout que chacun puisse faire de son travail et de sa passion une seule et même chose, travailler efficacement en équipe et progresser rapidement.

Annexe : outils et protocoles pour la méritocratie des idées de bridge water

L'annexe présente les outils technologiques de Bridgewater pour mettre en pratique la méritocratie des idées :

Coach (conseiller automatisé),

Dot Collector (votes pondérés en temps réel),

Baseball Cards (profils de personnalité),

Issue Log (journal d'erreurs),

Pain Button (enregistrement de la douleur),

Dispute Resolver (résolution de conflits),

Les outils de mise à jour quotidienne,

Les outils contrat,

Les schémas de procédé,

Les manuels de procédures et de pratiques

Les indicateurs de performance.

Ces innovations transmutent la théorie en pratique opérationnelle.

Au sujet de l’auteur

Cette dernière section nous présente, en quelques lignes, l’auteur Ray Dalio. Il est rappelé comment, ancien enfant ordinaire de Long Island, ce dernier a fondé Bridgewater Associates depuis son deux-pièces à vingt-six ans.

En quarante-deux ans, il en a fait la cinquième entreprise privée américaine selon Fortune, faisant de lui l'une des personnes les plus influentes et riches au monde … grâce à ses principes uniques.

Conclusion de "Les principes du succès" de Ray Dalio

Trois idées clés à retenir du livre "Les principes du succès"

Idée clé n°1 : L'échec devient le carburant de l'excellence grâce à une approche systématique

Ray Dalio transforme notre perception de l'échec en démontrant que Douleur + Réflexion = Progrès.

Sa propre catastrophe de 1982, où il prédit une dépression qui ne vient jamais, illustre parfaitement cette philosophie. Au lieu de l'anéantir, cet échec public forge sa capacité d'introspection et son ouverture d'esprit radicale.

L'auteur révèle comment systématiser l'apprentissage par l'erreur via des outils concrets comme le "journal d'erreurs", transformant chaque problème en opportunité d'amélioration. Cette approche révolutionnaire fait de l'échec non plus un obstacle, mais le moteur même de l'évolution personnelle et organisationnelle.

Idée clé n°2 : La méritocratie des idées surpasse tous les autres systèmes de décision

Contrairement aux approches autocratiques ou démocratiques traditionnelles, Ray Dalio développe un système de prise de décision pondéré par la fiabilité. Dans cette méritocratie des idées, les opinions les plus compétentes l'emportent, basées sur des preuves tangibles de performance. L'auteur démontre comment la transparence radicale et les désaccords raisonnés génèrent des décisions supérieures. Chez Bridgewater, cette approche se concrétise par des outils innovants comme le Dot Collector qui analyse les contributions de chacun en temps réel. Cette méthode révolutionnaire concilie efficacité collective et justice décisionnelle.

Idée clé n°3 : Comprendre le câblage humain permet d'optimiser les performances individuelles et collectives

Ray Dalio révèle comment nos différences neurologiques, loin d'être des obstacles, deviennent des atouts stratégiques. En utilisant des évaluations psychométriques et les fameuses "Baseball Cards", il démontre que l'adéquation personne-poste détermine le succès organisationnel. L'auteur expose sa découverte majeure : les "Façonneurs" - ces visionnaires pragmatiques capables de concrétiser leurs idées - combinent pensée conceptuelle et maîtrise opérationnelle. Cette compréhension du management comme ingénierie sociale transforme radicalement l'approche des ressources humaines.

Qu'est-ce que cette lecture des "Principes du succès" vous apportera ?

"Les principes du succès" vous fournit un système opérationnel complet pour affronter la complexité moderne.

Plutôt que des conseils génériques, Ray Dalio vous transmet des méthodes éprouvées testées durant quarante ans chez Bridgewater.

Vous découvrez comment améliorer votre approche de la prise de décision en processus scientifique reproductible.

Le livre vous enseigne à dépasser vos biais émotionnels grâce au processus en 5 étapes et à l'ouverture d'esprit radicale. Concrètement, vous apprenez à identifier vos forces et faiblesses réelles, à construire des équipes complémentaires et à créer une culture de performance durable. Ces principes s'appliquent aussi bien à votre évolution personnelle qu'à votre leadership professionnel.

Pourquoi lire "Les principes du succès" ?

"Les principes du succès" constitue un manuel indispensable pour quiconque aspire à une performance durable et à des relations authentiques.

D'abord, l'authenticité du témoignage : Ray Dalio partage ses échecs les plus cuisants avec la même transparence que ses succès, créant un apprentissage profondément humain.

Ensuite, l'approche systémique : contrairement aux livres de développement personnel classiques, cette œuvre propose une méthode complète et cohérente qui allie principes philosophiques et outils concrets.

Pour les lecteurs de "Des livres pour changer de vie", ce livre représente l'équilibre parfait entre inspiration et mise en pratique immédiate, transformant la lecture en véritable accélérateur de développement personnel et professionnel.

Points forts :

L’authenticité remarquable : Ray Dalio partage ses échecs les plus douloureux avec la même transparence que ses succès.

La méthode systémique complète : philosophie cohérente alliant principes de vie et outils opérationnels concrets.

L’innovation managériale révolutionnaire : la méritocratie des idées transforme radicalement l'approche du leadership.

L’applicabilité immédiate : processus en 5 étapes et outils technologiques directement transposables.

Points faibles :

La densité intellectuelle élevée, mais attention c’est un point fort ou faible selon chacun : l’approche très structurée peut intimider les lecteurs préférant un style plus accessible quand il peut représenter une mine d’or pour d’autres.

Le contexte spécifique : certains principes développés chez Bridgewater peuvent sembler difficiles à adapter dans des environnements plus traditionnels

Ma note :

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Mon, 13 Oct 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13128/Les-principes-du-succs
140 citations pour oser entreprendre en grand ! http://www.olivier-roland.fr/items/view/13124/140-citations-pour-oser-entreprendre-en-grand

Oser entreprendre en grand. Quatre mots qui font rêver autant qu’ils font peur. Derrière cette expression se cache une promesse : celle de transformer ses idées en actions à une autre échelle, ses élans en projets d’envergure, ses plus grands rêves en réalité tangible.

Mais viser haut, ce n’est pas seulement rêver plus fort. C’est accepter de sortir de sa zone de confort, de dépasser ses doutes, d’affronter l’incertitude, de défier ses peurs, de croire en soi même quand tout tremble autour et se lancer. C’est refuser de se contenter du minimum et choisir de jouer dans la cour des audacieux.

Dans cet article, vous trouverez une sélection de citations fortes, percutantes, parfois même dérangeantes, pour oser entreprendre à un niveau supérieur, avec ambition, courage et foi en votre vision.

À lire, à relire, à afficher pour ne jamais oublier que vous êtes capable de bien plus que vous ne le pensez...

  1. Oser prendre des risques pour entreprendre

Parce qu’entreprendre sans risque n’a jamais existé, cette sélection de citations pour oser entreprendre avec une prise de risques met en lumière le rôle fondamental de l’audace dans le passage à l’action. Ici, on ne parle pas de prudence, mais de saut dans l’inconnu et d’envie brûlante de vivre pleinement sa propre aventure.

"Qui ne risque rien n’a rien." Proverbe français

"Ne rien risquer est un risque encore plus grand." Proverbe français

"Le plus grand risque est de ne prendre aucun risque… Dans un monde qui évolue très rapidement, la seule stratégie qui échoue est de ne pas prendre de risques." Mark Zuckerberg

"Si vous ne risquez rien, vous prenez encore plus de risque." Erica Jong

"Et vint le jour où le risque de rester serré dans un bourgeon devint plus douloureux que le risque de choisir de fleurir." Anaïs Nin

"Quand on ose, on se trompe souvent. Quand on n’ose pas, on se trompe toujours." Romain Rolland

"Si vous pensez que l’aventure est dangereuse, essayez la routine, elle est mortelle." Paulo Coelho

"Jouer la sécurité est le choix le plus risqué que l’on puisse faire." Sarah Ban Breathnach

"Le plus grand échec est de ne pas avoir le courage d’oser." Abbé Pierre

"Si l’objectif prioritaire d’un capitaine était de préserver son navire, il ne le ferait jamais sortir du port." Thomas d’Aquin

"Le bateau est plus en sécurité quand il est au port mais ce n’est pas pour cela qu’ont été construits les bateaux." Paulo Coelho

"Si vous craignez de prendre un risque, prenez-le quand même. Ce que vous ne faites pas crée autant de regrets que ce que vous faites." Iyanla Vanzant

"N’écoutez pas les critiques, prenez des risques." Claude Lelouch

"Il faut savoir risquer la peur comme on risque la mort, le vrai courage est dans ce risque." Georges Bernanos

"Ce qui est dangereux, c’est de ne pas évoluer." Jeff Bezos

"L’audace réussit à ceux qui savent profiter des occasions." Marcel Proust

"Vivre prudemment, sans prendre de risques, c’est risquer de ne pas vivre." Wladimir Wolf Gozin

"Implore ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque." René Char

"Les braves ne vivent peut-être pas éternellement mais les prudents ne vivent pas du tout." Richard Branson

  1. Dépasser la peur de se lancer et agir maintenant

On attend souvent d’avoir moins peur, plus de temps, davantage de certitudes. Mais le bon moment n’arrive jamais seul : il se crée. Ces citations vous rappellent que l’action précède toujours la confiance. Et que l’élan vient… en bougeant.

"Le meilleur moment pour planter un arbre était il y a 20 ans… Le deuxième meilleur moment est maintenant." Proverbe chinois

"La meilleure manière de se lancer, c’est d’arrêter de parler et commencer à agir." Walt Disney

"Il arrive souvent de ne rien obtenir parce que l’on ne tente rien." Jacques Deval

"Commencez maintenant, pas demain. Demain est une excuse de perdant." Andrew Fashion

"En suivant le chemin qui s’appelle plus tard, nous arrivons sur la place qui s’appelle jamais." Sénèque

"Je savais que si j’échouais, je ne le regretterais pas, mais je savais que la seule chose que je pourrais regretter était de ne pas essayer." Jeff Bezos

"Les gagnants trouvent des moyens, les perdants des excuses." Franklin D. Roosevelt

"L’action est la clé fondamentale de tout succès." Pablo Picasso

"Si vous passez outre ce sentiment de peur… des choses vraiment surprenantes peuvent arriver." Marissa Mayer

"Saute et le filet apparaîtra." John Burrougts

"Agissez comme s’il était impossible d’échouer." Winston Churchill

"Seuls ceux qui osent s’accordent le droit de réussir." Jacques Audiard

"J’ai appris que le courage n’est pas l’absence de peur, mais la capacité à la vaincre. Nelson Mandela

"Penser est facile. Agir est difficile. Agir selon sa pensée est ce qu’il y a de plus difficile au monde." Goethe

"Vous ne saurez peut-être jamais quels résultats vous obtiendrez en agissant, mais si vous ne faites rien, il est certain que vous n’obtiendrez aucun résultat." Mahatma Gandhi

"Le commencement est la moitié de l’action." Wilfrid Laurier

"Dès que l’on se met à aborder chaque situation comme quelqu’un qui agit - et non comme quelqu’un qui subit – on commence aussitôt à reprendre sa vie en main." Grant Cardone

"Le seul homme à ne jamais faire d’erreurs est celui qui ne fait rien." Theodore Roosevelt

"Il ne faut pas attendre que ce soit parfait pour commencer quelque chose de bien." Abbé Pierre

"Dès que tu commences à marcher sur le chemin, le chemin apparaît." Rûmi

"On ne regrette rarement d’avoir osé, mais toujours de ne pas avoir essayé." Serge Lafrance

"Le courage est très important. Comme un muscle, il prend de la force à l’usage." Ruth Gordon

"Ne te soucie pas des échecs, inquiète‑toi plutôt des opportunités que tu manques quand tu n’essaies même pas." Jack Canfield

"Dans le domaine des idées tout dépend de l’enthousiasme. Dans le monde réel, tout repose sur la persévérance." Goethe

"Les folies qu’un homme regrette le plus dans sa vie sont celles qu’il n’a pas commises quand il en avait l’occasion." Helen Rowland

"La différence entre une idée et une réalisation réside dans l’action." Elon Musk

"Chaque action est un pas vers la réalisation de vos rêves." Maya Angelou

"Le monde appartient à ceux qui passent à l’action." Barack Obama

"Votre vie commence là où se termine votre zone de confort. Passez à l’action !" Neale Donald Walsch

"Si vous ne pouvez pas faire de grandes choses, faites de petites choses de manière grandiose par l’action." Martin Luther King Jr.

"Commencez, c’est la moitié de l’objectif." Aristote

"Il vaut mieux agir trop rapidement qu’attendre trop longtemps." Jack Welch

"N’attendez pas que les choses soient parfaites… démarrez maintenant." Mark Victor Hansen

"Certaines personnes rêvent de succès, tandis que d’autres se lèvent chaque matin et le font arriver." Wayne Huizenga

"Qu’il est dur d’échouer mais le pire est de n’avoir jamais tenté de réussir." Franklin Roosevelt

  1. Oser entreprendre l’impossible, avec ambition

Pourquoi viser petit quand on peut voir grand ? Ces citations vous invitent à repousser les limites, à rêver plus haut, et à croire que l’impossible est souvent juste une étape en attente d’être franchie.

"Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait." Mark Twain

"Entreprenez l'impossible, l'impossible fera le reste." François Cariès

"Dix mille difficultés ne font pas un doute." Isaac Newton

"Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas les faire, c’est parce que nous n’osons pas les faire qu’elles sont difficiles." Sénèque

"Tout ce que l’esprit de l’homme peut concevoir et croire, il peut l’accomplir." Napoleon Hill

"Il n’y a qu’une chose qui puisse rendre un rêve impossible, c’est la peur d’échouer." Paulo Coelho

"Ce que vous avez fait n’est rien comparé à ce que vous pouvez faire." Grant Cardone

"Si vous pouvez en rêver vous pouvez le faire." Walt Disney

"Ils peuvent parce qu’ils pensent qu’ils peuvent." Virgile

"Le seul moyen de découvrir les limites du possible est de s’aventurer un peu plus loin dans l’impossible." Arthur C. Clarke

"Impossible est un mot que je ne dis jamais." Jean‑François Collin d’Harleville

"Seulement ceux qui prendront le risque d’aller trop loin découvriront jusqu’où on peut aller." T.S. Eliot

"Je n’accepte plus les choses que je ne peux pas changer. Je change les choses que je ne peux pas accepter." Angela Davis

"Pensez grand et n’écoutez pas les gens qui vous disent que ce n’est pas réalisable." Tim Ferriss

"Encore faut‑il pousser une porte pour savoir qu’elle nous est close." Montaigne

"Qu’importe d’où tu viens, tu peux réussir." Oprah Winfrey

"J’essaie toujours de faire ce que je ne sais pas faire, c’est ainsi que j’espère apprendre à le faire." Pablo Picasso

"Ce qui nous empêche de changer, ce ne sont pas seulement nos doutes mais bien plus souvent nos certitudes." Sénèque

"Chacun d’entre nous a le pouvoir de réussir et possède la clé de son destin. Alexander Lockhart

"J’ai découvert dans la vie qu’il existe des moyens d’aller presque partout où l’on veut aller, si l’on veut vraiment y aller." Langston Hughes

"La première étape est de vous dire que vous pouvez y arriver." Will Smith

"Le seul voyage impossible est celui que vous ne commencez jamais." Anthony Robbins

"Le succès c’est tomber sept fois, se relever huit." Proverbe japonais

"L’ambition n’est pas ce que l’homme fait mais ce que l’homme voudrait faire." Robert Browning

"L’ambition est le germe de toutes les réalisations. Toutes les grandes œuvres sont le fruit de l’ambition." Orison Swett Marden

"Sans ambition, il ne se fait rien de grand." Napoléon Bonaparte

"La vie est un défi à relever, un bonheur à mériter, une aventure à tenter." Mère Teresa

"L’ambition est le chemin vers le succès. La persévérance est le véhicule que vous y conduisez." Bill Bradley

  1. Oser entreprendre pour innover ou expérimenter ses propres idées

Innover, créer, expérimenter… Ce sont souvent des élans qu’on garde trop longtemps pour soi. Oser entreprendre en grand, c’est aussi ça : sortir ses idées du tiroir, leur donner de l’ampleur, les confronter au réel. C’est arrêter d’attendre d’être prêt, arrêter de douter de sa légitimité. C’est choisir de donner à ses intuitions la place qu’elles méritent, de transformer un frisson créatif en projet vivant. Et peut-être, enfin, de se révéler à soi-même à travers ce qu’on ose créer.

"Les échecs servent à tester des idées. Il n’y a pas de créativité sans échec." Dr Jill Ammon‑Wexler

"La chose la plus précieuse que vous pouvez faire est une erreur. Vous ne pouvez rien apprendre en étant parfait." Adam Osborne

"Encouragez l’innovation. Le changement est notre force vitale, la stagnation notre glas." David Ogilvy

"Créer des opportunités signifie regarder là où les autres ne sont pas." Mark Cuban

"À force de tentatives, on finit toujours par réussir." Hérodote

"Celui qui n’a jamais commis d’erreurs n’a jamais tenté d’innover." Albert Einstein

"L’inventeur ne connaît pas la prudence ni sa sœur cadette, la lenteur. Il bondit, il va d’un saut sur le domaine vierge et, de ce seul fait, il le conquiert." C. Nicolle

"Les gens pensent que l’innovation c’est d’avoir une bonne idée, mais l’innovation consiste en grande partie à agir rapidement et à essayer beaucoup de choses." Mark Zuckerberg

"Lorsque vous trouvez une idée à laquelle vous ne pouvez pas vous arrêter de penser, c’est probablement une bonne idée à suivre." Josh James

"Il ne s’agit pas d’avoir des idées. Mais de les voir se matérialiser." Scott Belsky

"Si quelqu’un vous offre une opportunité incroyable mais que vous n’êtes pas sûr de pouvoir le faire, acceptez… puis apprenez à le faire plus tard." Richard Branson

"Le meilleur moyen de prédire le futur, c’est de le créer soi‑même par l’action." Peter Drucker

"Si l’idée est bonne, elle survivra à l’échec. L’action en est la preuve." Robert Kiyosaki

"Celui qui n’expérimente jamais reste toujours dans l’ombre de ses idées." Anonyme

"La logique vous amènera de A à B. L’imagination vous amènera partout." Albert Einstein

  1. Oser entreprendre pour enfin réaliser ses rêves

Il y a des rêves qu’on porte en soi depuis toujours… Oser entreprendre en grand, c’est cesser de les remettre à plus tard. C’est transformer l’envie en plan, l’élan en action, et faire de ses rêves un cap concret. Parce qu’il n’y a rien de plus puissant que de se mettre enfin en route vers ce qui compte vraiment.

"Quoi que vous rêviez d’entreprendre, commencez-le. L’audace a du génie, du pouvoir et de la magie." Goethe

"Si vous ne travaillez pas pour vos rêves, quelqu’un vous embauchera pour travailler pour les siens." Steve Jobs

"Ayez le courage de suivre votre cœur et votre intuition." Steve Jobs

"Pour réaliser une chose vraiment extraordinaire, commencez par la rêver." Walt Disney

"Un objectif est un rêve doté d’une échéance." Napoléon Hill

"Dans vingt ans, vous serez plus déçus par les choses que vous n’avez pas faites que par celles que vous avez faites… Alors, sortez des sentiers battus." Mark Twain

"C’est aujourd’hui que commence le reste de ta vie." Dale Carnegie

"Chaque grand rêve commence par un rêveur. N’oubliez jamais que vous avez en vous la force, la patience et la passion nécessaires pour atteindre les étoiles et changer le monde." Harriet Tubman

"On n’est jamais trop vieux pour se fixer un autre objectif ou rêver d’un nouveau rêve." C.S. Lewis

"Ose ta vie, toi seul la vivras." Jacques Salomé

"Choisis un travail que tu aimes et tu n’auras pas à travailler un seul jour de ta vie." Confucius

"Une vie réussie est un rêve d’adolescent réalisé dans l’âge mûr." Alfred de Vigny

"Faites que le rêve dévore votre vie afin que la vie ne dévore pas votre rêve." Philippe Chatel 

"Pour réaliser une chose vraiment extraordinaire, commencez par la rêver." Walt Disney

"C’est justement la possibilité de réaliser un rêve qui rend la vie intéressante." Paulo Coelho

"Le but d’un rêve n’est pas seulement d’être réalisé mais de nous réaliser." David Laroche

"Si une personne n’a pas de rêves, elle n’a plus de raison de vivre." Ayrton Senna

"Une vie sans rêve, c’est comme une marionnette sans ficelles." François Gervais

"Fais de ta vie un rêve, et de ton rêve, une réalité." Antoine de Saint‑Exupéry

"Ne renoncez jamais à un rêve juste à cause du temps qu’il faudra pour l’accomplir. Le temps finit toujours par passer de toute façon." Earl Nightingale

  1. Oser jouer dans la cour des grands : croire en soi et viser haut

Viser haut, ce n’est pas de l’arrogance. C’est un choix. Celui d’assumer ses ambitions, de croire en sa valeur, et de refuser de se limiter. Oser entreprendre en grand, c’est se donner la permission d’y aller à fond, d’occuper sa place - pleinement - et de viser bien au-delà de ce qu’on pensait possible.

"Pensez grand et n’écoutez pas les gens qui vous disent que ce n’est pas réalisable. La vie est trop courte pour penser petit." Tim Ferriss

"Si ton rêve ne te fait pas peur, c’est qu’il n’est pas assez grand." Anonyme

"Le plus grand danger pour la plupart d'entre nous n'est pas que notre but soit trop élevé et que nous le manquions, mais qu’il soit trop bas et que nous l’atteignons." Michel‑Ange

"Vivez votre vie comme une exclamation, pas comme une explication." William Blake

"Si vous ne valorisez pas votre temps, personne ne le fera. Arrêtez de donner votre temps et vos talents. Appréciez ce que vous savez et commencez à le facturer." Kim Garst

"Pensez 10 fois plus grand pour passer de l'échec au succès." Grant Cardone 

"Si vous ne voulez rien que vous n’ayez jamais eu, vous devez faire quelque chose que vous n’avez jamais fait." Thomas Jefferson

"Une vision forte et une ambition inébranlable sont les fondements d’un grand rêve." Anonyme

"Ceux qui osent échouer grandement peuvent réussir grandement." Robert F. Kennedy

"Si tu veux jouer dans la cour des grands, autorise‑toi à rêver et à jouer grand." David Laroche

"Ce qui est criminel, ce n’est pas d’échouer, c’est de manquer d’ambition." Napoléon Bonaparte

"Les grandes ambitions sont la passion des grands caractères." Honoré de Balzac

"Il faut toujours viser la lune, car même en cas d'échec, on atterrit dans les étoiles." Oscar Wilde

"Poursuivez la vision, pas l’argent, l’argent finira par vous suivre." Tony Hsieh

"Pour jouer dans la cour des grands il faut arrêter de jouer les petits." Anonyme, expression populaire

"Vous ne devez jamais faire ce que font les autres. Vous devez être prêt à faire ce qu’ils ne feront pas, et même à prendre des mesures que vous jugeriez "déraisonnables"." Grant Cardone

"N’aie pas peur d’avancer lentement. Aie peur de rester immobile." Proverbe chinois

"Seules les cibles 10 fois plus grandes que la normale entraînent de véritables gains." Grant Cardone

"Soyez réalistes : demandez l’impossible." Ernesto Che Guevara et slogan de Mai 68

"Peu importe qui vous êtes ou qui vous avez été, vous pouvez être qui vous voulez." W. Clement Stone

"Rêvez grand, commencez petit, agissez maintenant." Robin Sharma

"Vous n’allez jamais laisser des empreintes durables si vous marchez toujours sur la pointe des pieds." Leymah Gbowee

Et vous, avez-vous envie d’oser entreprendre en grand ? Si certaines citations vous portent ou vous ont donné l’élan de vous lancer, partagez-les en commentaire. Vous pourriez bien inspirer quelqu’un qui n’attend qu’un déclic pour franchir le pas.

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Thu, 09 Oct 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13124/140-citations-pour-oser-entreprendre-en-grand
Stratégie : les 33 lois de la guerre http://www.olivier-roland.fr/items/view/13123/Stratgie-les-33-lois-de-la-guerre

Résumé de "Stratégie : les 33 lois de la guerre" de Robert Greene : dans cet ouvrage, Robert Greene partage 33 grands principes stratégiques tirés de l'histoire militaire. Il les transforme en véritables armes psychologiques pour affronter nos guerres quotidiennes. Qu'il s'agisse de rivalités professionnelles, de jeux politiques ou de tensions dans nos relations personnelles, ces "lois de la guerre" intemporelles nous apprennent à penser en fin stratège.

Par Robert Greene, 2014, 877 pages.

Titre original : "The 33 Strategies Of War", 2010, 822 pages.

Chronique et résumé de "Stratégie : les 33 lois de la guerre" de Robert Greene

Préface

Dans sa préface, Robert Greene met en lumière un paradoxe de notre société : on nous enseigne la paix mais c’est la guerre que nous vivons quotidiennement. Pas une guerre faite de balles et de bombes, mais une lutte constante. Une lutte qui se manifeste dans nos rivalités professionnelles et même dans nos relations avec nos proches, et où la trahison peut se glisser sous des formes insidieuses.

La stratégie, selon Robert Greene, est née de la nécessité de rationaliser ces conflits : un moyen de l’emporter sans se détruire, de gagner avec un minimum de pertes. Et le "guerrier stratège", poursuit-il, est idéalement celui qui gère les situations délicates par des manœuvres habiles (intelligence, maîtrise, finesse…) plutôt que par la force brute.

Il résume cette posture de stratège en 6 principes fondamentaux :

Voir les choses telles qu'elles sont, au-delà des émotions.

Juger les gens sur leurs actions, pas leurs paroles.

Ne compter que sur soi-même.

Préférer l'intelligence d'Athéna à la brutalité d'Arès.

Prendre du recul pour penser stratégiquement.

Faire de sa guerre un combat d'abord intérieur, autrement dit mener d’abord la bataille en soi, avant de la livrer au monde.

Le livre "Stratégie : les 33 lois de la guerre" est structuré en cinq parties. Chacune de ces parties couvre un aspect de la stratégie de la guerre, une loi de la guerre, allant de la préparation mentale aux tactiques guerrières non conventionnelles. Ces lois sont accompagnées de récits tirés de l'histoire militaire mais aussi des affaires, de la politique et des sports.

Une invitation à affûter son esprit pour survivre, et surtout réussir, dans un monde où le combat est permanent.

Partie I : La guerre contre soi-même

Introduction

Pour Robert Greene, toute stratégie digne de ce nom débute par un travail sur soi.

Avant de diriger nos flèches vers l'adversaire, lance-t-il, nous devons les pointer vers nous-mêmes. Autrement dit, avant de partir à la conquête du monde, il faut se confronter à soi-même. Car un esprit submergé par ses émotions est incapable de penser stratégiquement.

Aussi, devenir stratège nécessite d’abord de franchir 3 étapes clés :

Identifier ses faiblesses,

Se déclarer la guerre,

Combattre méthodiquement ses ennemis intérieurs avec les stratégies appropriées.

  1. Déclarez la guerre à vos ennemis : la stratégie de la polarité

La vie est un combat permanent où il est vital d'identifier clairement nos ennemis, affirme Robert Greene. Ces derniers sont souvent subtils, camouflant leurs intentions hostiles derrière une façade amicale.

Pour illustrer ce principe, l’auteur raconte l'histoire de Xénophon, qui galvanisa les mercenaires grecs désemparés en Perse simplement en leur faisant prendre conscience que les Perses n’étaient pas des alliés, mais l’ennemi à combattre. Xénophon transforma ainsi des soldats démoralisés en guerriers déterminés.

À partir de cet exemple, Robert Greene explique l’idée suivante : les ennemis nous apportent une direction et une énergie essentielles. L’adversaire devient en fait un moteur. Comme deux pôles d’un aimant, cette opposition crée une tension qui propulse vers l’action.

Robert Greene souligne que notre culture moderne nous pousse à fuir les conflits, mais que cette attitude nous rend, en réalité, vulnérables face aux personnes naturellement agressives.

Margaret Thatcher est le parfait modèle de la stratégie de la polarité.

Plutôt que de chercher le consensus, la politicienne choisit délibérément de polariser. En désignant les socialistes, et même certains membres (les "poules mouillées") de son propre parti, comme ses ennemis, elle se démarqua, fédéra ses partisans et imposa son autorité.

Robert Greene nous conseille de ne pas chercher à plaire à tout prix. Pour lui, mieux vaut être clivant que fade, "mieux vaut être remarquable qu'aimable" :

"Thatcher ne cherchait pas la popularité, éphémère et superficielle. (…) Tant pis si certains vous détestent ; on ne peut pas plaire à tout le monde. Vos ennemis, ceux à qui vous vous opposez de front, vous aideront à vous forger une base stable. Inutile de se perdre au centre, là où se pressent les masses : dans la foule, on n’a pas la place de se battre. Divisez les gens, excluez-en certains et faites de l’espace pour la bataille."

De plus, nos ennemis nous aident à définir qui nous sommes et nous empêchent de nous perdre dans la médiocrité du compromis permanent. Et en nous forçant à nous positionner, ils nous révèlent :

"Dans la vie, tout concourt à vous pousser au centre, en politique comme ailleurs. Le centre est le domaine du compromis. Bien sûr, il faut savoir s’entendre avec les autres, mais ce n’est pas sans danger. En cherchant toujours la conciliation, on oublie qui l’on est et l’on se noie dans la mêlée. Considérez-vous au contraire comme un combattant, seul, encerclé par vos ennemis. Cette lutte constante vous garde fort et en alerte. Elle aide à définir ce en quoi vous croyez, pour vous comme pour les autres."

  1. N'ayez jamais une guerre de retard : la stratégie de la guérilla psychologique

Ce qui nous perd souvent, ce n’est pas l’ennemi, mais notre attachement au passé. Dans cette 2ème loi de la guerre, Robert Greene démontre, en effet, comment le poids de ce passé et l'attachement aux méthodes éprouvées peuvent conduire à la défaite.

Il relate la débâcle des Prussiens en 1806, incapables d’adapter leur stratégie figée à la tactique d’innovation et de mobilité de l’armée de Napoléon. Ils étaient restés prisonniers des méthodes de Frédéric le Grand, et en ont payé le prix.

À l'inverse, le samouraï Miyamoto Musashi est l’incarnation du stratège fluide et de l’esprit de guerilla psychologique : il déstabilisait systématiquement ses adversaires en changeant constamment d'approche. Par exemple, il arrivait en avance au lieu d'être en retard, utilisait un sabre de bois contre une lame d'acier, ou provoquait l'adversaire pour l'amener à commettre des erreurs.

Ainsi, l'auteur nous encourage ici à faire consciemment la guerre au passé et à "penser sur le vif", à nous adapter à l’imprévu et réagir dans le présent.  

Ensuite, il nous invite à :

Nous libérer des formules éculées et à réexaminer nos certitudes, l’ensemble de nos principes et de nos croyances.

Effacer les souvenirs "de la guerre précédente".

Garder un esprit vif, curieux, adaptable, toujours en mouvement et en éveil.

Rester dans l’air du temps : comme les guérilleros, il faut rester imprévisible, mobile, insaisissable, et transformer le chaos du monde en terrain de jeu stratégique.

"Changer la donne" : "En allant à contre-courant de ce que vous faites communément, en vous plaçant dans des circonstances inhabituelles ou en repartant de zéro. Dans ces situations, l’esprit doit gérer une nouvelle réalité, et c’est comme s’il revenait à la vie. Le changement est inquiétant, mais il est aussi vivifiant, exaltant."

  1. Au cœur de la tempête, gardez la tête froide : la stratégie de l’équilibre

Sous pression, l’émotion est notre pire ennemie.

Robert Greene démontre, avec cette loi, qu'en situation de crise, notre plus grand ennemi est notre propre émotivité.

Pour mieux comprendre, il revient sur l'histoire de l'amiral Nelson qui, en pleine bataille contre les Danois, ignora délibérément l'ordre de son supérieur de battre en retraite. De cet épisode, on raconte cette fameuse anecdote : l’amiral plaça sa longue-vue sur son œil aveugle et déclara : "Je ne vois pas ce pavillon."  Et cette audace lui permit de remporter la victoire.

Mais garder son sang-froid ne s’improvise pas. Car notre façade rationnelle s'effondre rapidement sous pression. Selon Robert Greene, il en faut peu pour que nos pulsions émotionnelles prennent le dessus.

Aussi, pour développer un véritable sang-froid, l’auteur recommande plusieurs techniques, inspirées de figures historiques : comme le général Patton, il suggère de s’exposer volontairement aux conflits pour apprivoiser la tension. À l’instar d’Ulysses S. Grant, il encourage à développer une indépendance mentale totale : ne compter que sur soi-même. Et enfin, à la manière du duc de Marlborough, il invite à désamorcer les provocations par le rire, en apprenant à se moquer calmement de la stupidité d’autrui.Pour Robert Greene, le sang-froid exige une discipline de chaque instant.

Prenons Alfred Hitchcock qui, contrairement aux réalisateurs nerveux, somnolait paisiblement sur ses plateaux. Ce calme olympien n'était pas inné, nous apprend l’auteur. Il résultait en réalité d'une préparation poussée dans les moindres détails : "Avant le tournage, Hitchcock s'était préparé avec une minutie telle que rien de mal ne pouvait se passer."

L’auteur nous invite enfin à développer notre "Fingerspitzengefühl" (qui se traduit par "intuition du bout des doigts") : cette capacité fine et aiguisée à sentir intuitivement une situation est, selon lui, l’une des meilleures armes de stratège.

  1. Créez un sentiment d’urgence et de désespoir : la stratégie du dernier carré

La stratégie du dernier carré met en évidence que nous sommes notre pire ennemi lorsque nous nous laissons la possibilité d'échouer.

Robert Greene commence par décrire comment Cortés, pour conquérir l'empire aztèque avec seulement 500 hommes, fit couler ses propres navires. En faisant cela, le but était de pousser ses troupes à l’extrême, de les priver de toute issue et de les amener ainsi à tout donner : "En mettant ses hommes en situation désespérée, il les forçait à se battre avec beaucoup plus de hargne" analyse l'auteur.

L’auteur des 33 lois de la guerre relate également l'expérience transformatrice de Dostoïevski qui, condamné à mort puis gracié au dernier moment, écrivit à son frère : "La vie est un cadeau... Chaque minute aurait pu être une éternité de bonheur ! " Cette confrontation à la mort changea fondamentalement son rapport au temps et à la vie.

Par ces exemples, Robert Greene montre que l'être humain n'est pleinement motivé que lorsqu'il se trouve acculé. Lorsqu’il n’a plus le choix, il se transcende. C’est ce que Sun Tzu, nous dit-il, appelait le "lieu de mort".

Il propose alors cinq méthodes concrètes pour se placer volontairement sous pression :

Mettre tous ses œufs dans le même panier, comme le fit Lyndon Johnson lors de sa première campagne électorale,

Passer à l'action avant d'être prêt, à l'exemple de Jules César traversant le Rubicon,

Partir à l'aventure, oser le saut dans l’inconnu comme le fit l'actrice Joan Crawford en quittant son studio d’Hollywood,

Jouer "seul contre tous", affronter seul la masse comme le batteur Ted Williams,

Rester perpétuellement sur le qui-vive, à l'image de Napoléon.

Robert Greene conclut : "Face à la mort, l'existence prend tout son sens." Autrement dit, quand on joue sa peau, chaque décision compte. Et la vie, soudain, prend tout son relief.

Partie II : La guerre en équipe

Introduction

Pour Robert Greene, une stratégie, aussi brillante soit-elle, n’a aucune chance de réussir sans une structure solide. Cette dernière est aussi importante que la stratégie elle-même.

Aussi, pour être efficace, une armée doit posséder un commandement unique, une mobilité rapide et une cohésion forte. Les soldats doivent partager un objectif commun, avancer vers un but commun, tout en disposant d'une autonomie d’action suffisante.

Ce modèle militaire peut s'appliquer à tous les groupes, à condition de bien en comprendre les rouages de la structure, et de les adapter avant de se lancer dans la bataille.

  1. Évitez les pièges du pouvoir partagé : la stratégie du commandement contrôlé

Robert Greene analyse ici le fiasco de Gallipoli, en 1915. Lors de cette bataille, le général Hamilton, trop poli et trop vague dans ses ordres, sema le flou sur les directives à suivre. Résultat : une débâcle pour les Alliés face aux Turcs, malgré des soldats valeureux.

Pour l’auteur, le problème ne vient pas des exécutants, mais de la tête : quand le commandement et la chaîne hiérarchique sont défaillants, tout s’écroule.

À l’opposé, pour montrer à quoi ressemble un commandement efficace, l’auteur cite le général George Marshall, nommé chef d’état-major en 1939.

Face à une armée américaine désorganisée, Marshall fit preuve de génie stratégique : au lieu de tout diriger lui-même, il plaça les bonnes personnes (comme Eisenhower) aux postes clés, structura les circuits d'information et transmit son autorité avec une subtilité redoutable.

L'auteur termine à propos de cette loi en soulignant qu'un leadership divisé mène généralement au désastre car les partis se politisent, les ambitions personnelles prennent le dessus. Il recommande de garder la main tout en donnant l’illusion d’un pouvoir partagé. Pour cela, il faut entretenir les "longues-vues" (informateurs directs), éliminer les "bêtes politiques" qui sapent la cohésion et faire en sorte que chacun sache qui commande, sans avoir besoin de le dire.

  1. Divisez vos forces : la stratégie du chaos contrôlé

En 1805, Napoléon bouscule l’art de la guerre : il fragmente sa Grande Armée en plusieurs corps indépendants, chacun commandé par un maréchal. Cette décentralisation crée un flou stratégique qui dérouta complètement l’ennemi. Le général autrichien Mack, paralysé par la confusion générée par ces unités mobiles et autonomes, capitula à Ulm avant même d’avoir versé une goutte de sang.

L'auteur se base sur cet exemple pour développer l’idée suivante : une bonne stratégie ne repose pas sur l’exécution d’un plan rigide, mais sur la création de situations où plusieurs options restent ouvertes. C’est ce que Sun Tzu appelait le "shih" : une position de puissance latente, prête à être exploitée. Finalement, en décentralisant son armée, Napoléon perdit en contrôle, mais en échange, gagna en mobilité et en efficacité.

Robert Greene évoque aussi l’Auftragstaktik (= tactique de mission), doctrine militaire prussienne selon laquelle on fixe un but clair, mais on laisse les officiers libres de décider comment l’atteindre. Cette philosophie conduisit aux victoires allemandes fulgurantes jusqu'à la Blitzkrieg de 1940.

Pour appliquer cette approche, Robert Greene conseille de construire une équipe soudée par une cause commune, de privilégier la discipline à la camaraderie superficielle, et surtout, d’adapter la structure du groupe aux talents et à la nature de ceux qui le composent.

7. Transformez la guerre en une croisade : la stratégie du moral

Robert Greene nous explique, avec cette 7ème loi de la guerre, que pour maintenir une motivation constante au sein de nos troupes, nous devons les amener à penser davantage au groupe qu'à eux-mêmes. La clé réside dans leur engagement pour une cause commune et dans la lutte contre un ennemi détesté.

Le premier obstacle ? L’égoïsme naturel de l’être humain. Tant qu’un soldat ne se sent pas faire corps avec un groupe qui combat pour une juste cause, il restera centré sur lui-même. Mais dès qu’il croit à une mission, son énergie change de nature. Sa réussite devient alors indissociable de celle du groupe.

Pour Napoléon, "le moral des troupes est trois fois plus important que leur forme physique".

Aussi, pour bâtir et maintenir ce moral collectif à toute épreuve, l'auteur présente huit étapes :

Unifier ses soldats autour d'une cause : donnons-leur un idéal fort pour lequel se battre et, idéalement, un ennemi commun à détester.

Subvenir à leurs besoins matériels : "Ventre affamé n'a pas d'oreilles". Si nos hommes se sentent exploités, leur égoïsme naturel reprendra le dessus.

Aller au front : soyons en première ligne, montrons l'exemple en partageant les risques et les sacrifices. Plutôt que de pousser vos hommes par derrière, courons devant.

Canaliser leur énergie (ch'i) : maintenons nos troupes en activité et orientées vers un but. L'agressivité concentre l'énergie collective.

Jouer sur les émotions : les sentiments sont plus efficaces que la raison pour motiver. Touchons l’affectif, pas seulement l’intellect.

Équilibrer récompenses et punitions : elles doivent rester rares mais significatives. Nos hommes entreront en compétition pour gagner notre approbation.

Construire des légendes : les armées qui ont le meilleur moral sont celles qui ont déjà des victoires à leur actif. Rien ne motive plus que le sentiment de faire partie d’une légende en marche. Commençons donc par des défis faciles pour bâtir la confiance.

Éliminer les rabat-joie : un seul élément négatif peut semer la discorde dans tout le groupe.

Pour illustrer ces principes, Robert Greene analyse les stratégies de grands leaders comme Oliver Cromwell, Lyndon B. Johnson, Hannibal, Vince Lombardi et Napoléon Bonaparte. Tous ont su transformer une simple équipe en une véritable armée de croisés dévoués à leur cause et à leur chef.

Partie III : La guerre défensive

Introduction

Dans cette troisième partie, Robert Greene présente la guerre défensive non comme une position de faiblesse, mais comme le summum de la sagesse stratégique.

Cette approche, indique-t-il, repose sur trois piliers :

L'utilisation optimale de ses ressources,

La maîtrise de l'art de la retraite stratégique (savoir reculer sans perdre la face),

La patience d'attendre le moment idéal pour contre-attaquer.

En utilisant intelligemment la guerre défensive, poursuit l’auteur, on peut laisser l'adversaire commettre la première erreur et ainsi préserver son énergie pour les batailles futures.

La clé réside alors dans l'art de la tromperie : paraître plus faible pour encourager l'attaque adverse, ou au contraire plus fort pour dissuader toute agression.

La guerre défensive devient ici un jeu d’anticipation et de maîtrise.

  1. Choisissez vos batailles avec précaution : la stratégie de l'économie

Robert Greene commence par un rappel fondamental : nos ressources - énergie, temps, talents - sont limitées. Les dilapider dans des combats inutiles est la meilleure façon de perdre, même quand on gagne. Aller au-delà de ces limites entraîne vulnérabilité et épuisement.

L'auteur étoffe ce principe avec l'histoire de Pyrrhus, roi d'Épire, et sa célèbre campagne contre Rome. Malgré ses victoires à Héraclée et Ausculum, Pyrrhus perdit tant d'hommes et de ressources pendant ces combats qu'il prononça ces mots devenus célèbres : "Encore une victoire comme celle-là, et nous sommes perdus !" Cette "victoire à la Pyrrhus" illustre parfaitement l'erreur d'une bataille trop coûteuse, même victorieuse.

En contrepoint, il évoque l’approche de la reine Élisabeth I d'Angleterre face à l'Espagne de Philippe II.

Plutôt que d'affronter de front la redoutable Armada espagnole, la reine adopta une stratégie d'économie. Elle exploita les faiblesses financières espagnoles et harcela sa flotte ennemie par de plus petits navires agiles.

La leçon est claire pour Robert Greene : n’attaquons jamais là où l’ennemi est fort. Ciblons ses points faibles avec nos forces les plus efficientes. Cette approche économe permet de remporter des victoires décisives avec un minimum de ressources.

C’est d’ailleurs de cette façon que le général vietnamien Võ Nguyên Giáp, à la tête d’une armée sous-équipée, parvint à déstabiliser et vaincre des puissances technologiquement supérieures : grâce à une guerre d’usure parfaitement dosée.

  1. Renversez la tendance : la stratégie de la contre-attaque

Frapper le premier peut paraître audacieux. Mais Robert Greene défend qu’il est souvent plus intelligent d’attendre. Selon lui, l’immobilité et le silence ne sont pas des faiblesses. Au contraire, cela permet d’observer l’adversaire et de se préparer, le moment idéal, à la riposte.

Voici un exemple emblématique de cette stratégie de la contre-attaque : la bataille d’Austerlitz, 1805. Napoléon, encerclé par une coalition austro-russe, simule la confusion et le retrait afin d’encourager ses ennemis à attaquer. Leurs généraux mordent à l’hameçon. Ils concentrent leurs troupes sur un point... et tombent dans son piège. Napoléon frappa leur centre dégarni et remporta une victoire éclatante.

Cette approche s’apparente au jiu-jitsu où on laisse l’adversaire s’exposer et on utilise la propre force de l’adversaire contre lui-même.

Robert Greene évoque également Franklin D. Roosevelt qui maîtrisait parfaitement cette stratégie en politique : il laissait ses opposants l'attaquer sans répondre, attendant qu'ils s’embourbent et aillent trop loin pour contre-attaquer calmement au moment opportun, retournant l'opinion publique en sa faveur.

Autre exemple marquant : le stratège chinois Sun Pin, qui, pour vaincre un général ennemi arrogant, simula des désertions dans son armée pour le piéger dans une embuscade fatale.

Dans notre société où l'agression directe est mal vue, la contre-attaque, elle, est particulièrement adaptée à notre époque, conclut Robert Greene :  elle permet de garder la maitrise de la situation sans passer pour l’agresseur, d'économiser son énergie, et de choisir le moment parfait pour frapper.

  1. Créez une présence menaçante : la stratégie de la dissuasion

Robert Greene explique dans ce chapitre que le meilleur moyen d'éviter une attaque est de paraître plus dangereux que nous le sommes réellement. Face à des agresseurs déterminés, ni l'apaisement ni le combat direct ne constituent des solutions viables : la dissuasion est la voie à suivre. Et ici, ce n’est pas la réalité qui compte, mais la perception.

Cette stratégie repose sur trois principes fondamentaux de la nature humaine, qui sont que les gens :

Attaquent les faibles,

Ne sont jamais totalement sûrs de la force de leurs adversaires,

Recherchent des victoires faciles.

La clé consiste donc à nous forger une réputation intimidante, parfois exagérée, pour décourager l’attaque avant même qu’elle n’ait lieu.

Voici donc cinq leviers de dissuasion selon "Les 33 lois de la guerre" :

Créer un effet de surprise par une manœuvre hardie,

Renverser la menace en frappant un point sensible de l'adversaire,

Se montrer imprévisible et irrationnel,

Jouer sur la paranoïa naturelle des gens avec des menaces voilées, en leur envoyant des signaux ambigus,

Se parer d'une réputation effrayante, stable et cohérente.

Le général sudiste Stonewall Jackson incarne très bien cette stratégie, observe l’auteur. Avec à peine 3 600 hommes, Jackson parvint à paralyser une armée de 60 000 soldats de l’Union pendant la guerre de Sécession. Comment ? Simplement en manipulant les perceptions par des comportements audacieux et imprévisibles.

  1. Troquez l'espace contre le temps : la stratégie du repli

Pour Robert Greene, battre en retraite face à un ennemi puissant peut être un signe de force, non de faiblesse. Ainsi, fuir n’est pas perdre. Au contraire, l'art de la retraite stratégique selon l’auteur, consiste à sacrifier de l'espace pour gagner du temps : une ressource bien plus précieuse.

Comme exemple de cette stratégie, Robert Greene cite l'histoire de Mao Zedong qui, mis à l'écart par les "28 Bolcheviks" au sein du Parti communiste chinois, choisit de se retirer plutôt que de contre-attaquer. Cette période de repli lui permit de repenser sa stratégie, lance l’auteur. D’ailleurs plus tard, lors de la Longue Marche, il transforma une retraite désespérée en opportunité pour forger un nouveau parti plus fort et plus cohérent.

Robert Greene explique que le repli stratégique rejoint le concept taoïste du wei wu : "l'action par l'inaction". Par l’inaction apparente, on récupère, on réfléchit, on se recentre, tout en laissant l'ennemi s'épuiser et commettre des erreurs.

Le repli est donc une opportunité de reprendre le contrôle, de se renforcer en silence. Il possède même une dimension presque mystique, que l'on retrouve dans de nombreuses traditions spirituelles où les grandes figures se retirent dans le désert par exemple avant d'accomplir leur destinée.

Robert Greene termine sur la stratégie du repli en rappelant que nous possédons tous une ressource que personne ne peut nous enlever : le temps. À condition de ne pas le gaspiller dans des batailles inutiles…

Partie IV. La guerre offensive

Introduction

Dans cette quatrième partie, Robert Greene présente la guerre offensive comme l'approche stratégique privilégiée par les plus grands généraux de l'histoire.

Selon l'auteur, l'essence de cette stratégie est de prendre les devants pour maîtriser les événements et éviter la fameuse "friction" : ce décalage souvent fatal entre intentions et résultats. L’idée est de dominer une situation parce qu’on refuse de la subir.

Robert Greene explique d’abord que l’offensive ne signifie pas foncer tête baissée. L'offensive réussie repose sur un mélange d'intelligence stratégique et d'audace, soutenu par une planification minutieuse.

Cette planification implique de définir un objectif global, d'étudier méticuleusement l'adversaire, et d'élaborer un plan détaillé qui considère la guerre comme une campagne cohérente plutôt qu'une série de batailles isolées.

Les 11 chapitres suivants explorent les manœuvres clés de l’art offensif applicables tant à la guerre qu'aux conflits quotidiens, à savoir : élaborer une grande stratégie, analyser l'ennemi objectivement, frapper là où on ne nous attend pas, encercler, négocier... et surtout, savoir quand s’arrêter.

  1. Perdez des batailles, mais gagnez la guerre : la grande stratégie

Robert Greene commence par dénoncer l’obsession des victoires immédiates. Beaucoup s’égarent à force de gagner des batailles sans jamais atteindre leur véritable but : la victoire finale.

La "grande stratégie" de Robert Greene consiste alors à voir au-delà de la prochaine bataille, à penser en termes de trajectoire, pas seulement d’impact immédiat, à calculer plus loin pour atteindre son objectif ultime.

L’auteur revient ici sur la conquête de l’empire perse par Alexandre le Grand, maître en la matière.

Alors que ses conseillers l'incitaient à stabiliser son pouvoir en Macédoine, le jeune roi de 20 ans surprit tout le monde par une stratégie audacieuse et apparemment incohérente. Au lieu d'attaquer frontalement le cœur de l'empire perse, il zigzagua le long des côtes, libérant des villes, s'assurant le soutien des populations locales et neutralisant la marine perse. Il prit le temps d'installer des structures administratives justes dans les territoires conquis. Cette approche, incompréhensible pour ses contemporains, lui permit finalement de contrôler tout l'empire perse avec une facilité déconcertante.

À l’opposé de cette stratégie, l’approche des Américains au Vietnam. Les Américains obsédés par la supériorité militaire, ont enchaîné les victoires tactiques, ignorant le contexte politique plus large. À l’inverse, les Nord-Vietnamiens élaborèrent une vision globale, à long terme. Elle incluait la politique américaine et l'opinion publique. Avec l'offensive du Têt en 1968, ils ciblèrent non pas des objectifs militaires mais psychologiques, notamment les téléspectateurs américains, sapant ainsi le soutien à la guerre et forçant les États-Unis à se retirer.

L'auteur liste les quatre piliers d’une grande stratégie :

Se concentrer sur son but ultime : avoir un objectif clair et détaillé, ancré dans la réalité, et ne pas le perdre de vue. C’est lui qui donne le cap.

Élargir sa perspective : observer le monde tel qu'il est, comprendre les enjeux politiques, les dynamiques globales.

Couper le mal à la racine : s’attaquer à la véritable source du problème, pas aux symptômes.

Empruntez les chemins de traverse : agir de façon indirecte, là où notre adversaire ne nous attend pas, pour garder l'initiative.

  1. Connaissez votre ennemi : la stratégie du renseignement

Dans ce chapitre, Robert Greene défend l'idée que la véritable cible d'une stratégie n'est pas l'armée ennemie mais l'esprit qui la guide. Dès lors, comprendre comment fonctionne notre adversaire, comment il pense, ce qu’il redoute, ce qui l’aveugle, est la clé pour le tromper et le contrôler.

Pour illustrer ses propos, l'auteur partage la fin tragique de William Macnaghten, émissaire britannique en Afghanistan dans les années 1830. Incapable de comprendre l’âme du peuple afghan, Macnaghten projeta ses valeurs britanniques sur un peuple fier et indépendant. Cette erreur fatale le conduisit à sa perte : le diplomate fut découpé en morceaux et sa tête exposée au bazar de Kaboul.

À l’inverse, l’auteur décrit comment le prince Metternich su percer la psychologie de Napoléon. En se rapprochant de lui par une façade amicale, Metternich repéra le besoin désespéré de Napoléon d'être reconnu par l'aristocratie européenne. Il exploita cette faiblesse en organisant le mariage de Napoléon avec une archiduchesse autrichienne, et réussit ainsi à reconstituer secrètement l'armée autrichienne. Quand le moment fut venu, l'Autriche rejoignit l'alliance contre la France, qui contribua à la chute de l'empereur.

Déjouer un ennemi, c’est avant tout le déchiffrer. Il faut se libérer de son propre narcissisme et être attentif aux signaux inconscients que chacun émet. Pour cela, il recommande de :

S'entraîner à vider son esprit à la manière des samouraïs shinkage pour mieux percevoir les signes.

Adopter une façade amicale pour encourager les confidences.

Observer les gens en action, particulièrement en situation de crise.

Se constituer un réseau d'informateurs parmi les proches de l'adversaire.

Robert Greene conclut que comprendre la vulnérabilité psychologique de l'ennemi, qu'il s'agisse d'un tempérament impulsif, d'une faiblesse pour le sexe, ou d'une insécurité profonde, nous disposons d'un levier capable de le déséquilibrer complètement.

  1. Balayez les résistances par la vitesse et la surprise : la stratégie de la Blitzkrieg

Dans un monde engourdi par l'indécision et la prudence excessive, la vitesse devient un atout stratégique majeur, affirme Robert Greene. Attention toutefois, souligne-t-il, il ne s’agit pas de précipitation, mais d'une action rapide et maîtrisée, au service d’un plan stratégique bien ficelé.

L’histoire de Gengis Khan face au shah de Khwarizm en 1219 en est un exemple saisissant. L’auteur raconte, en effet, comment le chef mongol utilisa la tactique de la "rupture de rythme" : il créa une séquence dévastatrice de mouvements lents puis brutaux et foudroyants. Avec d’abord une préparation minutieuse, puis un leurre destiné à endormir la vigilance du shah, suivi d'attaques fulgurantes venant de là où personne ne s'y attendait.

Même schéma avec la Blitzkrieg allemande en 1940, où la mobilité et la coordination des forces permirent de vaincre des défenses statiques, ou encore les attaques éclair de Jules César.

Cette stratégie, précise l’auteur, est particulièrement indiquée contre des adversaires rigides et défensifs. Elle marche aussi remarquablement bien dans notre époque moderne, où les gens, submergés par les distractions et les interruptions constantes, se replient instinctivement dans une posture défensive. La clé ? Créer une rupture de rythme. L’adversaire, déstabilisé, n’a pas le temps de réfléchir.

Pour que cette stratégie fonctionne, il faut trois éléments : une équipe mobile (généralement petite), une coordination parfaite entre les unités, et une transmission rapide des ordres.

Robert Greene conclut que la vitesse n'est pas seulement une arme contre l'ennemi, mais aussi un moyen de galvaniser ses propres troupes, créant un sentiment de vitalité, d'élan et une énergie contagieuse.

  1. Contrôlez la dynamique : la stratégie de la manipulation

Dans ce chapitre, Robert Greene nous enseigne l'art subtil du contrôle stratégique.

En gros, il explique que le pouvoir ne s’acquiert pas nécessairement en dominant frontalement, mais en influençant la dynamique du jeu. Ainsi, l’enjeu n’est pas de tout contrôler, mais d'orienter les actions de l'adversaire dans la direction souhaitée.

Le général Erwin Rommel maîtrisait cet art. En effet, en 1941, il renversa complètement la dynamique du conflit en Afrique du Nord en prenant l'initiative contre les Britanniques. Bien qu'inférieur en nombre, Rommel sema la panique par des mouvements rapides et imprévisibles, forçant l'ennemi à réagir et donc à le suivre sur son terrain. Il devenait le chef d’orchestre invisible de leurs décisions.

L’auteur des 33 lois de la guerre partage 4 principes pour manipuler la dynamique :

Talonner l'ennemi : prendre l’initiative et ne jamais laisser l’adversaire reprendre l’initiative, mener la danse en maintenant la pression.

Déplacer le champ de bataille : attirer l'adversaire sur un terrain qui lui est inconnu (physiquement ou mentalement).

Le pousser à la faute : frustrer notre adversaire pour l’affaiblir, jusqu’à ce qu’il commette des erreurs par épuisement ou tension.

Instaurer un contrôle passif : lui faire croire qu'il contrôle, qu’il détient les rênes : une illusion qui endort sa vigilance.

La stratégie de la manipulation est aussi celle qu’utilisa Mae West : il réussit à prendre le contrôle à Hollywood en déplaçant progressivement le conflit vers un terrain où les producteurs n'avaient pas l'habitude de se battre.

De même, Robert Greene décrit comment le général Sherman reprit le contrôle de la dynamique de la guerre de Sécession en choisissant d'opérer indirectement plutôt que de lancer des attaques frontales contre les positions confédérées.

  1. Visez là où cela fait mal : la stratégie du centre de gravité

Robert Greene nous enseigne ici que tout pouvoir repose sur un pivot, un centre de gravité. Pour vaincre efficacement un adversaire, il faut donc identifier cette ressource, ce lien dont dépend toute la structure adverse.

En guise d’exemple, l'auteur relate l’histoire de Scipion l'Africain qui, plutôt que d'affronter directement le redoutable Hannibal, s’attaqua progressivement aux véritables sources de son pouvoir : d'abord l'Espagne puis Carthage et ses campagnes fertiles. Le reste s’effondra presque de lui-même.

Ainsi, pour Robert Greene, la vraie stratégie consiste nonpas à se laisser impressionner par les apparences de force, mais à repérer ce qui fait réellement tenir l'adversaire debout. Il compare cette approche à un boxeur qui perd l'équilibre lorsque ses jambes faiblissent, bien avant que ses poings ne soient neutralisés.

Selon l'auteur, le centre de gravité peut prendre diverses formes : bases économiques, soutien populaire, communication entre différentes unités, ou réputation. Il cite notamment le général Võ Nguyên Giáp qui comprit que le véritable centre de gravité des Américains durant la guerre du Vietnam, ce n’était pas leur armée mais l’opinion publique.

  1. Divisez pour mieux régner : la stratégie de la conquête par la division

Un groupe uni est difficile à abattre, mais une fois divisé, il devient vulnérable. Telle est la base de la stratégie de la conquête par la division, qui consiste à neutraliser un ennemi en fractionnant ses forces.Pour l’illustrer, Robert Greene retrace la bataille de Marathon (490 av. J.-C.) au cours de laquelle les Athéniens exploitèrent la division des troupes perses pour remporter une victoire décisive, avant de courir défendre leur cité contre le reste de l'armée adverse.

Selon l’auteur, cette stratégie fonctionne car elle exploite une peur universelle : tout être humain redoute profondément l'isolement face au danger. Ce besoin fondamental d'appartenance à un groupe constitue une vulnérabilité que les grands stratèges ont su exploiter à travers l'histoire.

Ce fut le cas notamment de Samuel Adams à l’échelle politique : il utilisa cette stratégie pour semer la division entre l'Angleterre et ses colonies américaines, sapant progressivement les liens d'attachement qui les unissaient jusqu'à provoquer la Révolution américaine.

Dans ce chapitre, Robert Greene examine alors comment maintenir la cohésion à l’intérieur de notre propre camp.

Pour cela, il est capital, affirme l’auteur, de garder la main en occupant le centre du pouvoir. Et de cultiver la rivalité entre nos soutiens en obligeant chaque membre à rivaliser pour obtenir notre approbation. Mieux vaut des alliés qui cherchent à vous plaire que des factions qui s’organisent dans votre dos.

En guise d’exemples de leaders ayant brillamment mis en œuvre cette approche, l’auteur cite ici la reine Élisabeth Iᵉʳ et Alfred Hitchcock.

  1. Attaquez le flanc vulnérable de l'adversaire : la stratégie du pivotement

La loi du pivotement démontre qu'une attaque frontale renforce généralement la résistance de l'adversaire, quand l’approche latérale, elle, désoriente.

Cette stratégie indirecte, indique Robert Greene, a été exploitée par Napoléon Bonaparte à Arcole en 1796 : ce dernier déstabilisa les Autrichiens non en les affrontant directement, mais en menaçant leurs arrières (lignes de ravitaillement et de communication). Il les força, de cette façon, à pivoter et à se déséquilibrer.

Robert Greene souligne que le moment où l'ennemi pivote pour faire face à une attaque latérale est un instant de vulnérabilité critique, car il perd alors sa cohésion et son équilibre. Cette approche est particulièrement efficace dans notre monde moderne où les gens sont devenus excessivement défensifs et s'entourent de murailles psychologiques.

Jules César, par exemple, savait parfaitement exploiter le facteur psychologique. Contre toute attente, il faisait souvent preuve de clémence envers ses ennemis, transformant leur animosité en loyauté : en leur offrant le pardon, il cassait leur haine et les ralliait à sa cause. Cette approche subtile mais dévastatrice lui a permis de vaincre Pompée, pourtant militairement supérieur.

"Il faut à tout prix apprendre à contrôler les pulsions qui vous poussent au combat frontal" conclut alors l’auteur.

  1. Enveloppez l'ennemi : la stratégie de l'annihilation

Une des plus vieilles tactiques militaires reste aussi l’une des plus efficaces : l’encerclement.

C’est le fondement de la stratégie de l’annihilation que développe ici Robert Greene : anéantir complètement un adversaire en ne lui laissant aucune issue.

D’après Robert Greene, l'encerclement est la seule stratégie à laquelle l'être humain ne peut s'adapter. Lorsque l’on coupe toutes les issues à l’adversaire, ce dernier perd non seulement sa mobilité physique mais aussi son équilibre psychologique, ses repères. Il se met alors à paniquer et finit par s’écrouler.

En témoigne la bataille d'Isandlwana (1879) où les Zoulous, technologiquement inférieurs, vainquirent les Britanniques en déployant leur formation caractéristique "des cornes, du torse et des reins" pour les encercler totalement.

L'auteur explique que cette stratégie fonctionne aussi bien dans les batailles quotidiennes que militaires. Il cite l'exemple de John D. Rockefeller qui encercla économiquement ses concurrents pétroliers en les attaquant sur tous les fronts. Il créa alors un sentiment d'impuissance qui les poussa à abandonner malgré leurs ressources encore suffisantes.

Cela fonctionne remarquablement bien aussi au niveau psychologique : "Faire en sorte que l'adversaire se sente vulnérable aux attaques de tous côtés est aussi efficace que s'il était physiquement encerclé" écrit l’auteur des 33 lois de la guerre. En somme, faire croire à quelqu’un qu’il n’a plus aucune marge de manœuvre suffit souvent à le briser.

Attention toutefois, prévient l’auteur : une stratégie d'encerclement imparfaite pourrait nous laisser vulnérable à une contre-attaque désespérée de l'ennemi.

  1. Mettez votre adversaire en situation de faiblesse : la stratégie du fruit mûr

Robert Greene oppose ici deux visions de la guerre. Chacune reflète des philosophies différentes :

D'un côté, la guerre d'usure, ancrée dans la mentalité occidentale, qui cherche à écraser l'ennemi par la force brute.

De l'autre, l'art de la manœuvre, développé notamment en Chine ancienne, qui affaiblit l'adversaire avant même le début du combat, jusqu’à ce qu’il tombe par lui-même.

Pour l’auteur, la seconde approche est bien plus élégante… et efficace : en effet, plutôt que de s'épuiser dans des batailles frontales, le stratège habile manœuvre pour placer l'ennemi en position de faiblesse. "Un ennemi placé en position de faiblesse succombe plus facilement à la pression psychologique", affirme Robert Greene.

L’auteur fait ensuite référence à Sun Tzu qui a codifié cette philosophie en soulignant, par ailleurs, que les coûts d'une guerre augmentent exponentiellement avec le temps.

Il souligne également que cette maîtrise de la manœuvre repose sur une planification minutieuse qui doit permettre une grande flexibilité pour s'adapter aux imprévus.

C’est ce qu’a fait Napoléon, en 1800 : il parvint à vaincre les Autrichiens à Marengo grâce à sa capacité d'adaptation exceptionnelle. Malgré plusieurs revers, celui-ci sut tenir compte des changements de situation et retourner chaque imprévu à son avantage.

L'auteur partage enfin quatre règles d’or de cette stratégie dite du fruit mûr :

Penser au plan B => avoir toujours plusieurs options,

Préserver sa marge de manœuvre => rester mobile,

Imposer des dilemmes à l'ennemi => pas que de simples obstacles,

Créer un maximum de désordre, de confusion => pour dérouter l'adversaire.

Dans un dernier exemple, Robert Greene met en lumière ces principes. Il analyse comment Roosevelt, lors de l'élection présidentielle de 1936, fit vaciller ses adversaires républicains : il les manipula en les laissant s'ancrer dans une position modérée avant de se positionner clairement à leur gauche, les mettant ainsi face à un dilemme qu’ils ne pouvaient résoudre.

  1. Négociez en avançant : la stratégie de la guerre diplomatique

Pour Robert Greene, la négociation n'est qu'une autre forme de guerre. Une guerre où l'on tente d'obtenir par la discussion ce qu'on ne peut gagner par le combat direct.

Ainsi, elle ne doit jamais vous faire ralentir, mais servir votre avancée. Philippe de Macédoine, maître du double jeu, l’avait bien compris.

Ce roi de Macédoine utilisa, en effet, la négociation comme une extension de sa stratégie militaire pour dominer la Grèce antique.

À travers cette histoire, l'auteur montre que Philippe ne s'inquiétait jamais de tenir parole : "La confiance n'est pas une question d'éthique ; c'est une manœuvre de plus."

Robert Greene en tire une leçon stratégique : il faut toujours négocier depuis une position de force, sans chercher la sincérité mais en utilisant les mots comme des armes, demander plus que nécessaire et être prêt à faire quelques concessions mineures pour paraître généreux.

Il écrit :

"Comme dans une bataille, placez-vous toujours en position de force lorsque vous négociez. Si vous êtes faible, usez des négociations pour gagner du temps, pour retarder le combat jusqu’à ce que vous soyez prêt."

Il poursuit :

"Montrez-vous conciliant, non pour le plaisir d’être gentil, mais dans le cadre d’une stratégie. Une fois en position de force, prenez autant que vous pouvez avant et pendant les négociations ; il sera toujours temps plus tard de rendre quelques parcelles de ce que vous aurez pris : jouez les grands seigneurs. Ne vous inquiétez ni de votre réputation, ni du fait de briser la confiance d’autrui. Vous verrez : c’est incroyable à quel point les gens oublient vos promesses non tenues quand vous êtes en position de force, capable d’offrir des choses qui servent leurs intérêts."

Pour renforcer son propos, Robert Greene analyse comment le prince Metternich manipula avec finesse l'émissaire russe Taticheff en 1821. Le ministre autrichien commença par paraître superficiel pour diminuer la méfiance de son adversaire, puis orienta habilement les discussions vers des thèmes abstraits pour le désarçonner, avant de simuler une amitié sincère pour gagner sa confiance.

Robert Greene conclut que les gens ne se montrent conciliants que lorsque c'est dans leur intérêt ou qu'ils y sont contraints. Il conseille donc de maintenir la pression pendant les négociations et de continuer à avancer.

C’est ce qu’a fait Charles de Gaulle, en 1940, alors qu’il se trouvait sans armée ni territoire. Malgré sa position de faiblesse initiale, le Général obtint la reconnaissance des Alliés comme chef de la France libre par sa seule force de persuasion… et sa détermination inflexible.

  1. Sachez poser le point final : la stratégie de sortie

Finir une guerre est souvent plus difficile que la commencer, soutient l’auteur des 33 lois de la guerre.

Dans cette dernière loi offensive, il insiste donc sur l’importance de savoir terminer un conflit au bon moment. "Vous serez toujours jugé sur l'issue du conflit", prévient-il. Une conclusion précipitée ou prolongée peut alors ruiner tous les efforts précédents.

Ceux qui s’enlisent finissent par tout perdre.

L’exemple par excellence est celui de l'invasion soviétique de l'Afghanistan en 1979.

Malgré les avertissements du chef d'état-major Orgakov, les dirigeants soviétiques sombrèrent dans un conflit catastrophique sans stratégie de sortie claire qui dura dix ans. Cet enlisement précipita finalement l'effondrement de l'URSS.

Robert Greene distingue ensuite le risque (calculé) du pari (suicidaire) : un risque permet de se remettre d'un échec, tandis qu'un pari peut entraîner une spirale incontrôlable. L'invasion afghane, note l’auteur, était un pari où trop de variables échappaient au contrôle soviétique.

À l’opposé de la guerre URSS - Afghanistan, l'auteur présente la campagne électorale de Lyndon Johnson en 1937 comme modèle d'excellence stratégique. Non content de gagner l'élection, Johnson s'employa immédiatement à transformer ses adversaires en alliés, comprenant que la fin d'un projet n'est pas un mur mais une porte vers l'étape suivante.

L’auteur conclut en développant l’idée suivante : une victoire n’est durable que si l’on sait s’arrêter au bon moment. Trop tôt, on laisse le champ libre aux revanches. Trop tard, on s’épuise :.

"Si vous vous arrêtez trop tôt, vous perdez ce que vous avez déjà gagné ; vous ne laissez pas le conflit se développer pour voir où il mène. Si vous vous arrêtez trop tard, vous sacrifiez vos gains ; vous vous épuisez à vouloir plus que vous ne pouvez gérer, et vous vous créez un ennemi âpre qui voudra se venger un jour ou l’autre."

Robert Greene pousse la réflexion : il évoque le fameux "point culminant de la victoire" défini par Carl von Clausewitz, grand philosophe de guerre. Ce point culminant est le moment idéal pour conclure un conflit.

"Pour identifier le point culminant de la victoire, il faut connaître vos ressources, le moral de vos soldats, savoir ce que vous pouvez gérer, identifier le moindre relâchement de l’effort. Si vous passez à côté et continuez à vous battre, vous subirez de nombreux effets secondaires indésirables : l’épuisement, les escalades de violence, et pire encore."

Robert Greene cite notamment l'exemple des Japonais qui, en 1905, surent s'arrêter au bon moment face à la Russie, sécurisant ainsi leurs gains.

Comme mot de la fin, l’auteur nous invite à développer un "troisième œil stratégique" qui reste focalisé sur l'avenir tout en étant opérationnel dans l’instant. À l'image de Lyndon Johnson qui sut transformer ses victoires électorales en tremplin pour ses projets futurs

Partie V. La guerre non conventionnelle (ou guerre sale)

Introduction

Robert Greene introduit la 5ème partie de son livre "Stratégie : les 33 lois de la guerre" en stipulant que la guerre non conventionnelle représente l'évolution naturelle et inévitable de l'art stratégique.

En effet, explique l’auteur, quand toutes les stratégies classiques ont été épuisées, que toutes les règles ont été jouées, les esprits les plus stratèges vont inventer de nouvelles méthodes. Des méthodes plus extrêmes, manipulatrices, au péril des codes moraux traditionnels.

Va alors naître une "guerre sale" : une guerre moins frontale, plus politique, plus perverse, et bien souvent, amorale.

Et ce type de guerre, ajoute l’auteur, s’est infiltré dans tous les domaines de notre société : politique, affaires, relations humaines. Son secret ? Frapper là où on ne vous attend pas, manipuler les apparences, subvertir les règles. Dans un monde saturé de conventions, l’imprévisible devient une arme, et la ruse, un levier de puissance.

  1. Élaborez un savant mélange de vrai et de faux : les stratégies de perception

La stratégie de perception nous enseigne que la guerre se gagne souvent avant même le premier coup porté, dans l’esprit de l’adversaire. Et donc que la manipulation des perceptions peut devenir une arme stratégique redoutable.

Robert Greene le démontre à travers l’exemple du Débarquement de Normandie de 1944 : les Alliés ont piégé Hitler non par la force, mais en jouant avec ses croyances. En lui faisant croire à une attaque par le Pas-de-Calais, ils l’ont trompé dans ses propres certitudes.

L'auteur explique que le contrôle des perceptions est l'essence même du pouvoir stratégique : celui qui parvient à empêcher son adversaire de voir ou comprendre ce qui se passe autour de lui obtient un avantage décisif.

Et il s’avère que les perceptions humaines sont facilement manipulables car elles passent toujours par le filtre des émotions.

La clé d'une tromperie efficace, nous dit l'auteur, n'est pas de créer des illusions sophistiquées mais d'imbriquer subtilement le vrai du faux. Comme le montre l'exemple du jour J - le 6 juin 1944 : les Alliés mêlèrent habilement vérités banales et petits mensonges, tout en exploitant les attentes et les peurs de Hitler qui souhaitait presque croire à une attaque par le Pas-de-Calais.

Robert Greene présente six formes de supercherie militaire applicables à tous les terrains de la vie quotidienne :

La façade => paraître plus faible qu'on ne l'est.

L'appeau => détourner l'attention vers un faux objectif.

Le camouflage => se fondre dans l'environnement.

Le modèle => établir puis rompre un schéma attendu.

La désinformation => faire parvenir de faux renseignements, semer de fausses pistes.

Des ombres parmi les ombres => entretenir plusieurs niveaux d'ambiguïté.

L'auteur conclut que l’art de la tromperie, c’est de mêler si subtilement vérité et fiction qu'elles deviennent indiscernables, comme dans un tableau d'Escher.

  1. Soyez imprévisible : la stratégie du contre-pied

La stratégie du contre-pied montre que l'imprévisibilité constitue un avantage stratégique majeur dans une bataille.

L'auteur retrace l'évolution constante des stratégies militaires et explique comment chaque innovation tactique, si brillante soit-elle, devient toujours vite conventionnelle et donc inefficace. Pour Robert Greene, c’est ce cycle implacable de renouveau stratégique qui a progressivement mené à ce qu’il appelle la guerre non conventionnelle ou "guerre sale".

L'auteur présente les quatre principes fondamentaux de cette guerre non conventionnelle :

Sortir des sentiers battus => innover au-delà des expériences connues de l'adversaire, surprendre là où personne n’a osé aller.

Faire de l'extraordinaire avec de l'ordinaire => surprendre après avoir établi un contexte prévisible.

Être irrationnel à bon escient => désarçonner par un comportement occasionnellement imprévisible.

Rester en mouvement => ne jamais se figer dans un rôle, renouveler constamment ses approches.

Robert Greene illustre ces principes à travers plusieurs exemples :

Hannibal manipulant les Romains par des manœuvres constamment imprévisibles.

Mohamed Ali déstabilisant Sonny Liston par un comportement et un style de boxe radicalement non conventionnels.

Le général Grant abandonnant ses lignes de ravitaillement pour gagner en mobilité.

Les guerriers Windigokan terrorisant leurs ennemis par leur irrationalité apparente.

Tous ont su créer la confusion par des comportements inattendus.

L'auteur conclut que la vraie imprévisibilité ne vient pas d'actions étranges ou choquantes, mais d'idées qui contestent le familier et l'attendu. C’est une stratégie de rupture qui transforme l’ordinaire en déflagration mentale.

Comme le démontre l'exemple de Duchamp et de son urinoir transformé en "Fontaine", c'est le décalage entre le banal et l'inattendu qui crée la puissance déstabilisatrice du non-conventionnel.

  1. Occupez le terrain de la moralité : la stratégie de la vertu

Dans cette partie du livre "Stratégie : les 33 lois de la guerre", Robert Greene révèle que la moralité, la cause juste peuvent être une arme stratégique redoutable.

Robert Greene le démontre à travers l'affrontement entre Martin Luther et le pape Léon X au XVIe siècle : Luther transforma une simple critique théologique des indulgences en une puissante révolution religieuse. En s’emparant du terrain moral, il rendit chaque attaque contre lui suspecte… et galvanisa les foules.

L'auteur explique que toute guerre politique nécessite le soutien des masses, ce qui exige de défendre une cause juste. Luther comprit parfaitement cette dynamique en dénonçant publiquement la corruption et l'hypocrisie de l'Église catholique. Plus le pape l'attaquait, plus sa popularité croissait.

Les clés de la stratégie de la vertu pour Robert Greene sont les suivantes :

Dépeindre l'adversaire comme autoritaire et hypocrite,

Utiliser un langage simple et direct, proche du peuple,

Permettre aux gens d'exprimer leurs frustrations latentes en les exacerbant,

Provoquer l'ennemi pour qu'il réagisse de façon disproportionnée.

Par ailleurs, pour appliquer cette stratégie, Robert Greene recommande de pratiquer ce que l'on prêche, d'attaquer les hypocrisies de l'adversaire, et de faire en sorte que l'ennemi tire le premier.

L'auteur souligne que la moralité est devenue une "manœuvre externe" selon la terminologie du général Beaufre : un champ de bataille abstrait qui peut paralyser complètement un adversaire sans tirer un seul coup de feu.

Mais attention : les guerres morales, parce qu’elles touchent aux valeurs, sont souvent sans compromis, plus longues et plus sanglantes que les conflits d’intérêts.

  1. Masquez la cible : la stratégie du vide

Dans ce chapitre, Robert Greene analyse en quoi l'absence de cible peut constituer une stratégie dévastatrice.

Il revient sur l'invasion catastrophique de la Russie par Napoléon en 1812, au cours de laquelle le tsar russe Alexandre utilisa la stratégie du vide pour vaincre l'armée française… en lui refusant la bataille. Pas de cible, pas d’affrontement. Juste le froid, la fuite, et l’épuisement.

Ce principe, celui de la guerre d’usure et de la guérilla, exploite une faille psychologique : la nature humaine ne supporte pas le vide. Nous détestons le silence, l'inactivité et l'isolement. En refusant à l'adversaire une cible qu'il puisse frapper, en restant insaisissable et en pratiquant des attaques de guérilla, on désarme alors l’ennemi.

Cette stratégie, indique l’auteur, s'est développée historiquement comme le "négatif" de la guerre conventionnelle. Plutôt que de concentrer les forces en vue d’une bataille décisive, l'art de la guérilla disperse les combattants, évite les affrontements directs et utilise le temps comme une arme.

Ainsi, pour appliquer la stratégie du vide, nous devons :

Organiser de petites "cellules" mobiles et autonomes,

Utiliser les ressources de l'ennemi contre lui-même,

Faire du temps un allié.

La clé, c’est la fluidité : rester perpétuellement insaisissable pour empêcher l'adversaire de s'adapter, jusqu'à ce qu'il s'effondre sous le poids de sa propre frustration.

  1. Donnez l'illusion de travailler dans l'intérêt des autres : la stratégie de l'alliance

Robert Greene affirme que pour avancer efficacement sans trop d'efforts, il faut se créer un réseau d'alliances en constante évolution. Car finalement, pourquoi se battre si d’autres peuvent le faire à notre place ?

Pour étayer son idée, l'auteur revient sur l'histoire de Louis XI, surnommé "l'Universelle Araigne" (araignée universelle) en raison de sa capacité à piéger ses adversaires. Louis XI ne pouvait pas livrer bataille directement contre Charles le Téméraire, duc de Bourgogne car il avait une puissance militaire supérieure. Il tissa donc patiemment sa toile, courtisant les Suisses pendant des années et forgea ainsi des alliances qui dérouta son rival.

Robert Greene raconte que Louis XI utilisa également cette alliance comme une véritable machine de guerre : il manipula notamment le roi anglais Édouard IV pour qu'il rompe son pacte avec la Bourgogne. Par ces manœuvres habiles, il parvint à isoler le Téméraire et à le pousser vers sa propre destruction contre les redoutables phalanges suisses, et ce, sans perdre un seul soldat français.

Pour l’auteur des 33 lois de la guerre, les parfaits alliés ne sont pas les plus puissants mais ceux qui répondent à un besoin précis. Ce sont ainsi ceux qui vous apportent ce qui vous manque : ils compensent vos faiblesses, font le sale travail, se battent pour vous.

L’exemple du psychothérapeute Murray Bowen illustre parfaitement cette idée. Confronté à une famille en pleine crise, il fit le choix de refuser toute alliance émotionnelle. Au lieu de se laisser piéger par les confidences et les jeux d’influence, il prit le parti de rapporter systématiquement les ragots et critiques aux personnes directement concernées. Cette posture neutre, à contre-courant des réflexes habituels, lui donna une autorité inattendue. En ne jouant le jeu de personne, il devint paradoxalement la figure la plus respectée, et la plus influente, de la pièce.

L'auteur décrit trois variantes de la stratégie de l’alliance :

Feindre d'aider une personne pour servir ses propres intérêts, comme Salvador Dalí organisant des événements caritatifs qui finalement le servaient principalement.

Jouer le médiateur pour mieux orienter les forces en coulisses, comme le fit le prince Metternich pour l'Autriche.

Briser les alliances adverses : en d’autres termes, diviser pour mieux régner comme Cortés le fit avec les Aztèques.

Robert Greene conclut en recommandant de rester indépendant et flexible dans ses alliances. Il conseille de choisir ses partenaires selon les nécessités du moment plutôt que par loyauté ou sentimentalisme. En gros, l’art de l’alliance n’est pas de se lier… mais de garder sa liberté en feignant l’engagement.

  1. Tendez à vos ennemis la corde pour se pendre : la stratégie de la domination

Nos pires ennemis ne sont pas toujours devant nous. Ils sont parfois assis à notre table.

Dans cette 28ème loi de la guerre, Robert Greene met en effet en lumière que nos pires dangers ne viennent pas de nos ennemis évidents, mais des personnes censées être de notre côté. Selon lui, nous devons donc combattre simultanément sur deux fronts : contre nos adversaires déclarés et contre les collègues qui complotent contre nous.

Et face à ces rivaux masqués, la stratégie la plus efficace, assure l’auteur, est de jouer sur leurs faiblesses psychologiques, de manipuler leur failles - orgueil, jalousie, rigidité - jusqu’à ce qu’ils s'autodétruisent. Car Robert Greene soutient que chaque personne possède des vulnérabilités qui, sous pression, la font réagir de façon disproportionnée.

Le général Grant, par exemple, fit tomber son ambitieux subordonné McClernand en le poussant subtilement à l'insubordination. De même, l'abbé de Caumartin ridiculisa l'orgueilleux évêque de Noyon par une parodie de son style pompeux, le conduisant à s'humilier publiquement.

Les techniques de la stratégie de domination sont les suivantes :

Provoquer le doute et semer l'insécurité chez l'adversaire.

Parodier subtilement ses manières pour le déstabiliser.

Placer une idée fixe dans son esprit, comme le fit le samouraï Bokuden.

Susciter des émotions négatives qui altèrent son jugement.

Particulièrement redoutable est la tactique consistant à faire perdre son sang-froid à un adversaire rigide, comme Lee Atwater le fit avec le sénateur Dole durant la campagne présidentielle de 1988. De même, Joan Crawford excellait à pousser ses rivales à révéler leur vraie nature sous leur masque de politesse.

En résumé, la clé du succès, avec cette stratégie, est de rester en apparence irréprochable pendant que votre adversaire s'autodétruit. Ainsi, nous gagnons sans être tenu responsable de sa chute.

  1. Progressez à petits pas : la stratégie du fait accompli

L’être humain accepte le changement… à condition qu’il soit lent. De même, l'ambition trop affichée attire l'hostilité des autres.

Robert Greene raconte comment le général De Gaulle, réfugié à Londres en 1940, construisit méthodiquement son pouvoir par étapes successives : d'abord en obtenant un simple créneau à la BBC, puis en créant les Forces françaises libres, en contrôlant des territoires africains, et finalement en s'imposant comme le leader incontesté de la France libre.

Cet exemple nous montre qu’avancer petit à petit, sans faire de vagues, est un atout considérable : notre adversaire hésite ainsi à réagir à chaque micro-avancée, jusqu’à ce qu’il soit trop tard.

L'auteur explique que cette stratégie repose sur la nature conservatrice de l'être humain : la plupart des gens évitent le conflit et préfèrent accepter un petit changement plutôt que de risquer une confrontation. En prenant possession d'un territoire périphérique, on place l'adversaire devant un choix où il est presque toujours plus avantageux d'accepter le fait accompli que de déclencher un conflit.

Robert Greene illustre ce principe avec l'exemple de Frédéric le Grand qui, en s'emparant d'abord de la petite province de Silésie, put progressivement étendre son pouvoir jusqu'à faire de la Prusse une grande puissance européenne. Si Frédéric avait commencé par envahir un vaste territoire, il aurait provoqué une alliance contre lui.

Pour appliquer efficacement cette stratégie du fait accompli, l’auteur conseille de :

Agir vite, sans prévenir, sans annoncer ses intentions, car la discussion préalable permet à l’opposition de se mobiliser.

Laisser le temps diluer la mémoire des précédentes étapes : le facteur temps joue également un rôle crucial ; les longs intervalles entre chaque étape font oublier vos avancées précédentes et diluent la perception de votre progression.

Créer une dynamique que personne n’ose interrompre : c’est une stratégie redoutable de conquête douce, presque invisible, mais implacable.

  1. Pénétrez les esprits : les stratégies de communication

Pour Robert Greene, la vraie guerre se joue dans les têtes. Et le champ de bataille de la communication est l'esprit des personnes que vous cherchez à influencer.

En témoignent notamment les méthodes non conventionnelles d'Alfred Hitchcock : plutôt que d'expliquer verbalement ce qu'il attendait de ses acteurs, le cinéaste leur faisait vivre des expériences. Il a, par exemple, menotté Madeleine Carroll et Robert Donat pendant des heures dans le but qu'ils ressentent réellement la gêne de leur personnage.

Autre point : une bonne communication ne passe pas par le discours, mais par l’émotion, la suggestion, le silence.

En effet, l’auteur souligne que les mots seuls sont rarement efficaces pour changer les comportements. Il faut, assure-t-il, créer des expériences qui touchent l'interlocuteur au niveau émotionnel. Comme le faisait Machiavel : ses écrits semblaient simples mais contenaient des messages subversifs qui s'infiltraient subtilement dans l'esprit des lecteurs.

Ou encore Socrate, modèle de communication indirecte : plutôt que d'imposer son point de vue, le philosophe amenait ses interlocuteurs à découvrir par eux-mêmes leurs contradictions. Et quand les gens ont l'impression de parvenir seuls à une conclusion, celle-ci s'enracine bien plus profondément.

Voici quelques outils de communication décrits dans cette partie de "Stratégie : les 33 lois de la guerre" pour pénétrer les esprits :

Le silence,

Les détails,

Les messages équivoques, l’ambiguïté volontaire,

Les images,

L’expérience vécue.

Ceux qui pensent avoir trouvé la vérité par eux-mêmes y adhèrent bien plus fermement que si vous la leur imposiez.

  1. Détruisez de l'intérieur : la stratégie de la cinquième colonne

Dans cette partie de "Stratégie : les 33 lois de la guerre", Robert Greene nous enseigne que la façon la plus efficace de neutraliser un ennemi est souvent d'infiltrer ses rangs et de le détruire de l'intérieur.

Pour illustrer cette stratégie insidieuse, l'auteur relate comment Wilhelm Canaris, chef des services secrets allemands sous Hitler, manœuvra secrètement pour saboter les plans de guerre du Führer, tout en gagnant sa confiance.

En fait, précise l’auteur, l'essence de cette stratégie consiste à rester du côté ennemi en apparence, tout en travaillant silencieusement à sa perte.

En effet, lorsqu'on affronte ouvertement un adversaire puissant, on révèle ses intentions et on s'expose à une riposte écrasante. À l'inverse, en infiltrant l'organisation ennemie, on peut recueillir des informations cruciales, diffuser de fausses informations et ainsi encourager l'autodestruction.

En somme, l’infiltration apporte plusieurs avantages : invisibilité, accès à l’information, sabotage à bas bruit.

Salvador Dalí était un maître de cette approche. En rejoignant le mouvement surréaliste, l'artiste espagnol put exploiter sa notoriété tout en sapant progressivement l'autorité de son fondateur André Breton. Dalí divisa le groupe de l'intérieur, puis s'appropria le surréalisme à son profit, devenant aux yeux du monde sa figure emblématique.

Robert Greene compare également cette stratégie dite de la cinquième colonne à "l'éclosion du lotus" des Nord-Vietnamiens qui infiltrèrent la Citadelle de Hué avant l'offensive du Têt. Car, plutôt que d'attaquer les murs d'une forteresse, mieux vaut introduire ses agents à l'intérieur pour ouvrir les portes, conclut l’auteur.

En gros, si cette stratégie est aussi efficace, c’est parce qu’elle permet d’attaquer sans jamais s’exposer : une structure qui pourrit de l'intérieur finit par s'effondrer sous son propre poids.

  1. Dominez tout en feignant la soumission : la stratégie de la résistance passive

Parfois, la plus grande force est dans la retenue. Et l'agressivité la plus efficace peut être celle qui se dissimule derrière une apparence docile. C’est ce que nous enseigne ici Robert Greene à travers la stratégie de la résistance passive.

L’un des exemples les plus parlants est celui du Mahatma Gandhi qui, par sa Marche du Sel de 1930, défia l'Empire britannique sans jamais recourir à la violence. Le Royaume-Uni finit par révéler sa brutalité et par perdre la guerre de l’image.

L'auteur explique que la force de cette approche réside dans l'exploitation des contradictions morales de l'adversaire. Gandhi savait que les Britanniques se considéraient comme une nation civilisée et libérale. En restant pacifique face à leur brutalité, il les piégeait dans leur culpabilité et paralysait leur capacité d'action.

Le principe fondamental est d'agir sur deux fronts simultanément : paraître passif et docile à l'extérieur (soumission), tout en manœuvrant agressivement en coulisses (stratégie et fermeté). Cette dualité va alors dérouter l'adversaire qui ne peut identifier clairement la menace.

Jean-Jacques Dessalines lors de sa fausse capitulation à Haïti, Franklin D. Roosevelt pour obtenir un troisième mandat présidentiel, le prince diplomate Metternich face au tsar Alexandre Ier (il parut se soumettre à ses idées libérales tout en le manipulant subtilement pour qu'il devienne conservateur) ... Tous ont utilisé cette forme subtile de résistance pour faire tomber leurs ennemis de leur propre main.

Robert Greene termine en nous prévenant que la résistance passive est devenue une forme d'agression courante dans notre société où l'expression directe des sentiments négatifs est mal vue. Il nous conseille donc d'apprendre à reconnaître ces comportements et à y répondre avec calme et rationalité.

  1. Semez incertitude et panique par des actes de terreur : la stratégie de la réaction en chaîne

Robert Greene conclut son ouvrage en analysant l'ultime stratégie non conventionnelle : le terrorisme.

Il revient sur Hasan-i-Sabah, chef des ismaéliens nizarites au XIe siècle, qui sema la terreur et parvint à paralyser l'Empire perse par des assassinats ciblés et imprévisibles de personnalités influentes.

La terreur, explique l’auteur, fonctionne en provoquant une réaction en chaîne psychologique : une petite action choquante déclenche, par peur, une série d'effets secondaires (paranoïa, division politique, mesures sécuritaires excessives) qui vont finir par affaiblir considérablement l'adversaire.

Une minorité peut ainsi paraître beaucoup plus puissante qu'elle ne l'est réellement : le terrorisme n’a pas besoin de vaincre… juste de faire paniquer.

L'évolution du terrorisme est ensuite illustrée à travers l'exemple de la Narodnaya Volia, groupe révolutionnaire russe du XIXe siècle qui, par ses attentats à la bombe, espérait provoquer une répression gouvernementale qui aliénerait la population. L'auteur montre comment cette stratégie s'est modernisée, notamment avec l'utilisation des médias et le ciblage d'infrastructures critiques dans un monde interconnecté.

Robert Greene termine par des recommandations pour ceux qui font face à une campagne de terreur : éviter la panique collective, contrer par le renseignement plutôt que par la force brute, et occuper le terrain moral.

Il cite Churchill et De Gaulle qui, face aux bombardements allemands et au terrorisme algérien, ont su calmer l'hystérie publique et empêcher la division sociale.

La leçon finale est que face à la terreur, la réponse rationnelle et mesurée est toujours supérieure à la réaction émotionnelle que les terroristes cherchent justement à provoquer.

Conclusion de "Stratégie : les 33 lois de la guerre" de Robert Greene

Les 4 idées clés du livre "Stratégie : les 33 lois de la guerre"

Idée clé n°1 : La véritable bataille commence par une guerre contre soi-même

Dans cet ouvrage, Robert Greene démontre avec force que toute stratégie véritable exige d'abord une maîtrise intérieure.

Nos émotions incontrôlées, nos peurs, notre ego surdimensionné constituent souvent nos véritables adversaires. Avant d'affronter l'arène extérieure, nous devons triompher de nos propres démons : la peur, la colère, l’orgueil ou l’impulsivité.  

Car ce ne sont pas nos ennemis extérieurs qui nous font trébucher, mais nos réactions incontrôlées. Tant que ces failles nous dirigent, impossible de penser avec clarté ni d'agir avec précision.

Le stratège lucide est celui qui s’observe, s’éduque, et se discipline. À l'image de l'amiral Nelson fit mine de ne pas voir l’ordre de retraite en portant sa longue-vue à son œil aveugle. Il a su garder la tête froide, rester maître de lui-même, même en pleinetourmente.

Cette maîtrise ne vient pas naturellement : elle se forge par l’expérience, en se confrontant volontairement aux situations tendues, comme le faisait le général Patton qui cherchait les frictions pour s’endurcir.

Robert Greene évoque aussi le "Fingerspitzengefühl", ce "sentiment au bout des doigts" : une forme d’intuition stratégique affinée par l’expérience, qui permet de sentir instinctivement l’évolution d’une situation sans avoir besoin d’y réfléchir longuement.

Avant de vaincre les autres, il faut donc apprendre à se commander soi-même.

Idée clé n°2 : La guerre défensive est l’art de transformer ses faiblesses en armes

Dans "Stratégie : les 33 lois de la guerre", Robert Greene nous rappelle une vérité contre-intuitive mais redoutablement puissante : la force ne réside pas toujours dans l’assaut, mais souvent dans la patience, la retenue, et l’art de laisser l’autre s’épuiser.

Ainsi, la guerre défensive, loin d'être une position de faiblesse, constitue le summum de la sagesse stratégique. En refusant le combat immédiat, en sacrifiant de l'espace pour gagner du temps (cette ressource infiniment plus précieuse), nous pouvons retourner la dynamique en sa faveur.

La reine Élisabeth I, qui résista à l’invincible Armada espagnole en temporisant habilement, Mao Zedong qui transforma la Longue Marche en levier de résistance, ou encore les généraux russes, qui laissèrent Napoléon s’enfoncer dans la neige jusqu’à l’épuisement : tous ont triomphé non par la force brute, mais en sachant reculer stratégiquement pour mieux contre-attaquer. En sachant attendre, feindre la faiblesse, et frapper au moment exact.

Le véritable art défensif réside ainsi dans cette capacité à jouer sur les perceptions, à paraître plus fort ou plus vulnérable selon les circonstances, jusqu'à ce que l'adversaire s'épuise de lui-même. En cela, il est finalement bien plus redoutable que n’importe quel choc frontal.

Idée clé n°3 : Les guerres se gagnent davantage par la manipulation des perceptions que par la force brute

Pour Robert Greene, la véritable victoire ne se joue pas sur le champ de bataille, mais dans l’esprit des combattants. La stratégie, dans son essence, est un jeu d’apparences, une guerre psychologique où l’illusion vaut parfois mille armées.

Les plus grands stratèges l’ont compris : ce n’est pas la force brute qui fait basculer l’histoire, mais la manière dont l’ennemi perçoit la réalité.

Robert Greene le démontre à travers des victoires emblématiques : le débarquement de Normandie (succès fondé sur une gigantesque opération d’intoxication), la conquête éclair d’Alexandre face aux Perses (rendue possible par un mélange de vitesse, d’audace et de brouillage psychologique) ou encore le prince Metternich, fin observateur de la psyché de Napoléon, qui jouait ses coups en anticipant ses réactions.

Qu'il s'agisse de créer une présence menaçante pour dissuader l'attaque, de semer la panique par l'imprévisibilité comme le faisait Stonewall Jackson, ou d'exploiter les faiblesses psychologiques adverses, les batailles les plus décisives se jouent souvent sans qu'un seul coup ne soit tiré.

En somme, manipuler les perceptions, c’est gagner avant même que la guerre ne commence. Il s’agit de projeter une image (de force, de chaos, ou de vulnérabilité feinte) pour pousser l’autre à mal juger, à sur-réagir, ou à reculer.

Et dans cette guerre invisible, celui qui comprend l’ennemi mieux que ce dernier ne se comprend lui-même détient déjà la victoire.

Idée clé n°4 : Une des meilleures stratégies est de viser le cœur, pas les muscles : frapper là où tout se joue

Pour Robert Greene, une stratégie vraiment efficiente ne s’attaque pas aux apparences de force, mais aux fondations invisibles du pouvoir. Car chaque structure de pouvoir (armée, empire, organisation) repose sur un point névralgique dont dépend toute sa solidité : une faille logistique, un soutien psychologique, un pilier économique.

Le rôle du stratège n’est alors pas de foncer tête baissée, mais de repérer ce centre de gravité… et de le faire s’effondrer.

Et pour affirmer que la victoire appartient ainsi à celui qui identifie et frappe ce point névralgique, Robert Greene s’appuie sur des exemples parlants : Scipion l’Africain qui, au lieu d’affronter Hannibal en Italie, prit Carthage à revers en attaquant l’Espagne et l’Afrique, ou encore le général Giáp qui, pendant la guerre du Vietnam, comprit que la vraie faiblesse des États-Unis n’était pas leur armée, mais l’opinion publique chez eux, et s’employa à la miner patiemment.

Pour Robert Greene, ce type d’approche, indirecte, patiente, presque chirurgicale, qui refuse l'affrontement là où l'ennemi est fort pour cibler ses plus grandes vulnérabilités, incarne le sommet de la pensée stratégique.

Plutôt que de s’épuiser en batailles frontales et là où l’adversaire est prêt, le stratège l’isole, l’épuise, le déstabilise de l’intérieur. Jusqu’à ce qu’il chute de lui-même, sans avoir eu besoin de le pousser, tel un fruit mûr.

Qu'est-ce que le livre "Stratégie : les 33 lois de la guerre" vous apportera ?

Au-delà du traité de tactiques militaires, "Stratégie : les 33 lois de la guerre" est un véritable manuel de survie mentale pour celles et ceux qui évoluent dans un monde de compétition, de jeux d’influence et de tensions latentes.Robert Greene y livre une grille de lecture pour aborder les conflits, petits ou grands, non plus comme des menaces, mais comme des opportunités de croissance stratégique.

Grâce à des récits historiques fascinants, de toutes époques, cultures et pays, vous apprendrez à :

Décrypter les intentions cachées derrière les comportements,

Anticiper les manœuvres de vos adversaires ou concurrents,

Planifier vos mouvements plusieurs coups à l'avance,

Agir au bon moment : vous apprendrez quand avancer, quand reculer, quand frapper, et surtout quand ne rien faire.

Enfin, face aux situations tendues et conflictuelles que vous rencontrerez inévitablement, les 33 principes stratégiques de ce livre vous aideront à développer ce que Robert Greene appelle le "troisième œil stratégique" : cette faculté à rester pleinement ancré dans le présent, tout en gardant une vision claire de l’avenir.Particulièrement intéressant pour les entrepreneurs, les décideurs, les leaders, les esprits stratégiques ou ambitieux, "Stratégie : les 33 lois de la guerre" vous aide à comprendre que le véritable leadership ne réside pas dans la force brute mais dans une subtile combinaison d'adaptabilité, de patience et d'action ciblée au moment opportun.

Pourquoi lire "Stratégie : les 33 lois de la guerre" ?

« Les 33 lois de la guerre » est un « guide » pour tous ceux qui veulent comprendre les dynamiques de pouvoir. D’ailleurs, Robert Greene ne se contente pas de prodiguer des conseils : il apporte un autre regard sur le conflit et le leadership.

À la fois philosophique et concret, cet ouvrage est un allié stratégique à tous les dirigeants, entrepreneurs ou toute personne exposée à des jeux de pouvoir. Il permet d’affiner son jugement, d’éviter les décisions précipitées, et de faire preuve de sang-froid face à l’adversité.Mais il parle aussi à chacun de nous, car il nous aide à agir avec intelligence dans les tensions du quotidien, qu’elles soient professionnelles, sociales ou personnelles.

Points forts :

Une richesse d'exemples historiques captivants qui rendent les concepts stratégiques accessibles et mémorables.

L'application pratique des principes militaires à tous les domaines de la vie moderne, de l'entreprise aux relations personnelles.

La profondeur psychologique des analyses qui dépasse la simple tactique pour explorer les ressorts de la nature humaine.

La structuration méthodique qui permet d'utiliser l'ouvrage comme un véritable manuel de référence stratégique.

Points faibles :

La densité et la longueur du livre peuvent paraître intimidantes pour certains lecteurs pressés.

L'approche parfois machiavélique de certaines stratégies qui pourrait heurter les sensibilités éthiques les plus strictes.

Ma note :

★★★★★

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Mon, 06 Oct 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13123/Stratgie-les-33-lois-de-la-guerre
Power | Les 48 lois du pouvoir http://www.olivier-roland.fr/items/view/13109/Power-Les-48-lois-du-pouvoir

Résumé de "Power : les 48 lois du pouvoir" de Robert Greene : dans ce manuel stratégique impitoyable, Robert Greene analyse trois millénaires de pouvoir à travers 48 lois universelles. Il décode comment les grands maîtres de l'histoire ont acquis, conservé et exercé leur domination grâce à la manipulation, la ruse et la psychologie humaine. Il nous enseigne, de cette façon, les mécanismes secrets du pouvoir et l'art subtil de l'influence et de la stratégie dans nos relations professionnelles et sociales modernes.

Par Robert Greene, 2009, 804 pages.

Titre original : "The 48 Laws of Power", 2010, 476 pages

Chronique et résumé de "Power : les 48 lois du pouvoir" de Robert Greene

Préfaces

Première Préface

Dans une première préface, Robert Greene partage un aperçu synthétique de "Power : Les 48 lois du pouvoir".

Chacune des 48 lois du pouvoir y est exposée avec son titre et un court paragraphe qui en résume l'essence et les principes clés. Cette vue d'ensemble permet au lecteur de saisir rapidement la philosophie générale de l'ouvrage.

Deuxième préface

Dans une seconde préface de "Power : Les 48 lois du pouvoir", Robert Greene établit un parallèle entre le monde contemporain et les anciennes cours royales.

À ses yeux, nous vivons toujours entourés de courtisans, même si ceux-ci portent désormais des costumes modernes et dissimulent leur ambition derrière le langage policé de la bienséance.

Ainsi, nul n’échappe au jeu du pouvoir. Et ceux qui s’en prétendent détachés sont souvent les plus habiles manipulateurs, capables de maquiller leur soif d’influence sous les traits de la vertu, de la piété ou de la justice. Le pouvoir, dit-il, se dissimule souvent sous les dehors les plus irréprochables.

Pour jouer ce jeu sans s’y perdre, trois compétences sont, selon lui, essentielles :

Maîtriser ses émotions : colère incontrôlée et amour aveugle brouillent le discernement. Celui qui veut régner sur les autres doit d’abord régner sur lui-même.

Développer une vision panoramique : à l’image du dieu Janus, il faut regarder simultanément vers le passé pour en tirer des leçons, et vers l'avenir pour anticiper les obstacles.

Devenir un illusionniste : la manipulation est un art subtil. Elle exige de porter les bons masques au bon moment, comme les dieux antiques qui agissaient sans jamais se montrer directement.

Robert Greene finit cette préface en présentant son ouvrage comme un manuel pratique et stratégique, condensant trois millénaires de sagesse sur le pouvoir. Les 48 lois qu’il expose peuvent être lues dans leur intégralité pour en avoir une vision globale, ou picorées pour répondre à des situations spécifiques.

Mais il prévient : le pouvoir est une force aussi fascinante que dangereuse. Il ressemble à un labyrinthe enchanteur dans lequel on ne s’aventure pas à moitié. Pour en sortir maître, il faut du courage, du recul, et une volonté inébranlable de comprendre les règles... et ceux qui les écrivent dans l’ombre.

Loi 1 - Ne surpassez jamais le maître

Dans la première loi de son ouvrage "Power : les 48 lois du pouvoir", Robert Greene aborde un principe fondamental du pouvoir : ne jamais surpasser son maître.

Selon l’auteur, il est essentiel de laisser les figures d’autorité, autrement dit ceux qui nous sont supérieurs, se sentir brillantes et dominantes, sans jamais risquer de leur faire de l’ombre.

"Dans votre désir de leur plaire et de les impressionner, ne vous laissez pas entraîner à faire trop étalage de vos talents, ou vous pourriez obtenir l’effet inverse : les déstabiliser en leur faisant de l’ombre. Faites en sorte que vos maîtres apparaissent plus brillants qu’ils ne sont et vous atteindrez les sommets du pouvoir."

1.1 - Sous-estimez vos talents, surélevez votre maître

Pour illustrer ce principe, Robert Greene relate deux exemples historiques opposés :

D’abord, l’histoire de Nicolas Fouquet, surintendant des finances de Louis XIV, qui en organisant une fête somptueuse pour impressionner le roi, provoqua par là sa propre disgrâce.  

À l'inverse, celle de Galilée qui sut habilement flatter les Médicis en associant sa découverte des satellites de Jupiter à leur prestigieuse lignée, et qui consolida ainsi sa position.

1.2 - Deux principes fondamentaux pour ne pas être évincé du pouvoir

Deux principes fondamentaux se dégagent de ces situations :

Évitez de faire de l’ombre à votre supérieur, même si cela découle de vos qualités naturelles.

Ne vous croyez jamais intouchable, même si vous êtes le favori.

Robert Greene conclut en recommandant de toujours mettre en lumière les mérites de son maître, plutôt que les siens. Il compare cette approche aux étoiles qui brillent sans jamais rivaliser avec l’éclat du soleil.

Loi 2 - Ne vous fiez pas à vos amis, utilisez vos ennemis

Dans cette deuxième loi, Robert Greene met en évidence un principe déroutant : il est souvent plus sage de se méfier de ses amis et d’utiliser ses ennemis.

2.1 - Les amis sont imprévisibles, les ennemis sont constants

Pour appuyer son propos, il met en parallèle deux histoires contraires.

D’un côté, la tragique histoire de Michel III, empereur byzantin, qui plaça une confiance aveugle en son ami Basile et le combla de faveurs. Cette confiance excessive finit par le mener à sa perte lorsque Basile le trahit et usurpe le trône. À travers cette histoire, Robert Greene nous met en garde : accorder trop de pouvoir à un ami peut transformer la gratitude en ressentiment et provoquer une trahison.

À l’opposé, l’exemple de l’empereur chinois Zhao Kuang Yin qui, plutôt que de s'appuyer sur ses "amis" de l'armée, les neutralisa habilement et transforma ses ennemis en alliés fidèles grâce à sa clémence et son art de la politique. Cette stratégie, bien que risquée, lui assura une plus grande stabilité.

2.2 - Les pièges de la loyauté amicale

Mais pourquoi les amis peuvent-ils donc devenir dangereux ? Selon Robert Greene, parce que :

Ils dissimulent souvent leurs véritables sentiments.

Trop de faveurs peut engendrer de l’ingratitude et du ressentiment.

Les relations personnelles peuvent compliquer les rapports professionnels.

L’auteur conseille alors de garder ses amis pour l’amitié et de choisir ses partenaires en fonction de leur talent et de leur valeur, non de leur proximité personnelle.

Il va plus loin en suggérant de conserver quelques ennemis, car l’adversité est une force qui maintient notre vigilance, aiguise nos compétences et nous rend plus solides face aux épreuves. Robert Greene écrit :

"Vous avez plus à craindre de vos amis que de vos ennemis. Si vous n’avez pas d’ennemis, trouvez le moyen de vous en faire."

Loi 3 - Dissimulez vos intentions

Dans la troisième loi du pouvoir, Robert Greene s’intéresse à l'art de la dissimulation, une compétence essentielle pour conserver l’avantage dans les rapports de pouvoir.

Ainsi, il conseille :

"Maintenez votre entourage dans l’incertitude et le flou en ne révélant jamais le but qui se cache derrière vos actions. S’ils n’ont aucune idée de ce que vous prévoyez, ils ne pourront pas préparer de défense."

3.1 - Ce que vous montrez n’est jamais ce que vous visez

Il met en avant deux stratégies clés pour masquer ses véritables intentions.

1ère stratégie : utiliser des leurres et des diversions

Premièrement, l’auteur souligne l’importance de détourner l’attention de ses véritables objectifs.

Il illustre ce principe avec l’histoire de Ninon de Lenclos, une courtisane française du XVIIe siècle, connue pour avoir conseillé un jeune marquis dans sa conquête amoureuse. Ce dernier échoua précisément parce qu'il dévoila trop directement ses intentions : il brisa ainsi le mystère et le charme essentiels au jeu de la séduction qui repose sur la suggestion et l'ambiguïté.

2ème stratégie : créer des écrans de fumée

L’auteur expose ensuite la nécessité de dissimuler ses véritables objectifs derrière des apparences trompeuses.

Il relate deux exemples marquants :

L'histoire de Yellow Kid Weil, qui utilisa une transaction immobilière banale comme couverture pour escroquer un riche homme d'affaires.

Le stratagème de l'empereur éthiopien Haïlé Sélassié qui, par sa courtoisie et son apparente soumission, parvint à neutraliser son rival Balcha.

3.2 - Techniques pour dissimuler ses intentions sans disparaître

Robert Greene explique ensuite que les meilleurs imposteurs ne sont pas flamboyants mais, au contraire, cultivent la banalité comme camouflage.

Il identifie plusieurs techniques efficaces pour cela :

Adopter une expression faciale impassible.

Utiliser des gestes nobles ou bienveillants comme couverture.

Établir des modèles de comportement prévisibles et rassurants.

Se fondre dans son environnement en affichant une attitude banale.

L’auteur nous prévient toutefois que ces stratégies ne fonctionnent que si l’on bénéficie d’une réputation de fiabilité. En cas de réputation douteuse, il suggère une approche paradoxale : assumer ouvertement sa ruse, comme le fit P.T. Barnum, célèbre pour ses stratagèmes assumés et spectaculaires.

3.3 - Une apparence ordinaire : la meilleure couverture

Robert Greene conclut en expliquant que, si les démonstrations flamboyantes peuvent parfois détourner l’attention, une apparence discrète et banale reste le camouflage le plus efficace. Il mentionne, en exemple, des figures comme Talleyrand et Rothschild, qui ont su manœuvrer habilement et discrètement toute leur vie, sans éveiller de soupçons grâce à leur profil bas.

Loi 4 - Dites-en toujours moins que nécessaire

Dans cette quatrième loi du livre "Power : les 48 lois du pouvoir", Robert Greene démontre comment la retenue verbale peut devenir une puissante arme de pouvoir.

4.1 - L’échec du bavard, la victoire du taciturne

Il revient sur deux exemples pour montrer qu’être peu loquace est une source de pouvoir.

Le verbe trop libre de Coriolan qui le conduisit à son bannissement : Robert Greene raconte ici l’histoire de Coriolan, héros militaire romain dont le talent et le prestige furent éclipsés par sa langue trop déliée. Ses discours arrogants et ses insultes répétées retournèrent le peuple contre lui, transformant l’admiration en haine. Résultat : Coriolan fut banni, perdant tout ce qu’il avait accompli.

Le silence stratégique de Louis XIV : à l’opposé, Louis XIV, le Roi Soleil, excellait dans l’art de la réserve. Il savait utiliser le silence comme une arme, déstabilisant ses interlocuteurs. Face aux requêtes de ses ministres, il répondait souvent par un simple "Je verrai", laissant planer une incertitude qui renforçait son autorité et maintenait le contrôle.

4.2 - Les trois avantages du silence

Robert Greene explique que parler peu confère trois bénéfices clés :

Créer une aura de mystère et de puissance, captant l’attention et suscitant la curiosité. "Même anodines, vos paroles sembleront originales si elles restent vagues et énigmatiques" écrit l’auteur.

Pousser les autres à se dévoiler davantage, souvent en tentant de combler le silence.

Réduire les risques de dire des choses compromettantes, en évitant les erreurs ou maladresses verbales.

4.3 – Parler peu, mais juste : le silence stratégique n’est pas mutisme

L'auteur précise toutefois qu'il faut savoir adapter cette stratégie aux circonstances. Être constamment réservé peut sembler froid ou distant dans certaines situations. Savoir parler peu, mais à bon escient, est une compétence précieuse et rare, qui renforce à la fois l’autorité et l’efficacité dans les interactions sociales et politiques. Mais c’est une arme subtile qui exige discernement et timing.

Loi 5 - Protégez votre réputation comme la prunelle de vos yeux

Dans cette cinquième loi, Robert Greene affirme que "la réputation est la pierre angulaire du pouvoir". Une réputation solide peut démultiplier votre influence, tandis qu’une mauvaise image peut tout ruiner.

5.1 - Impressionner ou détruire, grâce à la réputation

Pour appuyer cette idée, il s’appuie sur deux exemples parlants.

La réputation comme arme : le cas de Zhuge Liang

Le général chinois Zhuge Liang, surnommé le Dragon endormi, utilisa sa réputation de stratège rusé pour repousser une armée de 150 000 hommes avec seulement une centaine de soldats. En effet, son adversaire, convaincu d’un piège inévitable, préféra battre en retraite sans combattre. Cette victoire illustre la puissance d’une réputation bien établie, capable de semer la crainte et de gagner des batailles sans avoir à lever l’épée.

La réputation comme levier : le cas de P.T. Barnum

À l’opposé, P.T. Barnum, alors sans notoriété et ne pouvant s'appuyer sur sa réputation encore inexistante, choisit de détruire celle de ses concurrents. Il détourna ainsi l’attention vers leurs faiblesses et utilisa la controverse pour asseoir son image. Et s’imposa rapidement comme une figure incontournable dans le monde du spectacle.

5.2 - Les trois principes de la réputation

Robert Greene met en avant trois points essentiels pour tirer parti de sa réputation :

Une réputation solide amplifie notre influence sans effort supplémentaire.

Elle doit être claire et reposer sur une qualité distinctive qui nous différencie.

Il est crucial de la protéger constamment des attaques et calomnies.

5.3 - Façonner et protéger sa réputation

L’auteur conclut qu’il n’existe aucune alternative : négliger sa réputation revient à laisser les autres définir votre image. Il est donc impératif d’en prendre soin comme un atout majeur, en la façonnant de manière stratégique et en restant vigilant face aux menaces, nous dit l’auteur. Car une réputation bien entretenue est une force silencieuse qui travaille constamment en votre faveur :

"Faites en sorte que votre réputation soit toujours impeccable. Soyez vigilant et déjouez les attaques avant qu’elles ne se produisent. En même temps, apprenez à détruire vos ennemis par leur réputation : ouvrez-y des brèches, puis taisez-vous et laissez faire la meute."

Loi 6 - Attirez l'attention à tout prix

La sixième loi des "48 lois du pouvoir" porte sur la nécessité de captiver et de conserver constamment l’attention pour maintenir et consolider son pouvoir : "Faites-vous plus grand, plus chatoyant, plus mystérieux que la masse terne et morne, soyez l’aimant qui attire tous les regards" appelle l’auteur.

6.1 - Scandale ou énigme : choisissez votre aura

Robert Greene développe ce principe à travers deux stratégies complémentaires.

1ère stratégie : créer la sensation et le scandale

Premièrement, il faut créer la sensation et le scandale. Robert Greene illustre cette stratégie avec P.T. Barnum, maître incontesté de l’art de l’attraction.

Barnum savait intriguer et fasciner les foules grâce à des stratagèmes insolites (comme celui de "l’homme aux briques") ou en orchestrant volontairement des polémiques et des scandales autour de ses attractions. Il allait jusqu’à tirer profit des critiques négatives pour renforcer sa notoriété, prouvant ainsi que toute publicité, même mauvaise, peut être exploitée à son avantage.

2ème stratégie : s’auréoler de mystère

Deuxièmement, l'auteur recommande de s'auréoler de mystère.

L’auteur aborde ici la puissance du mystère, en prenant l’exemple de Mata Hari. Bien que d’origine modeste, elle parvint à fasciner l’Europe entière en cultivant une image énigmatique :

En créant une identité exotique et intrigante.

En changeant constamment ses histoires et ses apparences.

En laissant planer une part d’énigme dans chacune de ses actions.

6.2 - Les clés d’un mystère captivant

Dans notre monde devenu trop prévisible, le mystère attire irrésistiblement l'attention, affirme Robert Greene.

Toutefois, il attire notre attention sur certaines erreurs à éviter :

Adapter la stratégie à notre position et notre progression : ce qui fonctionne au début peut ne pas convenir à un stade plus avancé de notre ascension.

Éviter de paraître avide d’attention : chercher désespérément à se faire remarquer peut trahir une faiblesse.

Ne jamais éclipser ses supérieurs : un excès d’attention au détriment de ceux qui détiennent le pouvoir peut causer notre perte.

6.3 - L’art d'attirer l'attention doit être pratiqué avec finesse et discernement

Robert Greene termine en citant l’exemple de Lola Montez, dont la quête d’attention, au détriment de la reine Victoria, a conduit à sa chute/causa sa propre perte.

La leçon ici est claire : l’art d’attirer l’attention exige subtilité et discernement. Il ne s’agit pas d’un simple spectacle, mais d’un jeu calculé où chaque mouvement compte :

"Il y a des moments où le besoin d’attention doit être reporté à plus tard et où le scandale et la notoriété sont à proscrire. L’attention que vous suscitez ne doit jamais offenser ni souiller la réputation de ceux qui sont au-dessus de vous, surtout s’ils sont assurés dans leur position. Cela vous ferait paraître à la fois mesquin et dénué de scrupules. C’est tout un art que de savoir quand se faire remarquer et quand se mettre en retrait."

Loi 7 - Laissez le travail aux autres, mais recueillez-en les lauriers

Dans la septième loi du livre "Power : les 48 lois du pouvoir", Robert Greene se concentre sur la faculté de tirer parti du travail des autres pour maximiser son pouvoir et son influence. "Ne faites jamais ce que les autres peuvent faire à votre place" lance-t-il.

7.1 – Le génie solitaire contre le stratège collectif : la gloire revient à celui qui sait la capter

Pour illustrer ce principe, l'auteur oppose deux figures historiques aux destins bien différents :

L'échec de Nikola Tesla

Nikola Tesla, génie visionnaire et brillant inventeur, voulut tout accomplir seul. Bien que ses inventions révolutionnaires, comme le courant alternatif ou la radio, aient changé le monde, il perdit tout en négligeant les aspects stratégiques. Robert Greene montre comment d’autres, comme Edison, Westinghouse et Marconi, s’emparèrent de ses idées et récoltèrent les lauriers de son travail.

La réussite de Rubens

À l’opposé, Rubens, célèbre peintre flamand, sut habilement déléguer. Face à une avalanche de commandes, il employa une équipe de peintres spécialisés pour exécuter ses œuvres, tout en maintenant l’illusion qu’il réalisait tout lui-même. Ce système lui permit de répondre à une demande croissante tout en consolidant sa réputation.

7.2 - Les conseils de Robert Greene pour utiliser le travail des autres à son profit

Protéger ses créations puis devenir soi-même un vautour : il est crucial de défendre farouchement ses idées et réalisations contre les tentatives de vol ou de détournement.

"Ne soyez pas naïf : en ce moment même, tandis que vous trimez sur un projet, des vautours tournoient au-dessus de votre tête en essayant de trouver le moyen de survivre et même de prospérer grâce à votre créativité. Il est inutile de s’en plaindre ou de se consumer d’amertume, comme l’a fait Tesla. Mieux vaut se protéger et entrer dans le jeu. Une fois que vous avez établi une base de pouvoir, devenez vous-même un vautour et vous vous épargnerez beaucoup de temps et d’énergie."

Savoir déléguer intelligemment : tirer parti des compétences des autres, y compris du savoir transmis par les anciens, est une clé pour optimiser son temps et ses ressources.

Robert Greene précise toutefois qu'il faut être suffisamment établi pour appliquer cette stratégie sans paraître opportuniste ou profiter de manière trop évidente du travail d’autrui. Une réputation bien construite permet d’utiliser cette loi avec élégance, sans susciter de méfiance ni de ressentiment.

Conclusion : cette loi rappelle que le pouvoir ne réside pas seulement dans le travail acharné, mais aussi dans la capacité à exploiter efficacement le talent et l’effort des autres, et ce, tout en conservant l’apparence d’un accomplissement personnel.

Loi 8 - Obligez l'adversaire à se battre sur votre propre terrain

Dans cette huitième loi, Robert Greene explique comment obtenir l’avantage en forçant l’adversaire à jouer selon vos règles et sur votre propre terrain.

Il s’appuie sur l’exemple brillant de Talleyrand, qui manipula habilement Napoléon pour précipiter sa chute. Plutôt que d’affronter directement l’empereur, Talleyrand joua sur sa vanité et son impulsivité pour le conduire à des erreurs fatales.

8.1 - Le pouvoir se trouve dans le contrôle de l’initiative plutôt que dans l’agression directe

Robert Greene souligne que notre véritable pouvoir réside dans notre capacité à contrôler l’initiative. Cela signifie notre faculté à éviter les confrontations directes mais, à la place, à attirer l’adversaire dans un environnement où il est désavantagé.

Pour y parvenir, l’auteur propose alors deux approches :

Maîtriser ses émotions et faire preuve de discernement : ne jamais agir sous le coup de l’impulsion ou de la colère, mais rester stratégique en toute circonstance. C’est, par exemple, ce que fait le chasseur face à un ours :

"Le chasseur d’ours ne poursuit pas sa proie ; un ours se sachant poursuivi est pratiquement impossible à attraper et, acculé, devient féroce. Au lieu de cela, le chasseur lui tend un piège avec du miel. Sans s’épuiser ni risquer sa vie à la traque, il appâte et attend."

Exploiter les faiblesses de l’adversaire : créer des pièges irrésistibles qui exploitent ses vulnérabilités ou ses désirs. "Si votre piège est assez attractif, la violence des émotions et des désirs de vos ennemis les aveuglera et les empêchera d’y voir clair. Plus ils deviendront avides, plus il sera facile de les manipuler" assure l’auteur.

Robert Greene souligne que cette stratégie présente un double avantage :

L’adversaire s’épuise : en venant sur votre terrain, il gaspille ses ressources et son énergie.

Il doit opérer sur un terrain hostile : sur un territoire inconnu ou désavantageux, il est plus susceptible de commettre des erreurs.

8.2 - Quand une attaque éclair est préférable

Robert Greene précise cependant qu’il existe des situations où cette stratégie n’est pas idéale. Une attaque rapide et directe peut être préférable si le temps presse ou si l’adversaire est particulièrement faible. Dans de tels cas, il vaut mieux frapper vite et fort pour éviter qu’il ne puisse se réorganiser.

Conclusion : cette loi enseigne que la patience et la maîtrise de soi sont des armes puissantes. En contrôlant l’environnement et en dictant les termes de la confrontation, vous inversez la dynamique du pouvoir à votre avantage, tout en minimisant vos risques.

Loi 9 - Remportez la victoire par vos actes et non par vos discours

Dans la neuvième loi des "48 lois du pouvoir", Robert Greene démontre que les actions parlent plus fort que les mots et constituent un moyen bien plus efficace de convaincre et d’affirmer son pouvoir. "Ne prêchez pas, montrez l’exemple" déclare-t-il.

9.1 - Convaincre sans dire un mot : la force de l’action

L’auteur de "Power : les 48 lois du pouvoir" illustre cette idée à travers deux exemples historiques opposés.

L’échec par les mots : l’ingénieur militaire

D’abord, Robert Greene relate l’histoire tragique d’un ingénieur militaire talentueux qui, malgré ses compétences, fut exécuté après avoir argumenté avec son supérieur au lieu de simplement obéir. Cette erreur nous enseigne un élément crucial : les mots, loin d’être neutres, peuvent être interprétés comme un défi à l’autorité et perçus comme une remise en question du pouvoir.

La victoire par l’action : Michel-Ange et le nez de David

En contraste, l’auteur évoque une anecdote avec Michel-Ange pour démontrer l’efficacité des actes : lorsque Soderini, son mécène, critiqua le nez de la statue de David, Michel-Ange ne discuta pas. Il simula une correction pour changer la perspective de son mécène mais laissa en réalité l’œuvre inchangée. Avec ce geste intelligent, le mécène fut alors satisfait sans que Michel-Ange n’ait à entrer dans un conflit verbal inutile.

9.2 - Les trois avantages de l’action sur les mots

L'auteur identifie trois avantages majeurs à privilégier l'action :

Éviter les malentendus : les mots sont souvent interprétés différemment par chacun, tandis que les actes parlent d’eux-mêmes.

Ne pas offenser l’ego des autres : les paroles peuvent heurter, mais les actions, silencieuses, évitent les affrontements.

Prouver son point de vue concrètement : rien ne vaut une démonstration directe pour convaincre sans débat.

9.3 - Quand les mots peuvent être utiles

Robert Greene nuance néanmoins cette loi en précisant que l’argumentation a sa place dans une situation particulière : distraire l’attention lors d’une tromperie. Les mots, bien choisis, peuvent alors détourner les regards et protéger vos véritables intentions.

Conclusion : cette loi rappelle que, dans les jeux de pouvoir, les actes sont toujours plus éloquents et percutants que les paroles. En laissant vos actions parler pour vous, vous renforcez votre crédibilité, minimisez les conflits inutiles et imposez subtilement votre vision.

Loi 10 - Fuyez la contagion de la malchance et du malheur

Dans la dixième loi de son livre "Power : les 48 lois du pouvoir", Robert Greene met en garde contre la nature contagieuse du malheur et des énergies négatives.

Il illustre ce principe avec l’histoire de Lola Montez, célèbre séductrice du XIXe siècle. Bien que charismatique et captivante, Lola semblait porter malheur systématiquement : tous ses amants finirent ruinés ou connurent des destins tragiques.

10.1 - La nature des "agents infectieux"

Robert Greene explique ici que certaines personnes ne sont pas simplement malchanceuses, mais attirent activement le malheur par leur instabilité émotionnelle et leur comportement destructeur.

Il identifie plusieurs caractéristiques communes à ces individus :

Un passé tourmenté, marqué par des troubles ou des échecs répétés.

Des relations constamment brisées ou dramatiques.

Une carrière instable ou en déclin.

Un fort pouvoir de séduction initial, qui masque en fait leur potentiel toxique.

10.2 - Deux règles essentielles pour se protéger

Robert Greene recommande deux attitudes pour se protéger :

Évitez absolument ces "agents infectieux" : même par compassion, il est dangereux de s’associer avec eux, car leur négativité finit toujours par déborder sur leur entourage.

Recherchez la compagnie de "personnes chanceuses" : entourez-vous de ceux qui attirent le succès, la positivité et l’opportunité. Ces individus sont des catalyseurs de réussite et d’énergie constructive. "Préférez la compagnie de ceux à qui tout réussit" conseille l’auteur. De même, "ne vous associez jamais avec ceux qui partagent vos défauts : ceux-ci se renforceraient mutuellement et vous ne feriez aucun progrès. Fondez vos relations uniquement sur les affinités positives. Que cette loi soit pour vous une règle de vie et elle vous profitera mieux que toutes les thérapies du monde" confie l’auteur.

Il n’y a ici aucune exception à la règle, conclut Robert Greene : la seule façon d'accéder au pouvoir et de le conserver est de fuir les personnes qui incarnent le chaos et de s'associer avec ceux qui réussissent.

La qualité de nos relations détermine en grande partie nos chances de succès ou d’échec.

Loi 11 - Rendez-vous indispensable

La onzième loi du livre "Power : les 48 lois du pouvoir" soutient que se rendre indispensable est la clé de l’indépendance.

Ainsi, être compétent ne suffit pas : il faut être unique et irremplaçable. "Tant que vous serez le garant du bonheur et de la prospérité des autres, vous n’aurez rien à craindre" observe Robert Greene. Il nous faut ainsi faire en sorte "qu’ils n’en sachent jamais assez pour se débrouiller seuls" divulgue l’auteur.

11.1 - De l’utilité à la nécessité : bâtir son pouvoir sur la dépendance

Robert Greene présente cette idée qu’être talentueux ne suffit pas mais qu’il faut être irremplaçable, à travers deux histoires.

L’échec des condottieri

Les condottieri, mercenaires de la Renaissance italienne, étaient reconnus pour leurs compétences militaires. Pourtant, ils furent souvent exécutés ou abandonnés par leurs employeurs, car ils restaient interchangeables. Leur talent seul ne les protégeait pas de l'obsolescence ou de la trahison.

Le succès de Bismarck

En guise de contre-exemple, Otto von Bismarck, le célèbre chancelier allemand, choisit une stratégie différente. Plutôt que de chercher à rivaliser avec les puissants, il s’associa à des dirigeants faibles et devint indispensable en assumant leur force et leur intelligence politique. Cette dépendance bien orchestrée lui permit d’acquérir et de consolider un pouvoir durable.

11.2 - Les deux principes pour devenir indispensable

Pour que les autres ne puissent plus se passer de nous, Robert Greene nous invite à :

Créer une relation de dépendance : autrement dit, faire en sorte que notre départ ou notre absence cause des dommages considérables à ceux qui dépendent de nous.

Développer un talent unique : l’objectif est de maitriser des compétences ou connaissances si spécifiques qu'elles deviennent irremplaçables.

11.3 - L’importance de l’interdépendance

Attention toutefois, Robert Greene précise que le véritable pouvoir ne réside pas dans une indépendance totale, qui peut facilement conduire à l’isolement. Il s’agit, au contraire, d’une dépendance mutuelle bien maîtrisée, où l’idée est d’apporter une valeur essentielle tout en restant en position de force.

Conclusion : cette loi nous enseigne que, pour préserver votre position et consolider votre pouvoir, il est crucial de devenir une ressource indispensable. En maîtrisant cette interdépendance, vous assurez votre survie dans des environnements compétitifs et renforcez votre influence à long terme.

Loi 12 - Soyez d'une honnêteté et d'une générosité désarmantes

Dans la douzième loi de ses "48 lois du pouvoir", Robert Greene explore comment l’honnêteté et la générosité, lorsqu’elles sont utilisées avec stratégie, peuvent devenir de puissants outils de manipulation.

Il met en évidence ce principe avec l’histoire du comte Lustig, un célèbre escroc qui réussit à soutirer de l’argent au dangereux Al Capone grâce à un acte d’honnêteté calculé. En rendant une somme importante qu’il aurait pu lui voler, Lustig gagne la confiance et la générosité de Capone, et désarma ainsi totalement sa méfiance.

12.1 - Les objectifs de l’honnêteté et de la générosité stratégiques

L'auteur explique que des gestes d'honnêteté ou de générosité bien calculés servent à :

Dissiper la méfiance, même chez les individus les plus soupçonneux.

Créer une distraction, pour masquer nos véritables intentions.

Établir une réputation solide, qui deviendra un atout durable et difficile à remettre en question.

12.2 - Les précautions à respecter

L’auteur attire notre attention sur les pièges possibles de cette stratégie :

Cette tactique doit paraître sincère pour fonctionner : si votre honnêteté ou générosité semble calculée ou artificielle, elle risque de se retourner contre vous. "Soyez honnête à bon escient, trouvez le défaut de la cuirasse, puis trompez et manipulez à loisir" glisse l’auteur.

La réputation préalable compte : si l'on a déjà une image de duplicité ou de malhonnête, cette tactique sera inefficace. Dans ce cas, mieux vaut assumer ouvertement notre ruse et jouer sur cet aspect.

Robert Greene conclut que l’honnêteté et la générosité, bien utilisées, sont des outils subtils pour établir confiance et influence. Loin d’être des vertus désintéressées, elles servent à renforcer votre pouvoir et à masquer vos véritables intentions, tout en désarmant ceux qui pourraient se montrer méfiants.

Loi 13 - Misez sur l'intérêt personnel, jamais sur la pitié ni la reconnaissance

Dans cette treizième loi, Robert Greene affirme que pour obtenir ce que vous souhaitez, il faut toujours miser sur l'intérêt personnel des autres plutôt que sur leur gratitude ou leur pitié.

13.1 - Deux exemples opposés qui montrent que c’est l'intérêt personnel qui motive les actions

Robert Greene relate deux histoires opposées qui prouvent que, pour influencer les autres et obtenir leur soutien, il est crucial de parler à leur intérêt personnel plutôt qu’à leur sens du devoir ou de la gratitude :

L’échec de Stefano di Poggio

L’auteur raconte que Stefano di Poggio tenta de s’appuyer sur la gratitude de Castruccio pour sauver sa vie et celle de sa famille, en rappelant les services rendus par le passé. Cette approche fut perçue comme un fardeau irritant, et Stefano fut exécuté, son appel à la reconnaissance ayant échoué.

Le succès des Corcyréens

À l’inverse, les Corcyréens, cherchant une alliance avec les Athéniens, misèrent uniquement sur les avantages mutuels que cette collaboration pourrait offrir. En présentant des bénéfices clairs et concrets, ils obtinrent l’accord des Athéniens sans dépendre d’une reconnaissance ou d’un sentiment moral.

13.2 - Deux principes essentiels et une exception stratégique

Robert Greene tire deux leçons fondamentales de ces exemples :

La gratitude est un mauvais levier : les appels à la reconnaissance ou à la pitié sont souvent perçus comme pesants, voire irritants.

L’intérêt personnel est la vraie motivation : les gens sont davantage motivés par ce qu’ils ont à y gagner que par leurs obligations morales ou émotionnelles.

L’auteur nuance toutefois cette règle en précisant que certains puissants préfèrent paraître nobles et généreux. Avec eux, mieux vaut donc faire appel à leur désir de supériorité morale qu'à leur intérêt personnel.

Robert Greene termine en affirmant que pour influencer les autres et obtenir leur soutien, il est nécessaire de parler à leur intérêt personnel plutôt qu’à leur sens du devoir ou de la gratitude.

Loi 14 - Soyez un faux ami... et un vrai espion

Robert Greene met ici en avant l’espionnage stratégique comme un pilier du pouvoir.

Il explique que la connaissance est une arme, et qu’en recueillant des informations sur nos adversaires ou alliés potentiels, nous prenons l’avantage dans toute situation :

"Tout savoir de son rival est indispensable. Vous prendrez un avantage inestimable en postant des espions qui vous communiqueront des informations précieuses. (…) Ouvrez l’œil, prêtez l’oreille. Par des questions indirectes, percez à jour les faiblesses et les intentions de vos interlocuteurs."

14.1 - L’histoire de Joseph Duveen et Andrew Mellon

Robert Greene rapporte l’exemple du marchand d’art Joseph Duveen. Grâce à une collecte méticuleuse d’informations, ce dernier sut conquérir la confiance de l’insaisissable collectionneur Andrew Mellon. Duveen utilisa ces connaissances pour personnaliser son approche, gagner la sympathie de Mellon et finalement conclure de lucratives transactions.

14.2 - Deux approches pour devenir un espion efficace

L'auteur identifie les deux approches suivantes pour exercer l’art de l’espionnage :

Utiliser des intermédiaires : mandater des tiers pour collecter des informations à notre place, afin de minimiser les risques de détection.

Jouer soi-même les espions : entretenir des relations amicales et se montrer proche, tout en restant vigilant et observateur, pour extraire les données nécessaires.

Robert Greene ajoute quelques précisions importantes :

Rester discret : l’espionnage doit être subtil et indirect pour éviter tout soupçon. La moindre maladresse pourrait briser la confiance et ruiner nos efforts.

Utiliser la désinformation : si nous suspectons d’être espionné à notre tour, exploitons ce levier comme contre-mesure pour semer le doute ou induire notre adversaire en erreur.

Finalement, pour Robert Greene, le contrôle de l'information est une compétence clé pour accéder et conserver le pouvoir. En espionnant intelligemment, vous pouvez anticiper les mouvements de vos adversaires, maximiser vos opportunités et réduire vos vulnérabilités.

Loi 15 - Écrasez complètement l'ennemi

Dans cette quinzième loi, Robert Greene soutient que la seule manière d’assurer sa domination est d’anéantir totalement ses ennemis. Toute clémence ou demi-mesure risque de se retourner contre nous, car un ennemi affaibli cherchera tôt ou tard à se venger.

15.1 - Deux exemples qui montrent l’intérêt de la destruction totale des menaces dans le pouvoir

L’échec de Xiang Yu

Le général Xiang Yu, malgré sa victoire contre Liu Bang, choisit d’épargner son rival par clémence. Cette erreur lui coûta son empire et sa vie, car Liu Bang, regagnant des forces, revint plus déterminé que jamais pour l’écraser.

La réussite de Wu Zetian

À l’inverse, l’impératrice Wu Zetian, première et seule femme à devenir empereur de Chine, n’hésita jamais à éliminer ses rivaux. Sa stratégie d’anéantissement total lui permit de consolider son pouvoir et de régner sans opposition.

15.2 - Les trois principes fondamentaux de cette loi

Robert Greene identifie ainsi trois principes clés pour appliquer cette loi :

Les victoires partielles sont risquées : épargner un ennemi lui donne l’occasion de se relever et de chercher à se venger. Robert Greene prévient : "s’il subsiste ne serait-ce qu’une faible braise, le feu reprendra."

La clémence peut être perçue comme une faiblesse : cela renforce la détermination de nos adversaires à nous renverser.

L’anéantissement doit être total : il ne suffit pas de vaincre physiquement ; il faut également briser le moral, l’influence et les ressources de l’ennemi. "Écrasez-le, non seulement physiquement mais aussi en esprit" déclare l’auteur.

15.3 - L’universalité de cette loi

Robert Greene souligne que ce principe est universel. Il partage ici divers exemples historiques pour nous convaincre :

Moïse, qui détruisit les idolâtres pour affirmer l’autorité de ses lois.

Mao Zedong, qui poursuivit son rival Tchang Kaï-chek jusqu’à Taiwan, ne lui laissant aucune possibilité de contre-attaque.

Clausewitz, qui prônait la guerre totale pour assurer une victoire définitive.

15.4 - Les exceptions stratégiques

L’auteur de "Power : les 48 lois du pouvoir" reconnaît toutefois deux situations où cette loi peut être ajustée. Ainsi, il est parfois préférable de :

Laisser un ennemi s’autodétruire : dans certains cas, un adversaire peut s’affaiblir par ses propres erreurs ou conflits internes.

Proposer une voie de retraite : une armée acculée peut combattre avec l’énergie du désespoir. Laisser une issue peut alors éviter une résistance acharnée.

Conclusion : pour Robert Greene, la clé du pouvoir durable réside dans la destruction totale des menaces. Tout compromis laisse la porte ouverte à des représailles futures. Attention cependant, cette stratégie exige un discernement précis, car un excès de brutalité ou une mauvaise évaluation des circonstances peut se retourner contre vous.

Loi 16 - Faites-vous désirer

Dans cette seizième loi, Robert Greene nous fait observer que la rareté augmente la valeur.

Être constamment visible ou accessible nous rend ordinaire, tandis qu’une absence bien orchestrée peut accroître notre désirabilité et ainsi renforcer notre importance.

16.1 - Bien maîtriser l’art de se faire désirer

L’erreur de Guillaume de Balaün

Robert Greene illustre d’abord cette loi par l’histoire du troubadour Guillaume de Balaün. Inspiré par son ami Pierre, qui assurait que les retrouvailles après une querelle amoureuse ravivent les sentiments dans un couple, Guillaume décida de provoquer volontairement une dispute avec sa dame, Guillelmette. Ainsi, voulant expérimenter lui-même les joies de la réconciliation passionnelle, il feint la colère et s’en alla.

Mais son stratagème ne produisit pas l’effet escompté… Plutôt que d’éprouver du ressentiment, Guillelmette, au contraire, se mit à désirer Guillaume encore plus. Au lieu de le fragiliser, l’absence prolongé de Guillaume attisa et décupla son amour. Déstabilisé par cette réaction inattendue, le troubadour repoussa violemment sa bien-aimée lorsqu’elle le supplia à genou de lui pardonner et de lui revenir.

Ce n'est finalement que lorsque Guillelmette finit par abandonner qu'il prit pleinement conscience de son erreur.

Pour obtenir enfin la réconciliation qu’il espérait tant, Guillaume fut contraint de souffrir et d’implorer Guillelmette des mois durant, de lui donner une seconde chance.

"Il ne revit pas sa dame de l’année et connut la cruelle morsure de l’absence, qui ne fit qu’attiser son amour. (…) Il multiplia les missives. Dame Guillelmette, elle, prolongea son silence. Puis, après quelque temps, se souvenant de ses belles chansons, de son aimable prestance et de ses talents de danseur et de fauconnier, elle commença à se languir de lui. Pour le punir de sa cruauté, elle lui ordonna de s’arracher l’ongle du petit doigt de la main droite et de le lui envoyer avec un poème décrivant ses souffrances. Il fit selon son désir. Et Guillaume de Balaün put enfin goûter la jouissance suprême : une réconciliation surpassant en intensité celle de son ami Pierre."

Ce récit démontre que l’absence, lorsqu’elle est mal dosée, peut produire l’effet inverse de celui recherché, et que la manipulation des émotions peut parfois se retourner contre son instigateur. L’absence maîtrisée peut être un puissant levier de désir, mais elle doit être utilisée avec subtilité. Trop de distance risque non pas de susciter une réaction attendue, mais de renforcer des sentiments imprévus et incontrôlables.

Le succès de Deiocès, roi des Mèdes

Robert Greene poursuit avec l’histoire de Deiocès qui devint roi des Mèdes en comprenant la puissance de l'absence. Après s’être rendu indispensable en tant que juge auprès des Mèdes, Deiocès se retira soudainement. Ce vide, ressenti comme insupportable, poussa son peuple à le nommer roi pour qu’il reprenne sa fonction.

16.2 - Les applications pratiques de la rareté

"Si vous faites partie d’un groupe, éloignez-vous-en un certain temps et l’on parlera de vous davantage, vous serez même plus admiré. Pratiquez l’absence : la rareté augmentera votre valeur" conseille Robert Greene.

La loi de la rareté s’applique aussi très bien :

En amour

L’absence stimule l’imagination et ravive le désir en laissant un espace à combler. L’auteur est convaincu que "sitôt qu’on accepte d’être traité comme n’importe qui, il est trop tard : on est avalé et digéré". Aussi, "pour éviter cela, poursuit-il, faites-vous rare. Forcez le respect de l’être aimé en le menaçant de vous perdre à jamais ; créez une alternance de présence et d’absence". 

Dans les affaires

La rareté fait grimper la valeur. "Ce que vous avez à offrir au monde doit paraître précieux et difficile à trouver, sa valeur en sera immédiatement décuplée" souligne l’auteur.

En politique

Se retirer au bon moment permet de préserver son influence et de créer un besoin autour de son retour.

16.3 - Sans une réputation préalable, l'absence mène simplement à l'oubli

Robert Greene souligne cependant que cette stratégie n’est efficace que si vous avez déjà établi une présence forte et une réputation solide. Sans cela, l’absence risque de mener à l’oubli. Il est crucial de trouver l’équilibre entre visibilité et retrait.

Conclusion : se faire désirer repose sur la maîtrise de son accessibilité. Une absence bien calculée peut renforcer votre valeur et votre pouvoir, mais seulement si elle est précédée par une présence marquante.

Loi 17 - Soyez imprévisible

Robert Greene explore, avec la loi 17, la puissance stratégique de l’imprévisibilité. Il explique que sortir des schémas attendus déstabilise les autres, les poussant à la confusion et à l’incertitude, ce qui vous place en position de force.

17.1 - Le principe de l’imprévisibilité comme outil de pouvoir

Le match d’échecs Fischer-Spassky de 1972

Robert Greene retrace le célèbre affrontement entre Bobby Fischer et Boris Spassky lors du championnat du monde d’échecs. Fischer adopta des comportements imprévisibles : retards inexpliqués, plaintes incessantes et coups inhabituels. Ces actions déconcertèrent Spassky, pourtant connu pour son calme, au point qu’il perdit ses moyens et sombra dans la paranoïa. Alors qu’il avait toujours gagné lors des précédentes rencontres, Spassky finit par déclarer forfait, laissant la victoire à Fischer.

L’auteur observe que :

"Toutes les actions de Fischer au cours de ce mémorable championnat de 1972 visèrent (…) à prendre l’initiative et à déstabiliser Spassky. De toute évidence, l’interminable attente commença le travail de sape. Mais plus éprouvantes pour Spassky furent les erreurs délibérées de Fischer et son manque apparent de stratégie. En fait, Fischer fit tout ce qu’il fallait pour brouiller les pistes, fût-ce au prix de deux défaites initiales."

Puis, il poursuit :

"Le jeu d’échecs, c’est la vie en raccourci : pour gagner, il faut être extrêmement patient et prévoyant ; le jeu est construit sur des manœuvres dont toutes les séquences ont déjà été jouées et seront jouées encore avec d’infimes modifications à chaque match. Chaque joueur analyse les méthodes de l’autre pour essayer de prévoir ses coups. Celui qui n’offre à son adversaire rien de prévisible pour fonder sa stratégie prend un gros avantage. Aux échecs comme dans la vie, quand les gens ne peuvent prévoir ce que vous allez faire, ils sont dans un état d’appréhension, d’incertitude et de confusion."

17.2 - Pourquoi l’imprévisibilité fonctionne-t-elle ?

Robert Greene explique que l’imprévisibilité est une arme redoutable car :

Les humains cherchent naturellement des schémas et des habitudes pour anticiper et se sentir en sécurité. Briser ces attentes les place dans une position de vulnérabilité.

Elle génère de la confusion et de l’incertitude, rendant nos adversaires moins efficaces et plus hésitants.

Elle provoque une peur inconsciente, car ce qui ne peut être prédit ne peut être contrôlé.

Pour faire comprendre cette idée, Robert Greene mentionne l’exemple du duc Visconti de Milan, qui gouvernait en laissant délibérément ses courtisans dans l'incertitude. En changeant constamment d’humeur et de décisions, il empêchait ainsi toute tentative de manipulation ou de rébellion, maintenant son pouvoir par la confusion qu’il semait.

17.3 - Les limites de l’imprévisibilité

Robert Greene attire notre attention sur un point de vigilance : trop d’imprévisibilité peut être perçue comme de l’instabilité ou de l’incompétence, surtout si vous occupez une position subalterne ou si votre rôle nécessite de rassurer les autres. Cette stratégie doit donc être utilisée avec discernement et ne pas devenir excessive.

Conclusion : l’imprévisibilité, lorsqu’elle est dosée intelligemment, est une arme imparable pour déstabiliser vos adversaires, renforcer votre position de pouvoir et empêcher toute tentative de prédiction ou de contrôle. Cependant, pour qu’elle reste efficace, elle doit être utilisée stratégiquement et ne pas compromettre votre crédibilité ou votre autorité.

Loi 18 - Ne restez pas dans votre tour d'ivoire

Dans la dix-huitième loi des "48 lois du pouvoir", Robert Greene nous alerte sur les dangers de l’isolement. Il explique que le pouvoir repose sur les relations et les interactions sociales. Par conséquent, un retrait prolongé ou trop marqué coupe de ces dynamiques essentielles, et finit par affaiblir notre position.

Ainsi, "mieux vaut circuler, trouver des alliés, se mêler aux autres. La foule est un bon bouclier humain" juge l’auteur.

18.1 - Deux dirigeants, deux stratégies antagonistes

L’échec de Qin Shi Huangdi

Robert Greene présente l’empereur Qin Shi Huangdi qui, par peur et paranoïa, s’isola progressivement dans son immense palais aux 270 pavillons. Il montre comment cette réclusion le priva d’informations cruciales sur son empire, et permit ainsi à ses ministres de conspirer dans l’ombre. Déconnecté de la réalité et sans alliés fiables, il précipita sa chute.

Le succès de Louis XIV

À l’opposé, l'auteur décrit le succès de Louis XIV, Roi de France, qui fit de Versailles un centre névralgique du pouvoir. Au château, nobles, courtisans et ennemis potentiels y étaient constamment sous la surveillance du Roi Soleil. En attirant tout ce monde près de lui, le roi désamorça les complots et s’assura de rester au cœur des interactions politiques et sociales, consolidant ainsi son règne.

Ainsi, "pour déployer votre pouvoir, écrit Robert Greene, il faut vous placer au centre, comme Louis XIV le fit à Versailles" :  

"Toutes les activités doivent tourner autour de vous ; vous devez être attentif aux événements de la rue, vigilant au moindre indice de complot contre vous. Face au danger, beaucoup ont tendance à se réfugier derrière une sorte de rempart ; ils en viennent ainsi à n’être plus tenus au courant que par un cercle de plus en plus restreint d’informateurs dont ils dépendent, et perdent toute perspective sur les événements. Privés de marge de manœuvre, ils deviennent des cibles faciles ; leur isolement, enfin, les rend paranoïaques. À la guerre comme dans la plupart des jeux de stratégie, l’isolement précède souvent la défaite et la mort."

18.2 - Le pouvoir est par nature social

Robert Greene rappelle que le pouvoir ne peut être exercé sans interactions humaines. Aussi, pour le maintenir, il est primordial de :

Rester accessible et visible : l’absence prolongée génère de l’oubli ou des soupçons.

Cultiver un large réseau d’alliances : la diversité des relations renforce notre influence.

Maintenir le contact avec tous les niveaux sociaux : cela nous permet de capter des informations utiles et de renforcer notre popularité.

Rester mobile et flexible : une présence physique stratégique nous garde proche des événements et des personnes clés.

Robert Greene conclut toutefois qu'un bref isolement peut être bénéfique pour réfléchir, prendre du recul ou échapper à une situation dangereuse, à condition cependant de savoir quand y mettre fin.

Conclusion : cette loi rappelle que le pouvoir est dynamique et nécessite une participation active. L’isolement prolongé, motivé par la peur ou un excès de prudence, affaiblit inévitablement votre position. À l’inverse, rester connecté, visible et au centre des interactions sociales garantit votre influence et votre capacité à anticiper les menaces.

Loi 19 - Ne marchez pas sur les pieds de n'importe qui

Dans cette dix-neuvième loi, Robert Greene s’intéresse aux dangers de sous-estimer ou d'offenser les mauvaises personnes. Il insiste sur l’importance d’identifier le profil psychologique de ceux que l’on côtoie, car une seule erreur peut provoquer des conséquences désastreuses.

19.1 - Les personnalités dangereuses

Robert Greene partage une typologie des individus dangereuses, à éviter donc ou à traiter avec une extrême prudence :

L’arrogant, qui réagit de manière disproportionnée à la moindre offense : il cherche à rétablir son ego coûte que coûte.

L’hésitant chronique, qui rumine sa vengeance : il se montre récalcitrant à agir sur le moment, mais frappe lorsque nous ne nous y attendons pas.

Le soupçonneux, qui voit des complots partout : il interprète chaque geste comme une menace potentielle.

Le serpent à mémoire d’éléphant, qui attend patiemment son heure pour frapper : il n’oublie jamais une insulte ou une offense.

La brute candide qui ne comprend rien aux subtilités : naïf et impulsif, il est capable d’une réaction explosive si provoqué.

19.2 - Des exemples édifiants de représailles disproportionnées

Pour illustrer cette loi, l'auteur raconte ici plusieurs récits révélateurs, comme celle de :

Le Shah du Khwarezm, qui méprisa Gengis Khan en sous-estimant sa puissance. Cette erreur provoqua la destruction totale de son empire.

J. Frank Norfleet, un homme dupé par des escrocs, qui consacra des années à les pourchasser inlassablement ; cette histoire prouve à quel point une vengeance peut devenir une obsession.

19.3 - Deux principes pour éviter les représailles fatales

Robert Greene souligne deux points à garder en tête :

Ne jamais se fier aux apparences ou à l’instinct : les personnalités dangereuses ne se dévoilent pas toujours immédiatement ; elles peuvent sembler inoffensives ou insignifiantes au premier abord.

Toujours collecter des informations concrètes sur les personnes avant d’agir : avant de prendre des décisions ou de confronter quelqu’un, il est impératif de comprendre pleinement à qui nous avons affaire.

L'auteur précise qu'il n'y a pas d'exception à cette règle : mépriser ou offenser la mauvaise personne peut avoir des conséquences désastreuses, point.

En conclusion, RobertGreene insiste sur l’idée qu’il n’y a pas d’exception à cette règle : mépriser ou offenser la mauvaise personne peut entraîner des représailles disproportionnées et parfois fatales. La prudence et la vigilance dans vos interactions sont des garanties de survie et de succès dans les jeux de pouvoir. En comprenant les motivations et les traits psychologiques des autres, vous évitez de marcher sur des mines invisibles.

Loi 20 - Ne prenez pas parti

Dans cette vingtième loi, Robert Greene explore l’art de préserver son indépendance en évitant de s’engager trop ouvertement. Il démontre que rester neutre et insaisissable est une stratégie très efficace pour maintenir son influence et sa liberté d’action.

20.1 - Le pouvoir de l’indépendance et de la neutralité : deux femmes, deux stratégies gagnantes

Robert Greene évoque cette loi à travers deux exemples historiques :

Rester insaisissable augmente notre valeur et notre influence

L’auteur revient d’abord sur l’histoire d’Élisabeth Ire, qui a su se faire désirer sans jamais se donner complètement. Robert Greene montre comment celle-ci, en refusant systématiquement de se marier tout en entretenant les espoirs de ses prétendants, maintint son pouvoir et préserva l'indépendance de l'Angleterre.

L’importance de rester au-dessus des conflits

Ensuite, Robert Greene partage l’histoire d’Isabelle d’Este, qui parvint à préserver son petit duché de Mantoue au milieu des guerres italiennes en refusant de s'allier définitivement à quelque camp que ce soit, tout en maintenant des relations cordiales avec tous.

20.2 - Les avantages de la neutralité

Rester insaisissable procure plusieurs atouts majeurs :

Garder sa liberté d'action et rester maître de ses décisions.

Susciter le respect et le désir des autres : notre mystère attirera et intriguera.

Exploiter les conflits : on peut ainsi profiter de l'affaiblissement mutuel des adversaires.

Conserver plusieurs options ouvertes.

20.3 - Les pièges à éviter

Robert Greene précise toutefois que cette stratégie requiert finesse et équilibre. Il faut alors :

Éviter de paraître trop distant au risque de susciter la méfiance.

Savoir feindre l'intérêt sans jamais s’engager.

Doser habilement les promesses pour maintenir l’intérêt des autres.

L’auteur termine en rappelant que, si le pouvoir est dans l’autonomie, il faut tout de même rester attentif à ne pas pousser trop loin cette stratégie, au risque de voir les autres s’unir contre nous. L’art est donc de rester insaisissable sans devenir inaccessible.

Loi 21 - À sot, sot et demi

Dans cette vingt-et-unième loi, Robert Greene dévoile une tactique de manipulation aussi efficace que subtile : laisser les autres croire qu’ils sont plus malins que vous. En jouant les naïfs ou les moins brillants, vous désarmez leur méfiance et prenez l’avantage sans qu’ils ne s’en rendent compte.

21.1 - L’art de paraître moins intelligent

Robert Greene cite pour exemple l’histoire des prospecteurs Arnold et Slack, qui ont berné les plus grands financiers de leur époque avec une fausse mine de diamants. En se présentant comme des rustres un peu simplets, ils ont endormi la vigilance de leurs victimes et mené leur escroquerie à bien.

Le principe est simple : personne n’aime se sentir moins intelligent que les autres. En paraissant un peu stupide ou moins sophistiqué, nous :

Désarmons la méfiance : les gens baissent leur garde.

Gagnons leur confiance : ils se sentent en position de force.

Flattons leur ego : ils se croient supérieurs.

Gardons l’avantage : nous pouvons agir sans éveiller les soupçons.

Robert Greene cite d’autres exemples, comme Bismarck, qui a feint l’incompétence au jeu pour piéger un négociateur autrichien, ou Claude, futur empereur romain, qui a joué l’idiot pour échapper aux intrigues de cour.

21.2 - Les limites de la stratégie

Mais attention : cette stratégie a ses limites. Parfois, il faut au contraire afficher son intelligence pour dissimuler une manœuvre encore plus subtile :

"Il y a cependant une situation où il est au contraire utile de faire étalage de votre intellect : quand cela vous permet de masquer une supercherie. En matière d’intelligence comme en beaucoup d’autres domaines, ce sont les apparences qui comptent. Si vous semblez avoir de l’autorité et du savoir, les gens croiront ce que vous dites."

L’essentiel est de savoir adapter notre jeu à la situation, en restant toujours un coup d’avance.

Loi 22 - Capitulez à temps

Robert Greene aborde ici l’art de savoir capituler stratégiquement.

Loin d’être un signe de faiblesse, une reddition bien calculée peut devenir une arme redoutable pour retourner une situation en notre faveur :

"Quand vous avez le dessous, ne continuez pas pour l’honneur : rendez-vous. La capitulation vous donne le temps de vous refaire une santé, le temps de tourmenter et d’irriter votre vainqueur, le temps d’attendre que son pouvoir périclite. (…). En tendant l’autre joue, vous le rendrez furieux et le déstabiliserez. Faites de la capitulation un outil de pouvoir."

22.1 - L’exemple de Bertolt Brecht

Robert Greene illustre cette idée à travers plusieurs exemples historiques, notamment celui de Bertolt Brecht face à la commission sur les activités antiaméricaines.

Alors que ses collègues ont choisi la confrontation, Brecht a opté pour une soumission apparente. Par des réponses habiles et une courtoisie feinte, il a déjoué ses accusateurs et préservé sa liberté, tandis que d’autres ont été écrasés par leur résistance frontale.

22.2 - Les avantages de la capitulation stratégique

Pour l’auteur de "Power : les 48 lois du pouvoir", cette approche offre plusieurs bénéfices clés :

Désamorcer l’agressivité : l’adversaire baisse sa garde, croyant avoir gagné.

Gagner du temps : nous pouvons nous renforcer en attendant le bon moment.

Observer de près : nous pouvons étudier les faiblesses de l’ennemi de façon rapprochée.

Maintenir notre liberté d’action à long terme : nous restons en position de rebondir plus tard.

22.3 - Les conditions de réussite

Cependant, cette tactique ne fonctionne que si elle est exécutée avec précision. Elle exige :

Un parfait contrôle de soi : on ne doit pas laisser transparaître nos véritables intentions.

Une capitulation purement extérieure : notre soumission doit être un masque, pas une réalité.

Une vision stratégique à long terme : nous devons avoir en tête que cette retraite temporaire sert un objectif plus grand.

Ainsi, Robert Greene conclut que, face à un adversaire plus puissant, une fausse soumission est souvent bien plus efficace qu’une résistance frontale vouée à l’échec. En cédant du terrain tactiquement, vous préparez le terrain pour une victoire stratégique. La clé est de savoir quand plier sans jamais rompre.

Loi 23 - Concentrez vos forces

Dans la vingt-troisième loi, Robert Greene nous rappelle que le pouvoir se trouve dans la concentration, pas dans la dispersion. En canalisant nos ressources et notre énergie vers un objectif unique, nous maximisons notre impact et renforçons notre position :

"Économisez vos forces et votre énergie en les gardant concentrées à leur niveau le plus élevé. (…) L’intensif l’emporte toujours sur l’extensif."

23.1 - L’exemple des Rothschild

Robert Greene illustre cette loi avec l’histoire des Rothschild, une famille qui a bâti un empire financier grâce à une stratégie de concentration implacable. Leur succès repose sur plusieurs piliers :

L’unité familiale : ils sont restés unis et exclusivement familiaux pour éviter les influences extérieures.

La préservation des secrets : ils ont protégé leurs informations et leur pouvoir en se mariant entre cousins.

Un système de communication codé : ils ont développé leurs propres méthodes pour échanger des informations sensibles en toute sécurité.

Une répartition stratégique : il se sont dispersés dans les principales villes européennes tout en maintenant une cohésion sans faille.

23.2 - Les avantages de la concentration

"Ce qui est concentré, cohérent et éprouvé par l’histoire a du pouvoir. Ce qui est dissipé, divisé, distendu se désagrège et tombe" explique l’auteur. Ainsi, dans un monde de plus en plus fragmenté et distrayant, concentrer ses forces revêt des avantages majeurs :

Une efficacité accrue : en se focalisant sur un seul objectif à la fois, on évite le gaspillage d’énergie.

Une puissance consolidée : une source de pouvoir principale est plus solide que plusieurs petites.

Une profondeur stratégique : mieux vaut maîtriser un domaine en profondeur que de papillonner en surface.

23.4 - Les risques et les limites

Robert Greene précise toutefois que cette stratégie n’est pas sans dangers. Elle comporte des risques, notamment celui de tout perdre si notre unique source de pouvoir s'effondre. Il recommande donc, dans certains cas, de diversifier ses appuis, surtout en période d’instabilité ou de crise.

La clé est finalement de savoir quand se concentrer et quand élargir ses bases. En temps normal, la concentration est une tactique redoutable pour dominer un domaine. Mais en période troublée, une diversification prudente peut servir de filet de sécurité. L’essentiel est de rester flexible et de ne jamais mettre tous ses œufs dans le même panier sans en avoir conscience. En résumé, concentrez vos forces pour frapper fort, mais gardez toujours un œil sur les risques pour ne pas tout perdre d’un seul coup.

Loi 24 - Soyez un courtisan modèle

Robert Greene dévoile ici les secrets de l’art de la courtoisie, un savoir-faire intemporel qui reste capital dans les jeux de pouvoir, même si les cours royales ont disparu. Être un courtisan accompli, c’est maîtriser l’équilibre subtil entre séduction, discrétion et influence, nous dit l’auteur :

"Le courtisan évolue dans un monde où tout tourne autour du pouvoir et du jeu politique. Il doit maîtriser l’art du flou, flatter, s’abaisser devant les grands et exercer son pouvoir sur les autres de manière aussi courtoise que discrète."

24.1 - Les règles essentielles du courtisan

Robert Greene détaille une série de principes pour exceller dans cet univers complexe :

Éviter l’ostentation :Ne jamais trop parler de soi. Rester modeste et discret.

Éviter d’attirer une attention excessive, qui pourrait susciter jalousie ou méfiance.

Maîtriser l’art de la flatterie :Flatter avec parcimonie et subtilité. Faire briller le maître plutôt que soi-même.

Ne jamais être trop direct dans ses compliments, pour éviter de paraître manipulateur.

Gérer sa présence :Se faire remarquer sans être envahissant. Adapter son style selon l’interlocuteur.

Maintenir une distance appropriée avec les supérieurs pour préserver son mystère.

Savoir composer avec les situations délicates :Ne jamais être porteur de mauvaises nouvelles. Éviter toute familiarité déplacée. Ne pas critiquer directement ses supérieurs.

Demander rarement des faveurs pour ne pas paraître opportuniste.

Pratiquer l’art du plaisirÊtre une source d’agrément pour les autres. Maîtriser ses émotions en toutes circonstances.

Rester dans l’air du temps pour paraître toujours pertinent.

L'auteur illustre ces principes à travers plusieurs figures historiques, comme celle de l'architecte Mansart qui sut flatter Louis XIV en lui faisant croire que les meilleures idées venaient de lui, et ainsi consolider sa propre position. Ou encore celle de l'artiste Isabey qui parvint habilement à satisfaire ses deux maîtres rivaux.

24.2 - Les pièges à éviter dans le jeu subtil du courtisan

L'art du courtisan est un jeu subtil qui requiert une grande finesse psychologique. Il exige une maîtrise de soi, une compréhension profonde des désirs des autres et une capacité à rester en retrait tout en étant indispensable.

Aussi, certaines erreurs peuvent être fatales, prévient l’auteur. Par exemple :

La familiarité excessive, qui peut conduire à une disgrâce immédiate.

La critique du goût ou des décisions du maître, qui risque de détruire la relation de confiance.

L’oubli des codes sociaux, qui peut vous faire passer pour maladroit ou inopportun.

Mais finalement, ceux qui parviennent à maitriser cet art peuvent influencer sans jamais paraître menaçants, et dominer sans jamais sembler ambitieux.

Loi 25 - Changez de peau

Dans cette 25ème loi, Robert Greene explique que le pouvoir appartient à ceux qui savent façonner leur propre identité plutôt que de subir celle que la société leur impose.

Selon lui, la capacité à se réinventer et à maîtriser son image est un atout fondamental pour dominer son environnement.

25.1 - Le pouvoir appartient à ceux qui maîtrisent leur identité : deux exemples révélateurs

Jules César : le maître de la mise en scène

Robert Greene montre comment César, en maître de la mise en scène, transforma sa vie en un véritable spectacle politique. Chaque geste, chaque décision était calculé pour marquer les esprits et asseoir son pouvoir. De ses jeux du cirque, qui captivaient les foules, à sa célèbre traversée du Rubicon, il savait créer des moments dramatiques qui le rendaient inoubliable.

George Sand : une identité créée pour transcender les normes

Autre exemple marquant, celui de George Sand, qui brisa les conventions de son époque en créant délibérément un personnage androgyne. En adoptant un pseudonyme masculin et en portant des vêtements d’homme, elle transcenda les barrières sociales imposées aux femmes, lui permettant d’être acceptée dans les cercles littéraires dominés par les hommes et d’imposer son influence.

25.2 - Les clés d’une transformation réussie

Pour réussir à se réinventer, Robert Greene identifie plusieurs stratégies :

Maîtriser ses émotions comme un acteur => afficher une image contrôlée, sans laisser paraître ses faiblesses.

Créer un personnage mémorable et distinctif => un style, une posture, une aura qui marquent durablement les esprits.

Orchestrer le timing et le rythme de ses actions => savoir quand frapper un grand coup et quand se faire oublier.

Faire des "grands gestes" symboliques => poser des actes marquants qui renforcent son mythe et sa légende.

25.3 - Attention aux pièges de l’exagération

Si cette capacité à se réinventer est essentielle au pouvoir, prudence toutefois : elle s’utilise avec subtilité et talent, signale l’auteur. Une mise en scène trop forcée ou maladroite peut se retourner contre nous, nous faisant paraître artificiel ou prétentieux.

Conclusion : le pouvoir appartient à ceux qui maîtrisent leur propre récit et savent se transformer au gré des circonstances. Créer son identité plutôt que de subir celle que l’on veut vous imposer est une technique redoutable, mais elle nécessite finesse, audace et un sens aigu du spectacle. Le monde est une scène, et ceux qui savent en jouer deviennent inoubliables.

Loi 26 - Gardez les mains propres

Robert Greene révèle ici une loi impitoyable du pouvoir : pour conserver son autorité et son image intactes, il faut parfois faire exécuter les basses besognes par d’autres. Un véritable maître du jeu ne se salit jamais directement les mains, il manipule habilement son environnement pour que le travail ingrat soit accompli sans qu’il ne soit jamais impliqué.

26.1 - Comment exercer le pouvoir sans jamais être éclaboussé

L'auteur du livre "Power : les 48 lois du pouvoir", développe ce principe à travers deux stratégies principales.

1ère stratégie : utiliser des boucs émissaires pour détourner le blâme

Les erreurs sont inévitables, mais les assumer publiquement avec des excuses ou des remords est souvent perçu comme un signe de faiblesse.

Robert Greene illustre ce point avec l’histoire du général Cao Cao, qui, après avoir mal géré un approvisionnement militaire, évita une révolte en faisant décapiter un intendant innocent pour calmer ses troupes.

Leçon clé : plutôt que d’avouer une erreur, il est parfois plus stratégique de désigner un responsable sur qui faire porter la responsabilité, de façon à détourner l’attention et de préserver son autorité.

2ème stratégie : déléguer le "sale boulot"

Un autre moyen de garder les mains propres est de faire exécuter les décisions impopulaires par d’autres. Robert Greene prend l’exemple de Cléopâtre, qui manipula César et Marc Antoine pour éliminer ses rivaux sans jamais être tenue pour responsable.

Pour réussir cette approche, il faut :

Faire preuve de subtilité dans la manipulation, en influençant les décisions sans les imposer ouvertement.

Anticiper plusieurs coups à l’avance, pour éviter de se retrouver en première ligne lorsque la situation dégénère.

Masquer ses véritables intentions, en adoptant une posture de neutralité ou de victime des circonstances.

26.2 - Les avantages de cette stratégie

L'auteur identifie ensuite les avantages clés de cette stratégie :

Préserver sa réputation et son image : en restant en retrait, on laisse les autres endosser les responsabilités.

Économiser son énergie : on ne perd pas de temps à gérer les conflits directs, on orchestre simplement leur résolution.

Garder une position de force morale : nous apparaissons comme une figure intègre, au-dessus des intrigues et des machinations.

Conserver plusieurs options ouvertes : en n’étant jamais directement impliqué, nous pouvons toujours changer de cap et nier toute responsabilité.

26.3 - L’exemple de Mao Zedong

En guise d’exemple, Robert Greene cite également Mao Zedong, qui exploita les conflits entre les nationalistes chinois et les Japonais pour affaiblir ses ennemis sans engager ses propres forces. En laissant les autres mener les batailles les plus sanglantes, il put émerger en vainqueur sans prendre de risques excessifs.

26.4 - Les précautions à prendre

L'auteur conclut toutefois que ces tactiques doivent être utilisées avec précaution :

Ne jamais laisser de trace : le lien avec le bouc émissaire ne doit jamais être découvert. Car si votre manipulation est découverte, vous risquez d’être perçu comme un traître.

Ne pas appliquer cette stratégie à des enjeux trop importants : un mauvais calcul peut provoquer des conséquences incontrôlables.

Savoir assumer la responsabilité si nécessaire : dans certaines situations, reconnaître publiquement une faute peut renforcer notre crédibilité et notre leadership.

En résumé, un véritable stratège ne laisse jamais son nom associé aux décisions les plus impopulaires. Il sait manipuler, déléguer et détourner le blâme tout en conservant son pouvoir intact. Comme un marionnettiste, il tire les ficelles sans jamais apparaître sur scène, veillant à ce que les autres portent le poids des responsabilités, pendant qu’il reste au-dessus de la mêlée. Le pouvoir n’appartient pas à ceux qui prennent les coups, mais à ceux qui les évitent intelligemment.

Loi 27 - Créez une mystique

La vingt-septième loi du livre "Power : les 48 lois du pouvoir" nous enseigne comment créer une aura de mystère et de fascination pour captiver et manipuler les autres.

Robert Greene affirme que les êtres humains ont un besoin profond de croire en quelque chose de plus grand qu’eux, ce qui les rend particulièrement réceptifs aux figures charismatiques et vulnérables à leur manipulation.

27.1 - Les cinq étapes pour créer une mystique

  • Étape 1 : Rester vague tout en étant simpliste

L’ambiguïté attire et intrigue, tandis que la simplicité rassure, pointe l’auteur. Pour séduire les esprits, il faut donc :

Faire de grandes promesses floues qui laissent place à toutes les interprétations.

Apporter des solutions simples à des problèmes complexes, sans entrer dans des explications rationnelles détaillées.

Employer un langage évocateur et symbolique, qui parle aux émotions plutôt qu’à la logique.

  • Étape 2 : Privilégier les sens plutôt que l’intellect

Les émotions et les sensations sont bien plus puissantes que les arguments rationnels. Pour captiver un public, il faut donc :

Mettre en scène un spectacle grandiose : décors impressionnants, musique, cérémonies. Créer une mise en scène spectaculaire.

Stimuler les sens : musique, usage d’encens, de vêtements distinctifs, de rituels qui marquent l’esprit.

Éviter les débats intellectuels, les discussions trop rationnelles qui risquent de dissiper l’aura de mystère.

  • Étape 3 : Imiter les structures religieuses

Les religions ont su captiver et fédérer les masses depuis des siècles en s’appuyant sur des rituels codifiés et des hiérarchies bien définies. Pour s’assurer une emprise durable, il est judicieux de :

Créer une hiérarchie avec un leader charismatique (vous) et des adeptes dévoués.

Établir des rituels et des traditions pour structurer la communauté et renforcer son identité.

Se positionner comme un guide spirituel, dont la parole a une valeur presque sacrée.

  • Étape 4 : Dissimuler les sources de revenus

L’argent est souvent un facteur de suspicion. Pour éviter que les disciples ou admirateurs ne doutent de notre sincérité, il est essentiel de :

Ne jamais paraître motivé par l'argent.

Faire croire que sa richesse provient de l’efficacité des principes enseignés.

Maintenir une apparence de désintéressement, en feignant de rejeter les honneurs matériels tout en les accumulant discrètement.

  • Étape 5 : Désigner un ennemi commun

Rien ne soude un groupe mieux qu’un adversaire désigné, perçu comme une menace extérieure. Pour cela, l’idée est de :

Pointer un ennemi responsable de tous les maux, qu’il s’agisse d’une institution, d’un groupe social ou d’un individu : cela va renforcer la cohésion du groupe en interne.

Discréditer toute critique en l’assimilant à une attaque de l’ennemi.

Robert Greene illustre ces principes à travers plusieurs exemples historiques, notamment celui de Francesco Borri, un charlatan du XVIIe siècle qui prétendait avoir des visions mystiques et connaître le secret de la pierre philosophale. En usant d’un langage mystérieux, en s’entourant d’un cercle restreint d’initiés et en évitant toute confrontation directe avec la réalité, il bâtit un empire de crédules prêts à le suivre aveuglément.

27.2 - Les risques de cette stratégie

L’auteur avertit que cette stratégie est particulièrement efficace dans les périodes de trouble et d'incertitude mais qu’elle peut se retourner contre vous si elle est poussée trop loin :

Si les disciples découvrent la supercherie, leur dévotion peut se transformer en fureur vengeresse.

Le charisme doit être constamment entretenu sous peine de perdre de son éclat et d’être remplacé par une autre figure mystique plus convaincante.

Une trop grande mystification peut susciter des révoltes parmi ceux qui se sentent trahis ou manipulés.

Conclusion : créer une mystique est un moyen habile pour captiver, fédérer et influencer durablement un public. Ceux qui excellent dans cet art deviennent des figures intouchables, entourées d’un culte de la personnalité. Mais cette stratégie exige subtilité et contrôle, car un excès de manipulation peut entraîner des conséquences désastreuses si l’illusion se brise. Comme Robert Greene le rappelle, les masses ont soif de mystère… mais elles peuvent aussi exiger des comptes.

Loi 28 - Faites preuve d'audace

Dans cette vingt-huitième loi, Robert Greene démontre que l’audace est un redoutable intrument de pouvoir. L’indécision et la prudence excessive sont perçues comme des signes de faiblesse, tandis qu’une action audacieuse impose le respect et force l’admiration. Ceux qui osent, même contre toute attente, prennent l’ascendant sur ceux qui hésitent.

28.1 - L’audace en action : trois exemples historiques

L’auteur illustre cette loi à travers plusieurs exemples historiques :

Le comte Victor Lustig, un escroc légendaire, qui osa vendre la Tour Eiffel… deux fois ! Il exploita le climat d’incertitude de l’époque et usa de son charisme pour convaincre des acheteurs crédules, prouvant ainsi que le culot peut parfois défier la raison.

Le jeune Ivan le Terrible qui, après des années de soumission apparente, renversa brutalement ses opposants en un coup de force magistral. Son audace marqua son règne et imposa son autorité absolue.

L’Arétin, poète et satiriste, qui se fit un nom en osant attaquer les figures les plus puissantes de son époque. Ses écrits corrosifs lui valurent autant de soutiens que d’ennemis, mais son audace lui assura une influence durable.

28.2 - Pourquoi l’audace fonctionne-t-elle ?

Robert Greene met en avant les avantages psychologiques de l’audace :

Elle masque les faiblesses et imperfections : une action assumée avec assurance donne une impression de contrôle, même si elle repose sur une base fragile.

Elle paralyse l’adversaire : une attaque frontale, inattendue et déterminée, laisse peu de temps pour réagir.

Elle capte l’attention et impose le respect : les individus audacieux inspirent, intriguent et fascinent.

Elle est contagieuse : une audace affichée encourage les autres à suivre et consolide ainsi le pouvoir de son initiateur.

28.3 - L’audace doit être maîtrisée et stratégique

L’audace brute peut être une arme à double tranchant si elle est mal utilisée. Elle doit être stratégique. Pour cela, Robert Greene recommande de :

La planifier soigneusement : l’audace impulsive mène souvent au désastre ; elle doit être précise, réfléchie et fondée sur une analyse des circonstances.

Choisir le bon timing : l’audace a plus d’impact lorsqu’elle est appliquée au bon moment, notamment face à un adversaire vulnérable ou un environnement incertain.

Ne pas la rendre systématique au risque de devenir prévisible : si vous êtes toujours audacieux, votre comportement devient une routine et perd son effet de surprise. L’idéal est d’alterner entre audace et prudence pour rester insaisissable.

Robert Greene conclut en soulignant que la timidité et l’hésitation n’ont pas leur place dans la quête du pouvoir. Même lorsqu’on doute, il est préférable d’avancer avec confiance et détermination, quitte à improviser en cours de route. L’audace, lorsqu’elle est bien employée, renverse les dynamiques, brise les résistances et forge des légendes. Ceux qui osent prennent le contrôle. Ceux qui hésitent se contentent de suivre.

Loi 29 - Suivez un plan précis jusqu'au but final

Dans cette vingt-neuvième loi, Robert Greene insiste sur un principe fondamental du pouvoir : l’improvisation est l’ennemie du succès. Ceux qui avancent sans plan précis finissent souvent par échouer, tandis que ceux qui suivent une stratégie méticuleuse atteignent leurs objectifs avec précision.

29.1- Deux exemples opposés : l’échec et le succès de la planification

L’échec de Vasco Núñez de Balboa

Explorateur audacieux, Balboa découvrit l’océan Pacifique en 1513, un exploit historique. Mais, faute de vision à long terme et d’un plan solide pour consolider son pouvoir, il se fit piéger dans des intrigues politiques et fut exécuté. Son incapacité à anticiper les risques transforma sa découverte en une victoire éphémère, rapidement effacée par son imprévoyance.

Le succès de Bismarck

À l’inverse, Otto von Bismarck planifia avec une rigueur implacable l’unification de l’Allemagne en trois guerres parfaitement orchestrées. Chaque conflit servait un but précis et s’arrêtait dès l’objectif atteint. Contrairement à Balboa, il ne laissa jamais place au hasard, garantissant ainsi le succès de son entreprise.

29.2 - Pourquoi la planification est essentielle ?

Robert Greene explique que la plupart des gens échouent à cause de trois erreurs majeures :

Ils se laissent guider par leurs émotions plutôt que par la raison => Les impulsions du moment remplacent une vision réfléchie, les rendant vulnérables aux imprévus.

Ils rêvent de triomphe sans anticiper les obstacles => Un plan sans prise en compte des difficultés est une illusion vouée à l’échec.

Ils improvisent face aux difficultés plutôt que de les anticiper => Sans feuille de route, chaque obstacle devient une crise qui affaiblit leur position.

29.3 - Comment bâtir un plan gagnant ?

Pour l’auteur, le réel pouvoir repose sur quatre principes fondamentaux :

Fixer un objectif clair et précis : plus l’objectif est défini, plus la stratégie est efficace.

Anticiper tous les obstacles possibles : un bon plan doit inclure des scénarios de crise et des solutions déjà préparées.

Prévoir une stratégie de sortie : savoir quand et comment conclure est aussi important que la manière de commencer.

Savoir s’arrêter au bon moment : l’excès de conquête ou de persévérance aveugle mène souvent à la ruine.

29.4 - Le pouvoir appartient à ceux qui pensent à long terme

Robert Greene conclut que les grands stratèges ne laissent rien au hasard. Ils avancent avec méthode, anticipent les difficultés avant qu’elles n’apparaissent et s’arrêtent dès que leur but est atteint. Contrairement aux impulsifs, ils ne se laissent jamais piéger par l’illusion du succès instantané. Le véritable pouvoir ne se construit pas sur l’audace seule, mais sur une vision claire, planifiée jusqu’au bout.

Loi 30 - N'ayez jamais l'air de forcer

La trentième loi expose un principe subtil mais clé du pouvoir : toute action doit sembler naturelle et sans effort.

Derrière chaque performance brillante se cache souvent un travail acharné, mais le secret d’un véritable stratège est de masquer la sueur derrière l’élégance. Ceux qui donnent l’impression de forcer paraissent maladroits et perdent en influence.

30.1 - L’art de l’effort invisible : deux exemples frappants

L'auteur illustre ce concept à travers deux exemples marquants :

Sen no Rikyu, maître japonais de la cérémonie du thé

Au XVIe siècle, Rikyu considérait que la beauté suprême résidait dans une harmonie apparemment fortuite et naturelle. Un jour, il plaça subtilement des coussins sur des dalles enneigées pour créer un effet magnifique, sans jamais révéler son artifice. Pourtant, chaque détail avait été calculé avec minutie. Sa maîtrise venait de cette capacité à dissimuler l’effort derrière l’apparente simplicité.

Harry Houdini, le roi de l’illusion

L’illusionniste stupéfiait le public avec des évasions défiant les lois de la physique. Mais derrière cette apparente facilité, révèle l’auteur, se cachaient, en fait des années de préparation, d’entraînement acharné et de recherches minutieuses, jamais dévoilés au public. Houdini, en ne montrant jamais les coulisses de son travail, entretenait le mystère et l’admiration.

30.2 - Pourquoi dissimuler l’effort est une arme de pouvoir ?

Robert Greene liste plusieurs avantages stratégiques à cacher ses efforts. Cela :

Suscite l’admiration et parfois même une forme de crainte respectueuse : une action fluide et maîtrisée impressionne plus qu’un effort laborieux et visible.

Préserve une aura de mystère autour de nos capacités : si personne ne comprend vos méthodes, il devient impossible de les copier ou de les anticiper.

Empêche les autres de voir vos points faibles et d’utiliser vos méthodes contre vous : montrer la difficulté d’un exploit révèle les coulisses et fragilise votre image.

30.3 - Comment appliquer cette loi dans la vie quotidienne ?

Ne vous plaignez jamais du travail accompli : les efforts doivent rester invisibles aux yeux des autres.

Soignez votre attitude : l’élégance et le contrôle donnent l’illusion d’une aisance naturelle.

Cachez vos stratégies et vos méthodes : en rendant vos résultats “évidents”, vous brouillez les pistes et empêchez les autres de les reproduire.

Misez sur la spontanéité maîtrisée : plus une action semble naturelle, plus elle est efficace et convaincante.

Robert Greene conclut que le vrai pouvoir opère sans révéler ses mécanismes. Comme en nature, où les arbres grandissent sans bruit et où la rivière s’écoule sans effort visible, les grands stratèges avancent avec fluidité, masquant leur travail sous une apparente facilité. Ceux qui maîtrisent cet art deviennent inaccessibles, car on ne peut ni prévoir, ni imiter ce qui semble inné.

Loi 31 - Offrez le choix : Charybde ou Scylla ?

Dans cette trente-et-unième loi, Robert Greene dévoile une autre stratégie de manipulation subtile : donner aux autres l'illusion du choix en gardant le contrôle de toutes les issues possibles.

Plutôt que d’imposer votre volonté de manière autoritaire, proposez deux options qui mènent toutes les deux à un résultat en votre faveur. Ceux qui croient décider par eux-mêmes sont bien plus enclins à accepter leur sort.

31.1 – Le pouvoir de l’illusion du choix : deux exemples historiques

Ivan le Terrible : l’abdication qui force l’obéissance

En 1564, confronté à l’hostilité des boyards, Ivan IV mit en scène une abdication théâtrale en quittant mystérieusement Moscou. Il laissa son peuple face à un dilemme : le chaos et l’anarchie sans lui, ou son retour en tant que tsar absolu, avec des pouvoirs étendus. Résultat ? Effrayés par l’alternative, les Moscovites le rappelèrent en lui accordant plus de pouvoir que jamais.

Ninon de Lenclos : séduire ou payer

La célèbre courtisane proposait à ses soupirants deux options : devenir ses "payeurs" ou ses "martyrs". Chaque alternative servait ses intérêts : soit financièrement, soit en alimentant sa cour d’admirateurs. En effet, ceux qui acceptaient de payer entretenaient son train de vie, tandis que ceux qui refusaient, bien que privés d’elle, devenaient ses admirateurs frustrés, renforçant son prestige et son aura de mystère.

31.2 - Pourquoi cette stratégie fonctionne-t-elle ?

Trois raisons principales rendent cette technique efficace. Celle-ci :

Masque la manipulation en donnant un sentiment de liberté : les gens n’aiment pas qu’on leur impose une décision, mais s’ils pensent qu’ils ont le choix, ils acceptent plus volontiers leur sort.

Évite le ressentiment puisque les gens pensent avoir choisi leur sort : celui qui choisit une option, même défavorable, aura tendance à la justifier après coup pour éviter de se sentir manipulé.

Garantit un résultat favorable quelle que soit l’option choisie : contrairement à un affrontement direct, cette approche supprime le risque de perdre.

31.3 - Comment appliquer cette loi dans la vie quotidienne ?

Dans la négociation : ne laissez jamais votre interlocuteur refuser en bloc. Proposez-lui deux alternatives, toutes deux avantageuses pour vous. Exemple : "Vous préférez signer aujourd’hui ou attendre et perdre cette opportunité ?"

Dans les relations personnelles : Orientez les choix pour obtenir ce que vous voulez sans passer pour autoritaire. Exemple : "On mange au restaurant A ou au restaurant B ?" (en ayant préalablement écarté les options qui ne vous conviennent pas).

Dans le leadership : amenez vos collaborateurs à choisir une direction que vous avez déjà balisée, plutôt que de leur laisser un libre arbitre incontrôlable.

En résumé, les meilleurs stratèges ne dictent jamais directement leurs décisions. Ils orientent les circonstances de manière subtile, apportant une liberté apparente tout en manipulant le cadre des décisions. Comme Ivan le Terrible ou Ninon de Lenclos, ils savent que l’important n’est pas ce que les gens choisissent, mais ce qu’ils ne réalisent pas avoir perdu en choisissant.

Loi 32 - Touchez l'imagination

La trente-deuxième loi étudie le pouvoir de l'imagination dans la manipulation des masses : les gens préfèrent les illusions séduisantes aux réalités brutales.

Celui qui sait captiver l’imagination d’un public détient un pouvoir immense, car il procure des rêves et des espoirs là où le monde réel est souvent décevant.

32.1 - L’art de l’illusion : l’exemple de Bragadino

Robert Greene illustre ce principe avec l’histoire de Bragadino, un alchimiste du XVIe siècle, qui exploita le désespoir et la soif de grandeur d’une Venise en déclin. Il promit aux dirigeants vénitiens de transformer du plomb en or, leur faisant miroiter un espoir de renouveau économique et de gloire sans effort.

Ce charlatan ne se contenta pas de faire des promesses : il orchestra un véritable spectacle, usant de rituels mystérieux et de symboles puissants pour nourrir la croyance. Il savait que la foule voulait croire à la magie et aux solutions miraculeuses plus qu’affronter les dures réalités.

Finalement, lorsque son imposture fut découverte, il fut exécuté, mais il avait déjà prouvé l’efficacité de la manipulation par l’imaginaire.

32.2 - Pourquoi savoir toucher l’imagination et faire rêver marche si bien ?

Pour l'auteur, cette stratégie fonctionne car :

Les gens fuient les réalités déplaisantes : ils préfèrent un mensonge séduisant à une vérité douloureuse.

Ils attribuent rarement leurs problèmes à leurs propres actions : offrir une solution externe (magie, destin, leader charismatique) permet d'éviter l’auto-responsabilité.

Ils préfèrent les solutions rapides et miraculeuses aux efforts de longue haleine : la discipline et le travail sont rarement aussi séduisants qu’une promesse d’élévation soudaine.

32.3 - Comment utiliser cette loi à son avantage ?

Racontez une histoire plutôt qu’un simple fait : les faits seuls sont froids, mais une narration captivante les rend inoubliables.

Créez un sentiment d’émerveillement : laissez planer un mystère, ajoutez une dimension spectaculaire à vos actions.

Apportez un espoir inatteignable mais séduisant : les leaders les plus influents promettent un futur meilleur, même s’ils ne le définissent jamais clairement.

Évitez d’être trop concret : une illusion détaillée est fragile, tandis qu’un rêve flou laisse place à l’interprétation et à l’espoir personnel.

Ainsi, selon Robert Greene, le pouvoir se situe dans la capacité à offrir des rêves qui contrastent avec la banalité du quotidien, tout en maintenant une distance suffisante pour que l'illusion ne se dissipe jamais.

Loi 33 - Trouvez le talon d'Achille

Dans sa trente-troisième loi du pouvoir, Robert Greene assure que chaque personne, même la plus forte en apparence, possède une faille exploitable dans sa personnalité.

Que ce soit une insécurité, une émotion incontrôlable ou un besoin irrépressible, celui qui sait identifier et manipuler ces points faibles peut contrôler autrui sans qu’il s’en rende compte.

33.1 - Exploiter les failles humaines : trois exemples historiques

Richelieu : l'art de la manipulation psychologique

Le cardinal de Richelieu bâtit son influence en détectant systématiquement les faiblesses de ses adversaires. Il exploita le besoin d’attention masculine de la régente Marie de Médicis et la dépendance émotionnelle du jeune Louis XIII pour construire son pouvoir et prendre progressivement le contrôle de la cour de France.

Le comte Lustig : flatter l’ego pour escroquer

L’escroc légendaire Victor Lustig repéra chez un nouveau riche nommé Loller, une soif maladive de prestige social. Il l’attira alors avec une fausse machine soi-disant capable de fabriquer de l’argent, exploitant son avidité et son besoin de reconnaissance. Résultat : Loller se fit escroquer sans poser de questions.

Catherine de Médicis et ses espionnes fatales

Pour manipuler les puissants hommes de sa cour, Catherine de Médicis créa un "escadron volant", composé de femmes séduisantes chargées de piéger et d’espionner les figures clés du pouvoir. Elle savait que le désir incontrôlable des hommes face aux charmes féminins les rendait vulnérables.

33.2 - Quelles sont les failles les plus courantes ?

Selon Robert Greene, les points faibles universels exploitables les plus courants sont :

Le manque de confiance en soi : ceux qui doutent d’eux-mêmes cherchent souvent un guide ou une validation extérieure.

Le besoin de reconnaissance sociale : les individus voulant être admirés sont prêts à tout pour préserver leur image.

Les pulsions incontrôlables : la luxure, la cupidité, la vanité poussent les gens à prendre des décisions irrationnelles.

Les blessures émotionnelles de l’enfance : un rejet ou une humiliation passée peut être exploité pour influencer les comportements.

33.3 – Quatre conseils pour utiliser ce jeu dangereux

Robert Greene nous met en garde : manipuler les faiblesses d’autrui comporte des risques. Certaines personnes, une fois conscientes de leur vulnérabilité exploitée, peuvent réagir avec violence, vengeance ou haine. Il faut donc utiliser cette technique avec finesse, sans éveiller les soupçons :

Observez et écoutez attentivement : chaque personne laisse inconsciemment entrevoir ses failles à travers ses paroles, ses gestes ou ses réactions émotionnelles.

Testez les réactions : proposez des situations qui touchent un point sensible et observez comment la personne réagit.

Flattez ou mettez sous pression selon le besoin : un individu en manque de reconnaissance se laisse séduire par les compliments, tandis qu’un esprit anxieux réagira par la peur et l’incertitude.

Ne vous dévoilez pas : plus vous en savez sur l’autre, moins il doit en savoir sur vous.

33.4 - Le pouvoir appartient aux observateurs

Ainsi, termine l’auteur, celui qui sait détecter les failles humaines devient un maître dans l’art de l’influence. Richelieu, Lustig et Catherine de Médicis n’étaient pas les plus forts physiquement, mais les plus habiles à jouer avec les émotions et les désirs des autres.

Si l’on résume en une phrase : le plus grand levier du pouvoir n’est pas la force brute, mais la connaissance des faiblesses des autres.

Loi 34 - Soyez royal

La trente-quatrième loi du pouvoir souligne l'importance de se comporter avec la dignité et la grandeur d'un roi pour être traité comme tel. L’attitude et l’assurance que vous affichez déterminent, en effet, le respect et l’autorité que vous inspirez aux autres.

34.1 - L’importance du comportement royal : deux destins opposés

Pour illustrer cette loi, l’auteur met en parallèle deux exemples historiques antinomiques :

L’échec de Louis-Philippe : le roi sans majesté

Surnommé le "roi bourgeois", Louis-Philippe tenta d’établir une proximité avec le peuple en adoptant un comportement modeste et accessible. Mais loin de le rapprocher de ses sujets, cette attitude affaiblit son autorité et le rendit vulnérable. Il perdit le respect de la nation et fut renversé lors de la révolution de 1848.

Le succès de Christophe Colomb : l’audace d’un roi sans couronne

Issu d’une famille modeste et fils de marchand, Colomb ne se laissa jamais définir par son statut social. Grâce à une confiance royale inébranlable, il se présenta aux monarques européens non comme un simple navigateur, mais comme un explorateur au destin grandiose. Son assurance tranquille et ses exigences audacieuses impressionnèrent la reine Isabelle, qui finit par financer ses expéditions.

34.2 - Pourquoi cette stratégie est-elle si efficace ?

Robert Greene explique que cette stratégie fonctionne car:

Notre comportement détermine la façon dont les autres nous perçoivent : les autres nous traitent comme nous nous traitons nous-mêmes.

Une confiance sereine, sans arrogance, inspire naturellement le respect.

Fixer soi-même sa valeur pousse les autres à l'accepter.

34.3 - La grandeur est une posture, pas un titre

L'auteur conclut qu'il est essentiel de maintenir sa dignité en toutes circonstances, car le pouvoir véritable émane de notre capacité à nous voir nous-mêmes comme dignes de grandeur.

Ainsi, ceux qui se comportent avec majesté et exigence obtiennent naturellement le respect, tandis que ceux qui se rabaissent finissent par être écrasés.

Voici alors quatre façons d’appliquer ce principe au quotidien :

Adoptez une posture et un langage dignes : la manière dont vous vous tenez, parlez et bougez influence la façon dont les autres vous perçoivent.

Ne cherchez pas l’approbation des autres : un roi ne quémande pas l’attention, il l’attire par sa seule présence.

Affichez des standards élevés : ceux qui se contentent de peu sont rarement respectés. Exigez de la reconnaissance et du respect, et les autres suivront.

Restez maître de vos émotions : un vrai leader ne se laisse jamais emporter par la colère ou le désespoir. Il maintient son calme et impose son autorité par sa maîtrise de soi.

Loi 35 - Maîtrisez le temps

La trente-cinquième loi du pouvoir met en évidence l’idée que celui qui contrôle le temps contrôle le jeu. Selon Robert Greene, la précipitation mène à des erreurs, l’attentisme à l’oubli. L’art consiste donc à savoir quand patienter et quand agir avec fulgurance.

35.1 - L’art du timing : l’exemple de Joseph Fouché

L’un des plus grands maîtres de cette loi fut Joseph Fouché, ministre sous la Révolution française, qui survécut à tous les régimes successifs (Robespierre, Napoléon, Louis XVIII) en s’adaptant parfaitement au rythme des événements.

Robert Greene montre comment Fouché sut identifier les tendances émergentes, anticiper les réactions, et surtout patienter quand nécessaire :

La phase d’affût : Fouché patienta lorsque la Révolution était à son paroxysme, restant discret et observateur pendant la Terreur.

La phase de traque : il déstabilisa ses adversaires en semant des rumeurs et en influençant secrètement le cours des événements.

La phase d’hallali : il frappa au bon moment, trahissant Robespierre juste avant sa chute, et s’alignant sur Napoléon avant qu’il ne devienne empereur.

Sa parfaite lecture des évènements et son intelligence du tempo politique lui permirent de survivre là où d’autres furent exécutés ou exilés.

35.2 - Les principes clés de la maîtrise du temps

Pour l'auteur, la maîtrise du temps repose sur ces trois phases :

L'affût => période de patience et d'observation où l'on attend l'occasion propice : ne pas se précipiter. Observez, analysez les tendances, laissez les autres commettre des erreurs.

La traque => moment où l'on perturbe le rythme de l'adversaire pour le déstabiliser : créez un déséquilibre temporel pour forcer l’ennemi à agir trop vite ou à hésiter au mauvais moment.

L'hallali => phase finale d'action rapide et décisive : lorsque le moment est venu, frappez sans hésitation. L’attente a préparé le terrain, maintenant l’action doit être fulgurante.

35.3 - Les quatre piliers de l’intelligence temporelle

L’auteur des "48 lois du pouvoir" souligne que dompter le tempo des évènements requiert quatre qualités clés :

Le contrôle de ses émotions pour éviter la précipitation : ne réagissez jamais impulsivement, sous l’effet de la pression, de l’urgence prenez toujours le temps de réfléchir avant d’agir.

Une lecture fine de l'air du temps, des cycles et des tendances émergentes : cela vous permettra d’anticiper les changements.

La capacité à ralentir délibérément pour voir plus loin et créer du suspens et de l’intérêt : créez de l’attente autour de vous. Ceux qui se rendent trop disponibles perdent en valeur.

Le courage d'agir vite au moment opportun : sachez quand accélérer, une opportunité manquée ne revient pas toujours. Quand c’est le bon moment, agissez sans hésitation.

35.4 - Celui qui contrôle le temps contrôle les autres

Robert Greene conclut que les grands stratèges savent lire le temps comme un musicien lit une partition. Ils anticipent, créent du suspense et frappent avec précision. Les impatients se précipitent et échouent. Les attentistes hésitent et sont oubliés. Mais ceux qui savent quand temporiser et quand agir dominent le jeu.

Loi 36 - Méprisez les contrariétés

Dans la trente-sixième loi, Robert Greene partage un paradoxal psychologique : accorder trop d'attention à un problème mineur ne fait que l'amplifier.

Autrement dit, plus vous accordez d’attention à un problème, plus vous lui donnez du pouvoir. Que faire alors ? Ignorer avec stratégie, car ce que l’on méprise cesse d’exister aux yeux des autres.

36.1 - Deux stratégies opposées : une leçon d’histoire

L'auteur illustre cette loi à travers deux exemples historiques opposés :

L’échec de l’expédition punitive contre Pancho Villa

Lorsque le président Woodrow Wilson réagit démesurément à un raid mineur de Pancho Villa en envoyant une expédition militaire au Mexique, il transforma un simple bandit en héros révolutionnaire. Au lieu de le neutraliser, il lui donna une importance qu’il n’aurait jamais eue autrement.

Le succès d’Henri VIII : l’indifférence comme arme

Plutôt que de s’opposer directement au Pape et à Catherine d’Aragon dans son divorce, Henri VIII ignora délibérément et simplement leurs protestations, et imposa sa propre église. En refusant d’entrer dans le jeu de l’opposition, il força le monde à s’adapter à sa volonté.

36.2 - Pourquoi cette loi est-elle si efficace ?

Pour Robert Greene, le mépris est une arme redoutable car il :

Prive l'adversaire de l'attention qu'il recherche.

Préserve votre énergie pour les vrais enjeux, les vraies batailles.

Vous place en position de force : celui qui dicte ce qui mérite de l’attention impose son cadre à l’autre.

Rend l'autre fou de frustration.

36.3 - L’art subtil d’ignorer pour mieux dominer : trois techniques de mépris stratégique

L'auteur développe plusieurs tactiques efficaces :

L'approche "les raisins sont trop verts" : si quelque chose vous échappe ou vous est refusé, faites comme si cela ne vous intéressait pas. Votre indifférence retournera le jeu psychologique à votre avantage.

La minimisation élégante des erreurs plutôt que les excuses excessives : ne justifiez jamais trop vos erreurs car s’excuser trop abondamment est une façon d’alimenter un problème. Parfois, il vaut mieux minimiser avec élégance plutôt que de nourrir l’embarras.

L'indifférence calculée face aux provocations mineures : ignorez les provocations délibérées. Lorsque quelqu’un cherche à vous énerver ou vous déstabiliser, répondez par l’indifférence. Cela lui retirera tout pouvoir sur vous.

Le silence face aux rumeurs : si une critique ou une attaque vous vise, l’ignorer et imposer votre propre narration est souvent plus efficace que de la réfuter.

36.4 - Attention à ne pas confondre indifférence et aveuglement

Pour Robert Greene, il faut savoir distinguer les véritables menaces des simples contrariétés : des problèmes ignorés ne sont pas toujours des problèmes résolus. Certaines menaces réelles peuvent s'aggraver dangereusement et devenir incontrôlables si elles ne sont pas traitées à temps.

36.5 - Moins vous réagissez, plus vous contrôlez

Finalement, dans le jeu du pouvoir, accorder de l’attention à quelque chose, c’est le nourrir. Ceux qui savent ignorer intelligemment les provocations et contrariétés gardent le contrôle, tandis que ceux qui réagissent à tout perdent leur énergie et leur crédibilité. En gros, ce qui ne vous touche pas n’existe pas.

Loi 37 - Jouez sur le visuel

Dans cette 37ème loi du pouvoir, Robert Greene met en lumière l’importance des images et symboles visuels dans l'exercice du pouvoir. Les images, affirme-t-il, parlent plus fort que les mots. Les symboles, les mises en scène et les illusions visuelles captivent l’esprit, influencent les émotions et s’ancrent durablement dans la mémoire collective.

37.1 - L’image comme outil de domination : deux exemples marquants

Cette loi se vérifie dans les deux exemples suivants :

Le "Docteur Lune" : la puissance du spectacle

À Berlin, un homme surnommé "Docteur Lune" fascinait les foules en projetant des rayons lunaires à l’aide d’un dispositif secret, donnant l’illusion d’un phénomène mystique. Son charisme et son contrôle de l’image lui permirent d’influencer des milliers de personnes sans prononcer un mot.

Diane de Poitiers : incarner un mythe

Maîtresse d’Henri II, Diane de Poitiers renforça son pouvoir en se façonnant une image divine, s’identifiant à la déesse Diane chasseresse. Par des tableaux, des bijoux et une mise en scène soigneusement orchestrée, elle captiva Henri II pendant plus de vingt ans, surpassant même l’influence de la reine.

37.2 - Pourquoi le visuel est-il une méthode de communication si impactante ?

Si les images sont aussi influentes, assure l’auteur, c’est parce qu’elles :

Court-circuitent la réflexion rationnelle : contrairement aux mots, qui nécessitent une analyse, une image provoque une réaction immédiate et instinctive.

Créent des associations émotionnelles fortes et immédiates : les symboles ou une bonne mise en scène par exemple peuvent déclencher une fascination irrationnelle.

Transcendent les barrières sociales et culturelles : elles parlent à tous, quel que soit le niveau intellectuel ou l’origine sociale en face.

Sont plus efficaces que les mots pour persuader : l’image marque les esprits durablement. Un bon discours peut être oublié, mais une scène bien orchestrée reste gravée dans la mémoire collective.

37.3 - Comment utiliser la force du visuel pour gagner en pouvoir ?

L'auteur recommande plusieurs stratégies :

Créer une "signature visuelle" distinctive : ayez un style, une gestuelle ou un élément visuel qui vous distingue instantanément. Napoléon et son célèbre bicorne, Steve Jobs et son col roulé noir, ou encore les capes rouges des cardinaux sont autant d’exemples de marques visuelles mémorables.

S'approprier des symboles historiques ou mythiques : associez-vous à des images de puissance. Louis XIV s’identifiait au Soleil, Mussolini copiait les postures impériales romaines, et les entreprises modernes utilisent des logos évocateurs pour incarner des valeurs fortes.

Orchestrer des mises en scène spectaculaires : mettez en avant votre message avec un décor marquant. Les chefs politiques et religieux le savent bien : des foules, des effets de lumière, des gestes calculés amplifient la puissance d’un discours.

Utiliser la couleur et l'espace de façon symbolique : les couleurs, les tenues et même le placement des objets et des personnes influencent la perception. Le rouge symbolise l’autorité, le blanc l’innocence, et l’or la richesse. Jouer sur ces codes visuels renforce le charisme et l’impact.

37.4 – Le pouvoir est un art visuel mais attention aux pièges

Ne tombez pas dans l’excès : un spectacle trop évident peut sembler artificiel ou manipulateur. La subtilité est essentielle.

Ne négligez pas la cohérence : votre image doit correspondre à votre message et à votre personnalité. Un décalage entre l’image et la réalité peut briser l’illusion et décrédibiliser votre pouvoir.

Robert Greene conclut qu'aucun pouvoir durable n'est possible sans le recours aux images et aux symboles, qui permettent de créer une aura transcendant la simple réalité.

Loi 38 - Pensez librement, parlez sobrement

Dans cette trente-huitième loi, Robert Greene nous met en garde vis-à-vis d’un piège classique : exprimer trop ouvertement ses pensées non conformistes. Même les idées les plus brillantes peuvent se retourner contre vous si elles sont perçues comme une menace pour l’ordre établi, prévient l’auteur.

38.1 - Deux destins opposés : la prudence contre l’arrogance

L’échec de Pausanias : afficher sa différence est dangereux

Pausanias, un commandant spartiate, adopta ostensiblement les mœurs perses sans craindre d’afficher son mépris pour les traditions spartiates. Résultat ? Il fut vu comme un traître et un provocateur et finit emmuré vivant par ses propres compatriotes.

Le succès de Campanella : savoir déguiser ses pensées

Face à l’Inquisition, le philosophe Campanella, pourtant porteur d’idées hérétiques, trouva un moyen de survivre en adoptant plusieurs stratégies :

Feindre la folie pour échapper à la responsabilité.

Dissimuler ses idées dans des écrits apparemment orthodoxes mais subtilement subversifs.

Réserver ses véritables opinions à un cercle restreint de confiance.

38.2 - Pourquoi cette loi est-elle essentielle ?

Pour trois raisons :

Les gens rejettent ce qu’ils ne comprennent pas : les idées trop en avance sur leur temps ne sont souvent pas acceptées par la majorité.

L’excès d’indépendance est perçu comme une menace : celui qui affiche trop ouvertement son anticonformisme attire les soupçons et le rejet.

L’humilité préserve la sécurité : en donnant l’illusion de se conformer, on évite les conflits inutiles.

38.3 - Comment appliquer cette loi intelligemment ?

Pour Robert Greene, la sagesse consiste à :

Se conformer extérieurement aux normes sociales : jouez le jeu en public, pensez librement en privé.

Garder ses opinions non conventionnelles pour soi : dissimulez vos pensées sous une apparence conventionnelle. Rien ne vous empêche d’introduire des idées radicales, mais faites-le subtilement et progressivement.

Exprimer ses idées de manière indirecte et nuancée : utilisez l’ironie et le double langage. Les meilleurs esprits savent faire passer des idées sous une forme acceptable (humour, symbolisme, métaphores).

Cultiver un cercle privé d'amis de confiance : entourez-vous d’esprits ouverts, mais choisissez-les bien. Construisez un cercle de confiance, mais assurez-vous de la loyauté et de la discrétion de ses membres.

Observez avant de parler : évaluez les croyances et les sensibilités de votre entourage avant d’exprimer votre véritable opinion.

Attention toutefois à :

Ne pas sous-estimer la peur du changement : même des idées logiques et bénéfiques peuvent être rejetées par principe.

Ne pas vous enfermer dans l’isolement total : il est important d’être perçu comme un membre fiable du groupe, même si vous pensez différemment en secret.

38.4 - L’art du camouflage intellectuel

Finalement, le pouvoir appartient à ceux qui savent penser librement tout en préservant les apparences de la conformité, à ceux qui savent penser différemment sans provoquer inutilement la résistance. Pour Robert Greene, un stratège sait ce qu’il peut dire et à qui.

Loi 39 - Exaspérez l'ennemi

La trente-neuvième loi du pouvoir explique que la colère est l'ennemie du pouvoir stratégique, tandis que le sang-froid permet de manipuler les émotions des autres et contrôler la situation.

L’idée est donc de savoir garder son calme tout en déclenchant la colère chez l’autre.

39.1 - Deux stratégies opposées : le sang-froid contre la colère

L’erreur de Napoléon : perdre son calme, c’est révéler ses faiblesses

Napoléon, pourtant maître de la stratégie, commit une erreur fatale face à Talleyrand, son ancien conseiller. Ce dernier, impassible et rusé, poussa l’Empereur à l’explosion de rage, exposant ses vulnérabilités à ses proches. Cette perte de contrôle affaiblit son autorité et marqua le début de son déclin.

L’intelligence d’Hailé Sélassié : provoquer pour mieux contrôler

L’empereur d’Éthiopie, Hailé Sélassié, affronta le seigneur de guerre Ras Gougsa en le poussant délibérément à la rébellion. Il l’humilia subtilement, certain que sa fierté blessée le pousserait à agir de manière précipitée. Et ça marcha. Gougsa se jeta dans une bataille qu’il ne pouvait pas gagner, scellant sa propre perte.

39.2 - Pourquoi cette loi est-elle si puissante ?

Pour Robert Greene, la maîtrise des émotions est un levier de pouvoir majeur car la colère :

Fait perdre tout contrôle stratégique : une personne en colère ne réfléchit plus, agit impulsivement et devient prévisible.

Expose nos faiblesses à l'adversaire : lorsqu’on s’énerve, on révèle nos points sensibles, fournissant ainsi à l’ennemi des moyens de nous manipuler.

Diminue le respect qu'on nous porte : celui qui s’énerve est perçu comme faible, car le pouvoir appartient à ceux qui maîtrisent leurs émotions

Peut être facilement manipulée par les autres : celui qui garde son calme et sait comment provoquer peut diriger les actions de son adversaire et le pousser à l’erreur.

39.3 - Comment utiliser cette loi pour garder l’avantage ?

L'auteur des "48 lois du pouvoir" suggère plutôt de :

Garder son calme en toutes circonstances : restez toujours maître de vos émotions, ne laissez jamais l’ennemi voir votre irritation ou vos frustrations. Montrez une façade de calme et d’indifférence.

Identifier les points sensibles de l'adversaire : observez attentivement ce qui le fait réagir. Il peut s’agir d’un complexe, d’une peur ou d’un besoin de reconnaissance.

Provoquer sa colère de manière stratégique : provoquez subtilement, sans en faire trop. L’art est de lui faire perdre son calme sans qu’il se rende compte que vous l’y avez poussé. Un commentaire ironique, une réponse froide à une attaque émotionnelle, ou une fausse insulte déguisée en compliment peuvent suffire.

Utiliser son emportement contre lui : une fois que votre adversaire s’emporte, il devient manipulable. Poussez-le à agir sur un coup de tête, à prendre des décisions hâtives ou à dire quelque chose qu’il regrettera.

En revanche, évitez de :

Vous laisser emporter par votre propre jeu : provoquer peut être efficace, mais il faut savoir quand s’arrêter pour ne pas susciter une haine irréversible.

Sous-estimer un adversaire en colère : quelqu’un poussé à bout peut devenir dangereux et agir avec une intensité imprévisible.

Trop vous exposer : un excès de provocation peut se retourner contre vous si l’ennemi rassemble des alliés contre vous.

Ainsi, pour Robert Greene, le vrai pouvoir appartient à ceux qui sont capables de garder leur sang-froid tout en sachant jouer avec les émotions (la colère surtout) des autres.

Loi 40 - N'hésitez pas à payer le prix

Dans cette quarantième loi, Robert Greene affirme que l'argent, bien utilisé, est un instrument de pouvoir terrible. La générosité stratégique peut ouvrir des portes, construire des alliances et asseoir une autorité durable. À l’inverse, chercher constamment à économiser ou obtenir sans payer vous fait perdre en stature, en respect et en contrôle.

40.1 - L’erreur des radins : l’obsession du gain détruit le pouvoir

Robert Greene illustre d’abord cette loi par l’exemple tragique des Espagnols du XVIe siècle, obsédés par le mythe de l’Eldorado. En poursuivant l’illusion de la quête d’argent facile, effrénée et instantanée, ils s’épuisèrent dans des conquêtes inutiles qui conduisirent à la mort de milliers d’hommes, gaspillèrent leurs ressources, négligèrent les investissements productifs au profit de ces chimères… et précipitèrent le déclin de leur empire.

40.2 - La générosité bien dosée : un levier de domination

Robert Greene présente ensuite plusieurs utilisations habiles de la générosité stratégique pour renforcer votre pouvoir et votre réputation :

L'Arétin, poète italien, offrait généreusement pour recevoir à Venise et se bâtir un réseau d’influence. En retour, il gagnait faveur, accès et protection.

Le baron Rothschild organisait les réceptions les plus somptueuses de Paris pour séduire les élites et surmonter les préjugés contre son origine juive allemande.

Laurent Le Magnifique, dont la fortune venait des banques, la fit oublier grâce à son mécénat artistique généreux, s’imposant comme un prince éclairé.

Louis XIV, stratège suprême, dépensait sans compter pour Versailles, forçant sa noblesse à l’imiter et à s’appauvrir, tout en l’achetant par des cadeaux stratégiquement calculés.

40.3 - Pourquoi la générosité stratégique fonctionne-t-elle ?

Pour Robert Greene, la générosité est efficace car elle :

Crée des obligations et de la reconnaissance durables : donner, c’est placer l’autre dans une position d’obligation implicite.

Adoucit les résistances et facilite la manipulation : un cadeau bien ciblé fait tomber les défenses plus sûrement qu’un discours.

Détourne l'attention des véritables jeux de pouvoir : dépenser ostensiblement permet de masquer des intentions plus profondes.

Renforce le prestige et l'influence sociale : dans l’imaginaire collectif, celui qui donne est puissant, celui qui compte est dépendant.

Touche aux mécanismes psychologiques profonds liés au don : le geste de donner active des mécanismes de loyauté, de réciprocité et de gratitude.

40.4 - Les types de comportements à éviter et ceux à appliquer

L'auteur nous met en garde contre quatre profils contre-productifs :

Le "requin" : obsédé par le profit immédiat, il suscite la méfiance et détruit toute relation à long terme.

Le "mesquin" : à force de marchander, il perd en dignité et en prestige.

Le "sadique" : il donne de l'argent pour dominer et humilier, ce qui détruit la confiance.

Le "mécène universel" : sa générosité excessive dilue son pouvoir et lui faire perdre toute aura.

Voici cependant quatre conseils à suivre pour appliquer cette loi intelligemment :

Payer pour ce qui compte vraiment.

Utilisez les cadeaux comme outils d’influence, pas comme simples marques d’affection.

Faites en sorte que votre générosité soit remarquée... sans paraître ostentatoire.

Ne soyez pas radin là où votre réputation est en jeu : dans le pouvoir, l’image précède toujours la logique financière.

40.5 - L’argent est un moyen, pas une fin

Robert Greene conclut que l'argent n'a de valeur que dans sa circulation et son usage stratégique. Ceux qui savent utiliser l’argent pour créer des liens et des influences, plutôt qu’amasser pour posséder des biens, et qui savent éviter les pièges qui diminuent le prestige, comme la gratuité et le marchandage, sont ceux qui dominent à long terme.

Loi 41 - Ne succédez à personne

Dans cette 41ème loi, Robert Greene met en garde contre le fait de prendre la suite d’un géant, qu’il s’agisse d’un parent charismatique, d’un chef admiré ou d’un dirigeant emblématique. Succéder, c’est risquer d’être éclipsé, comparé, diminué. Le pouvoir n’est pas dans la continuité passive, mais dans la rupture créatrice.

41.1 - Deux héritiers, deux destins

L'auteur illustre ce principe à travers deux exemples opposés :

L’échec de Louis XV : vivre dans l’ombre du Roi-Soleil

Après le règne glorieux et éclatant de Louis XIV, son arrière-petit-fils Louis XV hérite d’un royaume puissant et rayonnant… mais aussi d’une attente immense. Incapable d’incarner une nouvelle vision, il sombre dans l’oisiveté, l’indécision et la débauche, menant sans le savoir à l’effondrement de la monarchie.

Le triomphe d’Alexandre le Grand : dépasser Philippe II

Fils du génial roi de Macédoine, Alexandre aurait pu se contenter de prolonger l’œuvre de son père. Mais refusant de vivre dans l’ombre de son père, il choisit de frapper fort, vite, et autrement : il conquiert la Perse, fonde un empire immense, et en traçant ainsi audacieusement sa propre voie, s’effaça du rôle d’héritier pour devenir légende.

41.2 - Pourquoi succéder à une figure dominante est risqué ?

Pour l'auteur, succéder à une figure dominante présente plusieurs défis :

L'héritage d'un succès établi étouffe l'initiative : on attend de vous que vous perpétuiez un modèle existant, souvent incompatible avec votre personnalité ou votre époque.

Le poids des traditions limite l'innovation.

La comparaison constante avec le prédécesseur mine la confiance : même vos succès seront perçus comme moindres ou hérités, et vos erreurs comme des trahisons.

Le confort matériel diminue la motivation à exceller : reprendre les rênes d’un système bien huilé peut éteindre la volonté d’innover ou de bousculer les règles.

41.3 - Comment échapper à l’ombre du prédécesseur ?

Robert Greene préconise plusieurs méthodes pour s'affranchir de cette influence :

Créer une rupture nette avec le passé : ancrez votre identité dans le changement, même symbolique. Un nouveau style, un ton différent, un virage stratégique : tout ce qui vous distingue compte.

Développer un style et des symboles personnels distincts : ne vous contentez pas de "gérer l’héritage". Affirmez votre vision et bâtissez une œuvre personnelle, originale, mémorable.

Identifier et occuper des domaines négligés par le prédécesseur : occupez les angles morts de l’ancien règne, ce qu’il n’a pas vu, pas osé, ou pas accompli.

Maintenir un esprit de renouvellement constant : s’il est trop difficile de briller dans le sillage direct du précédent leader, changez de domaine, de style, de méthode. L’important est de déplacer le centre de gravité du pouvoir vers vous.

41.4 - Le pouvoir ne se reçoit pas, il se redéfinit

Attention à ne pas confondre rupture et rejet, s’enquiert l’auteur : ne détruisez pas l’héritage si vous n’avez rien à proposer en échange. Il ne s’agit pas de renier ce qui a été fait, mais de vous détacher intelligemment. Reprenez ce qui fonctionne, mais transformez la structure, l’intention, ou l’impact.

Finalement, conclut l’auteur, le véritable pouvoir commence là où l’héritage s’arrête, dans la capacité à créer son propre espace, libre du poids du passé. C’est-à-dire en cessant d’être l’héritier et en devenant l’auteur.

Il souligne toutefois qu'il ne s'agit pas de rejeter aveuglément tout héritage, mais de construire une identité authentique et indépendante. Créer sa propre trajectoire, c’est échapper à la comparaison, imposer son nom, et laisser une trace unique dans l’histoire.

Loi 42 - Éliminez l'agitateur

Cette 42ème loi explique que les troubles, désordres, divisions et chaos dans un groupe émanent souvent d’une seule personne. Un agitateur charismatique, un esprit rebelle, une voix toxique qui peut déstabiliser toute une structure et qu’il faut donc neutraliser à temps.

42.1 - Leçons de l’Histoire : quand la cité protège sa cohésion

Pour illustrer cette loi, l'auteur relate deux histoires.

L’ostracisme athénien : prévenir plutôt que punir

Dans l’Athènes antique, les citoyens avaient bien compris qu'une seule personne aux comportements asociaux pouvait menacer la cohésion de la cité.

En effet, ils organisaient chaque année un vote pour expulser de la cité, pendant dix ans, la personne jugée la plus dangereuse pour la démocratie. Ce n’était ni un châtiment ni une vengeance : c’était une mesure d’équilibre collectif, une façon de neutraliser l’influence nuisible d’un individu trop instable ou trop ambitieux.

Le cas de Dante et du pape Boniface VIII

Lorsque le pape voulait prendre le contrôle de Florence, il comprit vite que le poète Dante Alighieri, alors leader politique charismatique et influent, était le seul capable de fédérer la résistance. Sans lui, il savait que la ville tomberait facilement. En l’exilant, il brisa alors le cœur de l’opposition. Et Florence, privée de son agitateur emblématique, fut rapidement conquise.

42.2 - Pourquoi un seul individu peut désorganiser tout un groupe ?

Le pouvoir aime les figures centrales : dans toute structure, les énergies convergent vers les personnalités fortes. Il suffit d’une voix influente pour semer le doute, la défiance ou la colère.

L’agitateur crée des coalitions émotionnelles : il ne parle pas seulement à la raison, il mobilise les frustrations, crée une dynamique d’opposition, divise pour exister.

Tant qu’il est au centre du groupe, l’agitateur est dangereux : laisser un perturbateur dans l’arène, c’est lui donner un théâtre pour jouer son rôle.

42.3 - Stratégies pour neutraliser l’agitateur efficacement

L'auteur souligne que ce principe reste d'actualité : dans tout groupe, le pouvoir se concentre naturellement autour d'une ou deux personnalités fortes. Pour maintenir l'ordre, il faut donc :

Identifier rapidement le fauteur de troubles : cherchez la source, le nœud, celui ou celle autour de qui tout s’organise.

L'isoler avant qu'il ne contamine le groupe : un agitateur seul n’a plus de puissance. Supprimez son réseau, désolidarisez-le discrètement, réduisez son audience.

Le séparer de sa base de soutien, le neutraliser sans en faire un martyr : l'erreur serait de l’exclure brutalement et publiquement, risquant ainsi de le transformer en symbole ou en héros tragique. Mieux vaut le marginaliser subtilement, détourner l'attention, ou l'éloigner en douceur.

Le remplacer intelligemment : un vide de pouvoir attire toujours une autre force. Si vous éliminez un leader, introduisez immédiatement une nouvelle figure rassurante ou une structure solide pour éviter le chaos.

Robert Greene met toutefois en garde : cette stratégie n'est efficace que si l'on est en position de force, car un ennemi isolé mais puissant peut chercher à se venger dangereusement.

Loi 43 - Parlez aux cœurs et aux esprits

La 43ème loi souligne que la véritable persuasion et la loyauté durable passent par le cœur et l'esprit plutôt que par la force.

43.1 - Quand le mépris et l’arrogance mènent à la chute : le cas Marie-Antoinette

L’auteur commence par un contre-exemple marquant : Marie-Antoinette, qui n’a jamais cherché à comprendre ni à gagner le cœur du peuple français. Son attitude jugée frivole, son indifférence aux souffrances populaires et ses dépenses excessives ont creusé un fossé affectif, au point que son image est devenue celle d’une ennemie haïe… jusqu’à sa chute.

43.2 - Quand la clémence devient stratégie : Zhuge Liang et l’art de transformer l’ennemi

En opposition, Robert Greene présente l’histoire brillante de Zhuge Liang, stratège chinois du IIIe siècle. Plutôt que de massacrer les barbares du Sud, il choisit de gagner leur loyauté par la clémence et la compréhension.

Il captura leur chef Meng Huo… pour mieux le relâcher. Sept fois. À chaque libération, Liang montrait respect, noblesse et compréhension, jusqu’à ce que Meng Huo plie de lui-même, convaincu et loyal. C’est ainsi que Zhuge Liang parvint ainsi à transformer un ennemi juré en allié fidèle, sans bain de sang.

43.3 - Les clés d’une persuasion authentique selon Greene

Robert Greene souligne que pour persuader efficacement, il faut :

Observer attentivement la psychologie unique de chacun.

Jouer sur les émotions universelles (amour, peur, jalousie).

Montrer l'intérêt personnel que les gens ont à vous suivre (plutôt que leur imposer notre volonté).

Faire des gestes symboliques d'empathie et de bonne volonté.

La contrainte, quant à elle, échoue, car elle :

Alimente le ressentiment, même chez ceux qui obéissent.

Crée une loyauté de surface, sans engagement profond.

Affaiblit votre image à long terme en vous faisant passer pour tyrannique.

Exige un effort constant pour maintenir le contrôle.

43.4 – Le pouvoir véritable est celui qu’on vous offre librement, pas celui que vous prenez

L'auteur conclut qu'il est toujours préférable de gagner les cœurs (inspirer, séduire, donner envie de suivre) plutôt que d'imposer sa volonté par la force, car la contrainte ne génère que du ressentiment, alors qu’un cœur conquis ne se rebelle pas. Les leaders les plus puissants sont d’ailleurs bien ceux qu’on suit par choix, pas par peur.

Loi 44 - Singez l'ennemi

Dans cette loi, Robert Greene nous dévoile un levier psychologique infaillible du pouvoir : le mimétisme ou effet miroir. En imitant subtilement votre adversaire, vous pouvez le déstabiliser, le séduire ou le neutraliser… tout en dissimulant vos propres intentions.

44.1 – Les quatre facettes d’effet miroir 

L'auteur de "Power : les 48 lois du pouvoir" identifie 4 grands types d'effets miroir, chacun avec un objectif stratégique distinct :

L’effet neutralisant : annuler la stratégie de l’autre

Le principe => imiter les actions de l’ennemi pour lui couper l’herbe sous le pied. Cette technique permet de rester invisible tout en gardant l'initiative.Exemple => Fouché, ministre de la Police sous Napoléon : il créa son propre réseau d’espions… pour surveiller les espions de l’empereur lui-même. Résultat : il resta dans l’ombre tout en gardant l’ascendant.

L’effet Narcisse : séduire en reflétant les désirs et valeurs psychologiques de l’autre

Le principe => renvoyer à l’autre l’image flatteuse de lui-même, en adaptant son comportement à ses désirs et croyances.Exemple => Alcibiade, maître de la transformation sociale, qui adaptait parfaitement sa personnalité à chaque interlocuteur : se montrant philosophe avec Socrate, noble spartiate à Sparte, et satrape luxueux en Perse. Résultat : il fascinait et obtenait tout… jusqu’à l’usure.

L’effet moralisant : confronter l’adversaire à ses contradictions

Le principe => imiter les travers de l’autre pour lui renvoyer son propre comportement, son propre ridicule ou son injustice.Exemple => Ivan le Terrible fit nommer un tsar fantoche afin de démontrer le manque de respect du peuple et l’absurdité de leur contestation.

L’effet hallucinatoire : créer une illusion parfaite

Le principe => construire une copie si parfaite et convaincante de la réalité qu’elle en devient trompeuse et que l’autre ne voit pas la manipulation.Exemple => Yellow Kid Weil, escroc de génie, montait de fausses banques indiscernables des vraies, dupant ainsi les plus prudents des investisseurs.

44.2 - Pourquoi l’effet miroir est-il si fort ?

Pour Robert Greene, ces techniques sont particulièrement efficaces car elles :

Exploitent le narcissisme naturel et les désirs profonds des individus : les gens aiment ce qui leur ressemble.

Permettent de masquer efficacement ses véritables intentions.

Déstabilisent l'adversaire en le confrontant à son propre reflet : voir son propre comportement imité désarme ou irrite.

Créent une connexion émotionnelle manipulable.

Agissent à un niveau psychologique profond et universel : l’identité, la projection, l’ego.

44.3 - Les risques d’un usage excessif

L'auteur attire l’attention sur l’utilisation excessive ou maladroite de ces techniques : trop de mimétisme tue la stratégie.

Il cite l'exemple d'Alcibiade qui, à force de jouer tous les rôles, finit par s’aliéner tous ses alliés et par n’appartenir à aucun camp.

Attention également : l’effet miroir peut vous enfermer dans une posture, sans place pour l’initiative. En effet, il faut éviter les "situations reflets" toxiques où l'on se retrouve comparé défavorablement à une figure du passé. Ce fut le cas de Wagner qui rappelait trop l’image de la sulfureuse Lola Montez à la cour de Bavière : un reflet malvenu qui précipita sa disgrâce.

44.4 - Le miroir est un masque, pas une identité

Finalement, l'art du miroir, résume l’auteur, est subtil, psychologique, presque théâtral. Il permet d’agir sans exposer, de séduire sans révéler, de dominer sans affronter. Mais mal manié, il peut vous faire perdre vous-même dans le rôle de l’autre.

Loi 45 - Appelez au changement, pas à la révolution

Cette 45ème loi nous rappelle que, si l'innovation est nécessaire au pouvoir, tout changement trop brutal peut être dangereux, toute révolution trop rapide peut se retourner contre son instigateur. Il est alors important d'introduire le changement progressivement en respectant les traditions. Car, les masses, explique-t-il, tolèrent mieux l’évolution que la rupture.

45.1 - Le choc ou la continuité : Cromwell contre Mao

Thomas Cromwell : la réforme précipitée qui mène à la chute

En voulant imposer à marche forcée le protestantisme en Angleterre, Cromwell heurta de plein fouet les traditions populaires. Son mépris des rituels catholiques déclencha révoltes, chaos… et sa propre exécution. Trop de changement, trop vite, de façon trop radicale provoqua inévitablement une réaction conservatrice et un effet de rejet.

Mao Zedong : moderniser sans effrayer

En contraste, l'auteur présente le succès de Mao Zedong : face à des paysans chinois très ancrés dans leurs traditions, Mao comprit qu’il ne pouvait imposer le communisme frontalement. Il l’habilla habilement d’un vernis culturel familier, utilisant des atours rassurants du passé, des symboles traditionnels et récits littéraires chinois. Résultat : la transformation fut acceptée parce qu’elle semblait familière.

45.2 - Pourquoi le changement brutal échoue-t-il souvent ?

Robert Greene souligne que le changement doit être introduit avec subtilité car :

Les gens sont naturellement attachés à leurs habitudes : même les systèmes imparfaits ont une fonction psychologique de sécurité.

Le vide créé par la rupture avec le passé génère de l'anxiété : remplacer sans transition crée un sentiment de perte, de désorientation, et donc de résistance.

La nostalgie est une force sous-estimée qui finit toujours par ressurgir : elle revient toujours, et alimente les contre-révolutions.

45.3 - Stratégies conseillées par Robert Greene pour mettre en œuvre cette loi efficacement

Présentez le changement comme une continuité : ne dites pas "nous allons tout changer", dites : "Nous allons faire évoluer ce qui a toujours été important pour nous."

Habillez vos réformes d’éléments familiers : gardez les symboles, les mots, les rituels, même si leur sens évolue.

Faites appel à l’histoire pour légitimer l’innovation : montrez que votre réforme s’inscrit dans une tradition ou réalise enfin une promesse ancienne.

Progressez par petites touches : le changement progressif est souvent invisible, donc non menaçant.

Ce qu’il faut éviter, en revanche, c’est de :

Trop innover, trop vite : vous serez perçu comme un danger, pas comme un guide.

Dénigrer le passé ouvertement : cela alimente le ressentiment et fait naître des opposants par réflexe défensif.

Créer un vide symbolique ou idéologique : si vous supprimez tout sans rien proposer de rassurant en retour, vous provoquez la panique.

45.4 - Le secret n’est pas de choquer, mais d’enrober

Si vous souhaitez modifier le monde, l'auteur invite alors à :

Rassurer ceux qui y vivent.

Présenter les innovations comme des améliorations progressives du passé, comme une restauration, plutôt que comme des révolutions brutales.

Se servir du passé qui est un levier.

Loi 46 - Ne soyez pas trop parfait

La 46ème loi du pouvoir nous sensibilise aux dangers de paraître trop parfait et sans défaut.

En effet, pour Robert Greene, la perfection est un piège. Plus vous brillez, plus vous éclipsez les autres, et plus vous attirez jalousie, ressentiment, voire haine.

46.1 - Quand la perfection devient une provocation

Robert Greene illustre son propos par une histoire tragique : celle de Joe Orton, dramaturge britannique talentueux dont la carrière fulgurante et l’apparente perfection alimenta une jalousie silencieuse mais destructrice chez son compagnon Kenneth Halliwell.Orton était jeune, charismatique, reconnu, tout ce que Halliwell ne supportait plus de ne pas être. Résultat : la haine refoulée se transforma en meurtre. Trop de lumière, trop de réussite, trop d’assurance… et l’ombre finit par frapper.

46.2 - Pourquoi la perfection attire l’envie ?

Pour Robert Greene, la perfection suscite inévitablement l'envie et la jalousie, particulièrement chez les proches.

Il liste quelques raisons à cela :

Les gens supportent mal le sentiment d'infériorité, même passif ou inconscient.

L’admiration peut glisser en rancune si elle n’est pas contrebalancée.

La jalousie, souvent inavouée, se manifeste de façon sournoise : l’envie agit en douce, par sabotage, rejet ou isolement.

L’auteur souligne que les personnes les plus à craindre sont celles de notre entourage immédiat : collègues, amis ou proches sont les plus exposés.

46.3 - Comment désamorcer l’envie selon Robert Greene ?

La stratégie ne consiste pas à brider ses talents, mais à adoucir leur perception.

Voici ses tactiques favorites :

Affichez délibérément quelques défauts mineurs : cela vous humanise.

Attribuez vos réussites à la chance, au bon timing, ou à l’aide des autres, plutôt qu’au mérite.

Montrez-vous sincèrement humble, voire vulnérable sur certains points.

Présenter le pouvoir comme un fardeau plutôt qu'un privilège (Ex. : "Ce poste est exigeant", "je doute souvent", "j’apprends encore tous les jours").

46.4 - Leçon de sagesse de Cosme de Médicis

L’auteur évoque ici, en guise d’exemple, Cosme de Médicis. Ce maître discret de Florence incarnait, en effet, cette loi à la perfection. Bien qu’immensément riche et influent, il vivait modestement, et évitait les démonstrations de pouvoir en public. Il répétait : "La jalousie est une mauvaise herbe qu’il ne faut pas arroser."

46.5 - Mieux vaut l’élégance discrète que l’ostentation brillante

L'auteur conclut : si vous êtes trop parfait, les autres attendront votre chute comme une délivrance. Si vous êtes brillant mais humble, on vous admire sans vous redouter. La perfection fascine de loin, mais irrite de près.

Dans le jeu du pouvoir, le secret est donc de masquer votre perfection et votre pouvoir derrière une apparente imperfection. Car seuls les morts et les dieux, finit l’auteur, peuvent être parfaits impunément.

Loi 47 - Sachez vous arrêter

Dans cette avant-dernière loi du pouvoir, Robert Greene nous prévient : le danger guette moins dans l’échec que dans le succès. C’est en effet souvent au sommet de votre ascension que vous devenez vulnérable : grisé par vos victoires, aveuglé par votre propre légende.

47.1 – De l’euphorie à la chute : le prix de l’ambition sans limite

Cyrus le Grand : vainqueur devenu victime de lui-même

En guise d’exemple, Robert Greene revient sur l’histoire de Cyrus le Grand, bâtisseur d’un immense empire perse. Ce dernier, au lieu de se satisfaire de ses conquêtes, les poursuivit sans fin, jusqu’à attaquer les Massagètes, peuple farouche. Ce fut une guerre de trop : il y laissa sa vie… et son empire vacilla. L’euphorie du succès l’avait rendu imprudent et poussé à des actions irréfléchies.

Madame de Pompadour : l’art de durer sans s’épuiser

À l’inverse, Robert Greene présente Madame de Pompadour, favorite de Louis XV, comme un modèle de longévité politique. Pendant 20 ans, elle sut ne jamais abuser de sa position, en jouant avec finesse. Elle :

Restait modeste malgré sa position de favorite et son influence,

S’adaptait aux humeurs du roi et au climat politique changeant,

Savait renoncer à certains privilèges pour mieux en préserver d’autres plus importants.

Elle a compris ce que Cyrus avait ignoré : une position gagnée ne se consolide pas par l'excès, mais par la maîtrise.

47.2 - Pourquoi le succès est-il un moment dangereux ?

Pour Robert Greene, le succès est dangereux car il :

Donne le sentiment trompeur d'invulnérabilité, l’illusion d’être invincible.

Pousse à répéter les mêmes stratégies sans discernement.

Rend moins attentif aux signaux de changements de situation.

Fait oublier la part de chance et des circonstances, et le rôle des autres.

47.3 - Les conseils de Robert Greene pour rester maître du jeu après la victoire

L'auteur conseille donc de :

Prendre du recul après chaque victoire.

Évaluer objectivement les raisons du succès.

Consolider ses acquis avant d'aller plus loin.

Rester vigilant face aux revers de fortune.

Savoir s'arrêter au bon moment et ne pas laisser l'euphorie de la réussite compromettre ce qui a été durement gagné.

Finalement, termine Robert Greene, le pouvoir ne se mesure pas à la hauteur atteinte, mais à la capacité de s’y maintenir. Ainsi, celui qui sait quand s’arrêter conserve l’avantage sur celui qui cherche toujours plus. Et dans le jeu du pouvoir, savoir freiner est aussi stratégique que savoir attaquer, lance l’auteur.

Loi 48 - Soyez fluide

La dernière du pouvoir traite de la puissance de l'adaptabilité et de la fluidité face à la rigidité. Pour Robert Greene, le pouvoir véritable appartient à ceux qui savent changer de forme.

Dans un monde instable et mouvant, la rigidité est une condamnation, tandis que la fluidité est une stratégie de survie… et de domination.

48.1 - Sparte vs. Athènes : la chute des rigides, la survie des souples

Robert Greene commence par opposer deux cités grecques antiques :

D'un côté, Sparte, une société militaire rigide, figée dans ses valeurs et sa structure qui, en se repliant sur une organisation militaire rigide, finit par s'effondrer, incapable d’évoluer.

De l'autre, Athènes, ouverte, adaptable, commerçante, culturellement et artistiquement vivante qui, survécut et prospéra malgré les défaites.

La leçon est claire : ce qui ne plie pas finit par rompre.

48.2 - La carapace protectrice devient prison

Pour Robert Greene, la rigidité est une forme d'armure qui finit toujours par devenir une prison. Il compare ce mécanisme de défense à celui des animaux qui développent une carapace : elle protège dans l’immédiat, mais ralentit, limite la mobilité et l’adaptation, rend vulnérable aux changements et finit par mener à l'extinction.

48.3 - Le pouvoir appartient à ceux qui savent changer de forme

Selon Robert Greene, le véritable pouvoir réside dans la capacité à changer de forme, de la même manière que l'eau s'adapte à son contenant.

L’idée est donc de ressembler à l’eau :

Éviter d'avoir des contours trop définis : sans forme fixe, l’eau épouse tous les contenants.

Rester insaisissable pour l'adversaire : l’eau peut être calme ou déchaînée.

S'adapter constamment aux circonstances : l’eau échappe à la saisie, se glisse entre les lignes, s’adapte à tous les terrains.

48.4 - Modèles historiques de fluidité stratégique

Robert Greene cite plusieurs exemples historiques de cette approche :

Mao Zedong, qui utilisa la mobilité de la guérilla pour affronter des armées bien plus puissantes

Les reines Élisabeth Ire et Catherine II, qui manœuvrèrent entre les factions, les crises, et les alliances sans jamais perdre le contrôle

Le baron Rothschild, qui servit tous les régimes politiques sans jamais s’y lier - monarchie, empire, république - et restait indispensable car adaptable.

48.5 - Les principes de la fluidité stratégique

Pour l'auteur, la clé de cette adaptabilité est de :

Ne jamais rien prendre personnellement : l’émotion rigidifie

Éviter d'être sur la défensive : ce genre de posture vous fige.

Maintenir un masque impénétrable : le mystère vous rend insaisissable.

Garder l'initiative plutôt que de réagir : le fluide ne subit pas, il devance.

En revanche, Robert Greene nous avertit : être fluide ne signifie pas être flou ou mou. Il ne s’agit pas de renoncer à ses convictions, mais de savoir les exprimer différemment selon le contexte.

Conclusion : dans un monde en perpétuel changement, seule la fluidité permet de maintenir durablement le pouvoir.

Pour Robert Greene, le pouvoir n’est pas une forteresse, c’est une marée intelligente. Ceux qui tiennent à leur forme finissent par casser ; ceux qui savent se transformer deviennent inarrêtables. Soyez donc comme l’eau qui glisse, qui use, qui submerge. Qui ne résiste jamais. Et qui, pourtant, gagne toujours.

Conclusion de "Power : les 48 lois du pouvoir" de Robert Greene

  1. Quatre idées clés du livre "Power : Les 48 lois du pouvoir"

Idée clé n°1 : Le pouvoir repose sur la maîtrise des émotions et l'art de la dissimulation

Robert Greene démontre tout au long de son ouvrage que la domination appartient à ceux qui savent contrôler leurs propres émotions tout en manipulant celles des autres.

Des exemples historiques comme Louis XIV ou Talleyrand illustrent cette vérité : garder son sang-froid, dissimuler ses véritables intentions et provoquer stratégiquement la colère de l'adversaire permettent de prendre l'ascendant.

L'auteur insiste sur cette capacité à porter différents masques selon les circonstances, faisant de chaque interaction une partie d'échecs psychologique.

Idée clé n°2 : L'observation minutieuse des faiblesses humaines devient un levier de contrôle décisif

L'auteur montre comment les grands stratèges de l'histoire ont su identifier et exploiter les points faibles de leurs adversaires.

Que ce soit Richelieu manipulant les insécurités de Marie de Médicis ou Catherine de Médicis utilisant les désirs masculins, Robert Greene souligne que chaque individu possède des vulnérabilités exploitables.

Cette observation psychologique minutieuse permet de transformer l'ennemi le plus redoutable en allié docile.

Idée clé n°3 : La réputation et l'image publique valent souvent plus que la réalité des faits

À travers de nombreux exemples, de P.T. Barnum à Zhuge Liang, l'ouvrage démontre que maîtriser son image et façonner sa réputation constituent des armes redoutables. L'auteur nous enseigne que les perceptions comptent davantage que la vérité brute, et que savoir jouer sur le visuel, créer une mystique et contrôler les apparences permet d'exercer une influence durable sur les masses.

Idée clé n°4 : L'adaptabilité et la fluidité triomphent toujours de la rigidité

La dernière loi du livre synthétise parfaitement cette philosophie : dans un monde en perpétuel changement, seuls survivent ceux qui savent changer de forme comme l'eau.

L'auteur oppose Sparte, société rigide qui s'effondra, à Athènes, cité adaptable qui prospéra. Cette flexibilité stratégique permet de traverser les crises, de s'adapter aux nouveaux rapports de force et de maintenir son pouvoir malgré les turbulences.

  1. Qu'est-ce que la lecture de "Power : les 48 lois du pouvoir" vous apportera ?

"Power : les 48 lois du pouvoir" vous apporte une compréhension unique des dynamiques de pouvoir qui régissent nos sociétés modernes.

Contrairement aux livres de développement personnel classiques, Robert Greene ne vous vend pas de rêves mais vous présente une réalité crue : les rapports humains sont des jeux d'influence où seuls les plus habiles tirent leur épingle du jeu.

Vous apprendrez à décoder les stratégies de manipulation utilisées contre vous, tout en développant vos propres compétences en négociation et en leadership.

Ce livre de Robert Greene, au ton direct et audacieux, vous fournira les clés pour vous imposer intelligemment dans les environnements compétitifs, qu'il s'agisse de votre entreprise, de vos relations professionnelles ou même de votre vie sociale.

  1. Pourquoi lire "Power : les 48 lois du pouvoir" ?

L'analyse des mécanismes du pouvoir que propose Robert Greene dans cet ouvrage mérite, à mes yeux, votre attention pour deux raisons principales.

D'abord, elle vous protège en vous apprenant à reconnaître les techniques de domination utilisées par les manipulateurs de votre entourage professionnel ou personnel.

Ensuite, elle vous arme d'outils stratégiques éprouvés par l'histoire pour développer votre propre influence dans un monde impitoyable.

Robert Greene transforme trois millénaires de passé politique en un manuel pratique indispensable à quiconque souhaite comprendre et maîtriser les subtilités du pouvoir dans notre monde moderne.

Mais un mot d’avertissement s’impose : la vision que propose Robert Greene est résolument stratégique, parfois cynique. Il dépeint le pouvoir tel qu’il est, non tel qu’il devrait être. Ce regard lucide, voire glaçant, sur les rapports humains ne séduira pas tout le monde.

Certains y verront un manuel de manipulation et de domination, au détriment de valeurs comme l’authenticité, la coopération ou la création d’un impact positif. Ce livre ne parle ni d’éthique, ni d’héritage. Il parle de règles, souvent invisibles, qui régissent les coulisses de l’influence.

À chacun de décider s’il souhaite les ignorer… ou les comprendre pour mieux évoluer dans ce théâtre d’ombres qu’est parfois le monde.

Points forts et faibles de "Power, les 48 lois du pouvoir" :

Points forts :

La richesse historique exceptionnelle : des centaines d'exemples concrets puisés dans l'histoire mondiale sont relatés au fil des pages.

L'analyse psychologique approfondie : les mécanismes de l'influence humaine sont décryptés avec beaucoup de précision.

L'applicabilité moderne : les stratégies intemporelles sont complètement adaptables aux enjeux contemporains.

Le style captivant et accessible : la narration fluide, "storytellé" et recherché rend les histoires et concepts complexes compréhensibles et passionnants.

Points faibles :

La vision cynique, au détriment d'une approche plus humaine et bienveillante, peut choquer les sensibilités.

L'approche exclusivement stratégique, prônant la manipulation, la domination des autres et les jeux de pouvoir, peut ne pas convaincre tout le monde : ne peut-on pas aussi penser que le pouvoir réel s'ancre dans la capacité à créer de la valeur, à être authentique et à impacter positivement son entourage ?

Le risque de manipulation : même si comprendre les dynamiques du pouvoir est essentiel pour éviter de subir les manipulations des autres et s'épargner des souffrances inutiles, reste que certains lecteurs pourraient utiliser ces techniques de manière malveillante.

Ma note :

★★★★★

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Fri, 08 Aug 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13109/Power-Les-48-lois-du-pouvoir
Slow productivity http://www.olivier-roland.fr/items/view/13087/Slow-productivity

Résumé de "Slow productivity : retrouver efficacité, équilibre et goût du travail dans un monde d’excès" de Cal Newport : ce livre déconstruit le mythe de l’hyperactivité et notre relation moderne au travail pour proposer, à la place, une philosophie baptisée "Slow Productivity". Cette approche, fondée sur trois principes fondamentaux - en faire moins, respecter un rythme naturel et faire de la qualité une obsession - permet d’accomplir davantage en ralentissant consciemment et en se concentrant sur l’essentiel.

Par Cal Newport, 2024, 285 pages.

Titre original : "Slow Productivity : The Lost Art of Accomplishment Without Burnout", 2024, 240 pages.

Chronique et résumé de "Slow productivity : retrouver efficacité, équilibre et goût du travail dans un monde d’excès" de Cal Newport

Introduction

Dans l'introduction de "Slow Productivity", l’auteur, Cal Newport raconte l’histoire de John McPhee, rédacteur au New Yorker qui, en 1966, passa deux semaines allongé sur une table de jardin à fixer les branches d'un frêne, avant de trouver comment structurer un article complexe. Cette anecdote va servir à l’auteur de point de départ à une réflexion plus large sur notre relation au travail.

L'auteur relate ensuite comment, durant la pandémie, un malaise croissant envers la productivité s'est manifesté chez les travailleurs du savoir. Ce sentiment s'est matérialisé dans plusieurs livres critiques publiés entre 2020 et 2021, ainsi que dans des phénomènes sociaux comme la "Grande Démission" et le "quiet quitting".

Cal Newport avance qu’en fait, le problème n'est pas la productivité elle-même, mais sa définition moderne erronée. La surcharge qui nous épuise provient, dit-il, de "la croyance selon laquelle le 'bon' travail implique une suractivité débordante".

Face à ce constat, il propose une alternative qu'il nomme "Slow Productivity". Cette approche se fonde sur trois principes fondamentaux :

En faire moins,

Respecter un rythme naturel,

Faire de la qualité une obsession.

L’ambition de l’auteur n'est pas simplement de rendre le travail moins épuisant, mais de "proposer une toute nouvelle façon de réfléchir à ce que signifie 'être efficace'" afin de rendre les métiers du savoir plus humains et soutenables.

Première partie – Origines

Chapitre 1 – L'essor et le déclin de la pseudo-productivité

1.1 - Une anecdote révélatrice : le bureau vide du vendredi

Cal Newport ouvre le premier chapitre de son livre "Slow productivity" avec une histoire : celle de Leslie Moonves, directeur du divertissement chez CBS, qui, en 1995, envoie une note cinglante à ses employés après avoir constaté que plusieurs bureaux étaient vides un vendredi après-midi.

Pour l’auteur, cette anecdote illustre parfaitement la conception dominante de la productivité dans les professions du savoir : plus d'heures visibles au bureau équivaut à plus de travail accompli.

1.2 - Une définition floue de la productivité

L'auteur relate ensuite comment, en sondant ses lecteurs, il a découvert un fait troublant : la majorité des travailleurs du savoir n'ont pas de définition claire de la productivité. La plupart se contentent de lister leurs tâches sans mentionner d'objectifs précis ni de mesures de performance. Cette absence de clarté s'étend même aux travaux universitaires sur le sujet, comme le note Tom Davenport, expert en management : "Le plus souvent, nous ne mesurons pas la productivité des travailleurs du savoir. Et quand nous le faisons, nous le faisons d'une manière vraiment stupide."

1.3 - Le travail intellectuel est plus dur à mesurer

Cal Newport souligne également le fossé qui existe avec d'autres secteurs économiques où la productivité est clairement définie et quantifiable.

Les agriculteurs mesurent les rendements par acre. Les usines quantifient les unités produites par heure. Toute l’histoire de la croissance économique moderne repose sur cette logique productiviste.

Alors pourquoi est-elle si peu appliquée aux métiers intellectuels ?

Parce que, répond Newport, les métiers du savoir sont fondamentalement différents : ils sont complexes, irréguliers, évolutifs. Impossible d’y appliquer la mesure d’un rendement standard. De plus, comme l'affirmait Peter Drucker : "Le travailleur du savoir ne peut pas être supervisé de près ou en détail. On peut l'aider, mais il doit se superviser tout seul."

1.4 - La pseudo-productivité : l’illusion de l’efficacité

Faute de mieux, on a donc cherché des indicateurs visibles : une présence physique ou numérique, des réponses rapides aux mails, des réunions à gogo, etc. Cette illusion d’efficacité, Cal Newport la nomme la pseudo-productivité", qu'il définit comme "l'utilisation de l'activité visible comme principal moyen d'évaluer l'effort productif réel."

Le problème s’est encore aggravé avec la montée en puissance des technologies numériques dans les années 1990. Aujourd’hui, on consulte ses mails toutes les six minutes en moyenne. Résultat : une spirale d’hyperactivité qui épuise plus qu’elle n’accomplit. Les témoignages recueillis par Cal Newport décrivent une surcharge mentale constante, où la quantité écrase la qualité.

1.5 - Une alternative existe : l’exemple d’Anthony Zuiker

En revanche, il termine le chapitre par l’histoire inspirante d’Anthony Zuiker, le créateur de la série "Les Experts". Grâce à trois années de travail lent, patient et obstiné sur sa vision, Zuiker finit par propulser CBS au sommet. Une preuve, selon Cal Newport, qu’il existe une autre voie : ralentir, oui, mais pour mieux produire et orienter son travail vers la qualité plutôt que l'agitation perpétuelle.

Chapitre 2 – Le choix de la lenteur

2.1 - Slow Food : une réponse créative à l’accélération

Le chapitre 2 de "Slow productivity" s'ouvre sur la genèse du mouvement Slow Food.

En 1986, face à l'ouverture d'un McDonald's sur la place d'Espagne à Rome, Carlo Petrini lance cette initiative pour défendre une alimentation plus lente et plus respectueuse des traditions. Cal Newport souligne que ce mouvement repose sur deux idées novatrices : proposer des alternatives séduisantes (plutôt que simplement critiquer) et s'inspirer d'innovations culturelles éprouvées par le temps.

2.2 - Une philosophie qui se propage à d’autres sphères

L'auteur explique comment cette philosophie s'est étendue à d'autres domaines. Elle a ainsi donné naissance aux mouvements Cittaslow (villes lentes), Slow Medicine, Slow Schooling et Slow Media.

Il observe que tous partagent une approche similaire : offrir un choix de modernité plus lent et plus supportable en puisant dans une sagesse traditionnelle.

2.3 - Le monde du travail à la croisée des chemins

Cal Newport établit ensuite un parallèle avec le monde du travail post-pandémie, où une opportunité de transformation s'est présentée. Il évoque les débats sur le retour au bureau chez Apple et l'intérêt croissant pour la semaine de quatre jours. Toutefois, selon l’auteur, ces initiatives ne font qu'atténuer les symptômes sans s'attaquer aux causes profondes de la pseudo-productivité.

2.4 - S’inspirer des anciens métiers du savoir

Pour trouver des alternatives inspirantes, l'auteur élargit ici la définition des "professions du savoir" pour y inclure des métiers cognitifs plus anciens, tels que les écrivains, philosophes et artistes. Il décrit comment ces professions traditionnelles ont développé des approches plus durables du travail intellectuel, citant Isaac Newton, Anna Rubincam et divers écrivains.

2.5 - Les fondations de la slow productivity

Cal Newport conclut en présentant sa philosophie de slow productivity, fondée sur trois principes essentiels (comme mentionné en introduction) :

En faire moins — mais mieux.

Respecter un rythme naturel — celui du corps, de l’esprit, du projet.

Faire de la qualité une obsession — car c’est elle qui crée la valeur, pas la vitesse.

Il précise : adopter cette approche ne signifie pas renoncer à l’ambition. C’est au contraire choisir un chemin plus viable pour aller loin. Et il conclut en rappelant cette phrase inspirante à propos de Newton : "la valeur des idées perdure, la lenteur à laquelle elles ont été produites est vite oubliée."

Deuxième partie – Principes

Chapitre 3 – En faire moins

3.1 - Principe n°1 de la slow productivity : en faire moins

Le mythe de Jane Austen brisé : libérée des corvées pour créer

Cal Newport commence le troisième chapitre de son livre "Slow productivity" en démystifiant l'histoire de Jane Austen.

Il explique que contrairement au mythe populaire selon lequel l'écrivaine aurait écrit ses chefs-d'œuvre en cachette entre deux obligations sociales, la réalité est bien différente. Après une analyse approfondie de sa biographie, l'auteur révèle que c'est précisément quand Austen fut libérée de la plupart de ses obligations domestiques et sociales qu'elle put réellement produire ses romans remarquables.

C’est en effet une fois dans le cottage de Chawton, exempte de la majorité des tâches ménagères, que l’écrivaine put enfin se consacrer à finaliser "Raison et sentiments", "Orgueil et préjugés", puis écrire "Mansfield Park" et "Emma".

Ainsi, l’idée selon laquelle "en faire moins permet de faire mieux" constitue le premier principe fondamental de la slow productivity.

En faire moins : le paradoxe de la productivité accrue

Pour Cal Newport, le premier principe - en faire moins – consiste, en fait, à "s'efforcer de réduire ses obligations jusqu'à aisément imaginer pouvoir les accomplir avec du temps libre".

Il s’agit alors de "tirer parti de cette charge allégée pour s'investir davantage dans le petit nombre de projets qui comptent le plus et ainsi les faire avancer".

L'art de la simplification créative

Cal Newport reconnaît que ce principe peut toutefois sembler plus facile à énoncer qu'à mettre en pratique. Et nous sommes effectivement légitime de poser la question : dans un environnement professionnel où la suractivité semble inévitable, comment alléger sa charge de travail ?

À cette question, l’auteur répond que cette vision ambitieuse de simplicité aménagée est en fait possible dans la plupart des contextes professionnels modernes, à condition d'être créatif et parfois radical dans sa façon d'organiser ses tâches.

3.2 - Pourquoi les travailleurs du savoir devraient en faire moins

Le piège invisible des coûts indirects

Pour illustrer la pertinence actuelle de ce principe, Cal Newport raconte l'histoire de Jonathan Frostick, cadre chez HSBC qui, après une crise cardiaque en 2021, prit la résolution de ne plus passer toutes ses journées sur Zoom.

Cette situation révèle un problème majeur dans les professions intellectuelles contemporaines, lance l’auteur : celle de l'accumulation excessive de "coûts indirects".

L'auteur explique que chaque tâche ou projet accepté s'accompagne, en effet, de coûts indirects administratifs (emails, réunions, etc.). Ces derniers s'accumulent jusqu'à atteindre un "seuil critique" au-delà duquel il devient impossible de gérer efficacement son travail.

C’est ce qui explique le phénomène que Cal Newport surnomme "l'Apocalypse Zoom" qui a eu lieu pendant la pandémie : l'augmentation même modeste des coûts indirects a suffi à faire basculer de nombreux travailleurs au-delà de ce seuil critique.

Le paradoxe productif : moins pour faire plus

À travers un exemple chiffré, Cal Newport démontre ici que faire moins de choses à la fois permet paradoxalement de produire davantage.

En plus d'accroître la quantité produite, cette approche améliore également la qualité du travail, car "notre cerveau fonctionne mieux lorsque nous ne sommes pas pressés."

Le stress comme mauvais conseiller

L'auteur s'attaque ensuite à une question fondamentale : pourquoi tant de travailleurs du savoir se retrouvent-ils constamment au bord de la surcharge ?

Sa réponse est révélatrice : nous utilisons le stress comme heuristique pour modérer notre charge de travail. Nous ne refusons de nouvelles tâches que lorsque nous ressentons suffisamment de détresse personnelle pour justifier le coût social de ce refus.

Des pionniers de la simplification

Pour illustrer qu'une autre approche est possible, Cal Newport partage plusieurs témoignages de personnes ayant réussi à simplifier leur vie professionnelle : une coach qui a réduit ses offres à quelques services clés, un professeur de droit qui s'est concentré sur une seule affaire importante, une enseignante qui a arrêté tout travail non rémunéré, un consultant dont l'entreprise a mis en place des heures non facturables, et un ingénieur qui a réduit son temps de travail.

3.3 - Proposition n°1 : Limitez les gros projets

Pour mettre en œuvre ce premier principe, Cal Newport s'inspire d'abord d'Andrew Wiles, le mathématicien qui résolut le dernier théorème de Fermat. Après avoir décidé de se consacrer à ce projet, Wiles prit des mesures concrètes pour réduire drastiquement ses engagements : il renonça aux conférences, évita les distractions universitaires, et mit au point un "stratagème" pour maintenir une apparence de productivité tout en travaillant sur son objectif principal.

Cal Newport recommande de suivre cet exemple en limitant systématiquement le nombre de projets professionnels importants à trois échelles différentes :

Moins de missions

Cal Newport considère qu'idéalement, on ne devrait pas dépasser trois missions principales, ces objectifs professionnels majeurs qui déterminent notre attention. Il raconte comment son amie Jenny Blake a réduit ses sources de revenus de plus de dix à seulement quelques-unes, ce qui lui a permis de réduire son temps de travail à vingt heures par semaine.

Moins de projets

Pour limiter ses projets en cours, Cal Newport conseille d'utiliser la réalité concrète de son temps disponible comme argument. Il suggère d'estimer le temps nécessaire pour chaque nouveau projet et de le programmer dans son calendrier. Si on ne trouve pas assez de plages horaires, c'est qu'on n'a pas le temps de gérer ce projet et qu'il faut soit le refuser, soit en annuler un autre.

Moins d'objectifs quotidiens

À l'échelle de la journée, Cal Newport recommande de travailler sur un seul projet important par jour maximum. Il explique avoir appris cette approche de sa directrice de thèse au MIT, qui préférait se concentrer intensément sur un seul projet à la fois plutôt que de jongler entre plusieurs. Ce rythme peut sembler lent, mais sur le long terme, les résultats s'accumulent remarquablement.

3.4 - Proposition n°2 : Contenez les petites tâches

Cal Newport évoque ensuite Benjamin Franklin, qui contrairement à sa réputation de travailleur infatigable, avait compris l'importance de se libérer des petites tâches administratives.

À 48 ans, Franklin promut son employé David Hall au rang d'associé, lui confiant toute la gestion de son imprimerie pour se consacrer à ses recherches sur l'électricité et à d'autres projets plus significatifs.

L'auteur observe que de nombreux créateurs ont développé des stratégies similaires pour se protéger des petites tâches perturbantes : Ian Rankin s'isole dans une maison en Écosse, Edith Wharton avait une routine matinale stricte, etc. Reconnaissant que ces solutions ne sont pas à la portée de tous, Cal Newport propose plusieurs stratégies plus accessibles :

Passez en pilotage automatique

Créez un "calendrier de pilotage automatique" en réservant des créneaux horaires spécifiques pour effectuer des tâches récurrentes dans des catégories spécifiques. Associez ces tâches à des lieux et rituels spécifiques pour maximiser leur efficacité.

Synchronisez

Cal Newport explique que la surcharge collaborative peut être réduite en remplaçant la communication asynchrone par des conversations en temps réel.

Il propose deux méthodes :

Organiser des "permanences" quotidiennes dédiées aux discussions rapides.

Mettre en place des "réunions de déblayage" hebdomadaires pour traiter les tâches en suspens avec toute l'équipe.

Déléguez !

L'auteur suggère plusieurs techniques pour réduire l'asymétrie dans l'attribution des tâches :

La "liste de tâches inversée" : créer des listes partagées où les autres doivent ajouter eux-mêmes les tâches qu'ils vous demandent d'accomplir.

Mettre en place des processus qui obligent les autres à effectuer une partie du travail.

Ne pas hésiter à utiliser ces stratégies, car "les gens sont souvent trop focalisés sur leurs propres problèmes pour se préoccuper de la façon dont vous résolvez les vôtres".

Évitez les "machines à tâches"

Cal Newport recommande d'évaluer les nouveaux projets non seulement en fonction de leur difficulté ou du temps qu'ils prendront, mais aussi en fonction du nombre de petites tâches qu'ils généreront.

Il donne l'exemple d'un directeur des ventes qui devrait choisir la rédaction d'un rapport plutôt que l'organisation d'une conférence, car cette dernière est une véritable "machine à tâches".

Dépensez de l'argent

S'inspirant de son amie Jenny Blake qui dépense environ 2400 euros mensuellement en services logiciels professionnels, Cal Newport soutient que dépenser de l'argent pour réduire sa liste de tâches est un investissement judicieux.

Il suggère également d'embaucher des personnes pour déléguer des tâches ou de faire appel à des prestataires de services professionnels.

3.5 - Interlude : qu'en est-il des parents débordés ?

Dans un interlude plus personnel, Cal Newport aborde la situation particulièrement difficile des parents qui travaillent.

Il cite Brigid Schulte, journaliste et mère de deux enfants, et décrit son quotidien chaotique : préparer des cupcakes jusqu'à 2h du matin, finir des articles à 4h, faire des interviews dans la salle d'attente du dentiste de son fils...

L'auteur observe que la pseudo-productivité oblige les individus à gérer seuls les tensions entre vie professionnelle et vie privée, sans cadre clair pour négocier ces compromis.

Il élargit cette réflexion à tous ceux qui font face à des défis personnels (maladie, parents âgés, etc.) et rappelle comment la pandémie a exacerbé ces tensions.

Cal Newport conclut cet interlude en soulignant que "être débordé n'est pas seulement inefficace ; cela peut devenir, pour beaucoup, purement et simplement inhumain." Le premier principe de la slow productivity n'est donc pas qu'une question d'efficacité professionnelle, mais aussi "une réponse pour ceux qui ont le sentiment que leur emploi empiète sur tous les autres domaines de leur vie."

3.6 – Proposition n°3 : Ne poussez plus, tirez !

Push vs Pull : deux philosophies opposées

Dans sa dernière proposition, Cal Newport s'inspire du Broad Institute, un centre de recherche génomique qui a transformé son processus de séquençage génétique en passant d'une stratégie "push" (pousser) à une stratégie "pull" (tirer).

L'auteur explique alors la distinction fondamentale entre ces deux stratégies :

Dans un processus "push", à chaque étape terminée, la tâche passe automatiquement à l'étape suivante.

Dans un processus "pull", chaque étape tire vers elle la nouvelle tâche uniquement lorsqu'elle est prête à le faire.

Cette transition, indique l’auteur, a permis au Broad Institute de réduire le temps de traitement des échantillons de 85 % et d'améliorer considérablement son efficacité. Un groupe de développement technologique de l'institut a également adopté cette approche avec succès, et grâce à elle, réduit le nombre de projets en cours de 50 % tout en augmentant leur taux d'achèvement.

Le système pull pour tous : une méthode en trois temps

Pour les personnes qui n'ont pas le pouvoir de transformer complètement leur environnement de travail, Cal Newport propose une stratégie en trois étapes pour simuler un système "pull" :

Créez des listes "en attente" et "en cours"

Limitez votre liste "en cours" à trois projets maximum et concentrez votre attention uniquement sur ces projets. Lorsqu'un projet est terminé, tirez-en un nouveau depuis la liste "en attente".

Envoyez un accusé de réception

Pour chaque nouveau projet, envoyez un message qui officialise votre engagement mais inclut : les informations supplémentaires dont vous avez besoin, le nombre de projets déjà sur vos listes, et une estimation de délai réaliste.

Cal Newport souligne que la transparence est ici cruciale et que souvent, ce type de message conduit le demandeur à retirer son projet.

Mettez à jour vos listes hebdomadairement

Revoyez les échéances, donnez la priorité à ce qui doit être bouclé rapidement, et n'hésitez pas à demander à être libéré des projets que vous ne cessez de repousser ou qui sont devenus obsolètes.

Chapitre 4 – Respecter un rythme naturel

4.1 - Principe n°2 de la slow productivity : respecter un rythme naturel

Cal Newport démarre le chapitre 4 de son livre "Slow productivity" avec une révélation qui l'a frappé durant l'été 2021 alors qu'il lisait "The Scientists" de John Gribbin.

Il a observé que les grands scientifiques de l'histoire, bien que remarquablement productifs, travaillaient à un rythme qui, selon nos standards actuels, semblerait étonnamment lent et irrégulier.

L'auteur illustre cette idée avec plusieurs exemples frappants :

Copernic mit plus de 30 ans à publier ses théories révolutionnaires sur le mouvement des planètes après sa première ébauche.

Galilée commença à réfléchir au mouvement du pendule en 1584, mais n'entreprit ses expériences formelles qu'en 1602.

Newton développa sa théorie de la gravitation sur une période de plus de 15 ans.

Même Marie Curie, au beau milieu de ses recherches majeures sur la radioactivité, partit en vacances prolongées à la campagne avec sa famille.

Ces observations ont conduit Cal Newport à réaliser que l'échelle de temps est essentielle à notre compréhension de la productivité. À l'échelle rapide des jours et des semaines, ces scientifiques semblaient travailler lentement, mais à l'échelle des années et des décennies, leurs efforts étaient indéniablement fructueux.

D’où le deuxième principe de la slow productivity : respecter un rythme naturel.

Autrement dit : "n'effectuez pas votre travail le plus important au pas de charge. Laissez-le se réaliser selon une chronologie soutenable, incluant des variations d'intensité, dans un cadre favorisant l'intelligence".

4.2 - Pourquoi les travailleurs du savoir devraient renouer avec un rythme plus naturel

Cal Newport s'appuie sur les recherches anthropologiques, notamment celles de Richard Lee sur les Ju/hoansi du désert du Kalahari, pour démontrer que le rythme de travail constant et intense qui caractérise notre époque est fondamentalement contraire à notre nature humaine.

En effet, l'auteur explique que pendant environ 290 000 des 300 000 années d'existence de notre espèce, les humains ont vécu comme chasseurs-cueilleurs. Leurs efforts quotidiens pour se nourrir étaient caractérisés par une alternance naturelle entre périodes d'activité et périodes de repos. Les études de Mark Dyble sur les Agta des Philippines confirment cette tendance : les chasseurs-cueilleurs consacraient 40 à 50 % de leur journée au loisir, avec des rythmes de travail très variables.

Cette variabilité fut bouleversée par la révolution néolithique et l'avènement de l'agriculture, qui imposa un travail plus monotone. Toutefois, l'agriculture maintenait encore une certaine saisonnalité : l'intense activité des semailles et des récoltes alternant avec des périodes plus calmes. La Révolution industrielle effaça ces dernières variations, transformant chaque jour en "jour de récolte".

Cal Newport affirme que l'avènement des professions du savoir aurait pu renverser cette tendance, mais la pseudo-productivité a au contraire poussé à une aliénation encore plus profonde par rapport à nos rythmes naturels. Contrairement au secteur industriel, où des lois et des syndicats établirent des limites, les professions intellectuelles ne disposent d'aucune protection similaire.

L'ironie, souligne l'auteur, est que les travailleurs du savoir traditionnels qui jouissaient d'une grande liberté - comme les scientifiques mentionnés au début du chapitre - revenaient naturellement à des rythmes de travail plus variés. Ce n'est pas par hasard : notre physiologie est programmée pour cette alternance.

4.3 - Proposition n°1 : prenez plus de temps

Pour illustrer l'avantage de prendre son temps, Cal Newport raconte l'histoire de Lin-Manuel Miranda et de sa comédie musicale "In the Heights". Contrairement à la croyance selon laquelle il aurait créé ce chef-d'œuvre en un éclair de génie pendant ses études, Miranda a en réalité travaillé sur ce projet pendant sept ans, l'améliorant progressivement tout en poursuivant d'autres activités.

L'auteur propose trois stratégies concrètes pour allonger ses délais :

Concevez un plan sur cinq ans

Cal Newport partage sa propre expérience lorsqu'il commença son doctorat au MIT tout en souhaitant poursuivre sa carrière d'écrivain. Ce plan à long terme lui a permis de traverser des périodes où l'écriture passait au second plan, sans jamais abandonner son objectif global.

Doublez vos délais

Reconnaissant notre tendance à sous-estimer le temps nécessaire aux projets cognitifs, l'auteur suggère de déterminer un délai qui semble raisonnable, puis de le multiplier par deux. Cette "police d'assurance" contrecarre notre optimisme instinctif et permet un rythme plus paisible.

Simplifiez votre journée

Cal Newport recommande de réduire de 25 à 50 % les tâches prévues quotidiennement et de s'assurer que les réunions n'occupent pas plus de la moitié de notre journée de travail. Il propose la stratégie "une heure pour toi, une heure pour moi" qui consiste à protéger une durée équivalente à chaque nouvelle réunion programmée.

L'auteur conclut cette proposition en soulignant l'importance de se pardonner lorsque nos tentatives de prendre plus de temps échouent : "La clé d'un travail ayant du sens est de décider de revenir encore et toujours à ce qui vous paraît important. Pas de parvenir à tout bien faire tout le temps."

4.4 - Proposition n°2 : respectez la saisonnalité

Cal Newport s’intéresse ensuite à la vie de Georgia O'Keeffe qui, après des années frénétiques d'enseignement dans différentes institutions, trouva son rythme dans une propriété au bord du lac George. Entre 1918 et 1934, travaillant souvent en plein air, elle produisit plus de 200 tableaux, alternant entre des étés créatifs dans cette retraite et des automnes plus trépidants à New York.

L'auteur souligne que cette approche saisonnière du travail, où l'intensité des efforts varie au fil de l'année, est naturelle mais devenue rare dans notre société.

Il propose plusieurs stratégies pour réintroduire cette saisonnalité :

Programmez des saisons lentes

S'inspirant du concept de "quiet quitting", Cal Newport suggère de ralentir délibérément pendant une ou deux saisons par an, en bouclant les projets importants avant cette période et en repoussant les nouveaux jusqu'à son terme.

Raccourcissez votre année de travail

L'auteur raconte comment Ian Fleming négocia de ne travailler que dix mois par an pour passer les deux autres mois dans sa maison jamaïcaine, où il écrivit ses romans "James Bond".

Cal Newport cite également des exemples contemporains comme Jenny Blake et Andrew Sullivan qui s'accordent plusieurs semaines de pause chaque année.

Optez pour les "petites variations saisonnières"

Pour ceux qui ne peuvent pas prendre des mois entiers, l'auteur propose quatre micro-stratégies :

Pas de réunion le lundi (ou un autre jour fixe),

Une séance de cinéma ou autre activité en journée une fois par mois,

Programmer des projets de loisirs pour équilibrer chaque grand projet professionnel,

Travailler par cycles d'intensité variée, à l'image de l'entreprise Basecamp.

4.5 - Interlude : Jack Kerouac n'a-t-il pas écrit "Sur la route" en trois semaines ?

Dans un bref interlude, Cal Newport aborde l'objection évidente que certains travaux créatifs semblent avoir été produits dans des sursauts frénétiques plutôt qu'à un rythme lent.

Il démystifie l'histoire de Jack Kerouac, qui prétendait avoir écrit "Sur la route" en trois semaines, alors qu'en réalité il avait travaillé sur ce livre pendant six ans, tenant des journaux détaillés et rédigeant six versions différentes après le premier jet.

Comme le conclut l'auteur : ""Sur la route" se lit vite, mais le rythme auquel le livre a été écrit, comme pour la plupart des œuvres qui résistent à l'épreuve du temps, fut en réalité assez lent."

4.6 - Proposition n°3 : travaillez poétiquement

La dernière proposition du chapitre concerne le contexte dans lequel nous accomplissons notre travail.

Cal Newport s'inspire de Mary Oliver, poétesse lauréate du Pulitzer, qui composait ses poèmes lors de longues marches dans les bois. Il suggère que le cadre dans lequel nous effectuons notre travail peut transformer notre expérience cognitive, rendant nos efforts plus vivants et plus naturels.

L'auteur propose trois approches pour travailler "poétiquement" :

Accordez l'espace à votre travail

Créez un environnement physique qui résonne avec ce que vous essayez d'accomplir, comme le fit Lin-Manuel Miranda en écrivant "Hamilton" dans une maison historique liée à George Washington, ou encore Neil Gaiman en rédigeant dans une cabane octogonale en forêt.

Étrange plutôt que stylé

Cal Newport cite des écrivains comme Peter Benchley qui écrivit "Les Dents de la mer" dans l'arrière-boutique d'un atelier de réparation de hauts-fourneaux, ainsi que Maya Angelou qui louait des chambres d'hôtel dépouillées pour travailler.

Il explique que l'environnement familier du domicile piège notre attention et qu'un cadre étrange, même laid, peut être plus propice à la concentration.

Des rituels remarquables

S'inspirant des mystères de la Grèce antique, Cal Newport souligne que des rituels suffisamment remarquables peuvent modifier notre état mental dans une direction favorable à la réalisation de nos objectifs. Il cite David Lynch qui commandait un énorme milkshake au chocolat pour stimuler sa créativité, ou N.C. Wyeth qui coupait du bois pendant une heure avant de travailler.

En conclusion, Cal Newport réaffirme que le deuxième principe de la slow productivity nous invite à rejeter "les gratifications performatives de l'urgence perpétuelle" pour accorder à nos efforts professionnels "l'espace et le respect nécessaires afin qu'ils s'intègrent dans une vie bien vécue, au lieu d'y faire obstacle."

Chapitre 5 – Faire de la qualité une obsession

5.1 - Le principe n°3 de la slow productivity : faire de la qualité une obsession

Dans le cinquième chapitre de son ouvrage "Slow productivity", Cal Newport partage d’abord l'histoire de Jewel, une jeune chanteuse qui vivait dans sa voiture à San Diego dans les années 1990. Malgré sa situation précaire, elle parvint à attirer l'attention du public lors de ses performances à l'Inner Change Coffeehouse. Son talent brut et authentique finit par séduire les maisons de disques et aboutit à une offre d'un million de dollars à la signature.

Mais ce qui rend cette histoire particulièrement pertinente, précise l’auteur, c'est que Jewel refusa cette somme colossale. Cal Newport explique que la chanteuse avait, en fait, compris qu'accepter un tel montant la forcerait à vendre énormément de disques très rapidement pour que le label récupère son investissement. Au lieu de cela, elle choisit alors de rester "bon marché" pour sa maison de disques, se donnant ainsi le temps nécessaire pour développer sa musique et son art. Elle résuma cette philosophie par une maxime : "Le bois dur pousse lentement."

Cette histoire illustre parfaitement le troisième et dernier principe de la slow productivity que Cal Newport formule ainsi :

Soyez obsédé par la qualité de ce que vous produisez, même si cela veut dire rater des opportunités à court terme. Tirez parti des résultats obtenus pour gagner toujours plus de liberté de travail sur le long terme.

L'auteur souligne que ce principe n'est pas placé en dernier par hasard : en effet, il constitue le ciment de la slow productivity. Sans cette obsession de la qualité, les deux premiers principes (en faire moins et respecter un rythme naturel) risqueraient de transformer le travail en simple contrainte à gérer, plutôt qu'en source d'accomplissement.

5.2 - Pourquoi les travailleurs du savoir devraient être obsédés par la qualité

Cal Newport reconnaît que le lien entre qualité et succès est évident pour les artistes comme Jewel, mais peut sembler moins direct dans les professions intellectuelles.

En tant qu'enseignant-chercheur, il jongle lui-même entre multiples tâches : enseignement, demandes de subventions, supervision d'étudiants, comités, articles scientifiques...

Pourtant, il affirme que même dans les métiers du savoir, certaines activités clés déterminent véritablement notre succès. Pour un professeur d'université, ce sont les publications majeures ; pour un graphiste, ce sont ses réalisations visuelles ; pour un commercial, ce sont ses ventes.

Le troisième principe invite à privilégier la qualité de ces activités essentielles non seulement pour exceller, mais aussi parce que cette qualité entretient des liens inattendus avec le désir de ralentir.

Cal Newport illustre ce lien à travers deux dynamiques complémentaires :

La qualité exige de ralentir

Pour produire un travail vraiment bon, on doit nécessairement prendre son temps. Il cite l'exemple de Steve Jobs qui, de retour chez Apple en 1997, réduisit drastiquement les lignes de produits pour se concentrer sur quatre ordinateurs seulement. Cette simplification permit de travailler sur la qualité et l'innovation et par là même, transformer rapidement les pertes en profits.

La qualité permet de ralentir

Le succès basé sur l'excellence donne une plus grande liberté.

L'auteur raconte comment Jewel, après le succès de son album "Spirit", refusa de s'installer à Los Angeles pour poursuivre une carrière frénétique. Elle préféra s'établir dans un ranch au Texas avec son petit ami :

"Je n'avais pas besoin d'être plus riche ou plus célèbre", expliqua-t-elle.

Pour illustrer plus concrètement cette seconde dynamique, Cal Newport présente Paul Jarvis, auteur de "Company of One", qui vit dans une maison isolée sur l'île de Vancouver. Jarvis préconise d'exploiter ses compétences non pas pour agrandir son entreprise, mais pour gagner en liberté. Par exemple, un concepteur web facturant 50€/heure pourrait, une fois sa réputation établie, passer à 100€/heure et travailler moitié moins tout en maintenant le même revenu.

Cal Newport conclut que nous avons été tellement habitués à considérer que le perfectionnement de nos compétences ne doit servir qu'à augmenter nos revenus et responsabilités, que nous oublions qu'il peut aussi nous offrir un mode de vie plus soutenable.

5.3 - Proposition n°1 : affinez votre goût

La première proposition concrète de ce chapitre s'inspire d'une déclaration d'Ira Glass, créateur de l'émission "This American Life". Glass souligne qu'en matière de création, il existe souvent un fossé entre ce que notre goût reconnaît comme bon et ce que nos compétences nous permettent de produire. C'est la frustration de ce décalage qui nous pousse à nous améliorer.

Toutefois, Cal Newport remarque qu’un élément primordial est souvent négligé : la nécessité d'affiner d'abord notre goût. Il est impossible de produire un travail exceptionnel sans comprendre ce qu'est l'excellence dans notre domaine.

Il propose alors trois approches pour développer ce discernement :

Devenez cinéphile (ou expert dans un autre domaine)

Cal Newport raconte comment l'étude du cinéma l'a aidé à améliorer son écriture. Il suggère que l'exploration d'un art différent du nôtre peut nous inspirer sans nous intimider.

Fondez votre propre club

S'inspirant du cercle des "Inklings" qui réunissait C.S. Lewis et J.R.R. Tolkien à Oxford, l'auteur encourage la création de groupes où des pairs peuvent échanger sur leurs travaux. Le goût collectif est généralement supérieur au goût individuel.

Achetez un carnet à 50 euros

Cal Newport partage comment l'achat d'un carnet de laboratoire haut de gamme durant son post-doctorat au MIT a transformé sa façon de travailler. Il soutient que des outils de qualité nous poussent à produire un travail de qualité.

5.4 - Interlude : et le perfectionnisme dans tout ça ?

Face à une lectrice inquiète que l'obsession de la qualité puisse mener au perfectionnisme paralysant, Cal Newport nuance son propos.

Il prend l'exemple des Beatles qui, après avoir abandonné les tournées en 1966, passèrent près de 700 heures en studio pour produire "Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band", un album révolutionnaire dans l'histoire de la musique pop. Si ce chef-d'œuvre démontre les bénéfices de l'obsession de la qualité, l'auteur reconnaît que cette tendance a également conduit de nombreux groupes à s'enliser dans un "perfectionnisme solitaire" stérile.

Pour éviter ce piège, Cal Newport conseille de se donner suffisamment de temps pour produire quelque chose de brillant, mais pas un temps illimité.

5.5 – Proposition n°2 : misez sur vous-même

La seconde proposition nous invite à prendre des risques calculés dans le but d’améliorer la qualité de son travail.

Cal Newport illustre cette idée avec l'histoire d'Alanis Morissette qui, après un succès dans la pop commerciale au Canada, fut abandonnée par sa maison de disques lorsqu'elle voulut explorer un style plus personnel. Ce pari risqué la conduisit finalement à créer "Jagged Little Pill", un album qui s'est vendu à 33 millions d'exemplaires.

L'auteur propose plusieurs approches pour mettre en œuvre cette stratégie :

Écrivez "quand les gosses sont couchés"

S’inspirant de figures comme Stephenie Meyer (Twilight), Clive Cussler ou John Grisham, Cal Newport suggère d’utiliser une partie de son temps libre pour se consacrer temporairement à un projet qui compte vraiment.

Réduisez vos revenus

Pas question de tout lâcher sur un coup de tête ! Cal Newport recommande d’agir prudemment avant de quitter son emploi, même s'il reconnaît que parfois, la pression financière peut stimuler la créativité. L’essentiel : s’assurer que le projet a un vrai potentiel avant de sauter le pas.

Annoncez vos délais

Communiquer publiquement sur un projet crée des attentes sociales qui motivent à l'excellence.

Attirez un investisseur

L'auteur raconte comment John Carpenter réalisa "Halloween" avec un budget modeste fourni par Moustapha Akkad. Dans cet exemple, on voit bien que la volonté de ne pas décevoir ceux qui nous font confiance peut nous pousser au-delà de nos limites habituelles.

En résumé, faire de la qualité une priorité n’est pas juste une posture professionnelle. C’est un choix stratégique. Un levier pour reprendre la main sur son temps, sa carrière, sa liberté. En produisant moins mais mieux, on gagne paradoxalement plus : plus d’impact, plus d’autonomie, et plus d’équilibre.

Conclusion de Cal Newport

John McPhee, figure du travail lent et méthodique

Cal Newport clôt son livre en revenant sur l’histoire de John McPhee, évoquée en introduction.

Il décrit plus en détail la méthode rigoureuse que ce grand écrivain a affinée au fil des années : d’abord taper ses notes pendant des semaines, puis découper chaque idée en blocs cohérents, les classer dans des dossiers thématiques, avant de disposer ces fragments sur un panneau pour en dégager la structure parfaite… Seulement à partir de cette étape commence l’écriture.

Une leçon de fond : ralentir pour mieux avancer

Cette évolution incarne à merveille le message central de l’ouvrage : ralentir n’est pas un simple appel à lever le pied, c’est une stratégie de fond pour mieux travailler. Car Cal Newport insiste : "ralentir ne se résume pas à s'élever contre le travail. Il s'agit plutôt de trouver une meilleure manière de travailler", repenser notre façon de l’aborder.

Echapper à la pseudo-productivité et repenser le travail

Cal Newport explique ensuite les deux ambitions qui ont guidé l’écriture de ce livre :

D’un côté, aider concrètement les travailleurs du savoir à échapper à la pseudo-productivité, en s’appuyant sur les trois principes-clés énoncés au fil des chapitres.

De l’autre, contribuer à une réflexion plus large sur la manière dont le travail intellectuel est structuré aujourd’hui.

Cal Newport conclut en citant McPhee qui s'étonnait d'être perçu comme prolifique : "Si vous versez chaque jour une goutte d'eau dans un seau, au bout de 365 jours, il y a une certaine quantité d'eau". Ce qui compte vraiment, rappelle l'auteur, ce n'est pas la vitesse mais l'endroit où l'on arrive.

Conclusion de "Slow productivity : retrouver efficacité, équilibre et goût du travail dans un monde d’excès" de Cal Newport

Les 4 idées clés à retenir du livre "Slow productivity"

Idée clé n°1 : La pseudo-productivité nous épuise… sans rien produire de vraiment utile

Dans "Slow productivity", Cal Newport remet en question notre conception moderne de la productivité qui confond activité constante et véritable efficacité.

Ce qu’il appelle "pseudo-productivité", c’est cette tendance à utiliser l'activité visible comme indicateur de travail performant. C'est cette illusion selon laquelle être toujours occupé, toujours joignable, et enchaîner les mails et les réunions, serait la preuve d’un travail bien fait.

En réalité, ce modèle repose sur des signes extérieurs d'effort, mais ne produit que peu de résultats concrets, surtout dans les métiers intellectuels, où la valeur produite n'est pas proportionnelle au temps passé devant un écran.

Dès lors, Cal Newport montre comment cette logique, renforcée par les outils numériques et technologies connectées, est devenue un piège : on consulte nos mails en moyenne toutes les 6 minutes, on saute d’une tâche à l’autre sans jamais aller au fond des choses, et on termine nos journées épuisés, mais sans sentiment d’avancer vraiment.

Résultat : un cycle d’hyperactivité vide de sens, où l’on confond "être occupé" avec "créer de la valeur".

Idée clé n°2 : Faire moins permet paradoxalement d'accomplir davantage

Cette idée est l’un des grands paradoxes de la slow productivity que Cal Newport défend avec force : réduire délibérément nos engagements nous rend plus efficaces, pas moins.

Plutôt que de multiplier les tâches et les projets - au risque de nous disperser – Cal Newport propose une approche sélective et intentionnelle. En limitant notre charge mentale à ce que l’on peut réellement traiter avec attention et profondeur, on libère de l’espace pour produire un travail de qualité.

Il illustre ce principe avec l’exemple de Jane Austen, qui ne put écrire ses chefs-d'œuvre qu’une fois soulagée de ses contraintes domestiques. Son génie créatif a émergé quand elle a retrouvé du temps libre, non fragmenté.

Cal Newport introduit ici la logique des systèmes "pull" (on choisit quand et comment on tire une nouvelle tâche) face aux systèmes "push" (les tâches nous arrivent sans fin, sans filtre). Selon lui, cette approche réduit les "coûts indirects" - échanges, suivis, frictions - qui s’accumulent silencieusement jusqu’à atteindre ce "seuil critique" au-delà duquel notre efficacité s'effondre.

En bref, en en faisant moins, mais mieux, on évite la surcharge… et on accomplit davantage.

Idée clé n°3 : Notre corps (et notre cerveau) ne sont pas faits pour travailler à plein régime toute l’année

Un autre principe clé de la slow productivity repose sur une vérité souvent négligée : notre physiologie a besoin de rythme, de variation, de respiration.

Cal Newport s’appuie sur des observations anthropologiques pour montrer que pendant la quasi-totalité de l’histoire humaine (sur 290 000 années des 300 000 ans d'existence de notre espèce), nos ancêtres ont travaillé selon des cycles irréguliers, influencés par les saisons, les ressources disponibles et les besoins du moment. L’intensité constante est une invention moderne… et profondément contre-nature.

Même les plus grands esprits de l’histoire - chercheurs, artistes, inventeurs - travaillaient à des cadences lentes, alternant entre des phases de concentration intense et de longs temps de recul. Et pourtant, leur impact est immense.

Cal Newport plaide donc pour un retour à cette saisonnalité naturelle du travail perdue, que ce soit par :

Des périodes plus calmes dans l’année, propices au repos ou à la réflexion,

Des environnements de travail inspirants, qui nourrissent plutôt que d’épuiser,

Des délais plus réalistes, parfois doublés, pour sortir de la pression permanente.

Alors, travailler intensément, oui — mais pas tout le temps. L’alternance est essentielle pour préserver notre énergie, notre créativité et notre santé mentale.

Idée clé n°4 : L'obsession de la qualité devient un levier pour gagner en liberté professionnelle

Le troisième principe de la slow productivity révèle que viser l’excellence ne signifie pas en faire plus… mais mieux, avec plus de sens et plus de liberté à la clé.

À travers des histoires marquantes - comme celle de la chanteuse Jewel qui refuse un contrat d’un million de dollars pour rester fidèle à son art, ou celle de Paul Jarvis, designer qui choisit une vie simple sur l’île de Vancouver - Cal Newport montre que la vraie réussite n’est pas toujours dans l’accumulation de projets ou de responsabilités, mais dans la qualité de ce qu’on crée… et la liberté qu’on en tire.

Pour cela, il faut d’abord développer un goût exigeant, apprendre à reconnaître ce qui est réellement bon, ce qui a de la valeur. Puis, oser miser sur soi, prendre des risques calculés qui nous poussent à donner le meilleur de nous-mêmes.

Cette quête d’excellence, loin d’être un piège perfectionniste, devient un levier puissant pour créer une carrière à notre image : plus sobre, plus alignée, plus libre.

En somme, plus on s’approche de la maîtrise, plus on peut choisir notre manière de travailler - et de vivre.

Ce que la lecture de "Slow Productivity" vous apportera

Lire "Slow Productivity", c’est certes découvrir une nouvelle méthode de travail, mais c’est surtout changer de perspective sur la productivité elle-même.

Dans cet ouvrage, Cal Newport propose en effet un regard radicalement différent du travail intellectuel que l’on se fait habituellement : il partage une vision libérée des diktats de l’urgence, de l’hyper-disponibilité et du “toujours plus”.

Mais le livre ne se limite pas à un constat : il offre des stratégies concrètes, applicables dès aujourd’hui, pour transformer votre relation au travail. Vous y découvrirez notamment comment, au travail :

Réduire vos engagements sans culpabiliser,

Retrouver un rythme plus humain et plus naturel,

Miser sur la qualité plutôt que sur la quantité de vos réalisations,

Faire le tri entre l’essentiel et le superflu, identifier ces activités qui, dans votre métier, produisent véritablement de la valeur, et éliminer progressivement ce qui vous épuise sans rien apporter.

Et réinventer votre rapport au travail, sans sacrifier votre bien-être.

Plus qu’un simple guide de productivité, Slow Productivity est une philosophie complète, qui replace l’exigence de qualité, la sérénité et le plaisir du travail bien fait, à un rythme soutenable sans les sacrifices imposés par notre culture de l'urgence perpétuelle.

Enfin une lecture qui réconcilie efficacité durable et équilibre personnel !

Pourquoi lire "Slow productivity" de Cal Newport ?

"Slow Productivity" ne vous apprendra pas simplement à mieux vous organiser : il vous apprendra à mieux vivre votre travail.

En effet, dans cet ouvrage, Cal Newport ne propose pas une nouvelle méthode miracle de gestion du temps, mais une approche profondément humaine et durable du travail intellectuel. Il nous rappelle une vérité que notre époque a reléguée au second plan : Travailler moins, mais mieux, ce n’est pas une utopie. C’est une nécessité.

Que vous soyez cadre surmené, entrepreneur débordé, freelance créatif sous pression ou universitaire au bord de la saturation, ce livre vous partage des principes simples, libérateurs et adaptés à votre réalité pour :

Retrouver du sens dans ce que vous faites,

Protéger votre santé mentale,

Préserver votre énergie,

Et renouer avec ce qui compte vraiment : la joie de créer, de penser, d’agir - sans vous épuiser.

"Slow Productivity" n’est pas un outil de plus. C’est un tournant.

Points forts :

Une critique fondamentale et nécessaire de la pseudo-productivité qui domine le monde professionnel moderne.

Des principes ancrés dans la réalité anthropologique et physiologique de l'être humain.

De nombreux exemples concrets et historiques qui illustrent parfaitement les concepts présentés.

Des propositions pratiques applicables immédiatement pour transformer sa vie professionnelle.

Points faibles :

Une philosophie qui peut être difficile à mettre en œuvre dans certains environnements professionnels très contraignants.

Certaines stratégies proposées - comme le retrait saisonnier du travail - semblent plus accessibles aux professions intellectuelles indépendantes qu'aux salariés traditionnels.

Ma note :

★★★★★

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Mon, 28 Jul 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13087/Slow-productivity
Le principe de Lucifer http://www.olivier-roland.fr/items/view/13066/Le-principe-de-Lucifer

Résumé de "Le principe de Lucifer | Une expédition scientifique dans les forces de l'Histoire !" de Howard Bloom : cet ouvrage décortique le rôle intrinsèque de la violence et de la domination dans la construction de l’Histoire humaine. Pour cela, Howard Bloom nous livre une analyse scientifique brillante des mécanismes et forces invisibles qui animent et structurent autant nos civilisations que nos comportements humains.

Par Howard Bloom, 2015, 701 pages.

Titre original : "The Lucifer principle", 1995, 495 pages.

Chronique et résumé de "Le principe de Lucifer | Une expédition scientifique dans les forces de l’Histoire !" de Howard Bloom

Partie 1 : Introduction

  1. Qui est Lucifer ?

Howard Bloom, l’auteur, ouvre son livre "Le principe de Lucifer" en se lançant dans une réflexion vertigineuse : il se demande d’où vient le mal ?

Il remonte alors à l’époque de l’hérétique Marcion, qui, il y a près de 1800 ans, conclut que le Créateur de notre univers ne pouvait être qu’un dieu maléfique, tant les souffrances et les violences étaient omniprésentes.

En réponse, les chrétiens créèrent le mythe de Lucifer, l'ange de lumière déchu, devenu démon qui corrompit l'humanité.

Mais Howard Bloom propose une lecture radicalement différente : le mal ne serait pas une erreur ni une corruption, mais une composante intrinsèque de l’évolution naturelle.

À travers ce qu’il appelle le "Principe de Lucifer", il avance que la cruauté, la domination, la compétition ne sont pas des anomalies : elles font partie des mécanismes naturels qui poussent les sociétés à évoluer, à se structurer, à se dépasser :

"Le Principe de Lucifer est un ensemble de règles naturelles, fonctionnant à l’unisson pour tisser une toile qui nous effraie et nous épouvante parfois. Chaque fil de cette tapisserie est fascinant mais l’ensemble est encore plus stupéfiant. En son centre, le Principe de Lucifer ressemble à cela : la Nature découverte par les scientifiques a créé en nous les pulsions les plus viles. Ces pulsions font en fait partie d’un processus dont la Nature se sert pour créer. Lucifer est le côté obscur de la fécondité cosmique, la lame tranchante du couteau du sculpteur. La Nature n’abhorre pas le mal, elle l’intègre. Elle l’utilise pour construire. Avec lui, elle conduit le monde humain vers des niveaux supérieurs d’organisation, de complexité et de pouvoir."

Aussi, pour l'auteur, comprendre cette dynamique est essentiel pour espérer dépasser notre condition, car nos plus nobles qualités peuvent paradoxalement engendrer nos pires atrocités :

"De nos meilleures qualités découle ce qu’il y a de pire en nous. De notre ardent désir de nous réunir provient notre tendance à nous déchirer. De notre dévotion envers le bien résulte notre propension à commettre les plus infâmes atrocités. De notre engagement envers les idéaux naît notre excuse pour haïr. (…) Nous devons regarder en face le visage sanglant de la Nature et prendre conscience du fait qu’elle nous a imposé le mal pour une raison. Et, pour la déjouer, nous devons comprendre cette raison (…) Lucifer est, en réalité, l’alter ego de Mère Nature."

Selon Howard Bloom, c’est en acceptant cette logique trouble, en en perçant les ressorts, que l’humanité pourra espérer sortir de ses cycles de destruction.

  1. L’énigme Clint Eastwood

Howard Bloom remet ensuite en cause notre vision romantique de l'individualisme.

Il s’en prend au mythe de l’individu autonome et héroïque, cher à la culture occidentale. Il critique notamment la théorie d’Éric Fromm, pour qui l’indépendance totale serait un idéal de maturité.

Pour l’auteur, certes l'individualisme est important, mais c’est une illusion. L’humain est avant tout une créature sociale, et ce sont, soutient-il, les groupes sociaux (tribus, nations, mouvements) qui sont les véritables moteurs de l'évolution humaine.

Il démontre ce point en analysant la réaction de stress : contrairement aux théories dominantes, celle-ci n’est pas un réflexe de survie individuel. Ce mécanisme est bien plus orienté vers la protection du groupe que vers celle de l’individu.

Mais cette appartenance a un prix. C’est le paradoxe de notre nature sociale : si le groupe est une force vitale, il peut aussi devenir destructeur, poussant à la haine, à la violence, à l’aveuglement collectif et ainsi aux pires atrocités.

"Sans penser le moins du monde aux résultats à long-terme de nos minuscules actions, nous contribuons aux actes lourds et parfois atterrants de l’organisme social. (…) Par notre intérêt pour le sexe, notre soumission à des Dieux et à des dirigeants, notre attachement parfois suicidaire à des idées, des religions et de vulgaires détails de type culturel, nous devenons les instigateurs inconscients des exploits de l’organisme social."

Dès lors, conclut Howard Bloom, si nous voulons échapper à la folie des foules, ce n’est pas en fuyant le collectif, mais en le repensant, en agissant ensemble avec lucidité. Seule une action collective pourra nous en libérer.

  1. Le tout est plus grand que la somme des éléments qui le composent

Dans ce 3ème chapitre du "Principe de Lucifer", Howard Bloom introduit un concept fondamental : celui d’entéléchie, cette idée que des éléments simples peuvent, en s’assemblant, donner naissance à quelque chose de complexe et de radicalement nouveau. À l’image d’un océan qui naît de simples molécules d’eau, ou d’une culture émergeant des interactions humaines.

Partant de cette logique, l'auteur présente les cinq concepts de son Principe de Lucifer qui expliquent les grands mouvements de l'histoire humaine :

Les systèmes auto-organisateurs qui nous façonnent comme des produits jetables, remplaçables.

Le superorganisme, une entité collective dont nous ne sommes que les composants.

Les mèmes, ces idées contagieuses qui structurent nos civilisations.

Le réseau neuronal qui agit comme un cerveau partagé et manipule nos émotions collectives.

L'ordre de préséance qui régit les hiérarchies humaines.

Ces concepts, souligne l’auteur, "apportent un éclairage sur le déclin de l’Occident et sur les dangers qui nous guettent". Ils nous éclairent sur les racines du mal qui nous habite. Car dans ces cinq petites idées, termine-t-il, "se tapit la force qui nous gouverne".

  1. La révolution culturelle chinoise

Howard Bloom s’appuie sur l’exemple de la Révolution culturelle en Chine pour décortiquer les mécanismes cachés de la violence de masse.

L'auteur raconte comment Mao, écarté du pouvoir après l'échec du Grand Bond en Avant, exploita la rébellion adolescente naturelle pour reprendre le contrôle de la Chine.

À travers le récit de Gao Yuan, ancien Garde Rouge, Howard Bloom retrace la montée en puissance de ce chaos : au départ, les lycéens ne font que débattre de littérature ou remettre en cause leurs enseignants. Mais très vite, ces échanges littéraires évoluent en une spirale de violence : les étudiants passent de la critique à la persécution, puis à la torture. Et finissent par se retourner les uns contre les autres dans des affrontements sanglants.

Pour l'auteur, la Révolution Culturelle révèle un schéma universel : derrière les idéaux les plus nobles et purs - égalité, justice, libération - se cachent nos pulsions les plus destructrices. Sous couvert de vertu, les pires instincts peuvent alors se déchaîner.

La Révolution culturelle devient ainsi l’exemple tragique d’une vérité plus large : l’être humain, en groupe, peut devenir son propre prédateur.

Partie 2 : Des taches de sang au paradis

  1. Mère nature, cette chienne sanglante

Dans ce chapitre au titre quelque peu brutal, Howard Bloom démonte le mythe du "bon sauvage" et l'idée selon laquelle la violence serait une invention récente, née avec la civilisation moderne.

Il affirme au contraire que la cruauté est inscrite dans les lois mêmes de la nature. À l’appui de sa démonstration, il cite un bestiaire sanglant : les fourmis qui se livrent à des guerres impitoyables, les lions qui déchiquettent leurs proies, les oiseaux qui dévorent sans état d’âme des bébés tortues encore frêles.

Chez l’homme, cette brutalité n’a pas disparu, indique l’auteur : innée, elle est simplement camouflée sous la fine couche de vernis rationnel de notre néocortex. Pour dire cela, Howard Bloom s’appuie sur la théorie du "cerveau trine" du Dr Paul MacLean selon laquelle notre néocortex, siège de la pensée consciente, repose sur des couches plus anciennes : le cerveau reptilien et le cerveau limbique, gouvernés par l’instinct et l’émotion, toujours bien actifs.

L'auteur réfute également l'idée que les sociétés primitives seraient pacifiques. En témoignent les !Kung du Kalahari dont le taux d'homicide dépasse celui de grandes villes modernes comme New York, et les observations de Jane Goodall sur les comportements de guerre tribale et féroce des chimpanzés.

La conclusion d’Howard Bloom est sans appel : l’homme n’est pas violent malgré sa nature, mais à cause d’elle. S’il rêve de paix, s’il veut vraiment construire un mode pacifique, il doit d'abord triompher de sa nature profonde, apprendre à dompter cette bête qu’il porte en lui.

  1. Les femmes ne sont pas les créatures pacifiques que vous imaginez

Dans ce chapitre au ton volontairement provocateur, Howard Bloom remet en question l’idée tenace selon laquelle la violence serait l’apanage des hommes. Il montre que les femmes, loin d’être des figures exclusivement nourricières ou apaisantes, jouent, elles aussi, un rôle actif, et parfois féroce, dans les dynamiques de domination.

Pour démontrer que les femelles participent pleinement à la violence sociale, Howard Bloom mentionne alors plusieurs exemples parlants : la femelle gorille Effie, qui tue et dévore le petit d’une rivale pour préserver sa lignée, ou encore l’impératrice romaine Livia, stratège impitoyable, soupçonnée d’avoir fait éliminer un à un les héritiers gênants pour assurer la montée au pouvoir de son fils, Tibère.

Mais l’auteur va plus loin : il met en lumière le rôle plus discret, mais tout aussi influent, de la sélection sexuelle. En valorisant les comportements agressifs des mâles, comme la "bravoure" et l'héroïsme guerrier, bref, en choisissant les mâles les plus "dominants", les femmes participent à la perpétuation d’une forme de violence sociale.

Au fond, conclut Bloom, la violence n’est ni une affaire d’hommes, ni une affaire de femmes. Elle est gravée dans nos circuits les plus archaïques, dans les profondeurs de notre cerveau animal. Croire le contraire, c’est ignorer les racines biologiques qui façonnent notre histoire.

  1. Un combat pour le privilège de procréer

Howard Bloom nous plonge ici dans les racines biologiques de la violence à travers le prisme de la reproduction.

Il montre que, dans de nombreuses espèces (des singes langurs aux peuples Yanomami d’Amazonie, jusqu’aux Romains de l’Antiquité, une pratique brutale revient avec insistance : tuer les enfants du rival pour s’approprier les femelles et assurer la survie de sa propre lignée.

Derrière cette stratégie terrifiante se cache une logique froide mais diablement efficace : éliminer la descendance de ses adversaires pour accélérer sa propre reproduction. En effet, en supprimant les petits issus d’un précédent mâle, le nouveau venu rend rapidement les femelles à nouveau fertiles et disponibles pour porter leur propre progéniture.

Pour Howard Bloom, ce schéma universel révèle que bien des violences humaines, derrière leurs justifications idéologiques ou politiques, répondent à une pulsion plus profonde, un impératif biologique fondamental : celui de transmettre ses gènes.

Cette force constitue l'une des clés du "Principe de Lucifer" : l’avidité des gènes.

  1. L’avidité des gènes

Howard Bloom poursuit sa réflexion en revenant aux origines de la vie, inspiré par la théorie des réplicateurs de Richard Dawkins.

Au commencement, explique-t-il, il y avait des molécules simples, capables de se copier elles-mêmes. Dans un environnement hostile et limité en ressources, celles-ci ont développé des stratégies de compétition et de protection toujours plus complexes. Ainsi, seules les plus malignes ont survécu : celles qui savaient se défendre, éliminer les concurrentes, ou coopérer stratégiquement.

Ces réplicateurs sont devenus nos gènes. Et aujourd’hui encore, ils utilisent nos corps comme des "machines à survie", programmées pour maximiser leurs chances de transmission.

Pour Howard Bloom, cette programmation génétique explique notre violence fondamentale. Que l’on observe des gorilles en rut ou des empereurs romains en campagne, une même logique opère : s’imposer, dominer, éliminer les rivaux, transmettre son ADN. Nous luttons tous pour cela.

Pour l’auteur, c’est là le véritable moteur de notre brutalité : non pas la société, la religion ou le pouvoir… mais une programmation biologique ancienne, invisible, et incroyablement tenace :

"Malgré les opinions de Montaigne, de Rousseau et de leurs disciples contemporains, la civilisation n’est pas le générateur de la violence. Et la brutalité n’est pas réservée au mâle "patriarcal". Le créateur de la sauvagerie humaine est la Nature, qui trace sa route à travers les segments du cerveau légués aux hommes et aux femmes par nos ancêtres animaux."

Il poursuit :

"Les créatures de toutes les espèces se battent pour le privilège de la procréation. Elles luttent pour immortaliser les réplicateurs qui les composent. Inutile de se demander pourquoi les femmes des anciens empereurs et les dames de haut rang du clan des gorilles ont cherché à accaparer le monde pour leurs enfants. Inutile de se demander pourquoi les héros grecs, les guerriers Yanomamo et les Romains déchaînés ont risqué leur vie pour trouver de nouveaux ventres à ensemencer. A chaque fois qu’un spermatozoïde et un ovule accouchent d’une nouvelle créature dans le monde, le vainqueur est un gène."

Dès lors, la violence humaine n’est pas une aberration de l’évolution : elle en est le prolongement logique. Et c’est en comprenant cette logique que nous pourrons, peut-être, commencer à la dépasser.

Partie 3 : Pourquoi les humains s’autodétruisent

  1. La théorie de la sélection individuelle et ses failles

Dans la partie 3 de son livre "Le principe de Lucifer", Howard Bloom commence par remettre en question un pilier de la biologie moderne : l’idée que l'évolution n'opère qu'au niveau de l'individu.

Il montre que cette vision, dominante depuis des décennies, ne permet pas d’expliquer certains comportements humains (et animaux) qui contredisent clairement cette vision. Howard Bloom évoque notamment les suicides collectifs de civils japonais à Okinawa, encouragés au nom de l’honneur national, ou l’augmentation dramatique des suicides pendant la Grande Dépression. De tels actes ne peuvent être compris si l’on part du principe que chaque individu cherche avant tout à ne préserver que sa propre vie.

Il retrace l’histoire de ce débat scientifique, rappelant que Darwin lui-même admettait l’existence d’une "sélection de groupe", avant que cette idée ne soit largement écartée par les généticiens au XXe siècle au profit de la "sélection de parentèle", plus conforme à la théorie des gènes égoïstes.

Pourtant, les phénomènes biologiques abondent et résistent à cette grille de lecture : les gazelles qui lancent un cri d’alerte en présence d’un prédateur, au risque de se faire repérer elles-mêmes ; les guêpes stériles qui consacrent leur vie à la colonie ; ou encore l'"apoptose", ce mécanisme par lequel certaines cellules s’autodétruisent pour protéger l’organisme entier.

Pour Howard Bloom, ces exemples démontrent que nous sommes programmés pour servir parfois les intérêts du groupe au détriment de notre survie individuelle. En d’autres termes : l’être humain, parfois, est biologiquement câblé pour se sacrifier au nom d’un collectif, même si ce sacrifice va à l’encontre de sa propre survie.

Et ce comportement, affirme l’auteur, ne relève pas d’un élan de noblesse altruiste, mais d’un programme biologique plus vaste : celui du superorganisme.

  1. Superorganisme

Dans le chapitre 10 du "Principe de Lucifer", Howard Bloom fait un parallèle entre l'organisation cellulaire et sociale. Il explique, en effet, que nous ne sommes pas de simples individus isolés, mais les composants d’organismes collectifs d’une taille bien plus vaste. À l’image des cellules qui composent un corps humain, chaque être humain fait partie intégrante d’un "superorganisme" social.

Howard Bloom illustre cette analogie avec une série d’exemples issus du monde vivant : les fourmis, dont les actions coordonnées donnent l’illusion d’un seul être pensant ; les myxomycètes, ces organismes unicellulaires qui fusionnent en une masse collective dès qu’un danger survient ; ou encore les éponges, capables de se désassembler et de se réorganiser spontanément pour survivre.

Pour l'auteur, ces systèmes nous rappellent alors que l’humain, aussi sophistiqué soit-il, ne peut, comme ces organismes unicellulaires, survivre seul. Nous sommes biologiquement, émotionnellement et culturellement façonnés pour vivre au sein d’un tissu collectif. Hors du groupe, nous dépérissons.

  1. L’isolement : le poison ultime

Dans ce chapitre émouvant, Howard Bloom met en lumière l’un des plus grands dangers qui guettent l’être humain : l’isolement social.

Loin d’être un simple inconfort, la solitude prolongée agit comme un poison, affectant à la fois notre santé mentale et notre intégrité physique. Oui, la rupture ou destruction des liens sociaux peut être fatal à l’individu, lance l’auteur.

Howard Bloom revient sur plusieurs exemples déchirants : des nourrissons privés d’affection dans les orphelinats, dont le développement se fige ou s’effondre ; Flint, un jeune chimpanzé mort peu après le décès de sa mère, rongé par le chagrin ; ou encore Lawrence d’Arabie, qui, après avoir été un héros adulé, se replie sur lui-même et se détériore, une fois arraché à sa communauté d’adoption.

À travers ces récits, Howard Bloom prouve une évidence : l’être humain a besoin des autres pour rester en vie, au sens le plus littéral du terme. Être exclu, oublié ou séparé du groupe revient à perdre l’ancrage vital qui nous relie à notre humanité.

C’est pourquoi, notre intégration dans le superorganisme social est plus qu’un besoin : c’est une condition de survie.

  1. Même les héros sont inquiets

Dans ce chapitre, Howard Bloom déconstruit le mythe de l'indépendance émotionnelle.

À rebours de l’idéal du leader inébranlable, il révèle que même les figures historiques les plus redoutées - Hannibal, Hitler, et tant d’autres - étaient rongées par des insécurités profondes qu’ils dissimulaient sous une façade d'imperturbabilité.

Pour illustrer son propos, l’auteur du "Principe de Lucifer" se réfère aux travaux de Frans de Waal, qui a observé chez les chimpanzés un comportement troublant : les mâles alpha, bien qu’en apparence sereins, sont en réalité anxieux, sur le qui-vive, préoccupés en permanence par le maintien de leur statut.

Selon Howard Bloom, cette mascarade de dureté émotionnelle n’est pas un signe de force, mais une posture héritée de notre passé animal. Le problème, c’est qu’elle continue à façonner nos attentes, un idéal trompeur : dès lors, nous valorisons l’autosuffisance émotionnelle, et nous culpabilisons à l’idée de dépendre des autres.

Or, cette dépendance n’a rien d’anormal : elle est profondément humaine… et vitale.

  1. Aimer l’enfant qui est en nous ne suffit pas

Dans ce chapitre, Howard Bloom critique un dogme bien ancré dans la thérapie moderne : son approche individualiste. L’idée que le salut passe par l’amour de soi.

Pour lui, cette approche centrée sur l’estime de soi, aussi répandue soit-elle, passe à côté de l’essentiel. Car notre équilibre intérieur ne peut se construire en vase clos. Il dépend fondamentalement de nos relations sociales, de notre place dans le groupe, du tissu social dans lequel nous évoluons.

Howard Bloom va jusqu’à dire que nos instincts d’autodestruction, qu’ils prennent la forme du retrait, du sabotage ou même de la maladie, sont souvent déclenchés par un sentiment d’exclusion ou d’inutilité sociale. Ce qui prouve bien que l’humain n’a pas été biologiquement conçu pour vivre centré sur lui-même :

"La meilleure façon de désactiver le mécanisme autodestructeur n’est pas de pleurer sur les traumatismes de son enfance jusqu’à ce que l’on finisse par aimer l’enfant qui est en nous. C’est de comprendre que les éléments autodestructeurs sont contrôlés par des forces sociales : notre besoin de savoir si nous sommes à la hauteur des standards fixés par ceux que nous respectons et notre relation avec nos amis, notre mari, notre femme et même nos chiens et nos chats."

En somme, nous ne sommes pas programmés pour l’auto-suffisance, mais pour la participation à un tout. Aimer l’enfant en soi ? Oui. Mais tant que cet enfant n’est pas relié aux autres, il reste seul, et vulnérable.

Partie 4 : Le Dieu des uns est le Diable des autres

  1. Nous contre eux

Howard Bloom compare ici le fonctionnement des sociétés humaines à celui du système immunitaire.

Comme les globules blancs qui distinguent les cellules amies des intrus, les groupes humains développent des marqueurs d'identité (tenues vestimentaires, langages, coutumes, rituels) pour différencier les membres de leur communauté des "autres".

Cette tendance universelle à former des groupes opposés s’observe à travers les âges et les espèces. On la retrouve même chez les animaux. Mais ce besoin de différenciation a un prix, alerte l’auteur : il peut conduire à une déshumanisation totale de l’autre.

Howard Bloom illustre ses propos avec l’exemple glaçant de Bertha Krupp, riche héritière allemande, qui montrait une grande tendresse et compassion envers "les siens"… tout en fermant les yeux sur la souffrance de milliers d’ouvriers forcés à travailler dans ses usines d’armement.

Ce contraste brutal témoigne de notre capacité d’empathie qui se limite souvent à notre propre camp. En somme, la frontière entre "nous" et "eux", loin d’être abstraite, structure nos sociétés, mais elle peut aussi nourrir l’exclusion, l’indifférence, voire la barbarie...

  1. De l’intérêt d’avoir un ennemi

Howard Bloom décortique à présent une tactique utilisée par les leaders aussi vieille que le pouvoir lui-même : créer un ennemi pour unir les siens.

Car quoi de plus efficace pour renforcer la cohésion d’un groupe que de le persuader qu’il est menacé de l’extérieur ?

L’auteur du "Principe de Lucifer" appuie sa démonstration sur deux cas historiques édifiants. Le premier : le gouverneur Faubus, qui dans les années 1950, fabriqua de toutes pièces une "menace noire" pour galvaniser l’Arkansas ségrégationniste contre la déségrégation scolaire. Le second : Fidel Castro, qui exploita l’hostilité américaine pour asseoir son autorité à Cuba et justifier la mise en place d’un pouvoir totalitaire.

Dans les deux cas, l’ennemi devient une figure centrale, pas pour ce qu’il est, mais pour ce qu’il permet : détourner l’attention des tensions internes, offrir un exutoire aux frustrations, et maintenir l’unité du groupe sous tension.

L'invocation d'un ennemi, réel ou imaginaire, est donc, pour l’auteur, un outil de manipulation sociale profondément enraciné dans notre fonctionnement collectif.

  1. L’astuce perceptuelle qui fabrique les démons

Howard Bloom s’intéresse ici à un mécanisme psychologique aussi subtil que redoutable : la projection.

Il explique comment notre esprit, pour se protéger, refoule les pensées, souvenirs, désirs ou pulsions jugés inacceptables… puis les projette sur l’extérieur. Le "mal" que nous refusons de voir en nous, nous l’attribuons à un autre. Ce tour de passe-passe mental transforme alors nos démons intérieurs en ennemis bien réels.

Howard Bloom illustre ce phénomène à travers l’exemple des fondamentalistes religieux américains. Animés par une forte répression de leurs propres désirs, notamment sexuels, ces derniers accusent les "humanistes profanes", de perversion, de décadence morale. En réalité, ce qu’ils combattent chez "l’autre", ce sont souvent leurs propres pulsions inavouées.

Ce glissement, selon Howard Bloom, est d’ailleurs au cœur de nombreux mouvements idéologiques et religieux. Car la projection permet non seulement de préserver une image de soi intacte, mais offre aussi un ennemi imaginaire commun autour duquel un groupe peut se souder, un mouvement s’unifier.

Cette capacité à transformer une faille intime en croisade morale devient alors un puissant levier de manipulation collective.

  1. Comment la haine construit les murs de la société

Cette partie du livre "Le Principe de Lucifer" explore le rôle paradoxal de la haine dans la construction des sociétés humaines. Loin de la réduire à une pathologie individuelle, Howard Bloom présente ici la haine comme une force structurante, presque fonctionnelle.

Selon lui, chaque être humain vit avec un écart entre ce qu’il est et ce qu’il pourrait être. Cette frustration de ne jamais réaliser pleinement son potentiel, génère chez lui, naturellement, une forme de rage intérieure. Plutôt que de laisser cette énergie négative exploser et détruire le groupe de l’intérieur, les sociétés apprennent à la canaliser vers l’extérieur, à la rediriger vers des ennemis désignés.

Howard Bloom compare ce processus à la façon dont les premiers organismes multicellulaires ont transformé les déchets calciques toxiques en ossature protectrice : notre squelette. De la même façon, les sociétés transforment leur "déchet psychologique", la haine, en structure, en ciment qui soude les groupes sociaux.

Chaque culture, explique alors l’auteur, développe ses "autorisations" à haïr certains types de personnes : hérétiques, étrangers, riches, pauvres, infidèles… Ces permissions deviennent des vertus collectives, qui renforcent l’identité du groupe et la légitimité de ses dirigeants à les suivre contre un ennemi commun.

La haine, dans cette optique, n’est pas un échec du lien social, elle en est parfois la condition même.

Partie 5 : L’homme : Inventeur du monde invisible

  1. Des gènes aux mèmes

Howard Bloom commence cette nouvelle partie en introduisant un concept clé de son raisonnement : le même.

Le mème est une idée qui, comme un gène, se réplique et se propage non pas dans le corps, mais dans les esprits, de cerveau en cerveau.

Contrairement aux gènes qui façonnent les organismes biologiques à travers des millions d’années d’évolution lente, les mèmes structurent les sociétés humaines avec une rapidité fulgurante.

Le marxisme en est un bon exemple : une idée née dans l'esprit isolé de Marx, longtemps marginalisée, avant de trouver l'opportunité de la révolution russe (le bon "hôte") pour infecter des millions d'esprits à travers le monde.

Selon Howard Bloom, cette capacité à remodeler les sociétés sans toucher à l’ADN marque une étape majeure de l’évolution. Les mèmes sont devenus les nouveaux réplicateurs dominants : capables de transformer le monde en quelques décennies.

  1. Le nez d’un rat et l’esprit humain : une brève histoire de l’ascension des mèmes

Howard Bloom retrace ici l'évolution des mèmes à partir des "marqueurs d'identité tribale".

Il raconte comment les rats reconnaissent les membres de leur clan à l’odeur : un moyen biologique de distinguer le "nous" du "eux". Puis explique comment, chez les premiers humains, cette reconnaissance s’est faite non seulement par le sang, mais aussi par des symboles, des rites, des récits : des marqueurs culturels qui agissent comme des codes tribaux.

L’auteur retrace comment les mèmes ont progressivement pris le relais des gènes pour structurer l’appartenance. L’histoire du christianisme en est un exemple frappant : d’abord religion tribale liée aux gènes juifs, il devient, grâce à l’intervention de Saint Paul, une "religion transmissible" capable de rassembler des peuples génétiquement différents.

Ce tournant marque ainsi l’émancipation des idées : les mèmes deviennent forces autonomes de l’histoire, capables de forger des superorganismes humains, non plus fondés sur la parenté biologique, mais sur une identité mémétique partagée..

  1. Comment des fausses idées peuvent être vraies

Dans ce chapitre, Howard Bloom affirme que la vérité d'une croyance importe moins que sa capacité à souder un groupe. En d’autres termes, la valeur d’une idée ne dépend pas de sa véracité, mais de son efficacité sociale.

L’auteur évoque plusieurs cas emblématiques : une secte persuadée de l’arrivée imminente de soucoupes volantes, les prédictions erronées de l'Adventisme du Septième Jour, ou encore le marxisme, dont les promesses utopiques n’ont jamais été tenues.

Howard Bloom montre que même quand leurs prédictions échouent, ces systèmes de croyances survivent, et parfois même se renforcent. Pourquoi ? Parce qu’elles offrent un récit commun, une identité partagée, une grille de lecture du monde. Elles unissent les individus en un tout cohérent.

Et pour Howard Bloom, c’est là que réside le véritable succès d’un mème : non dans sa capacité à dire le vrai, mais à créer et maintenir la cohésion du superorganisme humain.

  1. Le village des sorciers et l’énigme du contrôle

Howard Bloom aborde, dans cette partie, une question fondamentale : pourquoi adhérons-nous à des idées, même irrationnelles ? Sa réponse : parce que nous avons un besoin biologique de sentir que nous avons le contrôle.

À travers l'exemple des tribus indiennes Nilgiri, où les sorciers Kurumba exerçaient un pouvoir considérable grâce à leur prétendu contrôle sur les maladies, l'auteur nous montre que l'illusion du contrôle est vitale pour notre survie. Cette illusion, précise-t-il, apporte un sentiment de sécurité, une forme d’ordre face au chaos du monde.

Howard Bloom cite également des expériences menées sur des rats : on y observe que ceux qui croient avoir un certain contrôle sur leur environnement vivent plus longtemps, résistent mieux au stress et tombent moins malades. En fait, pour l’auteur, c'est ce besoin profond de maîtrise (même fictive) qui nous pousse à adhérer aux systèmes de croyances (récits, religions, idéologies), croyances qui nous donnent l’impression d’avoir prise sur l’invisible.Et c’est précisément cette illusion, conclut Howard Bloom, qui rend les mèmes si puissants : ils nous offrent, au-delà du rationnel, une façon de survivre psychologiquement.

  1. Le sorcier, guérisseur moderne

Dans ce chapitre, Howard Bloom dresse un parallèle entre les sorciers d’autrefois et les médecins d’aujourd’hui.Derrière l’apparence de rigueur scientifique, il pointe leur façon de vendre l’illusion du contrôle et un besoin commun : celui de rassurer, de faire croire que l’on contrôle ce qui, en réalité, échappe encore largement à la compréhension humaine.

Dans cette idée, Howard Bloom dénonce certaines pratiques médicales – prescriptions d’examens inutiles, déni des symptômes, traitements standardisés - comme des rituels modernes qui masquent l’impuissance des médecins face à des maladies mal comprises.

Il rappelle que les progrès de la médecine n’expliquent pas à eux seuls l’amélioration de la santé publique, et que bien souvent, les médecins eux-mêmes ne reconnaissent que les pathologies qu’ils savent traiter. Autrement dit, ils ne guérissent pas tout, mais ils maintiennent l’illusion d’un savoir tout-puissant, exactement comme le faisait le sorcier du village.

  1. Le contrôle et le besoin de prier

Howard Bloom poursuit en explorant un autre pilier de l’illusion de contrôle : la religion.

À travers l’exemple du pape Grégoire VII (Hildebrand) défiant l’empereur Henri IV, il montre comment l’Église a imposé son autorité non pas par la force, mais en affirmant sa maîtrise sur l’invisible : le salut, l’enfer, le destin éternel des âmes.

Ainsi, en offrant notamment l'espoir d'une vie après la mort et la promesse de maîtriser leur destin éternel, l'Église médiévale vendait une illusion salvatrice aux serfs privés de tout pouvoir réel. Pour ces paysans démunis de tout pouvoir, ces promesses étaient vitales. L’Église apportait un sens, une espérance, une forme de contrôle sur une existence autrement accablante.

Howard Bloom explique que cette stratégie est toujours d’actualité. Les mouvements religieux modernes, notamment les fondamentalismes, exploitent ce même besoin de certitude face à l’inconnu pour gagner une influence politique et idéologique. La prière devient ainsi un acte de survie psychologique et une arme sociale de premier plan.

  1. Le pouvoir et le monde invisible

Dans ce chapitre, Howard Bloom élargit sa réflexion sur le pouvoir à tous ceux qui se présentent comme les interprètes de l’invisible.

De Newton aux prêtres aztèques, des médecins modernes aux astrologues ou encore experts en psychologie, tous tirent leur autorité de leur prétendue capacité à comprendre ce que le commun des mortels ne voit pas.

Ce pouvoir, souligne-t-il, repose moins sur la vérité que sur la confiance - ou la peur - qu’ils inspirent. Car nous sommes vulnérables face à ce que nous ne comprenons pas : microbes, forces cosmiques, mécanismes de l’esprit, théories éducatives... autant de mondes cachés qui nous échappent mais régissent notre monde, influencent nos vies. En prétendant en détenir les clés, les "experts de l’invisible" captent une immense influence. Et nous continuons, comme nos ancêtres, à leur accorder un pouvoir démesuré.

  1. Einstein et les Esquimaux

Howard Bloom clôt la 5ème partie de son ouvrage "Le principe de Lucifer" en explorant le rôle vital des modèles mentaux de l’invisible dans l’évolution humaine.

Il compare deux visions du monde : celle mathématique d’Einstein, qui imagine un univers courbé à travers des équations, et celle des Esquimaux, qui attribuent la chaleur de leurs igloos aux esprits.Deux modèles radicalement différents… mais qui partagent une même fonction : donner sens à l’invisible qui nous entoure pour mieux agir sur le monde.

Pour Howard Bloom, ces constructions mentales - ces mèmes organisateurs - sont devenues les nouveaux moteurs de l’évolution humaine. Même s’ils sont souvent approximatifs ou faux, ils permettent à nos sociétés de se structurer, d’innover, de survivre. En somme, aujourd’hui, conclut l’auteur, ce ne sont plus nos gènes qui dictent nos grandes transformations, mais nos idées. Et parmi elles, ce sont les visions du monde, même les plus abstraites, qui façonnent nos civilisations.

Partie 6 : Les mystères de la machine d’apprentissage évolutionniste

  1. L’explication connexionniste des rêves de l’esprit collectif

Dans cette nouvelle partie, Howard Bloom commence par comparer le fonctionnement de nos visions du monde à celui des réseaux neuronaux artificiels.

Comme ces ordinateurs capables de résoudre des problèmes complexes en générant des modèles approximatifs mais efficaces, notre cerveau tisse en permanence des réseaux de neurones, autrement dit des connexions entre idées, perceptions et expériences pour donner du sens à un monde souvent invisible.

Ces modèles mentaux, aussi imprécis soient-ils, fonctionnent, car ils nous permettent de prendre des décisions, de coopérer et de survivre.

Mais ils ont un coût : ils sont profondément enracinés dans notre cerveau. Howard Bloom explique que remettre en question une croyance, ce n’est donc pas simplement changer d’avis : c’est détruire une architecture neuronale entière, construite parfois sur des années. D’où notre résistance ardente et instinctive à abandonner nos convictions : elles ne sont pas qu’intellectuelles, elles sont neurologiquement ancrées.

  1. La société comme réseau neuronal

Dans ce chapitre, Howard Bloom pousse plus loin son analogie entre le cerveau et la société.À l’image des neurones qui communiquent constamment pour former une pensée, les individus d’une société échangent, réagissent, influencent mutuellement. Ils forment ainsi un réseau vivant capable de solutionner collectivement des problèmes qu’aucun individu ne pourrait résoudre seul.

Il prend l’exemple des abeilles, capables par leur danse et leurs échanges chimiques de réaliser des calculs complexes pour trouver la meilleure source de nectar. Chez les humains, les signaux sociaux (humeurs, comportements, émotions) jouent un rôle similaire. Pour Howard Bloom, l’évolution ne met pas en concurrence des individus isolés, mais des réseaux sociaux interconnectés, dont la complexité croissante dessine le futur de l’humanité.

  1. Le caractère remplaçable des mèmes

Howard Bloom aborde ici une vérité biologique brutale : dans l’histoire de l’évolution, les mâles ont souvent été traités comme des éléments interchangeables.

Fœtus masculins plus fragiles, espérance de vie plus courte, surexposition aux risques et aux guerres : la Nature semble avoir conçu les hommes comme des ressources "jetables".

Cette différence de traitement s'explique par une simple logique reproductive : un seul homme peut féconder de nombreuses femmes, alors que chaque femme est indispensable à la reproduction. Dans une logique froide d’optimisation de survie de l’espèce, mieux vaut préserver les femmes, et "jouer" avec les hommes.

Pour Howard Bloom, cette "remplaçabilité" des hommes devient encore plus critique à l'ère de l'information. Pourquoi ? Parce que leur force physique n'est plus un avantage déterminant. L'auteur suggère que l'émergence de comportements plus androgynes, plus équilibrés, pourrait être une réaction évolutive à cette prise de conscience de leur caractère dispensable : dans le superorganisme moderne, le mâle traditionnel n’est plus aussi indispensable qu’avant.

  1. De l’utilisation de l’homme comme un dé par la société

Ce chapitre du "Principe de Lucifer" explique pourquoi la Nature gaspille si facilement les vies masculines : c'est un pari pour l'expansion du superorganisme.

À l’image des fourmis qui envoient des milliers d’individus explorer des territoires hostiles dans l’espoir que quelques-unes fondent une nouvelle colonie, les sociétés humaines ont historiquement utilisé leurs jeunes mâles comme des pions dans leurs jeux de conquête territoriale.

L'auteur illustre ce principe à travers divers exemples historiques. Raids bédouins, conquêtes vikings, explorations violentes : derrière ces épopées se cache une stratégie darwinienne. Peu importe le nombre de pertes, pourvu que quelques-uns survivent, s’imposent, et transmettent leurs gènes. Le mâle devient alors un dé lancé par la société, dont le sort individuel importe peu face à la réussite collective.

  1. Le lancer est-il un savoir-faire acquis génétiquement ?

Howard Bloom propose ici une hypothèse sur la transmission évolutive de notre capacité à lancer (une pierre, une arme, un outil. Et si celle-ci était un trait sélectionné par l’évolution ?

Dans les sociétés primitives, celui qui lançait avec précision pouvait chasser, se défendre, vaincre. Il devenait un chef, attirait les femmes, laissait plus de descendants. Un avantage reproductif majeur, souligne Howard Bloom.

Pour l'auteur, cette sélection naturelle, couplée aux guerres tribales où les vainqueurs s'emparaient des femmes des vaincus, aurait rapidement été favorisée et transmise. Elle aurait permis la diffusion de ce trait génétique bénéfique au superorganisme social.

En cela, le lancer n’est pas juste un geste anodin, c’est peut-être un des premiers grands moteurs de l’évolution culturelle et biologique humaine, termine l’auteur.

  1. Olivier Cromwell : les instincts du rongeur sont déguisés

Dans ce chapitre, Howard Bloom décrit comment les mèmes, ces idées virales, savent parfaitement exploiter nos instincts animaux les plus archaïques pour déclencher des conflits à grande échelle.

À travers l'exemple d'Oliver Cromwell, dont la violence juvénile trouva son expression dans le puritanisme militant, l'auteur illustre comment les idées religieuses peuvent mobiliser nos pulsions primitives. Howard Bloom établit ici un parallèle avec le comportement des rats, qui éliminent les rivaux pour contrôler un territoire.

De la même manière, Cromwell justifie l’élimination massive des catholiques irlandais au nom de la "purification". Il transforme, de cette façon, la violence instinctive en conflit idéologique. Finalement, pour Howard Bloom, la guerre entre puritains et catholiques en Irlande révèle la puissance redoutable des mèmes : ils infiltrent notre cerveau reptilien et limbique, siège de nos instincts de peur, d’agression et d’appartenance, pour orienter nos actes. Sous couvert d’idéologie, c’est souvent l’animal en nous qui s’exprime, armé cette fois d’un discours moral ou divin.

Partie 7 : L’idéologie, c’est d’abord du vol

  1. Le monde invisible en tant qu’arme

Dans ce chapitre, Howard Bloom montre comment les idées invisibles peuvent devenir des armes plus puissantes que les épées.

Il prend pour exemple l’histoire de Mahomet : un marchand marginalisé dont les visions mystiques d’abord moquées ont fini par se transformer en un mouvement religieux capable de fonder l’un des plus vastes empires de l’histoire.

Pour Howard Bloom, ce récit n’est pas seulement spirituel : il est une démonstration de la force militaire des mèmes. Une croyance, quand elle capte les bonnes émotions et fédère un groupe, peut transformer un simple superorganisme social en machine de guerre conquérante.

L’Islam, dans sa phase d’expansion, illustre parfaitement comment une idée, née dans un esprit isolé, peut se propager à l’échelle d’un continent et renverser des civilisations entières. L’arme ici, ce n’est pas l’acier, c’est le monde invisible des croyances partagées.

  1. La vraie route de l’Utopie

Howard Bloom montre ici que les prophètes, qu’ils soient religieux ou idéologiques, ne réalisent pas toujours leurs visions surnaturelles… mais parviennent malgré tout à changer le monde.Leurs promesses d’utopie peuvent échouer dans les faits, mais elles réussissent à créer des "superorganismes" sociaux puissants, capables de concrétiser une part de leurs visions.

Pour mieux comprendre, l’auteur revient sur l’histoire du christianisme et de l’islam : les fidèles de ces religions, d'abord persécutés, ont fini par accéder au pouvoir et à la richesse grâce à leur force d’organisation collective.Pour Howard Bloom, le vrai pouvoir des prophètes ne réside pas dans le miracle, la prophétie ou leurs promesses divines, mais dans leur aptitude à unir les hommes en groupes organisés autour d’un récit commun. En somme, les prophètes sont des architectes de cohésion sociale, pas des magiciens.

  1. Pourquoi les hommes embrassent-ils des idées et pourquoi les idées embrassent-elles des hommes ?

Dans ce chapitre, Howard Bloom décortique la relation symbiotique entre les humains et les mèmes.

D'un côté, les hommes adoptent les idées car elles leur apportent cohésion sociale, pouvoir et richesse, comme l'illustre le cas de Fidel Castro. De l'autre, les mèmes "choisissent" les esprits humains qu’ils vont coloniser pour se propager. Ils étendent leur influence en exploitant des mécanismes comme la peur (menace de l’enfer), l’espoir (du paradis), la conquête militaire…

Ainsi, selon l’auteur, chaque société devient le théâtre d’un jeu d’influence où les idées se servent des hommes autant que les hommes se servent des idées.

  1. L’indignation morale cache le désir de biens fonciers

Howard Bloom dévoile la vraie nature des idéologies : des masques nobles dissimulant l'appétit territorial des groupes sociaux. C’est pourquoi, lance-t-il, derrière les discours enflammés sur la justice ou la vérité, il y a bien souvent une réalité plus terre à terre : la conquête, l’appropriation, la domination.

À travers l'analogie de l'amibe qui absorbe ses voisines, l'auteur montre que les superorganismes humains, guidés par leurs mèmes, cherchent constamment à croître en s'appropriant les ressources des autres.

Il cite divers exemples historiques où la morale et la religion ont servi de prétextes, d’alibis aux conquêtes. Comme le marxisme : une promesse de redistribution des richesses des capitalistes… mais aussi une justification à l’expropriation. Ou encore les conquêtes hébraïques ou musulmanes : des guerres présentées comme sacrées, qui masquaient un besoin d’expansion territoriale.

Bref, pour Howard Bloom, la morale est l’emballage idéologique d’un appétit territorial : derrière chaque croisade morale se cache un simple désir d'expansion et de domination.

  1. Les Chiites

Dans ce chapitre, Howard Bloom démonte l’idée selon laquelle les conflits religieux seraient purement théologiques. Il analyse comment l'idéologie masque, en réalité, les luttes de pouvoir au sein même des sociétés.

À travers deux exemples historiques majeurs, l'auteur montre comment des tensions sociales se transforment en conflits idéologiques :

Exemple 1 : la révolution bolchévique. Le discours de Lénine contre les "classes possédantes" justifia le pillage et la redistribution du pouvoir.

Exemple 2 : le schisme entre Chiites et Sunnites dans l'Islam primitif qui, sous couvert de querelle religieuse, cachait en réalité un affrontement de classes entre ruraux pauvres et citadins aisés, avec pour enjeu le contrôle des ressources.

Et pour Howard Bloom, l'histoire se répète : les attaques terroristes chiites modernes contre l'Occident suivent le même schéma d'une lutte sociale déguisée en conflit religieux.

  1. La poésie et le désir du pouvoir

Howard Bloom se penche ensuite sur des domaines qu’on imagine neutres voire nobles comme la médecine et la poésie pour montrer comment même ceux-ci peuvent également masquer des luttes de pouvoir entre groupes sociaux.

L'auteur illustre son propos à travers deux exemples :

L'élimination de l'homéopathie par les médecins allopathes au XIXe siècle, non pas par pur souci scientifique, mais pour conserver leur monopole institutionnel.

La poésie d'Horace dans la Rome antique qui, sous couvert d'idéal bucolique, délégitimait subtilement le système politique dont il était exclu.

Ainsi, pour Howard Bloom, ces cas démontrent que même les plus nobles expressions culturelles sont traversées par des dynamiques d’exclusion et de rivalité, et peuvent dissimuler des ambitions de domination sociale.

  1. Lorsque les mèmes entrent en conflit : L’ordre de préséance des nations

Howard Bloom examine ici le phénomène de hiérarchie sociale à travers les espèces. Plus précisément, il montre que les conflits entre idéologies suivent les mêmes logiques hiérarchiques que celles observées dans le règne animal.

Pour mieux comprendre, l'auteur revient sur les travaux du naturaliste Schjelderup-Ebbe qui a mis en évidence l'existence d'un "ordre de préséance" chez les poulets, un système que l'on retrouve chez de nombreuses espèces.

Il fait alors remarquer que la position dans cette hiérarchie influence profondément la physiologie et le comportement : de la production hormonale à l'espérance de vie, en passant par le succès reproductif.

Mais ce principe ne s’arrête pas à la basse-cour, assure l’auteur : il est universel. Les humains, les sociétés, et même les nations, s’organisent en hiérarchies de dominance. Les civilisations victorieuses imposent leurs mèmes aux autres. Ceci explique l'influence durable de certaines civilisations sur d’autres.

Rome, par exemple, ne s’est pas contentée de vaincre militairement : elle a diffusé sa langue, son droit, son mode de pensée.

Ainsi, les mèmes du dominant deviennent la norme. Et c’est ainsi que s’écrit l’histoire.

  1. Les poulets "hauts placés" se font des amis

Dans ce chapitre, Howard Bloom développe l’idée suivante : le rang détermine les alliances.Comme chez les poules, où les individus les mieux placés dans la hiérarchie sociale attirent les faveurs et les soutiens, les sociétés humaines fonctionnent selon les mêmes lois implicites de dominance. Ainsi, le succès attire les alliés tandis que le déclin les fait fuir.

L’histoire de Carthage et de Rome en est un parfait exemple. Lorsque Carthage dominait la Méditerranée, elle était entourée d’alliés puissants. Mais dès que Rome a pris l’ascendant, ces alliances se sont effondrées comme un château de cartes. Les peuples ont basculé dans le camp du plus fort, ou de celui qui semblait l’être.

Howard Bloom étend cette logique à l'époque contemporaine en analysant la Guerre Froide. Le lancement du satellite soviétique Spoutnik a marqué, symboliquement, la montée de l’URSS dans la hiérarchie mondiale. Résultat : de nombreux pays du tiers-monde, jusque-là alignés sur les États-Unis, ont commencé à se rapprocher du bloc soviétique.

En résumé, pour l’auteur du "Principe de Lucifer", c’est une dynamique universelle : la position dans l’ordre mondial détermine la survie d’un superorganisme. Être vu comme dominant attire soutien, ressources et influence. Le déclin, en revanche, isole.

  1. Les visions du monde en tant que fer à souder de la chaîne hiérarchique

Howard Bloom étudie comment les systèmes de croyances légitiment et perpétuent ces hiérarchies sociales.

Il s’intéresse à l’exemple de l’hindouisme, qu’il analyse non seulement comme une religion, mais comme un outil politique raffiné.

Selon lui, ce système de pensée a permis de justifier la domination des envahisseurs aryens sur les populations indiennes conquises. Le système des castes, observe Howard Bloom, n’a pas simplement organisé la société : il a transformé une conquête militaire en ordre social inattaquable divinement ordonné, gravé dans la spiritualité même de la culture.

Ce phénomène, ajoute l’auteur, ne se limite pas à l’Inde. Toutes les grandes civilisations se sont servies de leurs idéologies et religions pour sanctifier les privilèges des classes dominantes issues d’anciennes conquêtes. Elles les ont utilisées comme des "fers à souder", pour maintenir l’ordre hérité de la violence initiale. C’est ainsi que les élites, souvent issues de conquérants, légitiment leur position : non par la force brute, mais par des récits sacrés ou idéologiques de droit divin, de mérite moral, ou de supériorité culturelle.

Au fond, les croyances façonnent non seulement ce que nous voyons comme "juste" ou "naturel", mais aussi l’architecture invisible des dominations sociales.

Partie 8 : Qui sont les prochains barbares ?

  1. Le principe Barbare

Cette partie du "Principe de Lucifer" démontre que la domination dans l'ordre de préséance n'est jamais définitive. Ainsi, aucune civilisation ne reste éternellement au sommet. Les superorganismes dominants finissent toujours par être renversés, souvent par ceux qu’ils ont méprisés ou ignorés.

Howard Bloom développe cette idée que les grandes civilisations sont régulièrement renversées par des peuples "barbares" qu'elles méprisaient, avec une série d’exemples frappants : l’Égypte conquise par les Hyksos, Babylone tombant face aux Perses, la Perse vaincue par les Grecs... Et plus récemment, l’ascension de l’Allemagne surpassant la France, ou encore celle des États-Unis et de la Russie devenant les nouvelles puissances du XXe siècle.

Conclusion de l’auteur : le mépris des superpuissances les rend aveugles et leur suffisance vulnérables face à des adversaires sous-estimés mais déterminés.

  1. Existe-t-il des cultures tueuses ?

Dans ce chapitre, Howard Bloom aborde frontalement l'existence de cultures qui glorifient la violence et le meurtre.

Il s’attaque en particulier au fondamentalisme islamique moderne, en analysant son expansion et sa rhétorique belliqueuse. À travers les écrits de l'Ayatollah Khomeini et d'autres leaders religieux, Howard Bloom montre comment certaines interprétations de l'Islam prônent ouvertement la guerre contre les "infidèles".

L’auteur souligne, par ailleurs, l'influence croissante de cette idéologie : les mouvements fondamentalistes gagnent du terrain dans de nombreux pays, de l'Afrique à l'Asie, en passant par l'Occident. Il conteste les universitaires qui minimisent cette menace en arguant de la diversité de l'Islam. Pour lui, même une minorité violente peut prendre le contrôle d'une société, comme l'ont prouvé les nazis en Allemagne.

Howard Bloom s'inquiète également de la combinaison de cette idéologie expansionniste avec l'accès aux armes modernes, y compris nucléaires, qui pourrait selon lui menacer la survie même des sociétés occidentales..

  1. La violence en Amérique du Sud et en Afrique

Howard Bloom élargit sa réflexion en étudiant la violence endémique dans d’autres régions du monde, au-delà du fondamentalisme islamique :

En Amérique latine, il met en évidence des formes de brutalité politique et sociale antérieures à l’influence américaine : dictatures sanglantes, guérillas, meurtres de masse.

En Afrique, il décrit comment de nombreux dirigeants post-coloniaux ont perpétré des politiques de terreur, voire de génocide, contre certaines ethnies ou opposants politiques.

Howard Bloom n’épargne pas non plus l’Occident : l’histoire des États-Unis, marquée par l’extermination des Amérindiens, montre que toutes les sociétés portent en elles un potentiel de barbarie.

Mais pour lui, la différence tient à la manière dont une culture gère ce potentiel. Certaines sociétés cherchent à canaliser la violence par le droit, le dialogue, les institutions démocratiques. D’autres, au contraire, valorisent le meurtre comme mode de régulation sociale.

Sa conclusion : il est vital de préserver et promouvoir les valeurs démocratiques des sociétés qui privilégient le dialogue à la violence.

  1. L’importance de l’étreinte

Dans ce chapitre, Howard Bloom explore une possible origine psychologique de la violence culturelle : il affirme que le manque d'affection physique dans l'enfance corrèle avec la violence à l'âge adulte.

En effet, l’auteur s’appuie ici sur les travaux du chercheur James W. Prescott, qui a étudié 49 sociétés primitives, pour établir un constat : plus les contacts affectifs sont absents pendant l’enfance, plus ces cultures valorisent la violence à l’âge adulte.

Howard Bloom applique cette théorie à la société islamique traditionnelle, qui serait marquée, selon lui, par une certaine froideur paternelle et par la répression des gestes d’affection, en particulier entre hommes et femmes.

Il rapproche ce modèle de l’Angleterre puritaine des XVIe et XVIIe siècles, où la distance affective envers les enfants allait de pair avec une société rigide et brutale.

Pour Howard Bloom, le message est clair : le lien physique, l’étreinte, n’est pas un détail affectif, c’est une fondation biologique de la paix sociale. L’absence d’amour incarné peut engendrer des générations prêtes à haïr.

  1. Le mystère de la suffisance

Howard Bloom s’attaque ici à un piège dans lequel tombent toutes les civilisations dominantes : la suffisance, cette certitude arrogante d’être à l’abri.

Il nous met alors en garde contre les dangers de cet excès de confiance, de cette autosatisfaction, qui peut mener, lance-t-il, à la chute des civilisations.

Il évoque, comme exemple, la Chine impériale, qui, deux fois dans son histoire, a été envahie peu après avoir désarmé, convaincue que sa grandeur la protégeait. Il cite aussi Byzance, rongée de l’intérieur par ses querelles intestines avant sa conquête par l’Empire islamique.

Howard Bloom établit aussi un parallèle audacieux avec l’Occident contemporain. Selon lui, nos débats internes passionnés nous aveuglent, au point de ne plus voir les menaces extérieures se profiler, comme l'illustre la réaction américaine à l'attentat contre les Marines au Liban en 1983.

En bref, la suffisance, selon l’auteur du "Principe de Lucifer" n’est pas un confort, c’est un aveuglement. Et c’est souvent ce qui précède la chute.

  1. Mieux vaut être pauvre et avoir du prestige qu’être riche et en disgrâce

Dans ce chapitre, Bloom déconstruit les présupposés des politiques d’aide internationale occidentales. Il explique que dans de nombreuses cultures, recevoir des dons est perçu comme une humiliation, car cela confirme leur position inférieure dans la hiérarchie mondiale.

À travers des exemples historiques et anthropologiques - des rituels de Nouvelle-Guinée à l'Iran moderne - Howard Bloom démontre que le prestige et le statut sont souvent plus importants que le bien-être matériel.

Il raconte comment, malgré l'amélioration considérable de leur niveau de vie sous le Shah pro-américain, les Iraniens ont préféré suivre Khomeini qui leur rendait ce que l’argent ne pouvait acheter : la dignité et la fierté de se considérer moralement supérieurs face à l'Occident.

Dès lors, pour Howard Bloom, la quête de prestige des nations du tiers-monde implique nécessairement la volonté d'abaisser leurs "bienfaiteurs" occidentaux dans l'ordre de préséance mondial. L’enjeu est donc moins économique que symbolique : le respect, dans l’ordre mondial, est un besoin aussi vital que le pain.

  1. Pourquoi la prospérité n’entraînera pas la paix

Dans ce chapitre, Howard Bloom réfute l'idée que l'amélioration du niveau de vie, autrement dit la richesse et le confort, mènerait naturellement à la paix.

Au contraire, explique l'auteur, l'histoire montre que la prospérité nouvelle stimule souvent l'agressivité, comme ce fut le cas avec la Libye post-pétrolière ou avec les Mongols dont les conquêtes furent précédées par une montée en puissance économique.

Howard Bloom s'appuie sur la biologie pour expliquer ce phénomène. La prospérité agit comme un accélérateur hormonal, indique-t-il alors : elle élève les niveaux de testostérone, stimule l’excitation, renforce l’ambition… et réveille l’agressivité.

L'auteur compare ce mécanisme à celui du crapaud du désert, passif en temps normal, mais qui devient sexuellement et socialement actif uniquement lorsque les ressources sont abondantes.

Finalement, cette programmation biologique a des conséquences claires : apporter des ressources à une société n’éteint pas son potentiel conflictuel, elle peut même le réveiller. L’aide au développement, aussi bien intentionnée soit-elle, ne garantit donc en rien un monde plus paisible. La paix, affirme Howard Bloom, ne naît pas d’un plein ventre, mais d’un équilibre beaucoup plus complexe entre instincts, récits et structure sociale.

  1. La signification secrète de "Liberté", "Paix" et "Justice"

Pour clore la 8ème partie du "Principe de Lucifer", Howard Bloom revient sur trois grands idéaux qui traversent de nombreux discours politiques : Liberté, Paix, Justice. Mais derrière leur noblesse apparente, il dévoile une réalité plus cynique : ces termes servent souvent à maquiller des luttes pour le pouvoir dans l'ordre de préséance.

Il cite d’abord Vercingétorix, qui prêchait la "liberté gauloise"… tout en imposant sa propre tyrannie. Puis Khomeini, dont la "justice" islamique après la révolution iranienne s’est révélée plus brutale encore que le régime du Shah qu’elle prétendait combattre.

Pour Howard Bloom, la "paix" signifie souvent "maintenons le statu quo maintenant que je suis au sommet". La "justice", elle, devient le cri de ralliement de ceux qui veulent bousculer l’ordre établi pour grimper dans la hiérarchie. Quant à la "liberté", elle peut dissimuler une volonté de contrôle plus rusée encore que l’oppression.

Au final, ces concepts fonctionnent fréquemment comme des outils idéologiques au service des superorganismes sociaux : ils permettent de légitimer leur expansion, de rallier les foules, et de gagner des points dans l’ordre de préséance global.

Partie 9 : L’ascension et la chute de l’empire Américain

  1. Le déclin victorien et la chute de l’Amérique

Dans ce nouveau chapitre, Howard Bloom établit un parallèle saisissant entre le déclin de l'Empire britannique à la fin du XIXe siècle et les États-Unis aujourd’hui.  

L'auteur analyse comment la Grande-Bretagne victorienne, alors au sommet de sa puissance, a perdu sa suprématie en négligeant les nouvelles technologies émergentes (chimie, électricité) au profit de ses acquis industriels. Pendant que l'Allemagne et les États-Unis s'emparaient de ces innovations pour bâtir l’avenir, les industriels britanniques, aveuglés par leur autosatisfaction, s'accrochaient aux anciennes technologies et misaient sur leur force militaire.

Howard Bloom voit les mêmes signes de déclin dans l'Amérique contemporaine : chute de la production mondiale, déficits croissants, système éducatif défaillant et surtout incapacité à transformer ses innovations en produits commerciaux.

Pour l'auteur, comme la Grande-Bretagne qui perdit sa domination au profit de nations plus innovantes, les États-Unis risquent de décliner face à des concurrents plus dynamiques, comme notamment le Japon, en oubliant que la vraie puissance réside dans l'innovation continue plutôt que dans la force militaire.

Ainsi, le message de l’auteur est clair : la vraie suprématie ne vient pas des armes, mais de la créativité. Et une nation qui cesse d’innover, même si elle reste militairement redoutable, finit toujours par perdre son rang.

  1. Les boucs émissaires et l’hystérie sexuelle

Howard Bloom analyse ensuite comment les sociétés en déclin cherchent systématiquement des boucs émissaires symboliques, souvent liés à la culture ou à la sexualité.

Pour cela, il compare deux périodes de l’Histoire : l'Angleterre de la fin de l’ère victorienne qui, face à son déclin économique, persécuta Oscar Wilde et fustigea l’art moderne sous la plume de Max Nordau, et l'Amérique contemporaine qui, confrontée à sa perte de puissance, s'attaqua au rock, au sexe et à la contre-culture à travers des figures comme Allan Bloom (auteur du célèbre "The Closing of the American Mind").

Dans les deux cas, ces hystéries morales masquent surtout une réalité bien plus embarrassante. Elles servent, nous dit l’auteur, à détourner l'attention des véritables causes du déclin : l’échec de l'innovation technologique, la stagnation économique, la peur de perdre le contrôle.

  1. Les rats de laboratoire et la crise pétrolière

Howard Bloom met ici en lumière un mécanisme psychologique à l’œuvre dans toutes les sociétés : le "transfert d'agression". Ce phénomène se produit lorsque, face à une menace qu'ils ne peuvent affronter, les individus et les groupes s'en prennent à des cibles plus faibles.

L’auteur illustre ce comportement avec une expérience réalisée sur des rats de laboratoire : mis sous stress, les rats se battent… non pas contre la source du stress, mais entre eux.

Ce même schéma se retrouve à l’échelle des nations. Howard Bloom cite l’Amérique de l’après-guerre qui, impuissante face à l’expansion soviétique, retourna son agressivité contre ses propres citoyens avec le maccarthysme, puis contre ses alliés, comme lors de la crise de Suez.

Pour l’auteur, cette tendance à chercher des boucs émissaires finit souvent par nuire à ceux qui l'exercent : elle fragilise la cohésion intérieure, isole sur la scène internationale, et accélère le déclin de ceux qui y cèdent.

  1. Pourquoi les nations font-elles semblant d’être aveugles ?

Dans ce chapitre, Howard Bloom s’intéresse à un mécanisme aussi ancien que le monde : le déni des puissances en déclin face aux menaces montantes.

Il commence par observer un comportement étonnamment fréquent chez les animaux : faire comme si tout allait bien pour préserver son statut un peu plus longtemps. Du berger allemand qui évite de croiser le regard d’un chien plus gros aux chimpanzés vieillissants qui ignorent ostensiblement leurs rivaux, l’auteur fait remarquer que ce refus de voir est, en fait, une stratégie de survie sociale profondément ancrée dans le règne animal.

Howard Bloom applique cette analyse aux nations : il fait, par exemple, observer que l’Amérique des années 1930, affaiblie par la crise, a fermé les yeux sur les provocations japonaises jusqu’à l’attaque de Pearl Harbor. À l’inverse, il mentionne les puissances montantes, comme la Prusse de Bismarck qui, sûre de sa force, cherchait activement la confrontation pour affirmer son rang.

Selon l'auteur, le déni actuel des États-Unis face aux crises internationales (comme le génocide cambodgien) est le symptôme d’une puissance sur le déclin qui préfère détourner le regard que d’admettre sa vulnérabilité, qui feint de ne pas voir pour ne pas perdre la face. De la même façon que le vieux chimpanzé feint de ne pas voir ses rivaux pour préserver son statut.

  1. Comment l’ordre de préséance refaçonne l’esprit

Dans ce chapitre, Howard Bloom va plus loin. Il analyse comment le rang d’une nation dans la hiérarchie mondiale influence profondément son rapport à la nouveauté.Il tire une observation simple du comportement des oiseaux qui évitent l'inconnu quand ils ont faim mais l'explorent quand ils sont rassasiés. C’est exactement ce que font les sociétés : celles en déclin se replient sur les traditions tandis que celles en ascension embrassent l'innovation.

Howard Bloom compare l’Amérique des années 1960, audacieuse, inventive, portée par le rock contestataire et l’anticonformisme, à celle des années 1980, marquée par un retour au conservatisme et à la tradition. Selon lui, cette bascule reflète une perte de confiance dans sa propre position dans l’ordre mondial, un sentiment de déclin national.

Autrement dit, l’innovation n’est pas qu’une affaire de technologie, c’est aussi une expression directe de la position dans la hiérarchie planétaire.

  1. La fermeture perceptuelle et l’avenir de l’Amérique

Howard Bloom poursuit avec un avertissement : il met en garde contre le danger du déni face au déclin.

Il décrit ce qu’il appelle la fermeture perceptuelle : un processus par lequel les individus - et les sociétés - cessent de voir la réalité quand celle-ci devient trop menaçante ou trop inconfortable.

L’auteur rapporte plusieurs expériences menées sur des rats : lorsque ceux-ci se retrouvent dans un environnement qu’ils ne peuvent ni contrôler ni comprendre, ils finissent par s’enfermer dans une résignation aveugle, et cessent toute exploration ou tentative de changement.

Howard Bloom y voit un parallèle évident avec l’Amérique contemporaine qui refuse de reconnaître sa perte de leadership technologique et économique et préfère croire qu’elle est toujours au sommet malgré l’effondrement de multiples indicateurs à ce sujet.

Il compare cette attitude à celle de la Chine impériale, qui, se croyant invincible, s’est isolée du monde, a refusé l’innovation… et a fini par succomber aux puissances occidentales qu’elle méprisait.

Selon l'auteur, si les États-Unis continuent de nier leur propre déclin, ils connaîtront le même sort que toutes les grandes puissances trop sûres d’elles-mêmes. Non pas à cause d’un ennemi plus fort, mais à cause d’un aveuglement choisi.

  1. Le mythe du stress

Dans ce chapitre, Howard Bloom déconstruit l’idée reçue selon laquelle le stress lié à la compétition et à l'ambition serait nocif.Pour lui, ce n’est pas la compétition ou l’ambition qui détruisent, au contraire. Ce qui mine réellement l’être humain, ce sont la perte de liens sociaux, le sentiment d’impuissance et la chute dans la hiérarchie.

Le défi et l'activité sont vitaux pour notre épanouissement tant physiologique que psychologique, tandis que l’inaction, l’isolement et la dévalorisation sociale sont nos véritables sources de souffrance.

Il oppose à l’Amérique contemporaine, obsédée par la détente, la relaxation, et le bien-être passif, le modèle japonais, où le travail intense et l’effort sont valorisés.Et paradoxalement, malgré une pression sociale forte, les Japonais affichent une meilleure santé globale que les Américains.

Le vrai poison, selon Howard Bloom, n’est pas le stress… c’est le vide. Ce que notre organisme réclame, ce n’est pas moins de pression, mais un objectif, une place, une raison de lutter.

  1. L’heure du tennis et l’horloge mentale

Howard Bloom conclut l’avant-dernière grande partie de son livre "Le Principe de Lucifer" en explorant le tempo psychologique des civilisations. Autrement dit, comment le rythme mental d'une société reflète sa position dans l'ordre de préséance.

Il compare les sociétés à des crapauds du désert, capables d’alterner entre des phases de torpeur, de léthargie et des phases d’hyperactivité selon les conditions. Ainsi, les civilisations qui montent battent la mesure sur une "horloge rapide" : elles innovent, créent, se projettent vers l’avenir. Celles qui déclinent, en revanche, ralentissent, s’ancrent dans la nostalgie, cherchent la sécurité plutôt que l’élan.

Howard Bloom évoque, à ce propos, l’Amérique contemporaine : son tempo s’alourdit, son énergie se dissipe. Il en appelle alors à une réaccélération de l’esprit collectif. Et pour cela, il propose de se tourner vers une nouvelle frontière : l’espace.Explorer l’espace, dit-il, ne serait pas seulement une avancée technologique. Ce serait un échappatoire possible face à notre tendance biologique à la violence, une opportunité de coopération mondiale, et une manière de réactiver le dynamisme qui fait progresser les civilisations.

Le message d’Howard Bloom est ici à la fois stratégique et existentiel : pour rester vivante, une société doit garder le rythme du mouvement, de l’exploration, et de l’audace.

Partie 10 : Le paradoxe luciférien

  1. Le Principe de Lucifer

Dans la dernière partie du "Principe de Lucifer", Howard Bloom livre sa conclusion finale sur la nature ambivalente du superorganisme social : pour lui, le superorganisme, bien que brutal, est la condition de toute avancée humaine.

À travers l’exemple de l’Empire romain, à la fois cruel et fondateur de progrès durables, l’auteur montre que la violence n’est pas l’opposé du progrès, mais parfois son moteur. Que le superorganisme permet un niveau d'organisation et de progrès impossible aux individus isolés.

Ainsi, les grandes réalisations humaines ne sont pas le fruit de héros solitaires, mais bien de structures collectives (superorganismes) capables de mobiliser des millions d’individus autour d’un récit commun.

En résumé, pour Howard Bloom, trois grandes forces façonnent l'histoire humaine :

Le superorganisme (la société organisée comme un corps collectif),

Les mèmes (les idées contagieuses qui nous gouvernent),

L’ordre de préséance (la hiérarchie invisible qui règle les rapports de domination).

C’est cette "trinité", à la fois créatrice et destructrice, que l’auteur nomme le Principe de Lucifer : une dynamique évolutive où la beauté, la culture et la coopération naissent… de la lutte, du conflit, et de l’ombre

  1. Epilogue

Dans l'épilogue du "Principe de Lucifer", Howard Bloom confronte deux visions de l'évolution : celle d’un univers condamné à la décadence, et la sienne, celle d’une nature en perpétuelle complexification.

Il observe que cette progression a cependant un coût : l’évolution est un processus dur, souvent impitoyable. Comme un sculpteur taille dans la matière brute, la nature crée en détruisant. Chaque avancée, du simple organisme à la conscience humaine, s’est faite, en effet, au prix de souffrances, de luttes, de dominations.

Mais, pour Howard Bloom, si la violence et la compétition sont inscrites dans notre code biologique, l’imagination humaine nous offre une échappatoire. Nous avons, dit-il, la capacité unique de rêver la paix et de tenter de la bâtir. C’est là notre défi, et notre responsabilité : transformer notre héritage luciférien en projet collectif de dépassement. Non pas nier notre nature, mais l’orienter. Faire de notre imagination la force qui dompte nos instincts et élève notre humanité.

Conclusion de "Le principe de Lucifer | Une expédition scientifique dans les forces de l’Histoire !" de Howard Bloom

Les 4 idées clés à retenir absolument du livre "Le principe de Lucifer"

  1. L’agressivité et la violence font partie intégrante de notre évolution biologique

"Le principe de Lucifer" nous explique clairement que l’agressivité humaine n’est ni accidentelle ni anormale. Au contraire, elle constitue, assure l’auteur, un mécanisme biologique profondément inscrit dans notre ADN.

Aussi, pour Howard Bloom, la compétition, le conflit et les instincts de domination ne sont pas seulement des défauts de caractère, mais de véritables moteurs de l’évolution des sociétés. "La violence n’est pas l’exception à la règle, elle est la règle elle-même" affirme-t-il, pour souligner combien notre évolution est façonnée par ces forces destructrices autant que créatrices.

  1. Les sociétés se comportent comme des superorganismes guidés par des forces invisibles

Dans "Le principe de Lucifer", Howard Bloom partage une analogie intéressante : les sociétés humaines, soutient-il, fonctionnent comme des superorganismes. Elles obéissent à des logiques collectives qui dépassent la conscience individuelle : chaque individu contribue ainsi inconsciemment à une dynamique collective, parfois violente.

Selon lui, ces mécanismes sociaux s’apparentent aux réseaux neuronaux. Influencés par des forces invisibles comme les mèmes, ces "virus mentaux" propagent idées et orientent les comportements de masse à notre insu.

Ainsi, des concepts tels que le pouvoir, la hiérarchie et l’influence naissent d’interactions subtiles qui échappent souvent à notre conscience.

  1. L’homme a besoin de rivaux pour construire son identité et maintenir l’ordre social

Une des idées fortes du livre est la nécessité presque vitale, et depuis toujours, d’un ennemi pour structurer les sociétés.

Howard Bloom explique, en effet, tout au long de son livre comment le groupe se consolide autour de l’idée du "nous contre eux", et comment la haine et la désignation d’un adversaire commun renforcent paradoxalement la cohésion interne. En d’autres termes, l’hostilité envers un ennemi désigné, qu’il soit externe ou interne, agit comme un ciment social et un moteur de mobilisation collective.

L’auteur démontre que la haine envers l’autre n’est pas une anomalie temporaire, mais un mécanisme de survie profondément enraciné dans notre nature sociale.

  1. Les mèmes façonnent nos croyances et influencent directement nos comportements collectifs

"Le principe de Lucifer" nous révèle enfin le rôle fondamental des mèmes : ces unités culturelles transmissibles façonnent nos idées, nos croyances, nos comportements et donc finalement le cours de l’histoire.

Howard Bloom montre plus précisément comment ces mèmes agissent comme des réplicateurs autonomes, parfois bénéfiques, parfois destructeurs. En influençant notre perception du monde, ilspeuvent ainsi guider une civilisation entière vers la paix ou la guerre. Ces croyances, explique-t-il, deviennent, en effet, parfois si puissantes qu'elles dominent notre capacité à raisonner, et génèrent conflits ou harmonie selon leur nature et leur diffusion dans la société.

Qu’est-ce que vous apprendrez dans le livre "Le principe de Lucifer" ?

"Le Principe de Lucifer" est un livre qui change la perspective. Il vous apportera une grille de lecture nouvelle - et d’une certaine façon dérangeante - pour mieux comprendre l’Histoire humaine, les rapports de pouvoir, les conflits idéologiques et les mécanismes de domination.

En mêlant biologie, sociologie, psychologie et histoire, ce livre vous permettra de :

Déchiffrer les dynamiques collectives qui gouvernent les sociétés modernes et passées, et comment elles génèrent des conflits.

Comprendre pourquoi certaines idéologies triomphent et d’autres échouent.

Identifier les manipulations invisibles derrière les discours de paix, de justice ou de liberté et ce qu’elles affectent dans notre vie quotidienne, du plus intime au plus global.

Anticiper les conflits, les mécanismes de bouc émissaire et les formes de contagion émotionnelle dans les groupes.

En comprenant ces mécanismes, vous gagnerez en ouverture d’esprit, en analyse et en recul face aux événements mondiaux contemporains et historiques, ce qui peut être particulièrement utile pour elles et ceux qui souhaitent mieux saisir les tensions géopolitiques ou améliorer leur vie sociale et professionnelle en comprenant les jeux de pouvoir et de domination implicites autour d'eux.

Dès lors, cette lecture fournit des outils précieux pour anticiper les réactions humaines dans les conflits, identifier les manipulations et comprendre comment agir pour évoluer positivement dans un environnement complexe et parfois hostile.

Pourquoi je recommande la lecture du livre "Le principe de Lucifer" d'Howard Bloom ?

La lecture de "Le Principe de Lucifer" nous apprend que comprendre la violence, c’est comprendre l’humanité.

En effet, comprendre la violence et l'agressivité humaines est indispensable pour appréhender clairement le fonctionnement du monde et des sociétés dans lesquelles nous vivons.

Malgré un ton parfois déroutant par son réalisme cru, ce livre nous oblige à dépasser nos visions naïves ou moralisantes sur la nature humaine pour affronter ce que nous sommes vraiment, individuellement et collectivement.

Mais loin de prôner le fatalisme, il nous donne des clés pour mieux décrypter les dynamiques sociales, politiques et interpersonnelles et ainsi transformer notre conscience en levier d’action.

"Le principe de Lucifer" est une lecture incontournable pour les passionnés d’histoire, de géopolitique, de psychologie sociale, mais aussi pour quiconque souhaite aller au-delà des apparences et comprendre ce qui véritablement, en tout cas aux yeux d’Howard Bloom, anime notre monde.

Points forts :

Une approche interdisciplinaire brillante et sourcée combinant psychologie sociale, biologie et histoire.

Une explication captivante des mécanismes cachés derrière l’agressivité et la violence humaine.

Un éclairage inédit sur plusieurs concepts, dont celui de superorganisme et l’impact des mèmes dans les sociétés humaines.

Une écriture vive et percutante qui marque durablement les esprits.

Points faibles :

Un contenu ou ton parfois provocateur qui pourraient déranger certains lecteurs sensibles.

La complexité parfois de certaines théories biologiques qui pourrait ralentir les lecteurs non habitués à ces sujets.

Ma note :

★★★★★

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Mon, 07 Jul 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13066/Le-principe-de-Lucifer
La mise en scène du discours http://www.olivier-roland.fr/items/view/13052/La-mise-en-scne-du-discours

Résumé de "La mise en scène du discours | Porter sa parole en public de manière engageante et mémorable" d’Éric Bah : dans cet ouvrage, Éric Bah partage des stratégies oratoires en quatre étapes, allant de la préparation minutieuse d'une prise de parole en public jusqu'à la gestion des imprévus, en passant par l'entrée en scène et la maîtrise des techniques d'engagement. C’est un livre ultra concret, qui apprend à faire d'un discours non pas une simple allocution mais une expérience mémorable, capable de captiver l'attention et de créer une connexion authentique avec un auditoire.

Par Éric Bah, 2023, 250 pages.

Chronique et résumé de "La mise en scène du discours | Porter sa parole en public de manière engageante et mémorable" d'Éric Bah

Introduction

La première page du livre "La mise en scène du discours" nous plonge dans une histoire captivante : celle d'un homme pauvre recevant une graine qui, une fois arrosée de ses larmes, génère un arbre merveilleux.

Éric Bah établit un parallèle entre cette parabole et nos discours écrits : ce sont, lance-t-il, des textes "endormis" que nous devons réveiller. Ce sont des phrases qui s’enchainent, "des mots qui sommeillent, des mots qui attendent, pour prendre leur sens, que tu les réveilles, que tu y verses ta sincérité comme sur la graine du pauvre homme", écrit-il. Et cela passe par la mise en scène… "la mise en sons, en couleurs… en caresses, en odeurs…"

L'auteur rappelle ensuite que si les principes antiques d'art oratoire demeurent pertinents, notre époque impose de nouveaux défis face à la guerre de l'attention. Dans ce contexte, la mise en scène du discours devient cruciale pour capter l'intérêt d'un public constamment sollicité.

"La mise en scène du discours" est un livre qui promet donc un parcours complet pour transformer nos prises de parole en expériences mémorables.

Chapitre I - Veillée d'armes

Éric Bah commence le premier chapitre de son livre "La mise en scène du discours" en soulignant l'importance des derniers préparatifs avant une prise de parole.

Ces ultimes réglages concernent plusieurs aspects fondamentaux : l'éthos, le pathos, le style oratoire, les supports visuels, la préparation physique et la tenue vestimentaire.

1.1 - L'éthos

Dans cette partie, l'auteur examine le concept d'éthos, l'un des trois piliers de la rhétorique avec le logos et le pathos.

L'éthos représente la crédibilité de l'orateur et se compose de cinq vertus essentielles :

La sympathie,

La légitimité,

La pertinence,

L'intégrité,

La sincérité.

Éric Bah rappelle que l'éthos commence à se construire dès l'apparition de l'orateur sur scène, voire avant dans certains contextes. Il précise : "L'éthos t'impose d'abord comme autorité, avant de se solidifier peu à peu au service de ta persuasion". L'auteur insiste sur le fait que cette crédibilité n'est pas immuable et doit s'adapter à l'auditoire.

Pour se montrer sympathique, l'orateur doit afficher un air avenant, paraître détendu et bienveillant. La légitimité, quant à elle, permet d'installer rapidement la confiance en démontrant l'expertise nécessaire pour traiter le sujet. La pertinence consiste à aligner son approche avec les attentes spécifiques de l'auditoire. L'intégrité exige une cohérence entre les paroles et les actes, tandis que la sincérité implique d'exprimer des émotions réellement ressenties.

L'éthos peut être véhiculé par divers moyens : diplômes, expérience, relations, histoire personnelle, tenue vestimentaire, comportement, gestuelle ou choix rhétoriques.

L'auteur illustre son propos avec l'exemple de Simone Veil qui, dès le début de son discours sur la dépénalisation de l'IVG, pose les premières pierres de son éthos en une seule phrase.

1.2 - Le pathos

Ensuite, Éric Bah analyse l'importance des émotions dans l'art oratoire.

Le pathos désigne l'ensemble des émotions que l'orateur cherche à susciter chez son auditoire pour persuader et pousser à l'action.

L'auteur s'appuie sur les travaux du neurologue Antonio Damasio pour affirmer que les émotions influencent puissamment la prise de décision, l'attention, l'apprentissage et la mémorisation. Il raconte : "Tous les fans d'Elvis Presley, de Bob Marley ou de Michael Jackson peuvent dire ce qu'ils faisaient au moment de l'annonce de la mort de leur idole", illustrant ainsi comment l'émotion stimule la mémoire.

Pour exciter les passions, Éric Bah présente trois techniques principales :

La description => montrer l'émotion plutôt que la dire ;

L'amplification => augmenter l'intensité émotionnelle ;

La matérialisation => recourir à des objets ou à des témoignages.

L'auteur conseille de procéder par contraste émotionnel pour éviter la saturation, et de suivre une progression croissante jusqu'au finale. Il souligne que pour toucher les autres, l'orateur doit d'abord être touché lui-même. À ce propos, il cite Quintilien : "On n'est échauffé que par le feu et mouillé que par l'eau".

1.3 - Avec style

Dans cette partie, l'auteur explique que le style est ce qui donne du relief au discours et traduit l'originalité de l'orateur. Il rappelle que si le texte peut emporter l'approbation, c'est le style qui provoque l'admiration.

Éric Bah distingue trois styles oratoires, suivant la tradition cicéronienne :

Le style simple => conversationnel, objectif, pour instruire.

Le style tempéré => léger, humoristique, pour plaire.

Le style sublime => solennel, émotionnel, pour émouvoir.

Pour illustrer ces styles, l'auteur donne des exemples concrets : la narration de l'avocat Berryer pour le style simple, l'introduction humoristique du chef d'orchestre Benjamin Zander pour le style tempéré, et le discours d'André Malraux lors du transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon pour le style sublime.

L'auteur aborde ensuite les figures de style qui enrichissent le discours, en se concentrant sur les plus utiles en improvisation :

Les figures de répétition => anaphore, épiphore,

Les figures antithétiques => oxymore, antithèse,

Les figures d'amplification => hyperbole, gradation,

Les questions rhétoriques.

Pour finir cette partie sur le style, Éric Bah évoque l'importance des punchlines, ces phrases-chocs qui marquent les esprits, et présente le concept italien de "sprezzatura" : cette grâce qui émane d'un orateur capable de paraître naturel tout en maîtrisant parfaitement son art.

1.4 - Les supports visuels

L'auteur passe en revue les différents supports visuels qui peuvent accompagner un discours :

Pour le diaporama, il conseille de rester l'acteur principal et de maintenir le contact visuel avec l'auditoire. Il met en garde : "Ne te sers pas du grand écran comme d'un prompteur. Ne lis pas, parle."

Concernant la vidéo, il recommande de privilégier des formats courts et d'expliquer ce qu'il faut en retirer.

Éric Bah présente également le tableau blanc, utile pour noter des idées ou faire des croquis, mais dont le caractère éphémère nécessite une bonne gestion de l'espace.

Le paperboard, quant à lui, peut servir à afficher le plan du discours ou à noter des mots compliqués, des chiffres ou des schémas.

Enfin, l'auteur mentionne la tablette graphique et les accessoires, citant l'exemple de Steve Jobs qui, pour présenter le MacBook Air, utilisa simplement une enveloppe de bureau.

1.5 - Préparation physique

Dans cette partie, Éric Bah nous invite à prendre soin de notre corps avant une prise de parole. Il recommande un dîner léger la veille pour faciliter le sommeil et consacre plusieurs paragraphes aux temps de digestion des différents aliments.

L'auteur insiste sur l'importance d'une bonne nuit de repos et conseille de programmer son réveil en fonction de ses cycles de sommeil personnels.

Éric Bah vante également les mérites des exercices d'assouplissement, particulièrement ceux du yoga, qui offrent de nombreux avantages avant une intervention oratoire : ils augmentent l'endurance, améliorent la posture, réduisent le stress, stimulent les fonctions cognitives et renforcent la confiance en soi.

1.6 - De la tenue

L'auteur affirme que la tenue vestimentaire donne une première impression avant même que l'orateur ait ouvert la bouche. Il rappelle, à ce propos, l'importance de s'adapter au contexte tout en gardant à l'esprit que "ton message est plus important" que ta tenue.

Éric Bah partage une check-list détaillée qui couvre tous les aspects de l'apparence : du couvre-chef (à éviter) aux chaussures (discrètes et bien entretenues), en passant par les cheveux, les lunettes, le maquillage, les bijoux, les tatouages et les piercings.

1.7 - Avant de partir

Dans cette dernière section, l'auteur met en garde contre un repas trop copieux avant une intervention : "l'afflux de sang dans ton abdomen dû à la digestion priverait ton cerveau de la quantité de sang nécessaire à la vivacité d'esprit que demande une allocution".

Il conseille de préparer une check-list complète incluant les tenues vestimentaires, le matériel, la connectique, les accessoires et les documents nécessaires.

Enfin, Éric Bah aborde le concept de "fatigue décisionnelle", s'appuyant sur les propos de Barack Obama et les recherches du psychologue Roy Baumeister. Il recommande de limiter au maximum les décisions à prendre le jour de l'intervention pour rester en pleine possession de ses moyens.

Chapitre II - En position

Le chapitre 2 du livre "La mise en scène du discours" porte sur cette période critique entre l'arrivée sur le lieu de l'intervention et l'entrée en scène.

Éric Bah attire l’attention sur l’importance d'arriver suffisamment en avance pour peaufiner les derniers détails qui feront la différence dans votre prestation.

2.1 - À l'arrivée

L'auteur recommande de rencontrer le maître de cérémonie dès votre arrivée pour valider plusieurs éléments essentiels : votre présentation, l'heure exacte de passage et la durée de votre intervention. Il précise : "Assure-toi qu'il sera en mesure de te présenter comme tu l'entends".

Concernant la disposition de la salle, Éric Bah présente différentes configurations possibles (théâtre, U, cercle, école, etc.) en analysant pour chacune sa capacité d'accueil, la visibilité offerte et la facilité d'échanges entre participants. Il conseille également de prendre possession de l'espace scénique en répétant vos déplacements et en vérifiant les aspects techniques (éclairage, son, gestion du temps).

2.2 - Dernières répétitions

Pour ces ultimes répétitions, l'auteur distingue trois phases :

La répétition en solo, où vous pouvez encore ajuster quelques détails sans bouleverser la structure.

Les essais avec la régie son.

La validation du déroulé complet avec le maître de cérémonie.

Entre ces préparatifs et l'ouverture des portes, il est judicieux de s'accorder un moment de repos pour faire descendre la pression. Éric Bah conseille également d'accueillir personnellement le public pour créer un lien de confiance avant même de monter sur scène.

2.3 - Aie confiance !

Face au trac qui s'intensifie à l'approche de l'intervention, l'auteur rappelle qu'il s'agit d'un signe positif montrant l'importance accordée à sa prestation. Il note que "ce qui peut être le plus déstabilisant, c'est le regard des autres" et propose des techniques pour l'apprivoiser.

La visualisation positive constitue un outil puissant pour diminuer le stress et augmenter la confiance. L'auteur explique comment activer mentalement une ancienne situation de réussite avant de visualiser l'ovation finale souhaitée.

Éric Bah évoque également le phénomène d'habituation qui rend le trac de moins en moins paralysant avec l'expérience. Pour rester concentré, il préconise de limiter les distractions et propose l'usage de certaines huiles essentielles ou de techniques comme la cohérence cardiaque.

2.4 - Avant d'entrer en scène

Dans les derniers moments, l'auteur conseille de vérifier la durée exacte dont vous disposez (en ayant préparé des versions à 75 % et 50 % de votre discours) et de réactiver votre intention, c’est-à-dire ce que vous souhaitez que votre auditoire sache, pense ou fasse après vous avoir écouté.

Pour ces ultimes secondes, Éric Bah décrit deux approches :

Celle du dynamisme => exercices physiques, cris ;

Celle de la sérénité => respiration, méditation.

"Les deux approches sont efficaces pour évacuer le stress", conclut-il, l'essentiel étant de choisir celle qui correspond à votre tempérament.

Chapitre III - À l'assaut

Le moment tant attendu arrive - celui où l'orateur prend la parole devant son public. Éric Bah décrit cette étape comme celle où toute la préparation va enfin porter ses fruits. Il note que "le temps va passer tellement vite qu'il n'existera plus".

3.1 - L'entrée en scène

L'auteur nous invite à faire une dernière inspection avant d'entrer en scène. Idéalement, un assistant vérifiera que votre tenue est impeccable, car "comment veux-tu qu'un auditeur t'écoute sérieusement s'il note un détail insolite dans ta tenue ?" Il conseille également de vider ses poches pour éviter tout bruit parasite.

Pour l'entrée proprement dite, Éric Bah préconise de marcher avec assurance jusqu'au centre de la scène, puis de s'arrêter, dos droit, épaules relâchées. Il suggère d'imaginer des racines sortant de vos pieds pour plonger profondément dans le sol : "Plus stable grâce à cet ancrage, tu gagneras en énergie, en confiance, en autorité".

3.2 - Bien commencer

Selon l'auteur, bien commencer un discours tient en quatre lettres, résumées par l'acronyme ACIS :

Attention => D'abord, il faut attirer l'attention dans les trente premières secondes - délai critique pour convaincre l'auditoire de vous écouter jusqu'au bout.

Connexion => Ensuite, il convient d'établir la connexion avec le public pour permettre la transmission des informations et des émotions.

Intérêt => La troisième étape consiste à susciter l'intérêt en montrant à l'auditoire l'utilité de votre message pour lui.

Sujet => Enfin, il faut clarifier le sujet pour rassurer le public sur la direction que prendra le discours.

Éric Bah énumère ensuite les sept erreurs à éviter lors de l'ouverture :

Dire bonjour,

Se présenter,

S'excuser,

Remercier,

Démarrer en trombe,

Montrer de l'hésitation

Raconter sa préparation.

Il affirme : "Tu as la chance que des gens soient venus t'écouter. Fais-leur honneur en rentrant tout de suite dans le sujet".

3.3 - La connexion

Pour l'auteur, la connexion est ce "lien impalpable qui lie l'orateur à son public", fait d'empathie et de complicité.

Cette connexion doit idéalement se déployer sur trois dimensions :

Entre l'orateur et l'ensemble du public,

Entre les participants eux-mêmes,

Entre l'orateur et chacun des participants.

Pour tisser ces liens, plusieurs outils sont à notre disposition :

Adapter notre style (vocabulaire, ton) à notre auditoire sans nous renier,

Utiliser le sourire qui "est réellement contagieux",

Parler aux gens de ce qui les intéresse,

Utiliser le "nous" pour créer un sentiment d'appartenance,

Maintenir un contact visuel personnalisé avec différents membres de l'audience.

3.4 - La posture

L'auteur rappelle que "le corps est au service de la parole" et que posture et état d'esprit s'influencent mutuellement.

Il convient alors de se tenir droit, pieds légèrement écartés, en évitant tout balancement qui nuirait à l'ancrage et donnerait une impression d'instabilité.

Concernant la gestuelle, Éric Bah cite Sacha Guitry : "Tous les gestes sont bons quand ils sont naturels. Ceux qu'on apprend sont toujours faux". Il suggère de se concentrer sur deux éléments pour que la gestuelle suive naturellement : se sentir en confiance et travailler ses intonations vocales.

L'auteur met cependant en garde contre certains gestes parasites à éviter absolument : mains cachées, bras croisés, mains en cache-sexe, bras ballants, auto-contacts répétitifs et jeux avec les bijoux.

Pour les déplacements sur scène, il propose trois modes d'utilisation de l'espace :

Le mode structurel => changer de zone à chaque chapitre du discours.

Le mode temporel => utiliser la largeur de la scène comme ligne du temps (passé/présent/futur).

Le mode émotionnel => exploiter les réactions différentes du cerveau selon le côté visuel sollicité

L'auteur explique que pour toucher davantage l'émotion du public, il est préférable de se placer côté jardin, autrement dit dans le champ visuel gauche des spectateurs, "la partie gauche du corps étant gérée par l'hémisphère cérébral droit, en charge des informations émotionnelles".

3.5 - Le regard

Pour Éric Bah, le regard est capital. Il est "le plus important" de toutes les expressions faciales.

Le regard assure la connexion dans les deux sens : il transmet vos émotions au public tout en vous renseignant sur son état d'esprit.

L'auteur détaille différentes situations de gestion du regard : lors de la lecture d'un texte, avec un diaporama, ou pendant l'utilisation d'un prompteur. Dans tous les cas, il recommande de privilégier au maximum le contact visuel avec l'auditoire.

Pour balayer efficacement la salle du regard, il propose la méthode de la triangulation qui consiste à dessiner mentalement deux triangles inversés couvrant l'ensemble de la salle, assurant ainsi que personne ne se sente exclu.

3.6 - La voix

Éric Bah explique que contrairement à l'idée reçue, il ne faut pas être naturel mais "paraître naturel" sur scène. Pour cela, il recommande de travailler particulièrement sa voix à travers plusieurs aspects :

Une bonne diction pour se faire comprendre sans effort.

Un débit mesuré et varié : environ 150 mots par minute, mais pouvant varier de 120 à 230.

Des modulations en tonalité et en volume pour éviter la monotonie.

Il rappelle l'importance de l'intonation, "ce qui rend le discours vivant". Celle-ci doit refléter sincèrement les émotions que l'orateur cherche à transmettre.

3.7 - Les silences

Dans cette partie, l'auteur développe une véritable théorie du silence dans l'art oratoire. Il affirme que "le silence n'est pas l'absence de son" et qu'il fait pleinement partie de l'éloquence.

Éric Bah distingue deux erreurs à éviter :

La prodigalité de silences => trop de silences ou des silences trop longs.

L'avarice de silences => un débit incessant.

Il affirme : "le silence est un marqueur de structure" qui articule le discours et permet de faire saillir certains mots ou phrases.

L'auteur décrit ensuite l'utilité du silence selon trois perspectives :

Pour le discours : articulation, transition, mise en relief.

Pour le public : compréhension, assimilation, maintien de l'attention.

Pour l'orateur : réflexion, respiration, charisme.

Il accorde une attention particulière au premier silence qui précède la parole, permettant d'attirer l'attention et de préparer l'auditoire, ainsi qu'au dernier silence qui marque la fin définitive du discours et maintient l'émotion au niveau atteint.

3.8 - Le flow

Éric Bah présente ici ce qu'il appelle l'état de grâce de l'orateur, citant les travaux de Mihály Csíkszentmihályi sur le "flow". Cet état se caractérise par "l'engagement dans une tâche précise qui exige des aptitudes appropriées, un contrôle sur ses actions et une concentration intense".

Dans cet état idéal, l'orateur devient littéralement sa prise de parole, dans une forme d'unité avec son action où l'ego s'efface. L'auteur fait référence au concept taoïste de "wuwei" (非無為), le "non-agir" où "l'événement se déroule harmonieusement sans son intervention et comme par enchantement".

Pour atteindre cet état, l'auteur suggère de s'entraîner constamment à prendre la parole dans les conditions les plus diverses, afin de "dompter son esprit".

3.9 - Finir proprement

Pour conclure efficacement, Éric Bah propose l'acronyme DEBOU –(Digest, Émotion, Bouger, Ourlet) qui résume les quatre missions d'un finale réussi :

Proposer un digest => résumer les points clés du discours.

Susciter l'émotion => intensifier le pathos pour marquer les mémoires.

Faire bouger le public => appel à l'action clair et précis.

Coudre l'ourlet => terminer de manière nette et définitive.

L'auteur met en garde contre sept erreurs qui peuvent ruiner un finale :

Improviser,

Hésiter,

En rajouter,

Digresser,

Bâcler,

S'excuser

Parler après.

3.10 - La sortie

Éric Bah rappelle que "ta prestation n'est pas terminée tant que tu es sur scène".

Après la dernière phrase, il recommande de rester silencieux, d'accueillir les applaudissements avec le sourire, puis de rejoindre tranquillement les coulisses. Il avertit : "Ne parle pas après les applaudissements" pour éviter que des mots banals ne remplacent dans les mémoires le finale soigneusement composé.

3.11 - Répondre aux questions

Dans cette dernière partie de chapitre, l'auteur présente la session de questions-réponses comme "un exercice oratoire à part entière" qui offre une nouvelle opportunité de marteler son message de façon plus personnalisée.

Pour s'y préparer, Éric Bah nous encourage à anticiper toutes les questions possibles, y compris les objections et critiques, et suggère même de confier à un complice deux questions que vous aimeriez qu'on vous pose.

L'auteur conseille de garder toujours une attitude détendue et bienveillante, même face aux questions difficiles. Il distingue deux types de questions épineuses :

Les "questions blanches" => auxquelles on ne sait pas ou ne peut pas répondre.

Les "questions rouges" => où l'auditeur cherche à nuire.

Pour chaque situation délicate, l'auteur propose des stratégies précises : reformuler, faire valider sa compréhension, désigner un expert dans la salle, ou utiliser différentes techniques d'esquive lorsque nécessaire.

Éric Bah conclut en rappelant d'inclure toute la salle dans ses réponses : "Lorsque quelqu'un te pose une question, n'en fais pas une conversation à deux".

Chapitre IV - L'arsenal

Dans le quatrième chapitre de "La mise en scène du discours", Éric Bah présente les outils supplémentaires qui permettent à l'orateur de passer à un niveau supérieur.

L'auteur y détaille six compétences essentielles qui, une fois maîtrisées, démarqueront l'orateur des autres et graveront son message dans les mémoires.

4.1 - Savoir conter

L'art de raconter des histoires, ou storytelling, constitue selon Éric Bah une compétence millénaire mais toujours d'actualité. Ce n'est pas un hasard si les récits ont traversé les siècles, des tablettes babyloniennes aux séries Netflix, en passant par les grottes de Lascaux.

L'auteur explique que l'histoire est surtout puissante car elle touche par l'émotion plutôt que par l'argumentation rationnelle. Les discours les plus marquants contiennent généralement peu d'informations factuelles, mais beaucoup d'émotions. "La médecine, le commerce, le droit, l'industrie sont de nobles poursuites et sont nécessaires pour assurer la vie. Mais la poésie, la beauté, l'amour, l'aventure, c'est en fait pour cela qu'on vit", cite l'auteur en reprenant une réplique du film "Le Cercle des poètes disparus".

Selon Éric Bah, une histoire efficace dans un discours remplit cinq fonctions :

Soutenir le message,

Illustrer un argument,

Susciter l'intérêt,

Maintenir l'attention,

Favoriser le passage à l'action.

L'auteur détaille ensuite sept formats de récit utilisables :

L'anecdote => histoire courte et épurée, souvent peu connue, qui établit une proximité avec l'auditoire.

Le vécu => récit personnel où l'orateur est impliqué, créant une identification forte.

Le conte => récit fictionnel avec part de merveilleux, qui nous replonge en enfance.

La légende => récit avec un fond de vérité historique embelli, invitant au dépassement.

La fable => court récit humoristique avec morale, où dialoguent hommes, animaux et objets.

La parabole => récit symbolique tiré du quotidien, cachant un enseignement moral.

L'allégorie => figure de rhétorique à double sens permettant de faire passer une vérité.

Pour créer une bonne histoire, Éric Bah indique qu'elle doit comporter quatre éléments clés :

L'identification => le public se reconnaît dans le personnage,

Le basculement => passage de l'ordinaire à l'extraordinaire,

Les obstacles => défis rencontrés,

L'enseignement => lien avec le message.

L'auteur termine cette partie en insistant sur l'importance de vivre pleinement son histoire quand on la raconte, de parler au présent et de stimuler au moins trois sens pour la rendre mémorable.

4.2 - L'humour

Éric Bah présente l'humour comme "une arme de séduction massive" qui dispose favorablement l'auditoire. Il précise que l'humour ne doit jamais détourner du message principal : ce n'est pas un spectacle de stand-up, mais bien un outil au service de la persuasion.

L'humour apporte de nombreux bienfaits, tant pour la santé que pour les relations. L'auteur relate l'histoire de Norman Cousins qui aurait soulagé sa maladie grâce au rire, et mentionne des études montrant que le rire libère des hormones bénéfiques pour la santé.

Pour les relations avec l'auditoire, l'humour :

Maintient l'attention,

Procure de la détente,

Accroît la confiance sociale,

Fait naître un sentiment d'appartenance,

Favorise l'apprentissage et la mémorisation.

Éric Bah présente un inventaire détaillé des genres d'humour utilisables par les orateurs, de l'autodérision à l'humour littéraire, en passant par l'humour populaire, l'humour communautaire ou encore l'humour anglais.

L'auteur décrit également 14 techniques humoristiques pratiques comme : la vanne à trois temps, le boomerang, l'intrus, la fausse piste, la contradiction ou encore le détail qui tue. Un outil précieux pour tout orateur désireux d'intégrer l'humour à ses discours.

4.3 - Vendre

Dans cette partie, Éric Bah explique que vendre pendant un discours ne signifie pas forcément encaisser de l'argent, mais plutôt transformer un participant en client au sens large (abonné, suiveur, lecteur, etc.).

L'auteur préconise de suivre la structure AIDA :

Attirer l'Attention,

Éveiller l'Intérêt,

Susciter le Désir,

Pousser à l'Action.

Il conseille également de se limiter à vendre une seule chose et non de se transformer en "supermarché" de services, car trop de choix freine la décision.

Éric Bah souligne le rôle fondamental des émotions dans la vente, s'appuyant sur les travaux du neurologue Antonio Damasio qui montre que l'émotion est indispensable au processus de décision. "On achète en raison des émotions positives associées aux bénéfices perçus", note l'auteur.

Pour être efficace dans la vente, il recommande de présenter les bénéfices et non les fonctions, de vendre un changement plutôt qu'un produit, des émotions plutôt que des faits. La visualisation constitue l'outil majeur pour y parvenir, en faisant imaginer au public soit les conséquences négatives de ne pas adopter la solution (visualisation infernale), soit les bénéfices qu'elle apportera (visualisation paradisiaque).

L'auteur met finalement l’accent sur le rôle capital de la crédibilité et de la confiance, ainsi que sur la nécessité d'un appel à l'action clair qui dit quoi faire, quand le faire et comment le faire.

4.4 - Improviser

Paradoxalement, Éric Bah affirme que l'improvisation demande un énorme travail de préparation.

Il distingue trois éléments indispensables - le plan, l'ouverture et le finale - et deux éléments optionnels - les transitions et les punchlines.

Il est, par ailleurs, conseillé de connaître par cœur l'ouverture et le finale, et de mémoriser le plan sous forme linéaire ou de mindmap selon sa façon de penser, indique l’auteur. Ce dernier met enfin en garde contre le danger des citations approximatives, en illustrant son propos par un célèbre "bushisme" où George W. Bush s'emmêle dans un dicton.

Éric Bah présente trois techniques d'improvisation efficaces :

L'adaptation => se renseigner sur son public et intégrer des références à sa communauté.

Les histoires improvisées => ne retenir que le story-board et les images fortes afin de garder l'histoire vivante.

L'enquête => poser une question ouverte au public et rebondir sur les réponses, en préparant à l'avance des commentaires pour les réponses prévisibles.

4.5 - Interagir

L'interaction avec le public présente de nombreux avantages selon l'auteur. Elle maintient l'attention, rend le discours dynamique et renforce la relation entre l'orateur et la salle.

Éric Bah s'appuie sur les travaux de John Medina qui indique qu'un être humain ne peut maintenir son attention que pendant dix minutes consécutives. L'interaction permet de réinitialiser cette capacité d'attention en transformant l'auditeur en acteur.

L'auteur présente cinq formats d'interaction :

La question rhétorique => question sans réponse attendue, servant à marquer le plan, insuffler le doute, anticiper les objections ou émettre des suggestions.

La question fermée => question appelant un "oui" ou un "non", utile pour mesurer l'engagement ou obtenir l'adhésion.

La question ouverte => question permettant une variété de réponses, qui anime l'échange avec les participants.

Le vote => sondage à choix multiples, réalisable à main levée, par applaudissements, debout/assis ou électroniquement.

L'atelier => travail en petits groupes favorisant la cohésion et l'appropriation du contenu.

4.6 - Gérer les problèmes

Dans cette dernière partie, Éric Bah aborde les difficultés susceptibles de survenir pendant un discours et propose des solutions pratiques pour chacune.

Pour faire face à une réduction du temps de parole, l'auteur conseille de préparer à l'avance deux versions raccourcies du discours (à 75 % et 50 %) et du diaporama.

En cas de trou de mémoire, il suggère de commencer une phrase improvisée par le dernier mot prononcé, de proposer un exercice au public, ou en dernier recours, d'avouer honnêtement sa défaillance. "Personne ne t'en voudra d'avoir un trou de mémoire. Les gens sont de nature bienveillante", rassure l'auteur.

Éric Bah partage également des conseils pour gérer :

Les problèmes de micro,

L'oubli ou le dysfonctionnement du diaporama,

Les coquilles à l'écran,

Une salle presque vide,

Un public désintéressé,

L'absence de réaction,

L'absence de rires,

L'usage intensif des smartphones.

Face à tous ces défis, l'auteur préconise le calme, l'autodérision et l'adaptation. Il raconte notamment comment, lors d'un trou de mémoire où il cherchait le nom de la loi de Parkinson, il a fait preuve d'humour en remerciant la personne qui lui a soufflé la réponse : "Merci. Heureusement que ce n'était pas Alzheimer : je ne m'en serais jamais souvenu !"

Cette capacité à rebondir face aux imprévus complète l'arsenal de compétences de l'orateur accompli, prêt à délivrer un discours mémorable en toutes circonstances.

Épilogue

Pour conclure son ouvrage "La mise en scène du discours", Éric Bah partage le conte du sage Nasreddine Hodja qui, par trois fois, évite astucieusement de délivrer un sermon.

Cette histoire illustre en fait l'adaptation, compétence transversale fondamentale de l'orateur accompli. Et à travers elle, l’auteur nous rappelle, en effet, que l’orateur doit s’adapter "aux circonstances, aux conditions, et surtout au public, pour assurer la survie et l’essaimage de son message dans un monde de plus en plus bruyant".

Il nous encourage à multiplier les prises de parole, même au risque d'échouer, car c'est par l'expérience que l'on progresse.

"Trompe-toi, vautre-toi même, mais toujours relève-toi, encore plus adaptable, encore plus persuasif. Plus tu échoueras, plus tu réussiras. S’adapter, c’est triompher" conclut-il.

Conclusion de "La mise en scène du discours | Porter sa parole en public de manière engageante et mémorable" d'Éric Bah

Les 4 idées phares du livre "La mise en scène du discours" qu'il faut retenir !

Idée clé n°1 : La crédibilité de l'orateur s'établit bien avant les premiers mots prononcés

Éric Bah nous rappelle que l'éthos – cette crédibilité qui confère autorité de l'orateur –se construit dès notre apparition sur scène, voire avant. Cette crédibilité repose sur cinq piliers fondamentaux : la sympathie, la légitimité, la pertinence, l'intégrité et la sincérité.

L'auteur insiste aussi particulièrement sur les préparatifs qui précèdent une prise de parole en public : la préparation physique et mentale, la gestion du trac, le choix du style, des éventuels supports visuels ou encore la tenue vestimentaire. Ces éléments ne sont pas accessoires mais constituent les fondations sur lesquelles repose l'efficacité du message.

Comme l'écrit l'auteur : "L'éthos t'impose d'abord comme autorité, avant de se solidifier peu à peu au service de ta persuasion". Cette préparation méticuleuse permet d'être pleinement présent le jour J.

Idée clé n°2 : La maîtrise du corps et de la voix crée une connexion émotionnelle puissante avec l'auditoire

Éric Bah démontre brillamment que la parole ne représente qu'une partie de la communication. Il accorde une attention particulière aux éléments non-verbaux qui font la différence entre un discours oublié et une prestation mémorable.

L'auteur détaille avec précision comment l'entrée en scène, la posture, les déplacements, le regard et la voix permettent d'établir ce qu'il nomme le "lien impalpable" avec le public. Il met notamment en lumière l'importance des silences, véritables "marqueurs de structure" qui articulent le discours et permettent de faire ressortir certains mots ou phrases.

Enfin, le concept de "flow", cet état de grâce où l'orateur devient littéralement sa prise de parole, constitue l'aboutissement de cette maîtrise technique et émotionnelle.

Idée clé n°3 : L'orateur d'exception déploie un arsenal de compétences complémentaires qui élèvent son discours

La troisième grande idée de "La mise en scène du discours" concerne les compétences additionnelles qui permettent à l'orateur de se démarquer.

Éric Bah présente un véritable "arsenal" de techniques parmi lesquelles le storytelling occupe une place privilégiée. L'auteur présente sept formats de récits différents (anecdote, vécu, conte, légende, fable, parabole, allégorie) et explique comment une bonne histoire doit comporter quatre éléments clés : l'identification, le basculement, les obstacles et l'enseignement.

À cela s'ajoutent l'humour, l'art de vendre une idée, l'improvisation maîtrisée et l'interaction avec le public. Ces compétences ne sont pas superficielles mais constituent des leviers puissants de persuasion quand elles sont mises au service d'un message clair.

Idée clé n°4 : L'adaptation est la compétence transversale qui assure la réussite face à tous les défis

L'épilogue du livre révèle peut-être sa leçon la plus précieuse : la capacité d'adaptation est la qualité suprême de l'orateur accompli.

À travers le conte de Nasreddine Hodja, Éric Bah illustre comment cette flexibilité permet de faire face à n'importe quelle situation imprévue, qu'il s'agisse de problèmes techniques, d'un trou de mémoire, d'un public difficile ou d'une réduction du temps de parole.

L'auteur nous invite à multiplier les occasions de prendre la parole en public, même au risque de l'échec, car c'est par l'expérience que s'affine cette capacité d'adaptation. Sa conclusion est sans équivoque : "S'adapter, c'est triompher".

Qu'est-ce que la lecture de "La mise en scène du discours" peut vous apporter ?

"La mise en scène du discours" est un livre qui pourrait bien transformer profondément votre rapport à la prise de parole, car il vous fait comprendre qu'un discours réussi est, en fait, une expérience totale qui engage tout votre être.

C’est également un ouvrage qui fournit une véritable boîte à outils techniques pour parler en public.

En suivant la progression naturelle proposée par Éric Bah, vous apprenez à maîtriser chaque étape, qu’il s’agisse de la préparation méthodique en amont de votre prise de parole en public, de votre entrée en scène, de la façon de créer une connexion authentique avec votre auditoire ou encore de la gestion des situations imprévues.

Enfin, ce qui distingue particulièrement cet ouvrage, c'est sa capacité à allier conseils pratiques immédiatement applicables et réflexions plus profondes sur ce qui fait l'essence d'un discours ou d'une présentation inoubliable.

Vous y découvrirez comment orchestrer les silences aussi bien que les mots, comment utiliser les émotions sans tomber dans la manipulation, comment maîtriser le trac, optimiser votre concentration, adapter votre message à un public spécifique, favoriser et gérer les interactions ou encore éviter les erreurs.

Pourquoi lire "La mise en scène du discours" d'Éric Bah ?

"La mise en scène du discours" est un livre qui est écrit aussi bien pour les débutants que pour les orateurs confirmés ; chacun y trouvera matière à progresser.

Son approche particulièrement accessible et pratique vous aidera à développer votre impact à l'oral, que ce soit pour convaincre, vendre, former ou inspirer. Il s’adresse donc aux orateurs, conférenciers, formateurs, leaders, enseignants et à toute personne souhaitant mettre en valeur sa parole, un discours, un message.

Pour moi, "La mise en scène du discours" est un incontournable ! Une référence à lire absolument si vous cherchez à améliorer votre prise de parole en public, donner vie à un discours, le rendre percutant, donner vie à un texte endormi, et faire en sorte qu’on ne vous/l’oublie jamais !

Points forts :

Une approche structurée et chronologique qui suit les étapes réelles d'une prise de parole en public.

Un équilibre réussi entre techniques concrètes et dimensions émotionnelles de l'art oratoire.

Une richesse de formats narratifs et d'outils rhétoriques ultra concret et directement applicables.

Des conseils pratiques et exhaustifs sur la mise en scène d’une prise de parole en public, allant même jusqu’à la gestion des impondérables et situations difficiles.

Points faibles :

La richesse des conseils est telle qu’elle pourrait sembler trop dense à mettre en œuvre simultanément pour un débutant.  

L'absence d'exercices pratiques structurés pour accompagner la progression du lecteur (heureusement, d’autres ouvrages d’Éric Bah en regorgent !).

Ma note :

★★★★★

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Mon, 16 Jun 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13052/La-mise-en-scne-du-discours
L’approche Lean pour la transformation digitale http://www.olivier-roland.fr/items/view/13056/Lapproche-Lean-pour-la-transformation-digitale

Résumé de "L'approche lean pour la transformation digitale" d'Yves Caseau : un manuel pratique — et plutôt technique — pour passer "du client au code" et "du code au client", c'est-à-dire transformer votre entreprise en douceur mais avec rigueur afin qu'elle réponde aux exigences du monde numérique.

Par Yves Caseau, 2020, 240 pages.

Chronique et résumé de "L'approche lean pour la transformation digitale" d'Yves Caseau

Introduction

Dans La méthode lean pour la transformation digitale, Yves Caseau propose une vision approfondie de la transformation digitale. Il met particulièrement en avant la réinvention de l'offre grâce à l’abondance de données, la connectivité et la puissance de calcul.

L’auteur décrit trois capacités majeures qui s’appuient sur l’apprentissage continu et la co-construction avec le client.

La première est la démarche Lean Startup, qui s’ancre dans l’écoute des besoins et l’expérimentation itérative.

La deuxième concerne un système d’information exponentiel, flexible et ouvert, capable d’évoluer rapidement tout en garantissant la qualité.

La troisième est l’organisation de micro-usines logicielles, conçues pour livrer fréquemment et intégrer les retours afin d’améliorer l’offre.

Yves Caseau insiste sur l’exécution, jugée cruciale pour concrétiser une stratégie digitale, mais qui est souvent mal déployée, malheureusement. Il aborde les notions de gouvernance et d’architecture, indispensables pour gérer la complexité tout en préservant modularité et qualité.

Une culture d’agilité, soutenue par le management et respectueuse du savoir-faire logiciel, nourrit l’innovation et accélère l’adaptation. À qui est destiné ce livre ? Principalement aux décideurs et aux informaticiens, et finalement à toutes les entreprises en quête d’une mise en œuvre de la transformation digitale.

Première partie. Transformation digitale : orientation client et homéostasie

1 — Pourquoi une transformation digitale ?

Numérique ou digital ?

Yves Caseau explique qu’il utilise le terme numérique pour parler de l’usage des ordinateurs et des données. Il n'emploie digital (terme anglophone) que pour décrire la transformation digitale, terme associé à l’adaptation continue des entreprises face à l’essor d’Internet et du Web.

L’auteur insiste sur l’importance de comprendre cette nuance, car la révolution numérique a commencé bien avant l’apparition du concept de digital transformation. Il précise que l’arrivée de nouveaux acteurs (les big tech, notamment) a provoqué une accélération qui a obligé les entreprises à innover pour ne pas se laisser distancer.

« Markets are conversations »

Le spécialiste de la transformation digitale montre que le monde numérique génère une abondance de produits, où les entreprises luttent pour capter l’attention. Elles doivent passer du push marketing (où l’entreprise impose son message) à un pull marketing, qui mise sur l’écoute et la pertinence.

Il évoque la notion d'« économie de l’attention », caractérisée par une surcharge informationnelle et où chaque consommateur devient unique (personnalisation de l'offre). L’échange prend alors la forme d’une conversation, au sein de laquelle la confiance et la personnalisation sont essentielles.

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Mon, 02 Jun 2025 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/13056/Lapproche-Lean-pour-la-transformation-digitale
Commencer par pourquoi http://www.olivier-roland.fr/items/view/12863/Commencer-par-pourquoi

Résumé de « Commencer par pourquoi : comment les grands leaders nous inspirent à passer à l’action » de Simon Sinek : avec 18 millions de vues, sa conférence TED est l’une des plus fameuses de l’histoire de la série — mais avez-vous lu le livre ?

Par Simon Sinek, 2015, 230 pages.

Titre original : Start with why: How Great Leaders Inspire Everywone to Take Great Actions, 2009.

Chronique et résumé de "Commencer par pourquoi : comment les grands leaders nous inspirent à passer à l'action" de Simon Sinek

Préface

« Il y a des dirigeants et il y a des leaders. Les dirigeants occupent une position de pouvoir ou d’influence. Les leaders nous inspirent. Qu’il s’agisse d’individus ou de sociétés, nous suivons les leaders non pas parce que nous y sommes obligés, nous les suivons pour nous-mêmes. Nous suivons les leaders non pas pour eux, mais pour nous. Ce livre s’adresse aux personnes qui veulent inspirer les autres et à celles qui veulent trouver quelqu’un qui les inspire. » (Commencer par pourquoi, Phrase mise en exergue du livre)

Introduction

Selon Simon Sinek, les leaders efficaces se distinguent par une forme singulière "de pensée, d'action et de communication". Cet état d'esprit leur permet d'inspirer plus de monde et de mieux réussir que les autres.

Il ne s'agit pas de don. Bien sûr, il existe des leaders très talentueux. Mais ce n'est pas le plus déterminant. Ce qui compte, c'est vraiment cet état d'esprit. Et celui-ci peut être appris ! N'importe qui peut apprendre à penser, agir et communiquer efficacement en suivant le modèle qui sera présenté dans ces pages.

L'auteur présente enfin quelques figures clés de cet ouvrage :

Les frères Wright ;

Dr. Martin Luther King Jr. ;

Steve Jobs et Steve Wozniak d'Apple.

Ces personnes ont été des leaders inspirés et inspirants. Pourquoi ? Eh bien… justement, car ils ont commencé par se demander "pourquoi" !

Partie 1 — Un monde qui ne commence pas par pourquoi

1 — Présumer que vous le savez

Simon Sinek s'intéresse à la façon dont nos hypothèses affectent nos actions. Souvent, nous avons le nez dans le guidon. Or, une perspective plus large sur le monde peut conduire à un succès plus durable.

Il illustre cette idée en comparant les constructeurs automobiles américains à leurs homologues japonais.

Dans l'industrie automobile américaine, les travailleurs de la chaîne de montage utilisent souvent un maillet en caoutchouc comme outil de réglage final pour les portes de voiture.

En revanche, les constructeurs automobiles japonais conçoivent leurs véhicules pour s'assurer que les portes s'adaptent parfaitement dès le début.

À partir de cet exemple, l'auteur développe deux approches distinctes du leadership.

Les dirigeants qui choisissent de manipuler les situations et les gens pour atteindre les résultats souhaités, compromettant volontairement leurs principes pour un succès immédiat. Ils peuvent utiliser des tactiques qui génèrent des résultats rapides, mais finissent par éroder la confiance et l'authenticité.

Les dirigeants qui commencent avec une vision claire du résultat final qu'ils veulent atteindre. Ces dirigeants opèrent avec une compréhension profonde de leur "pourquoi" — leur but et leurs valeurs — et utilisent cette compréhension pour guider leurs décisions et leurs actions.

Selon Simon Sinek, ce deuxième type de leader est focalisé sur le long terme. Les dirigeants qui connaissent leur "pourquoi" sont authentiques et inspirants. Ils sont aussi plus confiants et rassurants. Enfin, ils sont davantage capables de promouvoir lune culture de la collaboration et du travail partagé.

2 — Des carottes et des bâtons

Dans Commencer par pourquoi, l’auteur examine ensuite les deux principales incitations utilisées par les entreprises pour attirer les clients :

Les « carottes », c'est-à-dire la promesse de récompense(s) ;

Les « bâtons », à savoir la mise en évidence de douleurs et de coûts.

Une grande partie des techniques de vente contemporaines s’appuient sur la mise en exergue de « points de douleurs » à évacuer… c’est-à-dire de « bâtons ».

Ces stratégies de persuasion publicitaire — ce que les marketeurs nomment copywriting, notamment — se rencontrent partout. Elles jouent sur les prix, la peur ou encore la pression par les pairs.

En tant que consommateurs, certaines nous sont familières et nous ne sommes pas "dupes". D'autres, toutefois, agissent plus implicitement.

Pour Simon Sinek, c'est toutefois insuffisant. En fait, ces tactiques sont des solutions à court terme qui doivent être constamment répétées pour rester efficaces. Le risque étant, pour l'entreprise, de perdre son identité et, finalement, sa rentabilité.

Partie 2 — Une perspective différente

3 — Le cercle d'or

Dans Commencer par pourquoi, Simon Sinek introduit sa propre conception de la persuasion. Il nomme « cercle d’or » les trois questions suivantes :

Pourquoi = le but et la raison d'être de l'organisation ;

Comment = sa proposition de valeur unique ;

Quoi = les produits/services tangibles qu'elle offre.

Le plus souvent, les entreprises privées ou publiques peuvent exposer leur "quoi", mais sont beaucoup plus embêtées lorsqu'il s'agit de parler de leur "comment" et, surtout, de leur "pourquoi".

Pourtant, c'est par là qu'il faudrait commencer ! C'est "la" clé pour établir des liens durables avec les clients ou les usagers. Lorsqu'une organisation communique efficacement ses valeurs et son but, elle s'adresse directement au cœur des individus et ceux-ci entrent plus facilement en résonance avec elle.

L'exemple le plus fameux est celui d'Apple. Les produits d'Apple sont techniquement similaires à ceux de ses concurrents, mais l'entreprise se démarque nettement dans la mesure où elle commence par son "pourquoi".

Pensez à sa plus célèbre publicité inspirée de 1984 de George Orwell. L'enjeu de la marque à la pomme : remettre en question le statu quo et libérer les individus de leurs chaînes. Ce mantra primordial insuffle de la vie à toute l'entreprise et lui donne son cachet d'authenticité. Les consommateurs, eux, entrent directement en empathie avec cet objectif : "Moi aussi, je veux être autonome et original".

4 — Ce n'est pas une question d'opinion, mais de biologie

Quelles sont les raisons de ce comportement ? En fait, Simon Sinek explique que les humains ont un désir inné d'appartenir à des communautés, c'est-à-dire à des groupes partageant les mêmes valeurs et croyances.

Ce besoin très fort de l'humanité correspond au niveau « pourquoi » du cercle d'or.

Par ailleurs, d'un point de vue neurologique, il existe une différence entre :

Le néocortex, qui gère la pensée et l'analyse rationnelles ;

Le cerveau limbique, qui régit les émotions, la confiance et la loyauté.

Le premier est lié au "quoi", tandis que c'est davantage dans le second que s'ancre le "pourquoi". Les entreprises (ou les organisations au sens large) qui commencent par leur "pourquoi" puisent dans ce désir naturel d'appartenance.

Pourquoi, dans ce cas, la plupart des entreprises commencent par « quoi » et « comment » ? Eh bien, parce que ce sont aussi des aspects que les clients privilégient :

La qualité du produit ;

Son prix bas ;

Ses fonctionnalités ;

Etc.

Tous ces aspects sont importants et sont "calculés" par la partie rationnelle du cerveau. Toutefois, c'est à un niveau plus profond (et plus ancien, selon la théorie de l'évolution), que l'auteur propose d'agir.

5 — La transparence, la discipline et la constance

Dans Commencer par pourquoi, Simon Sinek souligne l’importance de maintenir le bon ordre dans le cercle d’or. Chaque niveau implique un degré d’engagement différent :

Lorsque les décisions sont basées sur des éléments tangibles ou des mesures rationnelles (« quoi »), le plus haut niveau de confiance est formulé selon une phrase du genre : « Je pense que c'est la bonne décision ».

Les décisions instinctives (« comment ») produisent un niveau de confiance semblable à « La décision semble juste ».

Lorsque les décisions sont enracinées dans un "pourquoi" clair, le plus haut niveau de confiance est "Je sais que c'est juste".

Le consommateur qui connaît les raisons d'agir d'une organisation peut facilement l'expliquer et se sentir à l'aise avec son choix, comme s'il était tout à fait "naturel".

Partie 3 — Les leaders ont besoin d'adeptes

6 — L'émergence de la confiance

Simon Sinek explique comment la confiance émerge dans les organisations et comment l'alignement du "pourquoi", du "comment" et du "quoi" peut favoriser cette confiance.

Du point de vue de l'auteur, la confiance commence à s'épanouir lorsque les gens et les organisations font preuve d'un type de motivation qui va au-delà de l'intérêt personnel. À noter : c'est ce qui est parfois appelé motivation oblative.

L'auteur considère que la vision qui consiste à se démarquer constamment de ses concurrents n'est pas viable à long terme. C'est une culture du « quoi » qui risque à tout moment d'oublier son "pourquoi".

En effet, en se concentrant uniquement sur "ce qu'ils font" (quoi), ils restent constamment le nez dans le guidon. Par contre, les entreprises qui s'appuient sur leur "pourquoi" peuvent agir avec plus de flexibilité.

Voici deux exemples qui vont en sens inverse :

Apple, avec son "pourquoi" clairement identifié (voir plus haut), a pu sans problème diversifier ses propositions de services et de produits des ordinateurs aux iPads et aux iPhones.

Dell, quant à elle, a eu du mal à se diversifier au-delà des ordinateurs et en est finalement restée à son activité principale. L'entreprise s'est trop focalisée sur ce qu'elle faisait (son produit, leur qualité) et n'a pas cherché à "vendre" sa raison d'être.

Connaissez-vous "l'avantage du premier déménageur" ? C'est le nom que Simon Sinek donne à l'avantage compétitif que peuvent engranger les entreprises qui savent capitaliser sur leur "pourquoi". Il donne un autre exemple, toujours avec Apple (et Steve Jobs) en héros de l'aventure :

Creative, l'un des premiers producteurs de lecteurs MP3 s'est concentré sur les spécifications techniques lors de ses campagnes publicitaires ;

Apple a commercialisé l'iPod en vantant la possibilité de mettre "1 000 chansons dans votre poche".

Cette approche plus sensationnelle d'Apple fait tilt auprès des consommateurs et leur permet de dominer le marché.

Enfin, l'auteur souligne l'importance d'embaucher des employés qui sont passionnés par le « pourquoi » de l'entreprise. Les employés qui se connectent au « pourquoi » sont plus productifs et innovants. Ils contribuent davantage à la vie de celle-ci et créent une émulation positive pour tout le groupe.

7 — Comment se produit un point de bascule

Comment les idées et les innovations se propagent-elles ? Comment se produit le "point de bascule" qui fait d'un simple produit une référence, voire une norme que tout le monde utilise "doit" utiliser ? Pour l'expliquer, l'auteur s'inspire de la loi d'Everett M. Rogers sur la diffusion des innovations.

Cette loi décrit la courbe en cloche de l'adoption des produits. Il existe plusieurs types de consommateurs :

Innovateurs, c'est-à-dire ceux qui prennent le risque d'adopter une technologie en premier, lorsque celle-ci n'a pas encore été complètement testée ou validée par le public ;

Adopteurs précoces qui souhaitent être à la pointe de la technologie ;

Majorité précoce, qui ne veut pas être en reste et cherche à se maintenir dans la course au progrès ;

Majorité tardive, qui emboite le pas pour entrer dans ce qui devient une "norme" ;

Retardataires, qui adoptent la technologie après tout le monde.

Il y a peu d'innovateurs et peu de retardataires, comparativement aux autres segments. C'est pourquoi la courbe est "en cloche".

Cette analyse classique résonne avec le propos de Simon Sinek. En effet, selon ce dernier, les organisations devraient se concentrer sur l'attraction de personnes qui s'alignent sur leur "pourquoi" et qui croient en leur cause. En l'occurrence, ce sont les innovateurs bien sûr, mais surtout les adopteurs précoces.

Ceux-ci représentent environ 15 % à 18 % du marché. Ils jouent un rôle déterminant pour atteindre ce "point de bascule", cette "masse critique" requise pour qu'une idée ou un produit soit accepté par le grand public.

Dans Commencer par pourquoi, l’auteur cite le mouvement des droits civiques comme exemple du cercle d’or et de la loi de la diffusion de l’innovation. Selon lui, le Dr. Martin Luther King Jr. est devenu le symbole du mouvement des droits civiques, car il a su toucher ces adopteurs précoces avec une vision claire et une communication percutante.

Partie 4 — Comment rallier ceux qui croient

8 — Commencer avec pourquoi, mais savoir comment

Simon Sinek explore ensuite les concepts d'énergie et de charisme. Ceux-ci sont capitaux pour penser le leadership.

L'énergie motive ;

Le charisme inspire.

Si vous connaissez votre raison d'être, vous pouvez développer votre charisme. Est charismatique celui qui croit en quelque chose qui le dépasse. Simon Sinek illustre cela avec les exemples de Bill Gates et de Steve Ballmer.

Steve Ballmer est énergique, il sait mobiliser les troupes ;

Bill Gates respire le charisme malgré sa timidité naturelle.

Les dirigeants charismatiques, qui sont animés par un « pourquoi » fort, laissent un impact durable et obtiennent plus facilement l'engagement des autres. Ces visionnaires ont de l'imagination et une vue précise pour l'avenir. Ils sont la quintessence des personnalités "pourquoi".

Par contraste, les dirigeants qui se focalisent sur le « comment » sont pragmatiques : ils cherchent des solutions pratiques et sont réalistes ; ils pensent au jour le jour. Les personnalités "comment" peuvent très bien réussir, mais elles créeront rarement des entreprises qui changent le monde.

Par ailleurs, ces deux types de personnalités sont souvent complémentaires. Un dirigeant "pourquoi" a souvent besoin d'une personne de type "comment" pour donner vie à sa vision. C'était le cas de Walt Disney, par exemple, qui a pu compter sur son frère Roy pour faire de ses rêves une réalité.

Cette distinction s'étend à la vision et à la mission d'une organisation.

La vision représente l'intention du fondateur, le « pourquoi » derrière la fondation de l'entreprise.

La mission prédit « comment » l'entreprise créera cet avenir. C'est le mode d'emploi.

Lorsque ces deux dimensions sont au clair, l'organisation a toutes les chances d'être un succès, aussi bien en interne (relations entre les collaborateurs) qu'à l'externe (relations avec les clients, surtout, mais aussi les fournisseurs, etc.).

9 — Savoir pourquoi, savoir comment. Ensuite, quoi ?

Simon Sinek continue son parcours et aborde l'évolution du rôle des dirigeants. Lorsqu'une entreprise de développe, elle doit passer du centre du cercle d'or (le "pourquoi") vers son extérieur (le "comment", puis le "quoi").

Au commencement d'une organisation, les fondateurs ont un contact direct avec le monde extérieur. Ils s'expriment et sont écoutés. Mais progressivement, les fondateurs deviennent un symbole du message principal. Or, il en faut plus pour mettre en œuvre et faire fonctionner une organisation.

Pour exposer son idée, Simon Sinek réexpose la distinction entre cerveau limbique, centre des émotions et des décisions irrationnelles, et le néocortex rationnel. Au niveau de l'entreprise, les fondateurs sont l'équivalent du système limbique, tandis que les cadres dirigeants représentent usuellement le néocortex.

La communication doit utiliser les émotions. Pour cela, elle peut s'appuyer sur des métaphores, des images et des symboles. Lorsqu'il est bien compris et exécuté, le marketing communique les valeurs et les croyances de l'entreprise au monde.

Mais il n'est pas toujours facile d'exprimer ses émotions, et c'est pourquoi tant d'organisations peinent à se faire connaître et à se développer !

10 — Communiquer, ce n'est pas parler, c'est écouter

Dans Commencer par pourquoi, Simon Sinek insiste tout particulièrement sur le pouvoir des symboles dans la communication. Les symboles rendent l’intangible (invisible, abstrait, etc.) tangible. Ils tirent leur sens des associations que les gens créent.

Les logos jouent ce rôle de symbole. Par exemple, le logo de Harley-Davidson symbolise bien plus que l'entreprise. Pour les amoureux de motos, il incarne tout un ensemble de valeurs et un style de vie à part entière.

L'auteur en revient encore une fois à Apple pour montrer la discipline importante qu'il faut pour parvenir à communiquer son "pourquoi" sans se perdre. Il en vient ensuite à la description d'un test : le test du céleri !

"Ce n’est pas seulement CE QUE vous faites ou COMMENT vous le faites qui compte. Le plus important, c’est que le QUOI et le COMMENT soient cohérents avec votre POURQUOI. C’est seulement à ce moment-là que vos pratiques seront meilleures. Il n’y a rien de mauvais en soi à regarder ce que font les autres pour apprendre. Le défi est de savoir quelles pratiques ou quels conseils il faut suivre. Heureusement, il existe un simple test que vous pouvez utiliser pour trouver exactement quels QUOI et COMMENT sont les bons pour vous. Il s’agit d’une simple métaphore appelée le test du céleri." (Commencer par pourquoi, Chapitre 10)

Ce « test de céleri » a une base simple : pour choisir quels sont les exemples sur lesquels vous pouvez vous appuyer ou les innovations que vous pouvez faire dans votre entreprise, ne vous contentez pas de copier ce que font les autres. Passer chacune de ces propositions au crible de votre "pourquoi".

Si votre ambition est de manger sainement, vous opterez pour ceux qui vous proposent du céleri et non des M&Ms. En agissant avec cette boussole intérieure, vos décisions (et votre communication) s'aligneront sur vos croyances et vos objectifs fondamentaux.

Mais ce n'est pas tout ! Vous économiserez également du temps et d'autres précieuses ressources en évitant de vous éparpiller.

Partie 5 — Le plus grand défi est la réussite

11 — Lorsque le pourquoi devient vague

Dans ce chapitre, SImon Sinek discute de ce qui se passe lorsque les entreprises perdent de vue leur "pourquoi" d'origine. Deux exemples éminents, Volkswagen et Walmart, servent à l'auteur pour nous mettre en garde.

Volkswagen, qui signifie littéralement « voiture du peuple », a construit une image de marque autour de voitures fiables et abordables pour tout le monde. L'emblématique VW Beetle représentait la liberté et une vie simple et insouciante. Cependant, lorsque Volkswagen a sorti la VW Phaeton pour un public très aisé, elle a contredit son propre "pourquoi" et n'a pas réussi à trouver un écho auprès des consommateurs.

Walmart connait sensiblement la même histoire. L'enseigne s'adresse historiquement à des personnes aux revenus modestes. À la mort de son fondateur, l'entreprise se restructure et opte pour une politique impitoyable auprès de ses fournisseurs et ses employés notamment. Sa réputation en pâtit très fortement et elle perd ce qui faisait sa raison d'être.

Rester attaché à sa cause ou à sa croyance s'avère être le véritable test de l'intégrité d'une organisation.

12 — Une rupture peut survenir

Chaque entreprise évolue selon un cycle de vie déterminé :

La passion des débuts ;

Les risques pour faire vivre concrètement cette vision ;

La solidification de structures pour la faire "tenir" et la transformer en "mission".

L'entreprise peut devenir une référence et entrer dans le cœur de tous ou bien oublier son "pourquoi" (voir plus haut). La croissance comporte elle-même ses risques.

Pour de nombreuses entreprises, une « rupture » entre le "pourquoi" et le "comment" se produit au fur et à mesure qu'elles ont de plus en plus de succès. L'auteur définit cette rupture comme ce qui se passe lorsque le « pourquoi » et le « quoi » divergent.

Au fur et à mesure que les entreprises grandissent et se globalisent, la prise de décision se décentralise. Il n'est pas rare, alors, que les collaborateurs — voire les cadres eux-mêmes — perdent de vue le "pourquoi" de l'entreprise. Ils ne commencent à compter que sur le "quoi" pour éclairer leurs décisions.

Partie 6 — Découvrir pourquoi

13 — Les origines du pourquoi

Devez-vous réellement faire des études de marché pour connaître vos clients et trouver votre niche ?

Simon Sinek met cette théorie classique de la création d'entreprise en question. Selon lui, la vision du fondateur doit primer sur l'adaptation au consommateur. Le "pourquoi" ne ressort pas de statistiques, de sondages ou d'entretiens approfondis avec les clients et les employés.

Une fois que celui-ci est trouvé, le défi consiste à rester fidèle à soi-même face aux pressions extérieures et à l'évolution de la situation.

Simon Sinek révèle également les origines de ce livre. Selon lui, elles sont justement à trouver dans son propre échec à rester fidèle au « pourquoi » de sa première entreprise.

Lorsqu'il commença son activité d'entrepreneur, il était rempli d'excitation et de fierté car son entreprise avait survécu au-delà des trois premières années — ce qui est un succès en soi, considérant que 90 % des entreprises font faillite dans les 3 ans qui suivent leur création.

Cependant, au fur et à mesure que l'entreprise se développait, il se rendit compte que sa passion déclinait et que l'entreprise se transformait pour lui en une routine désagréable.

L'auteur explique alors que cet ennui, mais aussi son manque de confiance en lui-même et sa trop grande faiblesse à l'égard de ses concurrents l'ont incité à se lancer dans une analyse approfondie de ce qui distinguait sa propre expérience entrepreneuriale des entreprises plus prospères.

Il a tout particulièrement cherché à comprendre pourquoi des entreprises comme Apple surpassent systématiquement leurs rivaux. C'est alors qu'il a identifié un fil conducteur qui lui a permis de concevoir le cercle d'or présenté au premier chapitre.

Peu à peu, il a reconnu que ses propres difficultés découlaient d'une perte de son « pourquoi ». Trouvant que son analyse était pertinente, il s'est décidé à la partager avec autrui. Et c'est comme ça que tout a recommencé et qu'il a connu, cette fois, le succès !

14 — La nouvelle concurrence

Simon Sinek part d'une distinction essentielle pour penser la concurrence : celle contre les autres et celle contre soi-même.

Si vous (ou votre organisation) êtes en concurrence avec le monde, vous aurez des difficultés à trouver du soutien et à ne pas vous essouffler dans la durée. Vous chercherez à améliorer vos produits et services, mais au prix d'une course épuisante et sans fin.

Cependant, si vous (ou votre entreprise) êtes en concurrence avec vous-même, vous chercherez avant tout à améliorer vos réalisations antérieures, sans être constamment dans la comparaison. Vous pourrez plus aisément attirer les autres à vous et collaborer avec eux, ce qui diminuera la pression et la fatigue.

Cette "nouvelle concurrence" (celle contre soi-même) vous oblige à conserver votre vision, tout en l'affinant et la transformant. La concurrence classique nous amène à trop regarder à l'extérieur et à perdre notre spécificité. La nouvelle, au contraire, nous impose de regarder toujours davantage en nous-mêmes.

Seules les plus grandes conservent cette clarté sur leur « pourquoi », année après année. Oui, le chemin vers un succès durable réside dans le fait de commencer par pourquoi et de rester attaché à sa vision, tout en s’attachant à s’améliorer de façon continue.

Une entreprise fidèle à sa vision se simplifie la vie de bien des manières :

La qualité de ses décisions est accrue ;

La loyauté de ses membres s'approfondit ;

La confiance du public est durable.

L'optimisme et l'innovation font partie intégrante de sa culture.

Postface — Faites partie de ce mouvement, partagez votre vision du monde

                                                 Le cercle d'or de Simon Sinek. Source : Wikipedia

Conclusion sur "Commencer par pourquoi : comment les grands leaders nous inspirent à passer à l'action" de Simon Sinek :

Ce qu’il faut retenir de "Commencer par pourquoi : comment les grands leaders nous inspirent à passer à l'action" de Simon Sinek :

Une chose est sûre : Simon Sinek sait présenter sa pensée. D’ailleurs, si vous n’avez toujours pas vu la vidéo YouTube de sa présentation TED, c’est le moment ! Ce livre en est la continuation et l’approfondissement.

Sa théorie du "cercle d'or" lui permet de développer son argument central, selon lequel le but d'une personne ou d'une organisation est la clé de sa réussite.

Dans Commencer par pourquoi, Il affirme que les individus et les organisations influents commencent toujours par exposer clairement « pourquoi » ils font ce qu’ils font, puis qu’ils vont progressivement vers l’extérieur pour expliquer « comment » ils accomplissent cet objectif et — enfin — ce (« quoi ») qu’ils font pour l’accomplir.

Commencer par pourquoi est particulièrement important pour au moins 3 raisons :

Inspirer et motiver plus efficacement les autres.

Donner un cap pour les décideurs et les cadres qui doivent maintenir une cohérence au fil du temps.

Accroître la fiabilité et, ce faisant, la confiance des clients et des parties prenantes.

Contribuer à une plus grande résilience de l'individu ou de l'organisation, puisque le but sert d'ancre en période d'incertitude ;

Fournir un héritage durable, qui va au-delà du simple succès immédiat ou du profit.

Tout au long de Commencer par pourquoi, Simon Sinek prend des exemples dans les mondes de l’entreprise, mais aussi de la politique. À ce titre, ses deux exemples phares sont Apple et le Dr. Martin Luther King Jr. Ce dernier a profondément influencé le Mouvement pour les droits civils en clamant un « pourquoi » clair et puissant (le fameux discours « I have a dream » ou « J’ai un rêve », prononcé en 1963).

Points forts :

Un livre court, mais très clair et bien construit ;

Des exemples qui permettent de bien comprendre le propos ;

Une théorie assez simple, qui peut être facilement mise en application pour les autoentrepreneurs.

Point faible : 

Quelques répétitions.

Ma note :

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Thu, 23 May 2024 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/12863/Commencer-par-pourquoi
À nous d’écrire l’avenir http://www.olivier-roland.fr/items/view/12800/-nous-dcrire-lavenir

Résumé de « À nous d’écrire l’avenir » d’Eric Schmidt et Jared Cohen : un essai sur l'avenir du numérique qui a marqué les esprits, rédigé par deux spécialistes internationalement reconnus, tous deux anciens cadres supérieurs de Google.

Par Eric Schmidt et Jared Cohen, 2014.

Titre original : « The New Digital Age », 2013.

Chronique et résumé de « À nous d’écrire l’avenir : Comment les nouvelles technologies bouleversent le monde » d’Eric Schmidt et Jared Cohen

Présentation d’Eric Schmidt, de Jared Cohen et de leur ouvrage The New Digital Age

Eric Schmidt a été Président directeur général de Google dans les années 2000, puis a siégé à son conseil d’administration. Il a notamment été proche de l’administration de Barack Obama quand celui-ci était au pouvoir. Ses conférences et ses analyses connaissent un grand succès dans le monde entier.

Jared Cohen a notamment été conseiller d’Hillary Clinton quand celle-ci était au département d’État. Il a pensé et mis en œuvre le concept de « diplomatie numérique ». Durant les années 2010, lorsque ce livre a été écrit, Jared Cohen était le directeur du think thank de Google, Google Ideas.

The New Digital Age, traduit en français sous le titre À nous d’écrire l’avenir, a été un véritable phénomène éditorial outre-Atlantique lors de sa parution en 2013.

Pour l’essentiel, c’est un livre qui s’appuie sur l’énorme expérience de ses deux auteurs, ainsi que sur des entretiens réalisés avec de nombreux dirigeants, activistes et même terroristes de par le monde.

Son intention est de décrire la façon dont le numérique modifie les rapports entre individus, États et société civile. Plus précisément, l’ouvrage explore l’avenir en s’efforçant de proposer des prédictions sur de nombreux aspects des relations humaines et sociales.

Important : en rédigeant cette chronique, nous avons choisi de discuter, lorsque cela était nécessaire, les propositions principales des auteurs.

Par moments, nous montrons toute la justesse de leurs évaluations en donnant des exemples de ce que nous vivons aujourd’hui.

À d’autres moments, nous tempérons leurs propos, en montrant que leurs prédictions ne se sont pas réalisées.

Introduction

Internet est à la fois grisant et terrifiant. Cette technologie nous ouvre des possibilités inédites en termes de communication, mais pas seulement. C’est l’ensemble des rapports humains et sociaux qui s’en trouve modifié.

Voici ce qu’ils affirment d’entrée de jeu :

« Ceci n’est pas un livre sur les gadgets, les applis pour smartphone ou l’intelligence artificielle […]. C’est un livre sur la technologie, mais plus encore sur l’homme, sur sa façon d’interagir, d’adopter la technologie, de s’y adapter et de l’exploiter dans son milieu, aujourd’hui et demain, partout dans le monde. Surtout, c’est un livre sur l’importance du fait qu’une main humaine conduise l’avènement du nouvel âge numérique. Car toutes les possibilités que représentent les technologies de la communication, leur bon ou leur mauvais usage, ne dépendent que des individus. Oubliez ce qu’on raconte sur la prise du pouvoir par les machines. Ce qu’il adviendra ne dépend que de vous. » (À nous d’écrire l’avenir, p. 22)

Les défis sont de taille. Sans régulation, nous trouvons absolument de tout sur le Net. Le meilleur comme le pire ; pensons par exemple aux arnaques en ligne ou aux forums terroristes.

La prolifération rapide des technologies numériques est un aspect majeur du phénomène, ainsi que l’accroissement régulier de leur puissance ou efficacité. Plus de monde disposant d’appareils toujours plus performants : tel est le paysage qui se dessine pour les auteurs.

Les deux mondes, physique et numérique, vont s’entrelacer et parfois aussi s’entrechoquer. Nos institutions devront s’adapter. Nous ne pouvons encore connaître le résultat final de ce processus qui vient juste de commencer. Globalement, vivrons-nous mieux ou moins bien ?

Eric Schmidt et Jared Cohen cherchent, dans cet ouvrage, à apporter quelques clés d’analyse pour penser le développement technologique et ces implications sociales et culturelles. Voyons avec eux ce qu’ils en pensent !

1 — Notre avenir personnel 

Les auteurs nomment « connectivité » ou « connectivité numérique » le fait majeur que l’humanité dans son ensemble soit en passe de pouvoir communiquer en ligne via des téléphones mobiles. Quels sont ses avantages et ses inconvénients pour notre vie individuelle ?

Efficacité accrue

La connectivité — via les smartphones essentiellement — est capable d’aider de nombreuses personnes dans de nombreuses régions du monde. Y compris dans les pays moins développés et les zones les plus rurales, les changements se font sentir durablement.

Au-delà de l’utilisation du mobile pour diverses situations, c’est l’usage des données qui prend une importance massive. En connaissant mieux ses consommateurs, une entreprise peut lui fournir des services plus adaptés à ses besoins.

Autre progrès à garder à l’œil : les imprimantes 3D. Celles-ci révolutionnent la façon de produire les objets. En plaçant le processus de fabrication d’objets complexes à portée de tout un chacun ou presque, ce type de technologie facilite grandement la diffusion des innovations.

Les auteurs abordent aussi la question de l’intelligence artificielle et de la robotique. Si les robots à formes humaines seront sans doute réservés à une élite, une foule d’objets intégreront bientôt — ou intègrent déjà — des éléments de l’une ou l’autre de ces technologies.

Erich Schmidt et Jared Cohen abordent enfin trois types de « reconnaissance » :

Vocale (que nous utilisons pour nos recherches ou pour la domotique) ;

Gestuelle (que nous trouvons par exemple sur les consoles de jeu, mais aussi ailleurs) ;

Mentale ou par la pensée (déjà utilisé pour des prothèses et membres artificiels, par exemple).

Plus d’innovation, plus d’opportunités

Bien sûr, les technologies numériques offrent la possibilité de communiquer plus rapidement, quelles que soient les distances géographiques. Les entreprises profitent et profiteront encore davantage à l’avenir de la possibilité de travailler de façon décentralisée.

Le travail à distance est amené à devenir une chose de plus en plus commune. Chacun d’entre nous pourra proposer des services à d’autres personnes à l’autre bout du monde. À l’inverse, nous pourrons nous adresser à des professionnels de notre choix, sans nous soucier qu’ils soient proches ou loin.

Tous ces flux de communications intensifient la mondialisation et le niveau d’innovation globale et les opportunités d’affaires.

À côté de ces deux aspects, il faut aussi penser à l’éducation. Les auteurs affirment que la démocratisation des technologies d’information et de communication vont permettre à un plus grand nombre d’enfants d’être éduqués — et mieux éduqués.

En effet, selon eux, l’enseignement à distance et par moyens numériques autorise une plus grande modularité. Par ailleurs, les systèmes de création collective de connaissances, tels que Wikipédia, génèrent des compétences importantes tels que l’esprit critique et la résolution de problèmes.

Attention : sur ces derniers points, il importe de noter que les prévisions des auteurs ne se sont pas vraiment confirmées. En effet, les MOOCs et autres types d’enseignement à distance n’ont pas vraiment connu le succès attendu. Par ailleurs, à en croire certains experts, il n’est pas sûr qu’Internet et les outils numériques améliorent véritablement la qualité de l’éducation.

Une meilleure qualité de vie

Une prédiction tout à fait juste d’Erich Schmidt et Jared Cohen (parmi beaucoup d’autres) est la suivante : « Vous seul, et pas le programme de télévision, déciderez quoi regarder sur vos écrans ». En effet, nous avons désormais Netflix — notamment !

Au-delà des gadgets, de réelles améliorations de vie découlent et découleront de la révolution numérique, pour les auteurs. Dans le domaine de la sécurité, bien sûr. Mais aussi de la santé.

Par exemple, nous aurons de plus en plus de capteurs sur nos dispositifs portables. Ceux-ci prendront des mesures de notre corps en temps réel et nous avertiront de notre état de façon régulière. Ceux qui ont des smartphones et des montres connectées le savent déjà !

C’est ce qui est nommé le « soi quantifié » (quantified self), dont parle aussi — pour le critiquer cette fois — Yuval Noah Harari dans Homo Deus. Mais pensez aux bénéfices que cela peut avoir pour les personnes avec des maladies chroniques…

De façon générale, la médecine devient chaque jour plus mobile et plus personnalisée. Et cela passe par les smartphones des personnes. Certes, les auteurs sont conscients que cela ne remplace pas des systèmes de soins performants. Mais ils considèrent néanmoins que c’est un progrès souhaitable.

La frange supérieure

« La connectivité profitera à tout le monde. Ceux qui n’en disposent pas du tout en disposeront un peu, et ceux qui en disposent déjà en auront encore plus », annoncent Erich Schmidt et Jared Cohen.

Les plus aisés pourront bénéficier d’une domotique complètement intégrée à leur smartphone ou à un simple dispositif de contrôle vocal, par exemple. Ils contrôleront toute leur maison d’un son ou d’un geste.

Les auteurs annoncent également que les voitures sans conducteur seront une réalité. À noter : en 2023, elles le sont presque (pensons notamment aux Tesla qui incorporent des fonctionnalités avancées) mais ce n’est pas encore complètement une réalité quotidienne, même pour les plus riches d’entre nous !

2 — L’avenir de l’identité, de la citoyenneté et du journalisme de reportage

Les auteurs affirment que la population virtuelle devient plus importante que celle de la Terre. Qu’est-ce que cela signifie ?

En un mot, que chacun d’entre nous a plusieurs identités en ligne. Autrement dit, si la Terre entière est connectée, eh bien il y a mécaniquement « plus » de « personnes » dans le monde virtuel. Pourquoi ? Eh bien justement car chaque individu « réel » a plusieurs « personnalités » virtuelles.

La révolution des données

Le plus important dans tout cela est sans doute la révolution des données. Nous laissons de plus en plus de traces de nous (nos personnalités virtuelles, nos comptes de ceci ou cela, nos mouvements d’achat, etc.) en ligne.

Ce que nous nommons aujourd’hui le Big Data est bel et bien une réalité. Les entreprises et les États captent de plus de plus d’informations nous concernant. Souvent, pour améliorer nos expériences de consommation ou pour nous permettre d’accéder à des services publics.

Les flux constants de données et la possibilité de les utiliser dans un sens ou dans un autre vont créer, selon les auteurs, une « ère de la pensée critique ». Plus de lanceurs d’alerte, plus de contrôle des propos, plus de transparence.

À noter : il faudrait tempérer ce propos. Nous voyons aujourd’hui abonder les fake news et autres dénonciations en ligne. Contrairement à l’esprit critique, celles-ci font plutôt proliférer une « ère du complot et du soupçon généralisé ». 

Les traces dureront dans le temps et autoriseront certaines personnes à en juger d’autres. Il faudra donc faire de plus en plus attention à ce que nous publions sur le Net. Cette préoccupation est bel et bien présente dans nos quotidiens, aujourd’hui.

De nouveaux métiers vont apparaître, tôt ou tard :

Entreprises consacrées à la confidentialité et à la réputation (elles existent) ;

Assurances proposant d’assurer nos identités en ligne contre le vol ou le piratage.

Les auteurs continuent le chapitre en discutant des activités de WikiLeaks. Ils ont interviewé Julian Assange et mentionnent quelques extraits de leurs discussions. Les pratiques d’Alexeï Navalny sont aussi discutées.

La crise du journalisme

Le journalisme est devenu du journalisme web. Le journalisme se transforme chaque jour à plusieurs niveaux (que nous pouvons encore observer en 2023) :

Rapidité et nouveaux canaux de distribution de l’information (réseaux sociaux) ;

Restructuration des grandes entreprises d’information ;

Diversification des tâches du journaliste et formes plus collaboratives ;

Apparition de nouveaux types d’informateurs (non seulement locaux, mais en ligne) ;

Interférences entre « journalisme » et « marque personnelle » de certaines célébrités ;

Plus grande difficulté des gouvernements autoritaires à museler la presse, via la création d’une presse indépendante en ligne.

Reconsidérer la confidentialité — différentes implications pour différents citoyens

« La sécurité et la confidentialité relèvent d’une responsabilité que se partagent les entreprises, les usagers et les institutions qui nous entourent », rappellent les auteurs.

En effet, nous attendons des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) qu’elles protègent nos données. Par ailleurs, nous devons y veiller nous-mêmes et la puissance publique doit aussi prendre des mesures en ce sens.

Il importe par exemple de rappeler que, depuis la rédaction de cet ouvrage, l’Union européenne a adopté le Règlement général de protection des données (RGPD) censé réguler les échanges de données entre entreprises et citoyens.

Chacun de nous sera de plus en plus confronté au jugement d’autrui et à une forme d’évaluation constante. Et de fait ! N’est-ce pas une chose à laquelle nous nous sommes déjà habitués avec toutes les évaluations et recommandations que nous envoyons/recevons sur les différentes plateformes… ?

Cette vigilance accrue de chacun vis-à-vis de chacun pourra créer des tensions, mais améliorera globalement la transparence. Un faux expert ou un politicien corrompu peut désormais se cacher moins longtemps.

Les auteurs traitent des conséquences de la connectivité dans plusieurs types de régimes, des plus démocratiques aux plus autoritaires. Ils montrent que les États seront souvent tentés d’utiliser ces techniques pour augmenter le niveau de contrôle sur leurs ressortissants.

Pensons par exemple à la Chine aujourd’hui et à son utilisation des réseaux sociaux…

Stratégies d’adaptation

Quatre grandes stratégies d’adaptation à la « révolution des données » voient le jour et continuent de se développer aujourd’hui :

Les entreprises doivent inventer des dispositifs pour assurer la confidentialité et la sécurité des données ;

Le droit est un moyen efficace d’obliger les entreprises à agir dans le sens voulu par les citoyens d’un pays ou d’une région (c’est le cas avec le RGPD) ;

La société civile se lève aussi régulièrement pour dénoncer et mener des campagnes de sensibilisation aux enjeux du Big Data (nous pouvons penser, entre autres, à la création du parti pirate) ;

Les citoyens peuvent également choisir d’interagir directement entre eux sans passer par une tierce partie sur Internet, via des dispositifs PeerToPeer (P2P) et chiffrés.

État policier 2.0

Un jeu de chat et de la souris s’installe entre les États autoritaires et les individus cherchant à y échapper ou à renverser le pouvoir. Les technologies numériques servent aux premiers à créer une surveillance plus subtile et accrue. Mais elles sont également utilisées par les seconds pour lui résister !

La récolte de données en ligne et l’usage de logiciels de reconnaissance faciale à grande échelle sont déjà des réalités dans de nombreux pays. Les données biométriques (traits du visage, empreintes digitales, etc.) sont particulièrement recherchées par les administrations.

Dans les États démocratiques, il importe que des débats aient lieu pour décider de ce qui pourra être fait de ces données.

3 — L’avenir des États

Les États ne peuvent pas contrôler tous les flux d’informations qui circulent et s’amplifient constamment sur Internet. Mais ils ont un pouvoir sur l’infrastructure matérielle qui le rend possible.

N’oublions pas, en effet, qu’Internet n’existe que par l’entremise d’un gigantesque réseau de machines connectées entre elles, notamment par de la fibre optique.

Mais il y a d’autres problèmes qui surgissent. Comment évoluent les relations entre États dans le monde virtuel ? C’est l’une des questions intéressantes posées par les auteurs Eric Schmidt et Jared Cohen.

La balkanisation d’Internet

Chaque État tente de former un Internet à son image. Par exemple, chaque pays filtre ce qui est permis ou non. Il agit en fonction de normes qui lui sont propres. Les infrastructures diffèrent également.

Le grand réseau d’Internet se fractionne donc en réseaux régionaux ou nationaux. C’est une vérité aujourd’hui, puisque les services, les sites et les possibilités qu’offrent aujourd’hui Internet en Chine, en Russie, en Afrique ou en Europe sont bel et bien différents.

Les auteurs abordent plus en détail les cas de :

La Chine ;

L’Allemagne ;

La Malaisie.

Mais ils parlent aussi de l’Arabie Saoudite, de l’Iran et de bien d’autres pays.

Selon Eric Schmidt et Jared Cohen, en tant que consommateurs, nous ne nous rendons pas vraiment compte de ce phénomène de « balkanisation » (fragmentation) d’Internet.

Multilatéralisme virtuel

Cette fragmentation n’empêche pas la collaboration entre États. Celle-ci se fait sur base d’affinités politiques ou idéologiques. Les États-Unis et l’Europe partagent par exemple un grand nombre de services.

Cette réalité vaut également pour les pays autoritaires, qui s’échangent leurs savoirs et savoir-faire. Les auteurs rapportent par exemple comment Huawei, géant chinois des télécommunications, a proposé son aide à l’Iran en matière de censure.

Des accords multilatéraux sont également constamment établis afin de protéger les droits de propriété intellectuelle liés aux nouvelles technologies. Ceux-ci permettent à la fois de créer des alliances commerciales et de se protéger de concurrents indésirables.

Indépendance virtuelle

Eric Schmidt et Jared Cohen évoquent la possibilité que certaines communautés, comme les Kurdes par exemple, utilisent le monde numérique pour réclamer leurs droits.

Il est en effet possible d’imaginer des « déclarations d’indépendance virtuelles », lorsque celles-ci sont impossibles à créer dans le monde physique.

À noter : en 2023, il ne semble pas que ce type d’événement se soit produit.

Provocation numérique et cyberguerre

« Ceux qui sous-estiment la menace de la cyberguerre le font à leurs risques et périls. Le phénomène ne mérite peut-être pas tant de battage, mais le danger est bien réel. Les cyberattaques sont chaque année plus fréquentes et plus précises. Plus nous enchevêtrons notre existence avec les systèmes d’information numérique, plus nous devenons vulnérables. » (À nous d’écrire l’avenir, p. 155)

En 2023, nous savons que de nombreuses cyberattaques ont lieu. Elles sont organisées par les États eux-mêmes — la Russie, par exemple, qui affectionne ce moyen d’action. Parfois aussi par des groupes plus ou moins bien intentionnés.

Les entreprises et les individus peuvent être tantôt victimes, tantôt à la source de cyberattaques ou de piratages informatiques. Qui n’a pas eu affaire à au moins une tentative d’hameçonnage frauduleux pour récupérer ses données bancaires ?

Pour en revenir au niveau des États, les auteurs citent l’importance cruciale des fabricants de matériel de télécommunications. Les accords commerciaux qui se créent entre les États et ces firmes peuvent poser des questions de sécurité.

Un exemple récent, datant de 2020 : la controverse qui a explosé en Europe et aux États-Unis autour de l’implantation de la 5G par l’entreprise Huawei.

La guerre des codes

Cette section traite en particulier de l’espionnage industriel. Les auteurs insistent tout particulièrement sur le caractère volontariste des autorités (et entreprises) chinoises en ce domaine. Mais les États-Unis et les pays occidentaux ne sont pas en reste.

C’est une véritable guerre économique qui se passe en sous-main, sans que les consommateurs que nous sommes se rendent compte de grand-chose au quotidien !

4 — L’avenir de la révolution

C’est aujourd’hui un fait connu : les nouvelles technologies d’information et de communication ont joué un rôle certain dans les révolutions du Printemps arabe.

De fait, la société civile est amenée à être de plus en plus active avec les réseaux sociaux et les moyens techniques mis à sa disposition. Toutefois, tous les soubresauts révolutionnaires n’aboutiront sans doute pas. C’est ce que les auteurs analysent dans ce chapitre.

Facile au début…

Eric Schmidt et Jared Cohen se montrent particulièrement optimistes quant à l’émergence de nouveaux leaders d’opinion et de mouvement sociaux grâce au Web 2.0 et aux nouvelles formes de connectivité.

« Ces nouveaux mouvements révolutionnaires comprendront plus de participants occasionnels ou anonymes qu’aujourd’hui, pour la simple raison que le citoyen aura une plus grande maîtrise du moment et de la forme de son action », selon les auteurs.

La structure classique des mouvements militants est appelée à se modifier. De nouvelles formes d’organisation émergent et se solidifient grâce aux moyens numériques. Le crowdsourcing permet par exemple d’obtenir du soutien en ligne.

Une manifestation contemporaine de ceci est le nombre de pétitions qui circulent en ligne. En avez-vous déjà signé certaines ? Ou avez-vous, par exemple, contribué à récolter des fonds lors d’une campagne éclair sur Facebook. ?

Les auteurs affirment également que les personnes se tiendront au courant des manifestations dans le monde entier et ils prévoient l’éclosion encore plus marquée d’un « tourisme de la révolution ».

Il est certain que les réseaux sociaux offrent la possibilité de se tenir au courant et de se réunir beaucoup plus facilement qu’auparavant. Aujourd’hui, vous pouvez suivre les déplacements de Greta Thunberg (presque) en direct et la rejoindre dans ses actions si le cœur vous en dit !

… mais plus difficile à conclure

Toutefois, ces technologies ont des pouvoirs limités. Ces pouvoirs ne sont pas suffisants pour créer le changement décisif qui fait basculer un mouvement du soulèvement à la révolution réussie. Mais ces technologies peuvent assurément jouer un rôle important, comme les printemps arabes l’ont démontré.

Les auteurs reviennent sur certains événements de 2010-2012 en Lybie et en Tunisie. Mais ils abordent aussi le cas des troubles en Afrique du Sud. Plus généralement, ils traitent d’une question centrale : l’importance de ne pas laisser les mouvements de résistance aux mains de quelques célébrités.

Or, cette tendance est accrue par les réseaux sociaux. Par ailleurs, les mouvements peuvent prendre plus de « place » dans le monde virtuel qu’ils n’en prennent dans le monde physique. Cela crée des « dégonflements » de mouvements ou de « faux départs ».

Répression et endiguement virtuels

Les États autoritaires cherchent aussi à faire taire activement ces groupes. Pour cela, ils peuvent « couper » la connexion ou tenter de le faire. Ils peuvent également agir par la violence ou trouver des moyens plus subtils de « tuer dans l’œuf » les tentatives de rébellion.

Répression virtuelle et physique vont maintenant de pair. Des « infiltrés » des gouvernements en place peuvent contribuer à semer le trouble dans les mouvements qui se constituent en ligne, par exemple.

Ou même encore plus subtil : offrir des espaces virtuels de « défoulement » où les personnes peuvent clamer leur rage et leur mécontentement… Sans jamais passer à l’action.

Ces stratégies font partie de ce que Erich Schmidt et Jared Cohen nomment des stratégies d’« endiguement virtuel ».

Plus de « printemps »

Le cas du Printemps arabe est particulier pour plusieurs raisons. En effet, les auteurs analysent que :

Le monde arabe se distingue par son identité régionale (histoire, langue, culture) ;

Les réseaux religieux organisés jouent le rôle d’une société civile organisée.

Toutes les régions du monde n’ont pas ces caractéristiques et certains pays sont plus isolés, moins organisés que d’autres. La révolution ne peut donc éclore partout où les régimes autoritaires existent, même avec l’aide des technologies numériques.

Un problème de taille émerge également, que les auteurs évoquent en citant l’ancien Premier ministre de Singapour, Lee Hsien Loong :

« Le danger auquel nous risquons d’être confrontés à l’avenir, c’est qu’il sera beaucoup plus facile d’être opposé à quelque chose qu’en faveur. » (À nous d’écrire l’avenir, p. 217-218)

Cette prédiction se retrouve aujourd’hui dans nombre des comportements visibles sur Internet. De nombreux experts ont analysé, depuis plus de dix ans, l’évolution de campagnes de haine contre tel ou tel phénomène. Oui, il est plus facile d’être « contre » que « pour » quelque chose.

Si vous voulez en savoir plus à ce sujet, lisez la suite du chapitre où les auteurs décortiquent un cas cocasse, mais fascinant : celui du « currygate » qui a explosé au Singapour en 2010.

5 — L’avenir du terrorisme

Les auteurs craignent l’alliance mortifère entre terrorisme et numérique.

Nous le savons aujourd’hui : comme tous les autres mouvements, les groupes terroristes recrutent sur Internet (via des sites ou des chaînes YouTube) et communiquent via des moyens numériques.

Nouvelle porte, nouveaux risques

Par ailleurs, Internet permet également d’apporter des connaissances autrement impossibles à acquérir. Les personnes mal intentionnées peuvent, à tout moment, trouver sur le Net comment fabriquer une bombe ou autre.

Par ailleurs, comme nous l’avons déjà évoqué, les terroristes peuvent opérer directement dans le monde virtuel et, par ce biais, endommager des infrastructures ou créer des dommages bien réels. Ce sont les cyberattaques.

À l’heure actuelle, les terroristes ambitieux doivent se rendre maîtres des médias. Même les plus antimodernes et antioccidentaux n’ont pas le choix : s’ils veulent que leur action soit plus efficace, ils sont contraints d’exceller dans ces technologies.

En fait, c’est même le « marketing numérique », comme disent les auteurs, qu’ils doivent maîtriser.

Eric Schmidt et Jared Cohen abordent aussi la question des prisons. Documents à l’appui, ils remarquent que les prisonniers parviennent à se munir de matériel informatique même dans les régions les plus reculées de la planète. Ils discutent également d'une mesure radicale : geler l’identité virtuelle des détenus.

L’avènement des hackers terroristes

Une information importante est à retenir ici : à l’heure des pirates et des hackers, il n’est pas besoin d’être très nombreux pour avoir un impact significatif dans l’espace virtuel.

« En fait, il n’y a pas de masse critique à atteindre — un seul individu doué peut faire agir des milliers d’ordinateurs à sa volonté », rappellent les auteurs, qui donnent plusieurs exemples édifiants.

De l’autre côté, les États et leurs forces militaires cherchent eux aussi à débaucher des hackers afin de les faire travailler avec eux. Les petits génies turbulents de l’informatique deviennent des talents hautement recherchés !

Le talon d’Achille des terroristes

« Le revers de la médaille du cyberterrorisme, c’est qu’elle réduira la marge d’erreur de ses adeptes », disent Eric Schmidt et Jared Cohen. Oui, car toute connexion signifie potentiellement une possibilité de découverte. Or les terroristes doivent rester cachés.

À l’heure d’Internet, une seule petite erreur et ce peut être la fin d’un terroriste. Et il n’y a pas de raison de penser que ceux-ci ne feront pas d’erreurs, de temps à autre. Comme tout un chacun, ils deviennent eux aussi accrocs aux smartphones et ne prendront pas toujours les bonnes décisions.

Par ailleurs, attraper un ou plusieurs terroristes signifie aussi mettre la main sur le réseau qu’ils utilisent. Cette mine d’information peut conduire à d’autres arrestations, etc.

Interdit aux gens cachés

Les auteurs font ici une prédiction étonnante. Selon eux, certains gouvernements — y compris qualifiés de démocratiques comme les États-Unis — pourraient bien imposer aux personnes d’être connectées.

« Les gouvernements en viendront peut-être à considérer, par exemple, qu’il est trop risqué de laisser des citoyens “hors-circuit”, totalement déconnectés de l’écosystème numérique. Il ne fait aucun doute qu’à l’avenir, comme aujourd’hui, certains individus résisteront à l’adoption et à l’utilisation de la technologie […] Pourtant, il est fort probable que les autorités soupçonneront quiconque choisira la disparition totale d’avoir quelque chose à cacher […] » (À nous d’écrire l’avenir, p. 256-257)

Cette prédiction fait un peu peur. N’aurons-nous plus la possibilité de choisir notre mode de vie, avec ou sans moyens numériques ? Heureusement, pour l’instant et à notre connaissance, aucune mesure radicale de ce genre n’a été prise dans les pays occidentaux.

Par contre, ce qui a bel et bien créé l’inquiétude des pays occidentaux, c’est la machine de guerre du renseignement qui a été mis en place par les États-Unis après les attentats du 11 septembre 2001. Les auteurs en parlent pendant de longues pages.

Si vous voulez en savoir plus à ce sujet, vous pouvez aussi lire l’autobiographie d’Edward Snowden, Mémoires vives.

La conquête des cœurs et des esprits gagne le monde virtuel

Google Ideas est une branche de Google qui étudie notamment le phénomène de la radicalisation. Les études qui y sont menées montrent que les causes de celle-ci sont à chercher dans les sentiments d’abandon ou de recherche de sens ressentis par les jeunes gens.

Eric Schmidt et Jared Cohen montrent qu’il est possible d’enrayer ce phénomène en créant des opportunités et des distractions liées au numérique. Oui, pour les auteurs, la lutte contre la radicalisation passe par la technologie.

En résumé, « la clé consiste simplement à laisser les gens s’adapter aux produits selon leurs besoins et sans que cela demande trop d’expertise technologique ». Il suffit de mettre à disposition des personnes désœuvrées les moyens de bricoler par eux-mêmes des dispositifs techniques qui donnent un peu plus de sens à leur existence.

Bien sûr, le terrorisme ne sera pas exterminé de cette façon. Il est même plus que probable qu’il ne le soit jamais complètement, quels que soient les moyens employés. Mais ce qui est sûr, c’est que les entreprises technologiques sont appelées à jouer un rôle toujours plus important dans l’effort pour en maîtriser le développement.

6 — L’avenir du conflit, du combat et de l’ingérence

« Jamais dans le passé nous n’avons été aussi conscients des nombreux conflits en cours dans le monde […] Mais la presse se nourrit d’images sanglantes. Et ce qui a changé, ce n’est pas le nombre des conflits, c’est leur visibilité. En vérité, nous vivons des temps plus pacifiques que jamais. » (À nous d’écrire l’avenir, p. 271)

C’est aussi ce que dit un auteur comme Hans Rosling dans son livre Factfulness.

Pour autant, les conflits, plus ou moins importants, ne sont pas près de disparaître complètement (et nous en avons des preuves supplémentaires en 2023).

Moins de génocides, plus de harcèlement

Les auteurs étudient ici les mouvements de répression à l’encontre de minorités dans plusieurs pays. Cette répression peut s’exercer de façon plus ou moins forte et trouver des moyens de s’exprimer en ligne.

Par exemple, un gouvernement peut prendre des mesures discriminatoires pour que certaines parties de sa population n’aient pas accès aux services numériques de base. Il a aussi les moyens de les « harceler » en lui barrant l’accès à des ressources données ou en créant des campagnes diffamatoires.

Cette discrimination virtuelle est dangereuse, car le Web permet — comme nous l’avons déjà souligné — un anonymat et donc une forme de libération de la haine et de déshumanisation des rapports humains.

Conflit multidimensionnel

Dans les conflits armés, les « bons » se distinguent parfois difficilement des « méchants ». Les deux camps d’une guerre commettent des actes horribles.

En fait, c’est aussi pourquoi ils se livrent à une intense « guerre de communication », chacun essayant de justifier ses actions et de mettre l’accent sur les atrocités de l’autre partie.

Avec la venue des fake news — et depuis quelques années seulement des deep fakes —, la question de la manipulation des informations se fait encore plus pressante et complexe.

Le rôle des analyses et de l’esprit critique n’en devient que plus capital. C’est ce que les auteurs nomment la « vérification numérique ». Celle-ci revient aux journalistes, bien sûr, mais pas seulement. Les gouvernements doivent également être capables de distinguer le vrai du faux pour savoir comment agir.

Une proposition des auteurs mérite d’être signalée : envoyer des équipes internationales de « vérification numérique » sur les conflits, considérées comme intervenants neutres (comme la Croix-Rouge par exemple).

La guerre automatisée

Dans cette section, les auteurs se penchent sur la possibilité que les robots remplacent les guerres entre humains. Il y a déjà bien des formes robotiques qui sont utilisées dans les guerres (des missiles à tête chercheuse aux drones, etc.). Mais la guerre peut-elle être totalement automatisée ?

Eric Schmidt et Jared Cohen détaillent les différents projets en cours (en 2012) pour doter les soldats de plus grands moyens ou pour les remplacer dans certains cas. Ils terminent par évoquer les nombreuses questions qui se posent, telles que les capacités de discernement ou la responsabilité pénale du robot, par exemple.

Nouvelles ingérences

Les coalitions d’États qui voudront intervenir dans les conflits seront amenées à unir leurs forces pour créer des zones sécurisées en matière de communication, notamment.

7 — L’avenir de la reconstruction

Après un conflit ou une catastrophe, les technologies de communications numériques jouent un rôle important pour la reconstruction. Elles ne peuvent pas tout faire, bien sûr. Leur rôle est même limité. Mais elles importent dans la mesure où elles facilitent les relations entre parties prenantes.

Les communications d’abord

Les auteurs plaident ici pour la priorisation de la reconstruction du secteur des télécommunications. « Le remise en service et la modernisation des réseaux de communication sont déjà le ciment des méthodes de reconstruction actuelles », rappellent les auteurs. Il faudra, selon eux, amplifier encore cette approche. 

Les auteurs donnent différents exemples de reconstructions passées :

En Irak après la chute de Saddam Hussein ;

En Afghanistan après la chute des talibans ;

À Haïti, après le tremblement de terre de 2010 ;

Après le Printemps arabe.

Les États et les institutions qui aident à la reconstruction devraient privilégier la mise en place d’infrastructures de télécommunication de pointe. C’est un atout pour la coordination du travail. Mais aussi pour la reprise économique.

« Dans l’idéal, les efforts de reconstruction ne se bornent pas à recréer ce qui existait auparavant, mais, dans la mesure du possible, à améliorer la situation d’origine et à développer des pratiques et des institutions qui réduisent le risque de répétition des catastrophes. » (À nous d’écrire l’avenir, p. 333)

Or, pour les auteurs, les technologies numériques peuvent améliorer considérablement la situation d’origine en créant une sorte de filet de sécurité virtuel pour les institutions physiques, voire pour le gouvernement lui-même.

En cas de nouvelle catastrophe, les institutions virtuelles pourront prendre le relai et les données d’un État pourront être sauvegardées.

Opportunisme et exploitation

Dans les moments qui suivent une catastrophe naturelle ou un conflit, de nombreux acteurs interviennent et certains d’entre eux cherchent à tirer profit de la situation. L’égoïsme se tient côte à côte des gestes d’altruisme.

Au-delà de ce problème, la connectivité rend possible l’action d’un plus grand nombre de personnes et d’institutions à la reconstruction. Notamment par les plateformes de collecte de fonds en ligne ou la mobilisation plus rapide d’équipes d’urgence.

Les organisations non gouvernementales (ONG) utilisent désormais les méthodes du marketing numérique. C’est ce qui est aussi appelé marketing social. Toutes les ressources offertes par les nouvelles technologies de l’information et de la communication sont mises à profit par les associations caritatives et la société civile.

L’un des problèmes, selon les auteurs, est que nous risquons de nous retrouver « bombardés » par les demandes d’aides ou d’intervention. Il y aura une grande concurrence pour attirer l’attention du citoyen aisé occidental vers tel ou tel problème.

Finalement, c’est tout le secteur des ONG et de l’aide humanitaire qui devra se recomposer à partir de l’intrusion du marketing numérique.

Faire place à l’innovation

Eric Schmidt et Jared Cohen donnent des exemples d’innovations créées après une crise pour aider les populations à reconstruire leurs infrastructures et leurs institutions. Ou à sauver des vies !

Plus que jamais, le téléphone portable, muni d’applications spécialisées, devient un outil multifonctionnel qui pourra être utilisé positivement. Pourquoi ? Car il accroît la possibilité d’agir de chaque personne. Grâce à nos smartphones, nous pouvons :

Téléphoner pour prévenir de quelque chose (bien sûr !), mais aussi ;

Envoyer une photo (en cas d’agression ou de vol, par exemple) ;

Participer à des campagnes de fonds ;

Aider à géolocaliser tel individu, etc. ;

Témoigner sur les réseaux sociaux et créer des groupes ;

Et bien d’autres choses encore, car un grand nombre d’applications peuvent être créées pour soutenir la reconstruction.

Les auteurs abordent également la question de la traçabilité des armes ou des biens de première nécessité grâce aux puces RFID (radio frequency identification).

Ils évoquent également les innovations créées lors de différents processus de reconstruction, au Rwanda, en Colombie et en Irak, notamment.

Et ils terminent par cette note positive :

« De tous les sujets que nous avons abordés, l’avenir de la reconstruction est peut-être celui qui prête le plus à l’optimisme. Peu de choses sont aussi destructrices qu’une catastrophe naturelle ou la guerre, voire les deux, mais il apparaît nettement que les processus de transition suivant une crise tendent à devenir plus brefs et plus satisfaisants. Pour une fois en matière de géopolitique, le monde semble disposé à tirer les enseignements de chaque cas de reconstruction, à retenir ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas et ce qui mérite perfectionnement. » (À nous d’écrire l’avenir, p. 368)

Conclusion

Le numérique n’en est qu’à ses débuts. Une nouvelle révolution industrielle est en cours et il sera — selon les auteurs — impossible de l’arrêter. Le rythme de croissance est tel que, bientôt, tout le monde sera équipé. De nouvelles technologies, plus performantes, ne cesseront de voir le jour.

Telle est la vision positive et volontariste d’Eric Schmidt et Jared Cohen. Selon eux, même si elle n’est pas la panacée, la technologie informatique est néanmoins une formidable opportunité pour l’humanité.

Pour terminer les auteurs évoquent 4 grandes lignes de bouleversements en cours :

L’alliance de plus en plus forte de la machine et de l’humain ;

L’intrication de plus en plus forte des mondes virtuel et physique ;

Le doublement du travail des États, obligés d’intervenir dans ces deux mondes ;

Le rapport à nos données et à la vie privée.

En 2023, nous sommes toujours aux prises avec ces questions — et nous le sommes sans doute pour quelque temps encore ! Elles deviennent, de jour en jour, d’une actualité plus brûlante.

Conclusion sur « À nous d’écrire l’avenir : Comment les nouvelles technologies bouleversent le monde » d’Eric Schmidt et Jared Cohen :

Ce qu’il faut retenir de « À nous d’écrire l’avenir : Comment les nouvelles technologies bouleversent le monde » d’Eric Schmidt et Jared Cohen :

Ce livre est un plaidoyer pour « plus » de numérique, dans tous les aspects de nos relations sociales et humaines. Les auteurs ne nient pas les dangers et l’instabilité qui peut découler de l’adoption de nouvelles technologies. Mais ils pensent que les gains dépasseront les pertes.

Surtout, ils invitent tout un chacun à se saisir des opportunités offertes par cette nouvelle « connectivité » numérique. Chacun d’entre nous peut, à son échelle, créer une différence. En partageant des informations, en créant des applications ou par bien d’autres actions encore…

« Combien d’idées, de perspectives et de créations va produire la véritable inclusion technologique mondiale, et à quelle vitesse leur effet se fera-t-il sentir ? L’arrivée de nouveaux participants dans le monde virtuel est une bonne nouvelle pour eux, mais aussi pour nous. Le bénéfice collectif du partage du savoir et de la créativité des humains se multiplie de façon exponentielle. » (À nous d’écrire l’avenir, p. 370)

Progressivement, l’humanité toute entière se dotera d’outils numériques. Même les zones reculées pourront participer à l’évolution du monde virtuel et en profiter. Finalement, c’est là le fer de lance d’Eric Schmidt et Jared Cohen (qui, ne l’oublions pas, prêchent pour leur chapelle) : diffuser les technologies numériques le plus largement possible dans le monde.

Points forts :

Une pensée originale, ambitieuse et stimulante ;

Des exemples à la fois personnels et issus des plus importantes personnalités du monde ;

Un style tout à fait simple et accessible, sans (trop de) jargon technique.

Point faible :

Il faut être conscient que c’est le point de vue de cadres dirigeants de Google. Leur vision n’est donc pas « neutre », mais naturellement dirigée dans le sens d’un optimisme technologique (comme c’est le cas pour les ouvrages de Bill Gates, tel que Climat, par exemple).

Ma note :

★★★★★

Avez-vous lu le livre d’Eric Schmidt et Jared Cohen « À nous d’écrire l’avenir : Comment les nouvelles technologies bouleversent le monde » ? Combien le notez-vous ?

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Thu, 21 Mar 2024 17:00:00 +0100 http://www.olivier-roland.fr/items/view/12800/-nous-dcrire-lavenir
L’Âge de l’IA http://www.olivier-roland.fr/items/view/12756/Lge-de-lIA

Résumé de « L'Âge de l'IA » de Henry Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher : si vous voulez réfléchir aux avancées récentes de l'intelligence artificielle et à ses effets sociaux, économiques et géopolitiques, alors ce livre — best seller acclamé, entre autres, par le Wall Street Journal, The Financial Times et The Economist —  est fait pour vous !

Par Henry Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher (2022)

Titre original : The Age of AI, 2022.

Chronique et résumé de « L'Âge de l'IA » de Henry Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher

Chapitre 1 — Où nous en sommes

Trois événements récents suscitent l’attention des auteurs.

AlphaZero

Tout d’abord, il y a la victoire d’AlphaZero (IA développée par Google) sur Stockfish, un autre programme informatique. Ce qu’il y a d’original, c’est que AlphaZero et Stockfish ne sont pas du tout conçus de la même façon.

Stockfish est une IA "ancienne manière", à qui des humains ont transmis leurs connaissances. Sa particularité, par rapport à l'intelligence humaine, est qu'elle calcule beaucoup plus vite.

AlphaZero est une IA qui a appris par elle-même, en jouant des parties contre elle-même et en développant ses propres combinaisons gagnantes.

Autrement dit, AlphaZero joue d'une manière nouvelle, exécute des coups auxquels aucun humain ne se serait risqué. Comme le dit Gary Kasparov, cité par les auteurs, "Le jeu d'échecs a été bouleversé dans ses racines mêmes".

De nouvelles molécules

Le Massachussetts Institute of Technology (MIT) a développé une IA capable de classer et sélectionner des molécules pour leurs propriétés antibiotiques. Ce qui étonne les auteurs, c'est que l'IA a créé des liens et établit des catégories que les scientifiques n'avaient pas forcément faites.

Autrement dit, elle a sélectionné des molécules sur des bases nouvelles, qui demeuraient inaperçues aux chercheurs :

"L'intelligence artificielle que les chercheurs du MIT ont entraînée n'a pas simplement récapitulé les conclusions issues des qualités des molécules déjà observées antérieurement. Elle a plutôt détecté de nouvelles qualités moléculaires — des relations entre des aspects de leur structure et de leur capacité antibiotique —  que les humains n'avaient jamais perçues et encore moins définies." (L'Âge de l'IA, Chapitre 1)

ChatGPT-3

Quelques mois plus tard, la société OpenAI a annoncé avoir développé son modèle génératif de troisième génération : GPT-3 (GPT pour "generative pre-trained transformer"). Aujourd'hui, nous le connaissons tous sous le nom de ChatGPT-3 (et maintenant, avec les avancées réalisées depuis, nous connaissons les modèles 3.5 et 4).

La nouveauté de ce modèle informatique est sa capacité à générer du texte d'apparence humaine à partir d'un simple prompt ou morceau de texte (bout de phrase, question, paragraphe, etc.).

À la différence des deux premières IA mentionnées plus haut, celle-ci n'est pas limitée aux échecs ou à la recherche moléculaire. Il peut répondre aux questions sur un grand nombre de sujets. Mais comme dans les deux cas précédents, une part du fonctionnement de cette IA demeure mystérieuse, car nous ne comprenons pas totalement comment la machine élabore et choisit ses combinaisons/réponses.

Objet du livre

Le livre a pour ambition de penser la "révolution" de l'IA ou, pour le dire plus précisément, de l'"apprentissage machine". Pour les auteurs, son développement semble "inévitable". Pour autant, nous pouvons en déterminer le sens, la destination.

D'où l'importance de se poser des questions, telles que :

Comment l'avenir de l'IA affectera la perception, la cognition et les interactions humaines ?

Quel sera l'impact de l'IA sur notre culture, notre conception de l'humanité, et, finalement, de l'histoire ?

L'humanité et le changement technique

Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher montrent que l'homme a, de tout temps, été confronté au changement technique. La voiture a remplacé le cheval ; le pistolet a remplacé la lance, etc. Il y a une foule d'exemples !

Cela dit, l'IA crée un changement plus important que les autres. Pourquoi ? Car elle s'applique à tous les secteurs de la vie humaine et que nous en contrôlons plus difficilement les ressorts. Par ailleurs, il s'agit d'une technologie qui se situe au niveau du "mental" et qui pourrait donc bien modifier nos façons de percevoir, de penser et d'agir dans le monde.

Désormais, nous avons à imaginer un monde où des découvertes et des décisions de première importance sont prises par des machines ou des collaborations machine-humain. Cela transforme la manière dont nous considérons nos propres pouvoirs et ceux des machines.

Chapitre 2 — Comment nous en sommes arrivés là : technologie et pensée humaine

Dans ce chapitre, les auteurs dressent un portrait de l'humanité au fil des âges. Ils passent en revue les différentes époques de l'humanité :

Antiquité ;

Moyen-Âge ;

Renaissance et modernité ;

Lumières et époque contemporaine.

Selon eux, l'intelligence artificielle a le pouvoir de nous faire passer à un nouvel âge de l'humanité. Autrement dit, nous serions sur le point de transformer en profondeur nos façons de nous rapporter au monde, aux autres et à nous-mêmes.

Pour étudier plus en détail ce point, Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher n’hésitent pas à revoir les classiques de la philosophie. Ils discutent les thèses de grands auteurs tels que :

Platon ;

Descartes ;

Leibniz et Spinoza ;

Kant ;

Berkeley ;

Diderot ;

Mais aussi des scientifiques Niels Bohr et Werner Heisenberg (à l'origine de la physique quantique).

Ce chapitre très érudit nous aide à mieux cerner les transformations de nos manières de penser au fil du temps. Et, notamment, cela nous permet de mieux comprendre comment nous nous sommes rapportés à la technique — en la considérant tantôt comme un simple outil, tantôt comme une menace ou comme un espoir.

Finalement, le chapitre se termine par une réflexion sur l'information et notre nouvelle impatience. Sommes-nous encore capables de transformer l'information en connaissance, puis en sagesse ? Avec l'abondance des contenus sur le web et la connexion permanente, nous pouvons parfois en douter.

Dans ce cas, les logiciels dotés d'IA vont-ils venir prendre la place de nos capacités mentales les plus précieuses (imagination, réflexion, etc.) ? Peut-être. En tout cas :

"En étant appliquée à de plus en plus d'éléments dans nos vies, l'IA est en train d'altérer le rôle que nos esprits ont traditionnellement joué dans la mise en forme, l'ordonnancement et l'évaluation de nos choix et de nos actions." (L'Âge de l'IA, Chapitre 2)

Chapitre 3 — De Turing à aujourd’hui — et au-delà

Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher continuent leur exploration en se rapprochant de plus en plus de l’époque présente. Ils étudient dans ce chapitre les débuts de l’informatique et de l’IA.

En voici trois étapes importantes :

1943 : création du premier ordinateur moderne.

1950 : article d'Alan Turing sur l'IA et invention du "test de Turing".

1956 : définition de l'IA par John McCarthy.

John McCarthy définit l'intelligence artificielle comme des "machines qui réalisent des tâches caractéristiques de l'intelligence humaine". C'est aussi ce que cherche à valider le test de Turing. À cette époque, ces auteurs focalisent leur attention sur les performances réalisées par les machines… Et c'est par ce biais qu'ils définissent l'intelligence.

Pendant longtemps, les machines n'ont pas vraiment réussi ces tests. Mais depuis peu, elles y parviennent plutôt bien. C'est pourquoi il importe de creuser un peu ce qu'il s'est produit au cours des 70 dernières années !

L'évolution de l'IA

Pour évoquer les problèmes qui se sont posés aux chercheurs, les auteurs choisissent de traiter de la question de la reconnaissance visuelle. En tant que jeunes enfants, nous pouvons faire cela sans problème. Mais pour les IA, c'est beaucoup plus compliqué !

En fait, il était tellement difficile de parvenir à reproduire mécaniquement et numériquement des tâches aussi simples que, pendant les années 1980 et 1990, il y eut peu de progrès. Les historiens de l’IA parlent d’« hiver de l’IA » pour caractériser cette période.

C'est alors qu'une nouvelle façon de considérer le problème permit de faire un bon en avant. Plutôt que d'essayer de mettre des informations à tout prix dans la "tête" des machines, il était préférable de les laisser apprendre toutes seules.

Comment ? En créant ce qui est aujourd’hui à la base de l’apprentissage machine : les réseaux de neurones.

"Pour identifier une image de chat, ils réalisèrent qu'une machine doit "apprendre" une variété de représentations visuelles de chats en observant l'animal dans des contextes variés. Pour rendre possible l'apprentissage des machines, ce qui importait était le chevauchement entre les diverses représentations d'une chose, et non son modèle idéal (...)." (L'Âge de l'IA, Chapitre 3)

L'IA moderne

Les réseaux de neurones ont fait avancer les recherches en IA. Ils permettent aux machines de capturer des relations complexes et profondes. Pour ce faire, il faut entraîner les IA avec un grand nombre de données et les laisser créer leurs propres catégories.

Oui : le big data est ici essentiel. En fait, la précision et la pertinence de l'apprentissage dépendent de la quantité et de la qualité des données qui sont fournies à la machine.

L'un des problèmes posés par ce type de technologie est son coût en termes de ressources. Il faut non seulement beaucoup de données, mais aussi une grande puissance de calcul.

Différentes tâches, différents styles d'apprentissage

Pour les machines, chaque tâche (reconnaître des images, générer du texte, etc.) requiert de nouvelles façons d’apprendre. Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher choisissent de présenter trois formes d’apprentissage machine particulièrement importantes.

Les spécialistes parlent d'apprentissage :

Supervisé ;

Non supervisé (ou autosupervisé) ;

Par renforcement.

Dans le premier cas, les machines sont guidées par les chercheurs. Ceux-ci leur fournissent des données d'entrée et de sortie "annotées" (déjà précatégorisées, en quelque sorte) et entraînent les machines à effectuer les bonnes associations.

Dans le cas de l'apprentissage non supervisé, les données sont fournies sans être annotées ; ce sont des données "brutes". Seules les données d'entrée sont fournies.

Enfin, l'apprentissage par renforcement est celui qui donne le rôle le plus "actif" à la machine. Ici, l'IA est un "agent" qui doit interagir avec un environnement contrôlé (artificiel). La machine va apprendre en ajustant progressivement ses réponses pour qu'elles deviennent correctes. Le feedback est ici essentiel.

Pour plus d'informations sur l'histoire et les types d'IA, consultez la chronique de L'IA pour les nuls !

La puissance de l'apprentissage machine

Les auteurs sont particulièrement enthousiastes à l'idée du développement de l'IA. Ils explorent rapidement ses possibilités dans trois secteurs :

Agriculture ;

Médecine ;

Finance.

Ils approfondissent davantage son rôle dans la communication et la traduction. Vous souvenez-vous des anciens traducteurs automatiques ? Ils fonctionnaient assez mal. Mais depuis quelques années, ils ont fait des progrès fulgurants, grâce à l’apprentissage machine et aux réseaux de neurones.

BERT, de Google, est le plus utilisé de ces réseaux pour la traduction et la génération de textes. Les spécialistes appellent "transformeur" (ou "transformer") les réseaux de ce type (bidirectionnels).

Une autre technique très utilisée (en complément de la première) se nomme "parallel corpora". C'est elle qui a permis à Google Translate d'améliorer ses résultats de 60 % !

Mais créer du texte est une opération qui va encore un pas plus loin.

"Pour illustrer ; un réseau de neurones standard peut identifier une image d'un visage humain, mais un réseau de neurones génératif peut créer une image de visage humain qui semble réelle." (L'Âge de l'IA, Chapitre 3)

L’une des techniques supplémentaires développées pour arriver à cette fin est le GAN (pour « generative adversial network »). En gros, c’est comme si vous utilisiez les deux parties de votre cerveau : l’une pour brainstormer et l’autre pour décider quelle est l’option la plus réaliste.

Les limites de l'IA et sa gestion

Les IA contemporaines sont capables de générer des connaissances étonnantes auxquelles les humains n'auraient pas pensé. Ce fut le cas pour la découverte de nouvelles molécules ou pour le jeu d'échecs.

Toutefois, ces machines ne peuvent pas expliquer ou justifier ces résultats. Pourquoi ? Car elles ne réfléchissent pas. "L'IA ne réfléchit pas ; c'est aux humains de décider de la signification de ses actions". Ceci implique que c'est aux humains de gérer les IA et leurs résultats.

Une autre limite de l'IA est qu'elle fait des erreurs — et même parfois des erreurs qu'un humain considérerait comme rudimentaires. À d'autres moments, ces erreurs sont des "biais" qui sont induits par ses créateurs.

Par ailleurs, l'IA n'est pas consciente d'elle-même. "Elle ne sait pas qu'elle ne sait pas", disent les auteurs.

Où est l'IA ?

Les recherches en IA ont explosé depuis quelques années. Mais elles se situent principalement en Chine et aux États-Unis. C'est là où les investissements sont les plus importants et où les résultats sont les plus prometteurs.

Comment ce champ de recherche va-t-il évoluer ? Difficile à dire. Nous ne sommes pas, comme dans le champ des microprocesseurs, face à une évolution de type "loi de Moore". Mais ce n'est pas impossible non plus que le nombre de neurones par réseau augmente de façon très rapide.

Cela dit, cette augmentation quantitative ne prédit en rien le succès de l'intelligence artificielle en termes qualitatifs : un cerveau peut avoir plus de connexions neuronales et ne pas être plus intelligent pour autant.

Le rêve de l'intelligence artificielle générale

L'intelligence générale artificielle (IGA) consiste en une intelligence artificielle capable de trouver des réponses sur n'importe quel sujet et pouvant exercer toutes les tâches mentales d'un humain. Certains chercheurs et philosophes souhaitent voir advenir ce type nouveau d'IA. Toutefois, son développement est très cher et peu peuvent s'y risquer.

D'autre part, les auteurs se montrent prudents, car l'IGA, tout comme l'IA, dépend de ses concepteurs. Et ici encore, des biais peuvent très bien survenir.

Enfin, Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher diminuent la différence entre les deux types d'IA et se focalisent sur le fait que, peu à peu, les IA interviendront dans tous les domaines de notre vie. Nous collaborerons avec elles de plus en plus souvent.

Les auteurs prennent plusieurs exemples :

La conduite de voitures autonomes ;

Le pilotage des avions ;

La découverte de nouveaux traitements médicaux ;

Le codage de programmes informatiques ;

La création de publicités ou de textes dans le copywriting.

Chapitre 4 — Les plateformes de réseau global

« Les réseaux sociaux, les recherches sur le web, la vidéo en streaming, la navigation, le covoiturage, et bien d’autres services en ligne ne pourraient pas exister tels que nous les connaissons sans l’utilisation étendue — et chaque jour grandissante — de l’IA. » (L'Âge de l'IA, Chapitre 4)

Le problème principal de l'IA, pour les auteurs, n'est pas le risque de fabriquer un jour des robots humanoïdes aussi intelligents, voire supérieurs à nous.

L'enjeu éthique se situe plutôt dans le fait que des IA de toutes sortes nous entourent déjà et fonctionnent autrement que les humains. En fait, elles fonctionnent d'une façon que nous comprenons mal ou — pour la plupart d'entre nous — que nous ne comprenons pas du tout.

Pourtant, ces technologies modifient nos vies individuelles, sociales et politiques. Sans grande révolution apparente, jour après jour, elles modifient « le tissu de base de l’activité humaine ». Et cela ne serait pas possible sans ce que Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher nomment les « plateformes de réseau ».

Comprendre les plateformes de réseau

Les plateformes de réseau sont "des services numériques qui génèrent de la valeur par ajout d'autres utilisateurs en très grand nombre, souvent à une échelle transnationale et globale".

La particularité économique de ces plateformes est que la présence accrue d’utilisateurs ne diminue pas leur valeur pour les utilisateurs déjà existants. Au contraire ! L’attractivité de ces plateformes grandit à mesure qu’il y a plus d’utilisateurs qui y entrent. Les auteurs nomment ce phénomène un « effet positif de réseau » (positive network effect).

Or, les IA jouent un grand rôle dans ces plateformes — et, avec elles, le big data, c’est-à-dire la collection de données à grande échelle.

Les auteurs donnent deux exemples de la puissance (et de l'omniprésence) de l'IA dans ces plateformes :

Facebook utilise entre autres l'IA pour réviser ses contenus ;

Google a introduit l'IA dans son algorithme de recherche.

L'intelligence non humaine s'est infiltrée au cœur de ces plateformes. Et celles-ci croissent de façon telle (grâce à l'effet positif de réseau) qu'elles mettent en péril les équilibres sociaux, politiques et économiques traditionnels.

Communauté, vie quotidienne et plateformes de réseau

Premièrement, nos relations quotidiennes à nos communautés (famille, amis, etc.) ont changé. Nous avons appris peu à peu à nous laisser guider par les recommandations des algorithmes pour des actions de la vie de tous les jours.

De nouvelles relations profondes nous unissent aux IA. D'un côté, nous les adoptons. De l'autre, elles utilisent des données très personnelles pour nous répondre. Et ces réponses, nous n'en comprenons pas l'origine, car l'IA "raisonne" à sa manière. Nous devons donc — et nous le faisons souvent de bonne grâce — nous confier en son pouvoir.

Pour donner un exemple de ces nouvelles relations avec nos machines, les auteurs prennent l'exemple de la navigation par GPS, qui inclut également des algorithmes pour déterminer la meilleure route à suivre.

Si ces enjeux vous passionnent, sachez que c'est une question qu'explore aussi Y. N. Harari dans Homo Deus.

Firmes et nations

Les GAFAM ont un poids politique important. En fait, par certains aspects, certaines plateformes de réseau accaparent certaines prérogatives de l'État. Elles ont aussi une capacité à influencer sur les choix politiques des citoyens en drainant plus ou moins correctement le flux des informations.

Des questions doivent être soulevées, telles que :

L'État doit-il intervenir davantage dans la régulation des plateformes ?

Les plateformes de réseau dopées à l'IA nous aident-elles à dépasser les différences culturelles ou nous enferment-elles dans nos particularismes nationaux ?

Plateformes de réseau et désinformation

La désinformation est un problème sérieux que les gouvernements du monde entier cherchent à endiguer. Mais ne soyons pas naïfs : c'est aussi une arme qu'ils utilisent les uns contre les autres.

Henri Kissinger, Eirch Schmidt et Daniel Huttenlocher explorent la question à partir de deux exemples :

ChatGPT et ce type de modèles conversationnels et leur capacité à entrer dans des conversations pour y instiller le doute, la haine et la violence.

L'utilisation de TikTok et les débats autour de sa régulation au niveau national et international dans les pays occidentaux.

Plateformes de réseau et géopolitique

Les auteurs passent ici en revue les enjeux et les intérêts liés aux acteurs internationaux suivants :

États-Unis ;

Chine ;

Asie de l'Est et du Sud-Est ;

Europe ;

Russie.

Plateformes de réseau basées sur l’IA et notre futur humain

Voici la conclusion de ce chapitre dense, dont certains éléments ont ici été repris, par les auteurs :

"Les opérateurs des plateformes de réseau devront faire face à des choix qui vont au-delà du simple service de clients et de la réalisation d'objectifs commerciaux. Jusqu'à maintenant, ils n'ont pas été obligés de définir une éthique (claire) au-delà du besoin organique de servir l'intérêt de leurs utilisateurs et de leurs actionnaires. Mais dans la mesure où ils ont assumé des rôles plus larges et plus influents, dont ceux d'influencer les activités des gouvernements, ils doivent prendre en main des défis élargis." (L'Âge de l'IA, Chapitre 4)

Pour résumer, la position des auteurs est que les firmes gestionnaires des plateformes de réseau (typiquement, les GAFAM, mais aussi d'autres) :

Ont investi des rôles auparavant délégués à d’autres institutions, comme l’État ;

Que ces transformations ne sont pas vraiment prêtes à disparaître ;

Qu'il faut donc qu'il y ait une réflexion — en interne et avec l'extérieur — sur leurs objectifs et sur leur façon d'agir.

Chapitre 5 — Sécurité et ordre mondial

La sécurité est l'objectif premier de toute société. Une société qui ne se protège pas finit par cesser d'exister en tant qu'entité autonome. La technologie, par ailleurs, a toujours aidé les nations à se défendre — et à attaquer.

Les auteurs commencent par rappeler les grandes époques et les grandes réflexions autour des relations entre guerre et technologie. Ils évoquent notamment l’importance de la Première Guerre mondiale (1914-1918) et les réflexions de théoriciens majeurs comme Karl Clausewitz.

L’âge de la cyberguerre et l’IA

Les armes issues de l'intelligence artificielle pourraient rendre la sécurité internationale plus difficile à maintenir. La situation pourrait devenir plus imprévisible.

Notons que les armes assistées par l'IA sont déjà parmi nous. Les pilotes d'avion assistés par IA sont déjà une réalité. Le ciblage de missiles, les drones, etc., tout cela incorpore déjà de l'IA à différents degrés.

L'IA est devenu un enjeu qu'aucun état-major ne peut plus ignorer. Les inventions qui ont déjà été inventées resteront et d'autres viendront. Simplement car elles assurent un avantage sur les autres. Il devient donc de plus en plus urgent de comprendre ce nouvel équilibre des forces et de le gérer au mieux.

Les armes nucléaires et la dissuasion

Nous pouvons nous appuyer sur l'histoire du nucléaire militaire pour penser la régulation de l'IA dans ce même domaine.

La politique de dissuasion était-elle une bonne solution ? Elle avait pour ambition de dire à l'ennemi : "n'agis pas contre moi, car tu risques le pire". Ici, la quête de sécurité s'est transformée en recherche de l'arme la plus puissante au monde.

Résultat : un équilibre très instable et dangereux ; une anxiété grandissante parmi les populations et un contrôle de façade.

Le contrôle des armes

La politique de non-prolifération se mit en place plus ou moins en parallèle à celle de la dissuasion. Ces négociations passèrent par la voie diplomatique des traités. Elles aboutirent à un contrôle plus solide.

Comme nous allons le voir plus en détail maintenant :

"L'émergence des nouvelles technologies a aggravé les dilemmes des armes nucléaires." (L'Âge de l'IA, Chapitre 5)

Le conflit à l’âge numérique

L'équilibre entre rivaux est essentiel. Lorsqu'un pays renforce sa puissance, l'autre voudra faire de même. Si les acteurs de ce jeu ne savent pas quelles sont les forces de l'autre, les mauvais calculs se multiplient et la tentation est grande de mal agir.

Aujourd'hui, ces calculs guerriers sont entrés dans une phase d'abstraction encore jamais atteinte. Pourquoi ?

Car, désormais, la guerre n'a plus seulement lieu dans le monde physique, mais aussi — simultanément — dans le monde numérique. Par ailleurs, les armes numériques assistées par l'IA sont plus "obscures", techniquement parlant, que leurs homologues nucléaires.

En clair, les attaques sont moins facilement "compréhensibles" et il est plus difficile d'y répondre. Ces caractéristiques ont favorisé une tendance à l'attaque de la part de certains États.

L’IA et la perturbation de la sécurité

Cette section amplifie la précédente. Une réflexion est particulièrement troublante :

"Si les décideurs politiques concluent que l'assistance de l'IA (...) est nécessaire pour comprendre les capacités et les intentions de l'adversaire (...), ainsi que pour savoir que lui répondre de façon appropriée, la délégation de décisions critiques semble inévitable." (L'Âge de l'IA, Chapitre 5)

La question qui se pose est la suivante : comment éviter que la guerre ne devienne une affaire de machines et qu'elle perde toute raison humaine ?

Gérer l’IA

Henri Kisssinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher rappellent ici, à nouveau, l'importance d'établir des traités qui établissent clairement des limites aux recours de l'IA militaire. Les États les plus puissants doivent prendre conscience de leurs responsabilités en s'inspirant de ce qu'il s'est passé avec les armes nucléaires.

Impact sur les technologies civiles et militaires

Selon les auteurs, il existe trois qualités qui permettent habituellement de distinguer l'usage militaire de l'usage civil des technologies :

La différenciation technique (modification des techniques) ;

La concentration du contrôle (le gouvernement peut les contrôler plus facilement) ;

L'amplitude de l'effet (leur effet destructif est annulé ou beaucoup moins important).

L’IA « casse » cette façon de voir les choses car elle est intrinsèquement de double usage. La technologie ne change pas entre les deux usages (c’est du code), elle est facilement diffusable (d’ordinateur à ordinateur) et elle peut avoir des effets importants même dans son usage « civil ».

Une vieille conquête dans un nouveau monde

Les auteurs proposent 6 voies d'action pour contrôler les arsenaux d'armes (combinant des armes traditionnelles, nucléaires, numériques et assistées par IA). En voici le résumé :

Les dirigeants doivent être prêts à se parler de façon régulière ;

Les risques liés à l'armement nucléaire ne doivent pas être oubliés ;

Chaque gouvernement disposant de pouvoirs militaires en matière numérique et IA doit établir clairement sa doctrine et ses limites ;

Il doit aussi organiser un processus strict de révision interne et la mise en place de garde-fous ;

Des procédures de prise de décision en situation de haut risque doivent être créées et respectées ;

Des lignes rouges doivent être établies collectivement et une logique de non-prolifération doit voir le jour.

Chapitre 6 — IA et identité humaine

"Dans une ère où les machines rempliront de plus en plus les tâches que seuls les humains étaient habitués à faire, que constituera donc notre identité comme êtres humains ?" (L’Âge de l’IA, Chapitre 6)

Quelles seront les qualités humaines qui seront célébrées à l'âge de l'IA ? En fait, pour les auteurs, c'est la notion même de raison qui va s'en trouver bouleversée. Et avec elle se trouve modifiée notre représentation d'autres qualités, telles que notre libre arbitre.

Nous avons deux manières de nous comporter face à ces évolutions :

Ou nous réagissons instinctivement ;

Ou nous prenons le temps de répondre de façon consciente.

Transformer l’expérience humaine

Pour la plupart des gens, l'IA aura des avantages dans la vie de tous les jours. Les auteurs prennent de nombreux exemples, de l'entrepreneur qui l'utilise pour créer de nouveaux produits à la personne qui l'utilise pour son organisation quotidienne.

Le fossé se creuse toutefois entre ceux qui comprennent le fonctionnement et les enjeux de l'IA et ceux qui l'utilisent sans pour autant en cerner les tenants et les aboutissants. Ces derniers pourraient avoir le sentiment de perdre le contrôle de leur existence et se sentir perdus face à la montée en puissance de l'IA.

Des emplois vont disparaître et d'autres être créés. Dans le lot de ceux qui perdront leur emploi, il y en aura certainement qui développeront une aversion persistante pour la technologie. Le grand enjeu, pour tous ceux qui resteront sur le carreau, sera de développer de nouvelles compétences.

La prise de décision

Imaginez-vous un monde social complètement gouverné par les IA, dans lequel les décisions seraient prises sur des bases que nous ne comprendrions pas, car elles seraient enfouies dans les lignes de code des machines. Ce serait une situation terrible pour nous les humains, qui avons besoin de raisons pour agir et obéir.

En ayant à l'esprit cette version assez cauchemardesque, certaines personnes pourraient rejeter complètement les IA pour ne pas se sentir coupées de leur propre sens moral et de leurs raisonnements. Ils voudraient garder le pouvoir de conférer du sens — du sens compréhensible — aux choses et aux actions.

Pour Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher, cette solution serait toutefois intenable. Il est impossible de s'extraire complètement du monde et de refuser toute technologie.

La logique de la découverte scientifique

Les scientifiques apprennent à utiliser l'IA. Auparavant, ils comptaient surtout sur leurs théories et sur les expériences "faites de main d'homme" pour réaliser des progrès. Mais l'IA vient changer la donne.

Désormais, celle-ci apporte un angle nouveau à la recherche, notamment en agrégeant de grands échantillons de données sans avoir besoin de théorie sous-jacente.

Les auteurs donnent l'exemple d'AlphaFold, une IA (de Google) qui a aidé les chercheurs à résoudre le problème appelé de "pliage des protéines".

L’éducation et l’apprentissage tout au long de la vie

Les auteurs parlent d'une différence à venir entre "IA natives" et les autres. Dans un futur plus ou moins proche, les enfants qui auront grandi depuis leur plus jeune âge entourés par les IA n'auront pas le même rapport que leurs aïeux avec cette technologie.

Les auteurs prévoient même la venue d'assistants numériques "tout en un" capables de jouer, d'éduquer et de guider les plus jeunes.

Ils insistent également sur le paradoxe actuel concernant l'information : de plus en plus disponibles, nous avons de moins en moins la capacité de nous attarder sur elle en profondeur.

Les nouveaux intermédiaires de l’information

L'IA sert aujourd'hui d'intermédiaire dans la création, la sélection, la distribution et la consommation des informations. Jusqu'à maintenant, les réseaux sociaux cherchent essentiellement à nous présenter les informations que nous aimons le plus, afin d'accroître notre présence sur leur plateforme.

Nous pouvons repenser les modes de filtrage de l'information. Certains préféreront sans doute en rester à un mode purement humain. Mais d'autres voies sont envisageables : permettre aux algorithmes de nous surprendre et de corriger nos biais de confirmation, par exemple.

Un nouveau futur humain

Les forces de la foi et de la raison, qui conduisent les hommes habituellement, vont se trouver mises en concurrence avec la puissance de l’IA. L’une et l’autre seront toujours des guides pour l’action humaine, mais leur place sera redéfinie par le développement et les progrès de l’IA.

Dans beaucoup de domaines, l'IA et les humains apprendront à collaborer. Mais des conflits entre décisions humaines et décisions prises par l'IA peuvent survenir. Il sera important de bien organiser les rôles et les responsabilités de chacun.

Les sociétés humaines devront aussi décider ce qui est permis et ce qui ne l'est pas. Les valeurs humaines jouent ici un grand rôle. Quelle société souhaitons-nous ? Dans chaque cas, nous devrons trancher.

Les perceptions de la réalité et l’humanité

Pour les auteurs, il en va d'un véritable et profond changement d'ère. Il s'agit d'une révolution dans nos manières de penser et d'agir.

"Le monde médiéval avait son imago dei, ses modèles féodaux et agraires, son respect pour la monarchie et son orientation vers les hauteurs vertigineuses des cathédrales. L'âge de la raison avait son cogito ergo sum et sa quête pour de nouveaux horizons — et, avec elle, de nouvelles hypothèses sur les capacités de l'individu et de la société. L'ère de l'IA doit encore définir ses principes d'organisation, ses concepts moraux, ainsi que ses aspirations et son sens des limites." (L'Âge de l'IA, Chapitre 6)

Pour Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher, cette révolution est déjà en marche et c'est aujourd'hui qu'il faut commencer à penser sérieusement comment nous allons y répondre.

Chapitre 7 — IA et avenir

Les auteurs comparent la révolution de l'IA à la révolution enclenchée par l'invention de l'imprimerie au XVe siècle. L'impression de livre changea complètement le rapport à la connaissance, d'abord, puis aux relations.

De fil en aiguille, c'est toute la société qui se transforma sous l'impulsion de cette invention. Elle ouvrit de nouveaux chemins pour le développement des sciences, de la politique et de la religion, notamment.

"Aujourd'hui, une nouvelle époque fait signe. En son sein, à nouveau, la technologie transformera la connaissance, la découverte, la communication et la pensée individuelle. (...) La révolution de l'IA accomplira quelque chose de similaire : accès à de nouvelles informations, production. de nouvelles avancées scientifiques et économiques — et ce faisant, elle transformera le monde." (L'Âge de l'IA, Chapitre 7)

Nous voilà prévenus par les auteurs : la révolution de l'IA est en marche. Selon eux, cette (r)évolution est implacable. Henri Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher se montrent raisonnablement optimistes.

Bien sûr, disent-ils, des dangers ne manqueront pas de se présenter, des problèmes surviendront et beaucoup de personnes et d'institutions seront désorientées ; mais dans l'ensemble, la somme d'avantages sera supérieure et le progrès gagnera.

Pour les auteurs, le point clé est de bien comprendre que l'IA nous ouvre la voie vers une nouvelle compréhension de la réalité. L'IA n'agit pas comme les humains. Elle propose de nouvelles perspectives, de nouvelles formes de l'expérience.

Il se peut aussi que l'IA fasse tourner les têtes, selon les auteurs. Plus ses recommandations seront pertinentes et moins nous les comprendrons (le commun des mortels, du moins). Mais au moins nous les comprendrons, au plus nous serons tentés de les considérer comme des "oracles" divins.

Refuser l'usage de l'IA restera un choix possible, mais il deviendra potentiellement de plus en plus coûteux, tant de nombreux services y seront connectés.

L’intelligence artificielle générale

Les auteurs reviennent ici sur les propos tenus au chapitre 3. L'intelligence artificielle générale est encore en projet : son ambition est de pouvoir réaliser toutes les tâches qu'un humain réalise, aussi bien ou mieux que lui.

Mais comment penser un monde où des machines nous égaleraient ou nous surpasseraient potentiellement en tout ? L'éthique de l'IA est un domaine appelé à prendre de plus en plus d'ampleur dans les années à venir, notamment pour penser ces questions et proposer des cadres pour l'action.

IA, information libre et pensée indépendante

Les notions de "nuisible" et de "désinformation" ne doivent pas être laissées aux plateformes privées. Les gouvernements peuvent et devront trouver leurs propres limites et les imposer aux algorithmes.

Chaque société le fera en fonction de ses valeurs, même si cela risque de générer des conflits avec les plateformes de réseau, en grande majorité transnationales.

IA et ordre international

Finalement, Henry Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher reviennent sur leurs propos du chapitre 5. Pour gérer les aspects les plus destructifs de l'IA, la diplomatie aura un rôle fort à jouer. Face à l'incertitude et au risque, les États devront s'entendre au moins sur certains principes clés pour éviter l'escalade et l'affrontement.

Mais le dernier mot des auteurs n'est pas pour autant pessimiste. Au contraire, ils nous engagent à embrasser dès maintenant la question de notre coexistence avec l'IA :

"L'intelligence humaine et l'intelligence artificielle sont en train de se rencontrer, et vont s'appliquer à des objectifs nationaux, continentaux et même mondiaux. Comprendre cette transition et développer une éthique pour cela demandera de l'engagement et des contributions de nombreux éléments de la société : scientifiques, stratégistes, hommes d'État et philosophes, hommes d'église et grands patrons. Cet engagement doit être réalisé au sein des nations et entre elles. Maintenant est venu le temps de définir à la fois notre partenariat avec l'intelligence artificielle et la réalité qui en résultera." (L'Âge de l'IA, Chapitre 7)

Conclusion sur « L'Âge de l'IA » de Henry Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher :

Ce qu’il faut retenir de « L'Âge de l'IA » de Henry Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher :

Voilà un livre qui donne un peu peur, mais aussi diablement envie de penser ! Si vous êtes curieux, vous aurez vraiment envie d'en savoir plus sur tous les enjeux qui sont développés dans ce livre. D'ailleurs, c'est sa grande force : dresser un tableau général des transformations en cours et de leur impact potentiel.

Le point clé à retenir : pour Henry Kissinger, Eric Schmidt et Daniel Huttenlocher, l'IA est un phénomène civilisationnel qui va transformer de nombreux pans de notre expérience, au point de nous faire basculer d'une "ère" (celle de la raison, dans laquelle nous sommes toujours) à l'autre — celle de l'IA.

Leur titre est donc bien choisi !

Points forts :

Des chapitres courts, mais très instructifs et bien construits ;

Une véritable expertise sur le sujet avec ces 3 auteurs de renommée internationale ;

Un livre qui donne véritablement de la matière à réflexion.

Point faible : 

Les auteurs ne remettent pas une seule seconde en doute le présupposé selon lequel l'IA va se développer et devenir plus puissante. C'est leur point de départ, et ils ne le lâchent pas. Pourtant, nous pouvons nous demander si d'autres avenirs ne sont pas possibles…

Ma note :

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Résumé de « Reinventing organizations. Vers des communautés de travail inspirées » de Frédéric Laloux : un ouvrage qui offre une théorie, de nombreux exemples et de nombreuses pistes pour faire évoluer les organisations vers un nouveau stade de complexité et de mieux-être à tous les niveaux — un livre devenu en très peu de temps un classique absolu de la littérature de management !

Frédéric Laloux, 2014, 484 pages.

Chronique et résumé de « Reinventing organizations. Vers des communautés de travail inspirées » de Frédéric Laloux

Frédéric Laloux et « Reinventing organizations » : quelques mots de contextualisation

Ce livre s’est vendu à plus de 250 000 exemplaires dans le monde : autrement dit, c’est un best-seller de la littérature du management ! Frédéric Laloux l’a conçu progressivement, pendant plusieurs années, en s’appuyant sur des enquêtes et sur son expérience au sein de l’entreprise de consulting Mc Kinsey.

Il existe une version résumée et illustrée de l’ouvrage, parue également aux éditions Diateino. Celle-ci se lit plus facilement.

Introduction

Les humains évoluent, leurs conceptions du monde changent. Ils croient durant des années quelque chose qui se révèle erroné le lendemain. Mais il n’y a pas là à juger ou à critiquer le niveau d’intelligence de celles et ceux qui nous précèdent. Il faut plutôt honorer celles et ceux qui participent à nous faire voir le monde autrement et de façon plus riche.

Les modèles d’organisation (des entreprises, mais aussi de l’administration et des organisations du secteur associatif) qui nous servent encore aujourd’hui pourraient bien ne plus être adaptés à notre situation. Malgré les progrès énormes réalisés, en matière de prospérité, d’espérance de vie et d’éducation notamment, il y a quelque chose qui cloche.

Dans tous les secteurs d’activité, le travail est devenu de plus en plus le lieu de souffrances. Qu’on soit au bas ou en haut de l’échelle, de véritables malaises s’installent et s’enveniment. Cette crise invite à se demander : un autre modèle, plus enrichissant, plus sensé, peut-il émerger ?

Il s’agit avant tout d’une question pratique qui implique une foule d’interrogations sur les manières de transformer les façons dont nous organisons le travail, concrètement. Les enjeux d’une telle modification dépassent le cadre de cet ouvrage, mais on peut apercevoir leur caractère colossal :

« Ce n’est probablement pas une exagération, mais une triste réalité : la survie des espèces, des écosystèmes, et même de l’humanité dépend d’un changement radical dans notre façon de penser les entreprises et l’économie. » (Reinventing organizations)

Première partie. Histoire et développement des organisations

L’humanité avance par « sauts ». Sauts à la fois psychologiques, cognitifs, sociaux, politiques, moraux. À chaque fois, la complexité gagne du terrain. Il en va de même avec les organisations. À chaque fois que l’humanité a fait un bon en avant, elle a inventé un nouveau modèle organisationnel plus complexe que le précédent.

Chapitre 1.1. D’un paradigme à l’autre : modèles d’organisation d’hier et d’aujourd’hui

Frédéric Laloux utilise le travail de Ken Wilber, philosophe de la conscience humaine, pour catégoriser ces stades d’évolution et les nommer selon une couleur particulière. Son travail a notamment influencé la Spirale Dynamique.

L’idée première est que tout se modifie à chaque stade : la manière de voir le monde, la technologie, les structures de pouvoir et donc, le modèle organisationnel. C’est le point sur lequel entend insister l’auteur.

Autre idée clé : nous serions à l’orée d’un nouveau changement de stade que l’on peut nommer « évolutif » ou, en suivant le code couleur, « opale » (Teal, en anglais). Comment le sait-on ? Parce que la crise guette. Beaucoup de gens sont en souffrance ; la planète l’est aussi. Il y a des crispations face au changement, mais tous sentent sa nécessité.

Pour faire émerger ce nouveau modèle, il faut bien sûr vaincre ces résistances et toutes celles et ceux qui vous feront penser qu’il ne s’agit que d’une chimère. C’est possible ! Comme a été possible, en son temps, le développement des sciences ou de la démocratie.

Chapitre 1.2. À propos des stades de développement

Frédéric Laloux reprend cinq stades principaux qu’il analyse en détail dans la première partie de l’ouvrage :

Impulsif ou Rouge ; Conformiste ou Ambre ; Réussite ou Orange ; Pluraliste ou Verte ; Évolutif ou Opale.

Passons les quatre premiers en revue.

→ La vision rouge du monde ou le stade impulsif

Le chef est le garant de l’ordre social. Le pouvoir brut domine tout, non pas la loi. Les désirs du chef sont des ordres et se transforment en la règle pour tous. Bref, s’il y a une loi, c’est celle du plus fort ! Vous êtes soit dominant soit dominé.

Dans ce schéma, les organisations sont semblables à des meutes de loups. On en trouve encore des exemples dans des organisations violentes telles que la Mafia, les gangs de quartiers ou les entreprises fortement « paternalistes ».

L’innovation propre à ce modèle est d’avoir introduit dans les relations sociales la division du travail (chacun a sa place) et l’autorité hiérarchique.

→ La vision ambre du monde ou le stade conformiste

Historiquement, ce modèle apparaît aux alentours de 4 000 avant notre ère, en Mésopotamie. Désormais, l’impulsivité première est maîtrisée et retournée vers soi grâce à la Loi, qui s’applique à tous. Celui qui l’enfreint se sent coupable et honteux.

Ce modèle a créé des organisations hautement hiérarchisées ; les places sont stables (on parle ici de fonctions) et cette sécurité est assurée par la croyance à la Loi. La prévision et le conformisme sont des valeurs partagées par tous. Des exemples ? Il y en a à foison : l’Église, l’armée, les administrations, etc.

Quelles sont les avancées liées à ce stade ? La reproductibilité des processus (rituels, travail) et la stabilité des hiérarchies. Ces deux caractéristiques ont permis de faire croître les Empires, l’agriculture et l’architecture, par exemple.

→ La vision orange du monde ou le stade de la réussite

Voici venu le temps de la Révolution industrielle et scientifique. Le temps de la démocratie libérale, aussi ! La Loi, qui opposait le Bien au Mal et rendait les individus conformistes et coupables, est balayée par l’Innovation et le désir de Progrès.

La logique et la découverte sont à l’ordre du jour. Mais aussi et peut-être surtout, au niveau du management : le profit. Il s’agit de faire apparaître et de générer toujours davantage de revenus.

S’il fallait utiliser ici une métaphore, ce serait plutôt celle de la machine. Pour garantir l’efficacité (et donc le profit), tout doit fonctionner mécaniquement et automatiquement. Les multinationales d’aujourd’hui, les Écoles de commerce, les Banques de Wall Street sont toutes prises dans ce modèle.

Les avancées principales de ce stade sont :

L’innovation (nouveaux produits, nouveaux profits, nouvelles parts de marché, etc.) ; La responsabilité (incitations au travail, évaluation de la performance, etc.) ; La méritocratie (c’est aux plus intelligents et aux plus agiles de diriger).

Mais là-dedans, où se trouve le sens ? L’approche matérialiste du stade Orange épuise les « ressources » (un mot qui vient de son propre vocabulaire) humaines et naturelles. Ce « toujours plus » est comme un cancer qui ronge les sociétés contemporaines.

→ La vision verte du monde ou le stade pluraliste

Dès le XVIII et le XIXe siècle, cette vision du monde pris forme grâce aux mouvements antiesclavagistes, féministes, etc. Mais ce n’est qu’à partir de la seconde moitié du XXe siècle qu’elle s’exprima plus clairement et complètement. La vision verte du monde inspire la pensée académique post-moderne, mais aussi les associations de la société civile.

La famille fait office de métaphore adéquate. Pourquoi ? Car il s’agit de retrouver les liens de communauté perdus avec le stade Orange. Le bonheur ne peut être seulement individuel ; il doit passer par tous et donc être aussi collectif.

Certaines entreprises contemporaines se sont constituées selon un modèle pluraliste : c’est le cas, par exemple, de Southwest Airlines ou de Ben & Jerry’s (les glaces, oui !). Celles-ci appliquent un « management doux » où la hiérarchie n’a plus sa place et où les ordres sont remplacés par la participation à une vision commune.

Les profondes transformations organisationnelles de ce stade sont :

L’autonomisation (motiver plutôt que diriger, mais aussi éviter les rapports hiérarchiques) ; La culture des valeurs (elles sont au cœur de la stratégie et permettent à chacun de se reconnaître comme faisant partie du groupe) ; Le respect des parties prenantes (ce ne sont pas seulement les actionnaires qui comptent, mais tous ceux pour lesquels l’entreprise importe).

Dans la réalité, les entreprises vertes conservent souvent des structures de type Orange. C’est un stade qui a donc quelques difficultés à se trouver.

À noter pour conclure ce chapitre : en fait, le quotidien est multicolore. Aucune organisation n’est « seulement » Orange, ou Rouge, ou Verte. Il y a des mélanges à tous les étages ! Par ailleurs, nulle vision du monde n’est vraiment « meilleure » qu’une autre, selon l’auteur, mais simplement plus « complexe ».

Chapitre 1.3. Le stade évolutif Opale

Abraham Maslow, le célèbre psychologue étatsunien ayant créé une hiérarchie des besoins, parle d’« accomplissement de soi ». Parallèlement ou à sa suite, d’autres ont étudié l’émergence de ce nouveau stade à la fois d’un point de vue psychologique et social. Quelles en sont les caractéristiques ?

Le monde est ici conçu comme le lieu de la découverte de son potentiel unique, le lieu où l’individu peut croître et devenir un Soi complet, en harmonie avec les autres. Cela passe par la:

Maîtrise de l’ego (notamment, les peurs, les besoins, les désirs, etc.) ; Rencontre avec sa propre « justesse intérieure » (ce qui nous est propre et intime) qui doit nous guider ; Représentation de la vie comme le lieu du déploiement de soi (développement de cette singularité) ; Focalisation sur ses forces intérieures (abandon du jugement, patience et confiance en soi) ; Acceptation de l’adversité (humilité et attitude d’apprentissage) ; Sagesse au-delà du rationnel (mise en avant de l’intuition, notamment) ; Quête de la plénitude (pleine authenticité en relation à soi, aux autres et à la vie en général, qui implique entre autres la réconciliation des oppositions traditionnelles, telles que le féminin et le masculin, etc.).

Cela a-t-il un sens lorsqu’on parle d’organisations et d’entreprises ? Eh bien oui ! Ce qui peut paraître complètement éloigné du management ne l’est pas : en fait, les individus qui trouvent leur vocation sont naturellement plus efficaces. Et puis, imaginez une entreprise où chacun maîtriserait son ego… Mais pour en savoir plus et ne pas en rester aux hypothèses, il faut passer à la deuxième partie !

Deuxième partie. Structures, modes de fonctionnement et culture des organisations Opale

Cette deuxième partie utilise un matériau empirique abondant pour analyser comment fonctionnent les organisations Opale. Douze organisations ont été sélectionnées, précisément car elles mettent déjà en œuvre des principes nouveaux de management. Ce sont comme des « aliens », des étrangers vivant cachés parmi leurs contemporains ; mais ces aliens sont des innovateurs aux superpouvoirs !

L’auteur a enquêté dans ces organisations, notamment à partir d’un questionnaire très complet de 45 questions portant sur tous les aspects du management, depuis les processus directeurs jusqu’aux détails les plus pratiques du quotidien (réunions, gestion des conflits, etc.).

Chapitre 2.1. Trois avancées et une métaphore

Tandis que le paradigme Orange utilisait volontiers la métaphore de la machine et que le paradigme Vert pouvait davantage être relié à l’image de la famille, le paradigme Opale se développe autrement : l’organisme vivant fait figure de métaphore adéquate.

Par ailleurs, comme tout stade organisationnel, le stade Opale introduit des révolutions dans la manière de concevoir le management. Quelles sont-elles ?

L’autogouvernance : pas de hiérarchie ni de recherche de consensus, mais fonctionnement horizontal. L’affirmation de soi (wholeness) ou la plénitude : pas de « soi professionnel » privilégiant seulement une facette (masculine, rationnelle, etc.), mais pratique du travail dans la plénitude de ce que nous sommes. La raison d’être évolutive : pas d’avenir préconçu et maîtrisé, mais un processus de devenir qui implique une écoute profonde des besoins et désirs.

Ces trois révolutions de la vision du monde Opale appliquée au management feront l’objet des chapitres suivants. Frédéric Laloux utilise son enquête auprès des entreprises suivantes pour dégager plus précisément les implications et les enjeux de ces trois points fondamentaux :

AES (secteur de l’énergie, groupe mondial, 40 000 collaborateurs, à but lucratif) ; BSO/Origin (conseil en informatique, groupe mondial, 10 000 collaborateurs, à but lucratif) ; Buurtzorg (Santé, Pays-Bas, 7 000 collaborateurs, à but non lucratif) ; ESBZ (Collège et lycée, Allemagne, 1 500 personnes, parents et enfants compris, à but non lucratif) ; FAVI (Métallurgie, France, 500 collaborateurs, à but lucratif) ; Heligenfeld (Hôpitaux psychiatriques, Allemagne, 700 collaborateurs, à but lucratif) ; Holacracy (Modèle d’exploitation des entreprises) ; Morning Star (Agroalimentaire, États-Unis, de 400 à 2 400 collaborateurs, à but lucratif) ; Patagonia (Prêt-à-porter, États-Unis, 1 350 collaborateurs, à but lucratif) ; RHD (Service à la personne, États-Unis, 4 000 collaborateurs, à but non lucratif) ; Sounds True (Média, États-Unis, 90 collaborateurs et 20 chiens, à but lucratif) ; Sun Hydraulics (Composants hydrauliques, groupe mondial, 900 collaborateurs, à but lucratif).

Chapitre 2.2. Autogouvernance (structures)

Faut-il absolument un chef qui décide ? L’entreprise a-t-elle vraiment besoin d’une structure hiérarchique ? La réponse à ses deux questions est « non » ! L’expérience de ces entreprises le montre : il est possible — et même souhaitable — de gérer la complexité sans recourir à ces formes.

→ La hiérarchie ne sait pas gérer la complexité

Au sommet de la pyramide hiérarchique, les dirigeants sont débordés. Trop de responsabilités, de choses à penser ; le temps est compté pour prendre les décisions.

Pourtant, de l’économie mondiale à l’écosystème d’une forêt, en passant par le cerveau humain ou le vol en escadrille des oiseaux, l’histoire et la nature nous montrent que des formes d’organisation non centralisées existent et fonctionnent bien !

Tirons-en les conséquences : il est possible de faire marcher des organisations humaines sans passer par ce vieux modèle. Burrtzorg compte 9 000 salariés, et n’a ni manager ni chef. Mais avant d’aller plus loin, résolvons quelques malentendus. L’autogouvernance, est-ce que c’est…

L’anarchie ? Non ! les membres se coordonnent, respectent certains rôles et processus. Le consensus et les réunions à n’en pas finir ? Encore non ! Les réunions y sont, en fait, moins présentes. Une expérimentation trop jeune ? C’est faux : des entreprises autogouvernées existent depuis des décennies et ont prouvé leur efficacité et leur résilience face aux crises.

→ L’autogouvernance exige la mise à niveau de presque toutes les pratiques managériales de base

Bien sûr, il ne suffit pas d’abandonner la structure pyramidale du jour au lendemain. Il faut penser à son système de remplacement en amont et aller dans le détail en reformulant les principales pratiques et structures :

Structure de l’organisation ; Fonctions de direction ; Circuit d’informations ; Prise de décisions ; Architecture des réunions ; Gestion de projet ; Investissements ; Budgets ; Objectifs ; Gestion de la performance ; Rémunération et primes ; Gestion de conflit ; Gestion de crises ; Licenciements.

→ Structure de l’organisation

Prenons deux exemples.

Buurtzorg fonctionne à partir d’unités de base de 10 à 12 personnes, qui fonctionnent en autonomie. Pas de chef au-dessus, mais un coach régional qui n’a pas d’autorité sur les équipes coachées (40 à 50), mais peut leur venir en aide si elles en expriment le besoin. Le siège est composé de 28 personnes qui se chargent des questions administratives. Pas de RH, pas de comité exécutif… C’est si simple, et ça marche ! FAVI fonctionne par mini-usines dédiées à un client en particulier. Un cas simple : pour gérer les commandes, le commercial s’adresse directement aux ouvriers qui planifient eux-mêmes la tâche. En 25 années, pas un seul retard de livraison à dénombrer !

Chapitre 2.3. Autogouvernance (processus)

→ Prise de décisions

Nous sommes habitués à la décision autoritaire, à la décision consensuelle et à la décision majoritaire. Mais il y a d’autres façons de faire et une en particulier : la sollicitation d’avis.

Selon ce système, tout le monde peut prendre des décisions, y compris celles qui engagent l’argent de l’entreprise. Mais il y a des règles :

Solliciter celle ou celui dont c’est le domaine d’expertise ; Celles et ceux qui devront vivre avec les conséquences de cette décision ; Le décideur prend sa décision après examen rigoureux et mûre réflexion.

Tous les membres de l’entreprise se retrouvent à la fois solliciteurs (décideurs) et sollicités. Prendre les autres en considération et créer des liens : voilà les points forts de ce système.

Plus les décisions sont importantes, et plus le nombre de personnes consultées doit croître.

→ Rémunérations fixes et variables

Est-ce possible de se passer de « bonus » et même d’objectifs ? Eh bien oui ! Cela peut paraître étonnant, et pourtant cela fonctionne. L’argent offre une bien maigre motivation, en réalité. Pourquoi ? Car cela implique une vision pessimiste des travailleurs ; on s’imagine qu’ils ne travaillent que pour gagner de l’argent, et pas pour s’épanouir.

Plutôt qu’offrir des primes individuelles, il est possible de répartir une partie des bénéfices entre tous. Pour le salaire de base, la solution mise en œuvre par Morning Star (géant US de la tomate) vaut particulièrement le détour. Elle consiste à laisser chacun demander l’augmentation qu’il estime juste. Une commission de collègues lit et donne son avis, mais ne peut imposer la décision. Néanmoins, si un collègue exagère dans sa demande, une procédure de résolution des conflits peut être proposée.

→ Gestion de la performance

La pression de la direction (associée aux bonus financiers) pour conserver la motivation des employés est un leurre . Le plus souvent, cela conduit à une démotivation complète. Pour donner une véritable motivation intrinsèque aux membres de l’entreprise, il faut plutôt compter sur :

l’émulation des collègues (l’envie de faire aussi bien qu’une autre équipe, l’entraide et la supervision de chacun par chacun) ; les exigences du marché (la réalité du marché est sue des employés).

→ La multiplicité des hiérarchies naturelles

S’il n’y a plus d’autorité hiérarchique établie par des normes dans les organisations Opale, il y existe en revanche des hiérarchies naturelles, venant des compétences ou des qualités de chacun. Untel sera bon dans l’écoute, l’autre dans la planification ; celle-ci sera experte en techniques de pointe et celle-là maîtrisera la résolution des conflits à merveille.

« L’absence de manager libère l’espace pour des hiérarchies naturelles, spontanées et fluides de reconnaissance, d’influence ou de compétence. Il n’est pas question de considérer que tous les individus sont égaux. Certains auront tendance à se concentrer sur des rôles plus limités. […] D’autres auront une contribution plus large. […] Il ne s’agit pas de rendre tous les collaborateurs égaux, mais de permettre à chacun d’être pleinement lui-même, dans toute sa force et toute sa santé. » (Reinventing organizations)

Chapitre 2.4. En quête de plénitude (processus RH)

→ Être pleinement soi-même sur le lieu de travail

Parfois, nous l’oublions. Et pourtant, nous portons très souvent un masque lorsque nous sommes au travail. Nous cherchons à répondre à ce que l’organisation attend de nous. Ce faisant, nous enfouissons nos aspirations propres.

Celles-ci ne sont pas vraiment bienvenues dans l’espace professionnelle. Par contre, l’ego peut s’y exprimer dans une certaine limite. L’ego, c’est d’abord le souci de reconnaissance, d’avoir raison, d’avoir du succès et de faire bonne impression. Pourrait-on inverser le phénomène ?

Affirmer ce que l’on est réellement (nos aspirations profondes) nous paraît risqué. Et cela l’est parfois réellement : nous pouvons mettre en péril notre poste en étant honnête. Mais la peur vient aussi de la direction de l’entreprise elle-même, qui estime qu’une organisation où chacun laisserait libre cours à sa singularité deviendrait vite ingérable.

Dans cette situation, les jeux d’ego sont parfois tout ce qui nous reste. Nous développons aussi une attitude dure et froide, rationnelle et déconnectée des émotions. En un sens, on ne donne accès qu’à notre côté « masculin » (celui auquel répondent prétendument toutes ces caractéristiques) au détriment de notre part féminine. Les qualités de soin, de vulnérabilité, d’écoute, d’intuition et de spiritualité sont refoulées.

→ Le travail comme lieu de la quête de plénitude

L’autogouvernance est un bon moyen d’aller vers plus de plénitude. Ne plus avoir à plaire au chef et être autonome dans ses choix, cela aide. Mais ce n’est pas toujours suffisant. C’est pourquoi certaines organisations ont mis en place des procédures pour créer un sentiment de sécurité renforcé.

Voici deux exemples.

Sounds True, par exemple, diffuse des messages de maîtres spirituels. Et accepte aussi les chiens ! Des gestes simples qui font entrer la vie en entreprise. Les enfants des salariés de Patagonia peuvent jouer et apprendre au Centre de développement de l’enfant intégré dans l’entreprise. Pendant les repas, les enfants sont en présence des parents. Conséquence ? Les relations se transforment, les masques tombent.

De nombreuses caractéristiques liées à l’organisation doivent être modifiées pour laisser les personnes être elles-mêmes : depuis les façons de recruter jusqu’aux manières de procéder aux évaluations. Passons en revue quelques pratiques mises en place par les entreprises pionnières étudiées par Frédéric Laloux.

→ Un espace protecteur

L’association RHD (Resources for Human Development) prend en charge des personnes en difficulté. Elle fonctionne sur la base de l’autogouvernance. En plus, elle a installé la bienveillance au cœur de son activité.

Une « Charte des droits et des responsabilités des salariés et des clients » a été conçue pour inviter chacun à respecter les valeurs d’intégrité, de respect et d’ouverture. Chacun est invité à prendre connaissance et à réfléchir à ces règles. À leur tour, ces principes sont traduits en pratiques concrètes. Une référence commune est créée, à partir de laquelle travailler.

→ Espaces de recueillement

Heiligenfeld est une entreprise de soins psychiatriques et de réadaptation. Joachim Galuska, son fondateur, cherche à intégrer une vision holistique à sa pratique, en y intégrant notamment une dimension spirituelle et collective. Ici :

Les salariés peuvent prendre une demi-heure pour méditer en groupe, chaque jour ; Des séances de coaching individuel sont ouvertes à tous les salariés ; Deux à trois fois par an, un coach extérieur vient dénouer les problèmes ; Quatre fois par an, des journées silencieuses, en pleine conscience, sont organisées — les patients, aussi bien que les salariés, y participent ;

En outre, chaque mardi matin, une introspection collective a lieu autour d’un sujet particulier, pendant une heure et quart. Ces groupes de travail très particuliers (pas d’objectif à atteindre, pas de compte rendu) connaissent un grand succès.

→ Narration

La narration permet de créer un fond d’histoires partagées. De cette façon, la confiance gagne du terrain. L’association Centre for Courage & Renewal propose par exemple un rituel d’embauche au cours duquel le nouveau venu est accueilli par des histoires et des vœux prononcés par les autres employés.

ESBZ est une institution scolaire qui pratique aussi la narration. La « réunion de congratulation » est préparée et animée par les élèves. Ceux-ci racontent, devant parents et professeurs, des histoires sensibles, amusantes où ils se remercient les uns les autres. C’est ainsi que le sentiment de communauté se crée !

→ Réunions

Comment transformer ce lieu habituel de combat d’egos en un espace d’écoute ? Différentes techniques existent, mais l’une d’entre elles consiste à « faire sonner les cymbales » lorsque la réunion dérape. L’auteur raconte en détail cette technique aussi simple que fascinante dans le livre.

→ Engagement et horaires de travail

Dans une entreprise fonctionnant de façon autogouvernée, il n’y a plus besoin de mentir pour respecter ses obligations familiales ou personnelles. Les remplacements sont discutés entre les salariés, dans leurs petites équipes. Chacun peut prendre tour à tour, un peu plus de travail. Ce faisant, chacun peut aussi honorer ses engagements non professionnels.

→ Évaluation des performances

La peur est souvent au rendez-vous de ces évaluations ! Comment la supprimer ? Une solution expérimentée par Sounds True consiste à transformer ce moment en réflexion collective, au cours de laquelle le salarié évalué échange avec le groupe.

Dans un premier temps, le salarié fait le point sur ses réalisations et ses aspirations. Dans un deuxième temps : le groupe pense à vous en silence, puis répond à deux questions en évitant tout jugement :

Qu’est-ce que travailler avec toi m’apporte de plus précieux ? Quel est le domaine dans lequel je perçois que tu pourrais changer et grandir ?

Une feuille avec toutes les réponses est remise ensuite au salarié « évalué ». Un troisième temps consiste à poursuivre la réflexion en face à face avec un collègue.

Chapitre 2.5. À l’écoute du projet des entreprises Opale

Les entreprises Opale refusent que le sentiment de concurrence et la course à l’argent prennent la main sur le reste. Cette vision est celle du paradigme Orange, principalement, et beaucoup d’entreprises ont de grandes difficultés à s’en défaire. Même lorsqu’elles affichent ouvertement une « mission » ou une « profession de foi » !

→ Est-ce que votre entreprise a une raison d’être noble ?

Prendre cette question au sérieux peut provoquer de grands changements. Prenons l’exemple de Jos de Blok, de l’entreprise Buurtzorg. Il aide ses concurrents à mettre en place la méthode qu’il a créée ! Il ne cherche pas d’abord le profit, mais l’instauration d’un système de soins où les patients puissent mener une vie riche et autonome.

→ Le concept de raison d’être est plus qu’une noble mission

En fait, il s’agit surtout d’en finir avec l’idée de maîtrise sur l’avenir, de prévision et de planification. Finie, la logique stratégie --> exécution ! L’entreprise ressemble à un organisme vivant et non à une machine. Elle a son énergie propre, ses propres buts qui se dévoilent peu à peu, au cours de son existence.

À la maîtrise fait place l’écoute. Il s’agit de deviner le sens qui est pris et de l’accompagner. On prend la température et on répond ; on cesse de prévoir/établir une stratégie et de donner des ordres d’exécution.

→ Stratégie

Les entreprises étudiées par Frédéric Laloux n’ont aucune stratégie à 3 ou 5 ans ! Cela vous semble fou ? C’est que vous avez oublié les avantages de l’autogouvernance. Chaque collaborateur, dans une entreprise Opale, est un « capteur » qui peut être moteur du changement. Il n’y a plus de tête-cerveau qui pilote l’ensemble !

« L’innovation ne résulte pas d’une initiative centralisée, planifiée, mais d’une adaptation permanente aux marges : un organisme capte un changement dans l’environnement et cherche une réponse. Certaines ne prennent pas ; d’autres se diffusent rapidement dans tout l’écosystème. La réalité est l’arbitre suprême. » (Reinventing organizations)

Bien sûr, les fondateurs (DG) peuvent aussi solliciter l’avis des autres collaborateurs pour effectuer un changement. Mais désormais, ils ne sont plus considérés comme les seuls êtres capables de donner une direction à l’entreprise.

D’autre part, cela ne signifie pas que la réflexion stratégique et la mise en place de certaines priorités soient interdites. Elles sont parfois nécessaires, lors des crises ou bien lorsque la raison d’être ne suffit pas à mettre tout le monde en synergie. Collectivement, l’entreprise peut décider de donner, pour un temps, plus d’importance à la normalisation qu’à l’innovation, par exemple.

Dans ce cas, la clé du succès est de ne pas en faire une loi d’airain : ce sont des indicateurs qui permettent un guidage général, mais qui n’empêchent aucunement de sentir et de répondre au jour le jour aux sollicitations du moment.

→ Budget

Quelle illusion ! Il y a tant d’événements extérieurs qui peuvent venir rebattre les cartes de vos prévisions financières que l’exercice confine souvent à l’absurde. Pire, il est démoralisant. Il indique que le seul objectif est le profit et rien d’autre.

Mais alors, les salariés n’ont-ils pas non plus d’objectifs chiffrés, dans les entreprises Opale ? Eh bien non ! Le salarié y prend les décisions (autogouvernance), vient tel qu’il est (plénitude) et sait pourquoi il travaille (raison d’être évolutive) : c’est plus que suffisant pour le motiver à l’action !

→ Gestion du changement

Tandis que les consultants et managers des entreprises Orange pensent que le changement est difficile, voire impossible, celles et ceux qui s’inscrivent dans un paradigme Opale le considèrent comme la plus naturelle des choses. Une forêt n’est-elle pas en constante évolution ?

Certes, lorsque vous êtes bien ancré dans une habitude, changer n’est pas simple. Et pourtant, si vous êtes bien entouré et protégé, que vous sentez aussi sa nécessité intérieure, alors le changement devient beaucoup plus facile.

Finalement, c’est probablement sur la raison d’être évolutive que nous avons le plus à apprendre. Si l’autogouvernance et la plénitude commencent à être bien comprises et à entrer dans les mœurs, l’idée de raison d’être évolutive doit encore faire son chemin en pratique.

Chapitre 2.6. Une raison d’être commune

Autant être clair une fois de plus : si toutes ces pratiques sont mises en œuvre dans le seul but de faire plus de profit, elles sont vouées à l’échec ! Pourquoi ? Parce que toutes les parties de la vision du monde Opale sont liées. En « maquillant » d’Opale une structure fondamentalement Orange, vous ne feriez qu’ajouter confusion et cynisme dans votre entreprise.

Les pionniers qui ont été présentés par Frédéric Laloux dans ce livre ont agi différemment. C’est par nécessité intérieure qu’ils ont transformé les façons de diriger une entreprise. Ils ne voulaient pas réduire les coûts, ni devenir plus agiles ou novateurs, mais trouver des manières de faire qui correspondent à leurs valeurs. L’efficacité n’était pas oubliée, mais elle était placée au second, voire au troisième rang des préoccupations.

Troisième partie. L’émergence des organisations Opale

Après avoir décrit des organisations qui fonctionnent déjà sur le modèle Opale, Frédéric Laloux s’est intéressé à la façon dont ce modèle pourrait se généraliser. Pour ce faire, il a interrogé ces organisations sur leur émergence. Comment ont-elles vu le jour ?

De là, il a pu tirer des enseignements utiles pour les organisations qui voudraient soit être créées sur cette base, soit faire évoluer leurs pratiques à partir d’un autre modèle existant. Cette partie cherche également à insuffler aux entrepreneurs la force d’agir pour le changement !

Chapitre 3.1. Les conditions nécessaires

Selon Frédéric Laloux, il n’y aurait finalement que deux conditions absolument nécessaires pour créer des structures et des pratiques Opale au sein d’une organisation et plus précisément d’une entreprise.

Le dirigeant : il doit porter une vision Opale. Les cadres qui l’accompagnent devraient aussi la porter, mais ce n’est pas obligatoire ; L’actionnariat : les propriétaires doivent suivre leur dirigeant et comprendre, eux aussi, la vision du monde Opale. Sans cela, le conseil d’administration reprendra le contrôle par d’autres moyens (Orange, etc.) dès que l’entreprise connaîtra une crise.

Entrons un peu plus dans le détail de ces deux conditions.

→ Le dirigeant (DG)

Quel est son rôle au sein d’une entreprise Opale ? Il est bien sûr - cela ne change pas — l’ambassadeur principal de celle-ci vis-à-vis du monde extérieur (fournisseurs, clients, autorités de tutelle, etc.). Pour le reste, tout change ! Il n’est plus en charge de la fixation des objectifs ni de l’animation des réunions, pour ne citer que quelques fonctions traditionnelles. Mais alors, que fait-il ?

Le dirigeant d’une entreprise Opale remplit surtout deux autres rôles :

Être le garant de l’espace où se déploieront les modes opératoires Opale ; Être un exemple du comportement Opale.

Le premier rôle n’est pas si facile à jouer, car les vieilles habitudes sont tenaces. En cas d’abus ou de problème, le dirigeant doit garder le cap et ne pas revenir aux anciennes solutions. Par exemple, devant un abus de bien social, la réaction première pourrait être la mise en place d’un système de surveillance qui diminue le niveau de confiance général.

Face à cela, le dirigeant a le devoir de dire « non ». Il doit montrer, par un discours clair, qu’il souhaite privilégier et protéger une « culture fondée sur [la] croyance en la valeur, en la dignité et l’honnêteté de chaque salarié. »

L’auteur évoque quelques cas plus problématiques dans le livre, comme la pression d’un gros client exigeant la création d’un poste entrant en contradiction avec une organisation Opale (voir page 342).

Dans tous les cas, le dirigeant devra se montrer créatif, quitte à être un brin provocateur, afin de respecter la vision évolutive de l’entreprise. L’idéal, bien sûr, est que tous les membres de l’entreprise défendent les valeurs opales ; mais ce n’est pas absolument requis.

→ Incarner de façon exemplaire les trois révolutions Opale

« Les DG fondateurs des entreprises autogouvernées ne détiennent pas d’autorité hiérarchique, mais ils exercent le plus souvent une forte autorité morale. Chacun de ceux avec qui je me suis entretenu durant cette enquête avait une conscience aiguë du poids de sa présence, de ses mots et de ses actes. » (Reinventing organizations, p. 343)

Le DG doit en particulier être capable d’incarner ces trois principes clés :

Autogouvernance (en réfrénant son envie de prendre le contrôle) ; Authenticité (en privilégiant l’ouverture, la sincérité et la fragilité dans les réunions et à l’égard des collègues) ; Écoute et raison d’être (laisser son ego de côté et interroger le sens global de l’entreprise).

Par ailleurs, le dirigeant n’a pas à être « surbooké » ! Sur ce point, il est un collègue comme un autre. Ils peuvent participer à toutes les activités de l’entreprise, mais en se demandant, comme tout autre membre, quelle est la valeur qu’il apporte.

Le dirigeant veillera aussi à diriger en sollicitant les avis. Par exemple, en faisant le tour de l’usine (si elle est petite) ou en utilisant un blog, comme l’a fait De Blok, le dirigeant de Buurtzog.

Chapitre 3.2. Créer une entreprise Opale

Qu’est-ce qui vous attire dans la création d’une entreprise Opale ? Est-ce davantage le principe de l’autogouvernance, ou le besoin de plénitude ? Frédéric Laloux vous incite à réfléchir à toutes ces questions et à d’autres encore.

Pensez par exemple en profondeur à la raison d’être de votre entreprise, mais aussi à la forme qu’elle devrait prendre. Considérez également la possibilité de choisir des co-fondateurs pour vous accompagner dans la tâche.

Il n’y a pas de recette miracle pour créer une entreprise Opale. Chaque situation est unique ! Toutefois, vous pourrez générer des pratiques saines qui seront un terreau fertile pour la suite.

→ Postulats et valeurs générales

Il est largement préférable de clarifier les postulats et les valeurs de fond dès le départ et en groupe. Cela est requis notamment afin que les décisions en matière de processus opératoires ne soient pas considérées comme absurdes. En l’occurrence, vous devez vous concentrer sur la perception de l’humain qui est le socle de toutes les pratiques de l’entreprise.

Contrairement à une entreprise Orange, par exemple, qui considère à la base que toute personne est égoïste et fainéante par nature, mettez en avant par la discussion des postulats comme la bonté et l’envie de donner le meilleur de soi. L’anthropologie (la conception de l’être humain), trop souvent sous-jacente dans les modèles managériaux, doit ici être mise au premier plan.

→ Trois pratiques en lien avec l’autogouvernance

Si vous voulez être aidés dans le détail, vous pourrez vous fier à Holacracy. Si vous souhaitez aller sur votre propre chemin, mais avoir quelques repères néanmoins, assurez-vous de voir ces trois points dès le début de l’aventure.

La sollicitation d’avis : personne, pas même vous, le DG, n’est là pour « valider » une décision ; tous les employés ont le pouvoir de décider et de demander des avis, que vous pouvez donner en tant qu’expert (mais pas imposer comme la solution) ; Une mécanique de résolution des conflits : ne les réglez pas à la place des personnes impliquées, mais définissez un mécanisme clair qui permette de le faire de façon juste ; Évaluation par les pairs et processus salariaux : adoptez une approche collective et ouverte de négociation des salaires, puis envisagez de créer une procédure d’évaluation par les pairs.

→ Quatre pratiques en lien avec la plénitude

Dès le commencement, pensez à travailler cet aspect, s’il n’est pas complètement chez vous. Pour vous aider à atteindre plus de plénitude dans votre rôle de DG, brainstormez les points suivants.

Les règles de base d’un espace protecteur : définition collective des valeurs et des règles qui en découlent. Les locaux professionnels, bureaux ou usines : choix en commun de la décoration, l’agencement, l’ambiance. Le processus d’intégration : élaboration d’un rituel d’accueil et d’un plan de formation pour les nouveaux. Méthodes de réunion : création d’un protocole adapté pour inciter chacun à se connecter à son soi profond.

→ Deux pratiques en lien avec la raison d’être

Incarner les valeurs et le sens de l’entreprise ne signifie pas adopter une attitude de prophète seul sur la montagne. Au contraire, vous devrez tout faire pour vous assurer de transmettre le sentiment que chacun peut réaliser le projet de l’entreprise.

« Ce qui est sain pour le fondateur que vous êtes, c’est de voir, dès le début, que l’entreprise a sa vie et son projet propres, distincts de vos souhaits et de vos désirs. Pendant une brève période, c’est peut-être surtout vous qui allez les exprimer, mais, dès que d’autres vous rejoindront, ils devraient eux aussi être capables de sentir quel est le projet global et trouver leur façon propre d’entrer en relation avec lui et lui donner expression. » (Reinventing organizations, p. 372)

Pensez à utiliser :

Le recrutement, c’est-à-dire à voir dès le départ si ça « colle » profondément entre le candidat et vous ; Le rituel de la chaise vide, dans lequel un employé se place en situation de représentation du projet de l’entreprise et répond à une question posée par l’assemblée (par exemple, « Est-ce que cette réunion a vraiment été utile à l’entreprise ? »).

Chapitre 3.3. Transformer une entreprise

Il vous faudra tout d’abord chercher à rencontrer les deux conditions nécessaires : la volonté du DG et du conseil d’administration. Sans cela, il sera très difficile, sinon impossible, de mettre en place un changement en profondeur.

Ensuite, vous pouvez y aller par paliers et commencer par l’une des trois révolutions : l’autogouvernance, la plénitude et la raison d’être). Chaque structure évolue à son propre rythme, a sa propre vie. Essayez de suivre ce rythme et de réaliser la « mue » progressivement. Dans tous les cas, soyez à l’écoute et sentez ce qu’il faut faire en premier.

→ Créer les conditions de l’autonomie

Les échelons « inférieurs » de l’entreprise (ouvriers, par exemple) aiment entendre parler d’autonomie. Ils accueillent généralement les propositions qui vont dans ce sens avec joie. À moins, bien sûr, que l’habitude de l’obéissance et de la soumission ne soit trop ancrée.

Assurez-vous en premier lieu que le sentiment d’autonomie soit approprié par tous au niveau psychologique. Cela peut prendre du temps. La raison d’être de l’entreprise, l’émulation des collègues et la pression du marché peuvent ici jouer un rôle favorable.

Pour les cadres moyens et supérieurs, le changement sera accueilli avec moins de spontanéité joyeuse. Leur poste pourrait être en jeu ; ils ne seront donc pas très favorables au changement. Le cas de Zorbist, raconté dans l’ouvrage (p. 380-383), est exemplaire d’une transition réussie.

Comment agir ? Vous pouvez :

Opter pour un chaos créatif, durant lequel les nouvelles structures vont se mettre en place (à partir de la suppression d’un outil clé du management comme la pointeuse, par exemple) ; Redéfinir les procédures par la base, en organisant des événements pour imaginer le futur de l’entreprise ; Passer par Holacracy et son modèle « prêt à l’emploi ».

→ Créer les conditions de la plénitude

Vous pourrez aller pas à pas, en suivant par exemple le calendrier de l’entreprise. Par exemple, si le temps d’évaluation est venu, proposez de le transformer en une évaluation par les pairs où ce sera le processus d’apprentissage et la vocation du collègue qui sera au centre des préoccupations.

Enlevez, autant que possible, votre masque. Expliquez les raisons (vues plus haut) pour lesquels il vaut mieux être sincère et centré, même au travail. Faites-vous des ambassadeurs et laissez-les prendre des initiatives.

Si vous décidez de mettre en place les conditions de la plénitude en une fois et de façon globale, pourquoi ne pas organiser une journée complète, hors site, durant laquelle toute votre équipe réfléchira à la question suivante : quelles conditions vous permettraient d’être pleinement vous-même au travail ? L’auteur donne les détails d’une telle procédure aux pages 388-393.

→ Créer les conditions de la réalisation de la raison d’être évolutive

Pas question de générer une profession de foi superficielle : vous et vos collègues, vous devez trouver ce qui vous anime vraiment, ce pour quoi l’entreprise vous paraît mériter l’existence. Ce pour quoi vous et vos collègues vous pouvez « donner » à elle.

Plusieurs méthodes sont citées par l’auteur en passant (Théorie U, démarche appréciative), mais le plus important, pour Frédéric Laloux, consiste à prendre le temps qu’il faut pour trouver ce sens profond. Il peut surgir après une réunion ou après 30 !

Bien entendu, ce processus doit être collectif, au maximum. Une fois que la raison d’être est trouvée, vous cherchez à l’inscrire dans le quotidien de tous vos collaborateurs. Pour ce faire, bannissez la langue de bois, parlez franchement et exprimez clairement vos idées. Bref : communiquez par les moyens qui vous semblent les plus appropriés (blog, magazine, mails, etc.).

Les personnes souhaitent travailler pour une entreprise qui « fasse sens ». Laissez-les s’imprégner et reformuler cette raison d’être et ils travailleront avec passion.

Chapitre 3.4. Les résultats

→ La preuve par l’exemple

Une fois que les pingouins sont dans l’eau, ils sont heureux et agiles. Lorsqu’ils sont sur terre en revanche, ils sont gauches et pas très efficaces. L’environnement fait beaucoup !

« Au stade Opale, la motivation bascule vers des facteurs intrinsèques : faire ce que l’on sent juste, en relation à ses valeurs et à ses convictions. […] Cela ne veut pas dire que l’efficacité ne compte pas dans le paradigme Opale : mais elle compte pour une raison différente. Quand nous cherchons à donner corps à une raison d’être qui fait profondément sens, nous voulons être efficaces ! » (Reinventing organizations, p. 398-399)

Mais quels sont les résultats ? Grâce aux exemples issus de ses recherches, Frédéric Laloux démontre la viabilité financière des entreprises Opale. Le cas de la croissance de l’entreprise néerlandaise Buurtzorg est éloquent. Ainsi que celui de FAVI, la fonderie de cuivre française, passée de 80 à 500 employés en 30 ans.

L’auteur ne fait pas de fausses promesses, il ne cherche pas non plus à valider complètement scientifiquement son hypothèse, mais il cherche à montrer honnêtement ce en quoi il croit profondément : l’entreprise de stade Opale permet de viser des résultats quasi irréalisables autrement.

→ Les moteurs d’une performance révolutionnaire

Comment ? Car l’entreprise Opale libère des « énergies », au sens large de ce mot, qui étaient restées inexploitées dans le passé (grâce à la raison d’être, au pouvoir mieux réparti, à l’usage des talents de chacun, etc.).

Par ailleurs, cette énergie est mieux canalisée. Et cela, grâce à une prise de décision plus fluide, une perception plus fine des problèmes et un alignement sur la raison d’être évolutive.

« Jusqu’à maintenant, nous avons dirigé les entreprises selon des schémas rigides, effrayés par la nature désordonnée et incontrôlable de l’évolution. Nous sommes peut-être en train de nous préparer au grand saut, à lâcher nos tentatives de maîtriser la vie et de la faire entrer dans les plans étriqués que nous lui avions tracés, à ouvrir les portes, à inviter l’évolution, le processus le plus puissant que la vie ait jamais mis en œuvre, à doper nos initiatives collectives. » (Reinventing Organisations, p. 406)

Chapitre 3.5. Entreprises Opale et sociétés Opale

Selon des recherches citées par l’auteur, seulement 5 % de la population occidentale verrait le monde selon un angle de vue Opale. Si l’hypothèse de ce livre est juste, une bascule pourrait néanmoins se produire dans les années à venir.

Les pionniers étudiés dans ce livre (en particulier dans la partie 2) feront des « petits ». Et lorsque ce sera le cas, cela ne changera-t-il pas la société dans son ensemble ? Même s’il est risqué de parler de l’avenir, Frédéric Laloux veut prendre le pari d’une (r) évolution Opale.

→ À quoi pourrait ressembler une société Evolutive Opale ?

Voici quelques traits mis en avant par l’auteur :

Une croissance zéro et une économie circulaire ; Une autre façon de consommer, moins matérialiste ; Des changements profonds dans les conceptions de certains secteurs et métiers ; D’autres systèmes monétaires, moins d’épargne et plus de liens ; Une modification profonde des rapports de propriété ; Des rapports entre humains à la fois plus locaux et plus globaux ; La fin du travail tel que nous le connaissons ; Un renouvellement démocratique vers plus de participation ; De nouvelles voies pour la spiritualité au-delà du pur matérialisme.

Quant à savoir si la société actuelle s’effondrera d’un seul coup (théorie de l’effondrement de Jared Diamond) ou si elle évoluera progressivement vers le modèle Opale, cela reste indécis. Frédéric Laloux est toutefois optimiste : il est possible de se transformer rapidement, sans attendre la catastrophe.

→ Les entreprises Opale dans une société Opale

La frontière entre entreprises et associations sans but lucratif est brouillée par l’émergence des entreprises Opale. L’actionnariat devra donc clairement repenser son rôle. Si la société Opale ne valorise ni la thésaurisation ni la propriété, comment réimaginer le rôle des actionnaires ?

L’auteur plaide pour la création d’un riche tissu partenarial constitué de partenaires de gérance qui participeraient au financement des entreprises qui leur tiennent à cœur, sans espérer aucun versement automatique de dividendes.

La flexibilité du travail sera aussi plus grande, les frontières entre entreprises plus poreuses. Avec des entreprises guidées par leur raison d’être, la concurrence cèdera la place à des collaborations plus ou moins temporaires.

→ Créer l’avenir

« La meilleure façon de prédire l’avenir, c’est de le créer. » (Peter Drucker)

En citant ici le célèbre consultant étatsunien Peter Drucker, Frédéric Laloux veut nous exhorter à avoir confiance en l’avenir. Il est possible de le construire à partir de ce que nous avons du stade Opale et des exemples qui nous ont été fournis par les pionniers étudiés dans ce livre.

Annexes

En annexe, vous trouverez :

Les questionnaires d’enquête utilisés ; Une réflexion sur le stade évolutif postérieur au stade Opale ; Un récapitulatif utile des principaux éléments structurels d’une entreprise Opale ; Un comparatif des formes d’organisation Opale et Orange.

Conclusion sur « Reinventing organization. Vers des communautés de travail inspirées » de Guillaume Lamarre :

Un guide indispensable pour les managers qui aspirent à un profond changement :

Ce livre est novateur et même provocateur. Pour toutes celles et ceux qui agissent dans le milieu du management « classique », c’est-à-dire dominé par une vision mécaniste du monde, la pilule risque d’avoir du mal à passer. Et pourtant, il ne faut pas avoir fait beaucoup d’études pour se rendre compte que le modèle Orange d’organisation a du plomb dans l’aile : épuisement des ressources naturelles et des travailleurs, réduction de l’existence à une pure recherche infinie de profits, perte de sens, etc.

Les entreprises qui se meuvent dans une vision du monde Verte, c’est-à-dire pluraliste, sont plus enclines à entendre le message de Frédéric Laloux. Elles ont déjà pris conscience et réagit à aux problèmes de fond générés par le modèle productiviste Orange. Il existe aujourd’hui de nombreuses organisations qui se tournent vers cette approche pluraliste et ouverte.

Mais l’auteur va encore plus loin. En dénichant des « pionniers » en Europe, mais aussi aux États-Unis, il montre que ceux-ci sont en train de développer une vision du monde évolutive, qui rompt avec l’approche pluraliste et ses contradictions internes. Ce faisant, il nous pousse à suivre l’exemple et à découvrir ce que nous pouvons faire grâce au modèle Opale.

Ce qu’il faut retenir de « Reinventing organizations. Vers des communautés de travail inspirées » de Frédéric Laloux :

Le message le plus important à retenir est simple : nous pouvons nous transformer rapidement. L’espoir est permis (et requis) ! La confiance dans notre capacité à changer les choses est le moteur qui les transformera effectivement. C’est pourquoi tout le travail de l’auteur est dirigé vers une mise en application des principes qu’il a aidé à mettre au jour dans le monde des organisations.

Je citerai les deux dernières phrases du livre, qui paraphrasent les propos d’auteurs qui l’ont inspiré :

« Nous vivons une époque extraordinaire. Je suis parfois impatient de voir ce que l’avenir va nous apporter. Pour reprendre les mots de Wealthey et de Kellner-Rogers, je ne peux que me demander : si nous réussissons à être dans le monde dans toute la plénitude de notre humanité, de quoi serons-nous capables ? » (Reinventing organizations)

Vous voulez, vous aussi, devenir un manager bienveillant ? Formez-vous grâce à l’ouvrage de Frédéric Laloux et consultez les autres ressources déjà disponibles sur des Livres pour changer de vie !

Points forts :

Un effort de théorisation important ; Une approche novatrice qui bouscule les certitudes ; De nombreux exemples, issus d’un travail empirique de grande ampleur ; Une explication détaillée du fonctionnement des organisations Opale (on n’en reste pas aux grands principes, mais on va dans le détail !) ; L’écriture reste claire, malgré des thématiques parfois abstraites et de nombreux développements parallèles.

Point faible :

Nous pouvons nous poser la question du caractère « occidentalo-centré » du propos. Sont-ce, encore et toujours, les Occidentaux qui sont à la pointe de l’évolution ? Bien sûr, nous pouvons critiquer et même ne pas être d’accord avec le modèle proposé, mais nous devons tout de même reconnaître le travail de longue haleine, impressionnant et original qui a été mené par l’auteur. Pour cette raison, je conserve les 5 étoiles !

Ma note :

                

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Mon, 24 Oct 2022 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/12097/Reinventing-organizations
Le management situationnel http://www.olivier-roland.fr/items/view/12082/Le-management-situationnel

Résumé de « Management situationnel. Vers l’autonomie et la responsabilisation » de Dominique Tissier : un ouvrage de référence qui guide les managers vers plus d’autonomie et de collaboration. Par Dominique Tissier, 2018, 184 pages, nouvelle édition augmentée (1re édition 1988). Chronique et résumé de « Management situationnel. Vers l’autonomie et la responsabilisation » de Dominique Tissier

Chapitre 1 – Le management situationnel, toujours d’actualité Le management situationnel est une approche pertinente et efficace qui a séduit des dirigeants et des entreprises du monde entier. L’auteur l’a expérimentée avec succès auprès de plusieurs équipes de deux grandes entreprises pendant 30 ans. Pourquoi cette longévité et cette pertinence aujourd’hui ? Selon l’auteur, le management situationnel ne propose pas une recette miracle, mais une méthode et un cadre adapté aux évolutions du monde de l’entreprise aujourd’hui. Pris dans une digitalisation croissante et une demande de collaboration instantanée, les différents acteurs de l’entreprise ont besoin de faire preuve d’autonomie, de prendre des initiatives tout en restant connectés aux objectifs communs du travail. Le management situationnel constitue un guide précieux pour des contextes et des situations très variés. Le management situationnel et les autres méthodes de management Plusieurs autres méthodes de management cohabitent avec le management situationnel (méthodes inspirées du Lean management, méthode agile, actionnariat salarié, eRH, architectures de bureaux plus adaptées à la collaboration, etc.). Si les méthodes peuvent varier, les résultats recherchés sont similaires : plus d’autonomie dans les équipes, une meilleure collaboration, des systèmes d’évaluation revisités. L’objectif final est d’obtenir l’engagement humain et la performance économique. Mais la multiplication des méthodes peut mener à la confusion et à des incohérences ce qui conduit au résultat inverse à celui escompté : tensions, malaises, désengagement, etc. Face à ces dangers, l’auteur déconseille fortement de se ruer sur les solutions préfabriquées de ceux qu’il nomme des « gourous » de la pensée managériale. Cohérence et adaptation Vous devez rester cohérents et adapter votre méthode de management aux différentes évolutions et situations qui traversent l’entreprise et vos équipes. Différents points doivent être discutés précisément parmi les membres concernés dans l’entreprise : le rôle du management, la définition et l’évaluation des méthodes et des objectifs. Des actions de formation doivent être régulièrement organisées pour stimuler l’engagement de chacun (forums, groupes de pairs, ateliers de travail, etc.). Méthodes et pratiques sont toutes deux indispensables et se complètent. Chaque manager doit avoir une marge de manœuvre pour adapter son style de management en fonction des situations, des contraintes et de la personnalité de chaque collaborateur. Il faut savoir discerner les degrés de maturité qui permettent la responsabilisation d’une équipe sur certains sujets (pas nécessairement tous les sujets), quand une expertise est nécessaire face au travail collaboratif, si les valeurs de l’entreprise sont assez précises pour être opérantes, etc. Le management situationnel, un cadre de référence plutôt qu’un modèle Selon Dominique Tissier, pour parvenir au management collaboratif et responsabilisant, vous devez choisir les méthodes les plus adaptées à une situation réelle donnée. Il ne s’agit pas d’appliquer des solutions faciles et toutes faites. Mais à l’inverse, vous devez observer, analyser, évaluer le contexte, les besoins, les compétences de chacun et faire aussi avec votre propre personnalité. Et il faut accepter que cela puisse prendre un peu de temps. C’est un travail qui se fait dans la durée. Les notions de « cycle de développement » et de « posture » sont importantes. Il n’y a pas une « bonne posture », mais plusieurs qui peuvent être amenées à évoluer au fil du temps et des situations. Vous devez être en mouvement et adapter les réponses aux problèmes qui se présentent tout en restant « attentif à la personne et à son développement ». Le management situationnel et les générations Y et Z Selon Dominique Tissier, le management situationnel est adapté au profil des jeunes qui entrent aujourd’hui sur le marché du travail. Il répond à leurs attentes en termes de connexion à des canaux d’informations variés et sans filtre hiérarchique, notamment via les réseaux sociaux. En même temps qu’il laisse plus de liberté à chacun, le management situationnel prône un encadrement et un accompagnement sérieux. Il invite aussi à des actions équilibrées de formation et d’autoformation dans l’entreprise pour aller vers plus de collaboration et de responsabilisation. Management situationnel et leadership Selon le management situationnel, management et leadership sont indispensables et complémentaires. Le management fait référence à des objectifs à atteindre dans un périmètre et un secteur d’action définis et par la collaboration de différents acteurs. Le leadership est inclus dans le management et se réfère à la capacité d’une personne à inspirer et à entraîner ses collaborateurs, à travers sa personnalité et son aura, dans des projets collectifs. Les travaux consacrés aux leaders Différents travaux portent sur les leaders.

Les travaux portant sur les qualités des leaders : l’auteur annonce qu’il traitera des travaux portant sur les qualités des leaders dans une partie ultérieure de l’ouvrage, s’inspirant des ouvrages de Howard Gardner, professeur à la Business School d’Harvard. Les travaux qui portent sur « le leader comme héros » : Dominique Tissier cite l’ouvrage de référence de Joseph Campbell (Le Héros aux mille et un visages). La figure du héros mythique inspire un scénario qui se répète et qui se base sur l’idée qu’un héros a de bonnes chances de succès, qu’il sait où il va, mais que son chemin est parsemé d’incertitudes, ce qui suscite l’engagement des collaborateurs dans le collectif pour passer les différentes étapes. En tant que leader, vous pouvez vous positionner de la sorte. Les études sur « l’après-héros » : À travers l’exemple de Périclès (400 avant J.-C.), un des premiers grands leaders de l’histoire, l’auteur montre l’indispensable complémentarité du management et du leadership. Le management permet d’assurer la pérennité de l’organisation, pour porter les changements nécessaires, faire face à de graves crises. Le leader disparait un jour et à lui seul, il ne suffit pas.

Gouverner dans la durée Le management situationnel, comme son nom l’indique, est un management qui s’adapte aux situations et aux circonstances. Si un changement important a lieu en entreprise, il peut être important de faire appel à une posture de leadership forte. Au contraire, si l’entreprise est bien engagée dans une progression régulière, le leadership peut se mettre en second plan, de manière à préparer le moyen terme et à anticiper des changements à venir. L’auteur cite le « commandement adaptatif » très présent dans des métiers qui nécessitent des formes de mobilisation diverses en fonction des circonstances (armée, pompiers, ambulanciers). La forte structuration de l’environnement de travail et un contexte de court terme incitent à un fort contrôle et beaucoup d’organisation. À l’inverse, un contexte de long terme laisse plus de place à l’autonomie. Prendre en compte l’ensemble des critères en fonction de la situation peut parfois se révéler un exercice difficile. L’auteur cite Hersey et Blanchard qui invitent à réfléchir à partir de la différence observée entre l’état des besoins de l’entreprise et de l’état des compétences des équipes :

Si les compétences et l’engagement sont adaptés aux besoins, vous pouvez laisser plus d’autonomie aux équipes. Si ce n’est pas le cas, vous pilotez davantage, vous organisez le plan d’action et les moyens.

Ainsi le management situationnel évolue et s’adapte en fonction de la progression de l’organisation et de ses besoins pour aller vers plus de collaboration et d’autonomie. Le management situationnel au quotidien Le management situationnel propose ainsi une approche moderne adaptée aux évolutions de nos sociétés. Le manager est à la fois celui qui dirige, mais aussi celui qui assure un dialogue avec ses équipes tout en répondant aux besoins de formation et de progression de chacun. Il adapte son mode de management en fonction du degré de maturité des collaborateurs et des équipes tout en prenant en compte la situation. Progressivement, les équipes deviendront plus autonomes et le manager pourra déléguer davantage, ce qui libérera de l’espace pour de nouveaux projets. Ce que propose ce livre L’auteur précise que la première édition de l’ouvrage date de 1987. Les nouvelles éditions se sont ensuite enrichies. Les approches du management ont évolué en tenant compte d’un contexte plus large pour considérer les environnements de travail et les modes d’organisation. L’autonomie, individuelle et des équipes, a été davantage mise en avant. Les outils et les méthodes ont également été actualisés. Questionnaire : Êtes-vous un manager situationnel ? « Ce questionnaire a pour but d’introduire de façon vivante et active les notions du management situationnel. (…) Vous allez trouver huit situations dans lesquelles un responsable se voit engagé dans une interaction avec une personne ou un groupe de personnes. À chaque fois, quatre choix s’offrent à lui. » (Management situationnel, p. 35)

Chapitre 2 – La carte des modes de management Mon management, une affaire de tempérament ? Il est fréquent de parler des managers à partir d’adjectifs qualificatifs qui caractérisent leurs traits de personnalité (agréable, ouvert, exigeant, fatigant, etc.). L’auteur propose l’approche des modes de management qui s’intéresse davantage à ce que fait concrètement la personne pour diriger. En tant que manager, vous devez être conscient des traits dominants qui caractérisent votre style de management et que vous avez tendance à adopter le plus souvent. Vous devez aussi être capable de vous adapter en fonction des situations pour faire varier ce style le cas échéant. Dominique Tissier donne l’exemple d’un manager qui serait très relationnel et qui aimerait le dialogue et le travail en équipe. Si vous êtes ce type de manager, il vous faudra aussi redéfinir et restructurer des missions et des processus et varier les styles de management. Vous l’aurez compris, il vous faut avant tout observer, analyser et vous adapter en fonction des situations sans pour autant laisser de côté votre propre personnalité. Tirez le meilleur de vous-même et adoptez des comportements adaptés aux contextes. Soyez fluide et sachez mobiliser différents modes de management suivant les contraintes et les demandes actuelles. Les quatre modes de management Dominique Tissier insiste sur la nécessité pour les managers de créer et de se porter garants d’environnements de travail qui favorisent de bonnes relations entre les collaborateurs. Il est important que la direction de l’entreprise octroie suffisamment de marges de manœuvre aux managers pour créer ces environnements de travail. Les quatre modes de management définis par l’auteur selon deux axes (organisationnel/relationnel) présentés à travers un schéma très efficace à la page 48 :

Structurer/piloter : peu relationnel, très organisationnel ; Dynamiser/entraîner : très relationnel, très organisationnel ; Associer/faire collaborer : très relationnel, peu organisationnel ; Responsabiliser/déléguer : peu relationnel, peu organisationnel.

Les composantes du mode relationnel identifiées par l’auteur sont : recevoir les collaborateurs pour les écouter et les conseiller, créer une ambiance de travail qui favorise l’expression individuelle, associer les collaborateurs à la prise de certaines décisions, former une équipe de travail qui permette des relations constructives et chaleureuses entre les individus, etc. Les composantes du mode organisationnel identifiées par l’auteur sont : l’investissement par le manager pour focaliser son énergie et celle des autres sur l’organisation au point de vue des missions, des rôles, des systèmes, des outils de gestion, des systèmes d’information, des règles du jeu, des modes de fonctionnement des équipes. Le management de type 1 (M1) : Structurer/piloter Ce secteur est caractérisé par des comportements fortement organisationnels et faiblement relationnels. Quand trop de dérives et de dispersions apparaissent, il est mobilisé pour reposer les bases d’une organisation et revenir à des fondamentaux unifiés du système de management : outils et méthodes d’information, de gestion, d’évaluation des performances. Attention cependant à bien doser ce qui est essentiel à la structure et à ne pas introduire un excès de directivité, de formalisme, de réunions et de contrôles. Cela risquerait de créer un cadre pesant et envahissant qui nuirait à l’action et à l’objectif recherché d’efficacité. À la page 52, vous trouvez un tableur listant précisément des actions que vous pouvez mettre en place pour établir et faire vivre un cadre structurant ainsi que les outils et les méthodes de pilotage nécessaires. Le management de type 2 (M2) : Dynamiser/entraîner Ce secteur se réfère au leadership, à la « capacité pour le management à fixer un cap et à donner envie d’aller dans la direction indiquée » (Management situationnel, p. 53). Dans cette posture, vous devez convaincre vos collaborateurs et vos équipes de l’intérêt et de la validité des résultats fixés et des moyens mis en œuvre pour les atteindre. Vous insufflez l’énergie et l’enthousiasme nécessaires au bon déroulement du travail collectif. Vous encouragez un esprit de solidarité qui donne à chacun l’envie de s’investir dans son travail et avec ses collègues. Gardez toujours en tête les éléments de réponse à la question du « pourquoi ? » et devenez capable de les décliner en fonction des collaborateurs et des situations. Ainsi vous indiquez le sens du travail de chacun et les managers peuvent effectuer une transmission commune de ces mouvements insufflés. Chaque manager peut alors adopter un type de management spécifique, en fonction des situations. L’auteur insiste sur l’importance de créer des « fiertés locales » et de renforcer le sentiment d’appartenance en valorisant la mise en place d’outils, de méthodes et de procédures à succès par les équipes. Le manager doit être investi pour créer et encourager ces dynamiques collectives. À la page 55, vous trouvez un tableur listant précisément des actions que vous pouvez mettre en place pour donner un cap, construire un futur, convaincre et entraîner les personnes. Le management de type 3 (M3) : Associer/faire collaborer Le management collaboratif cherche à faire s’exprimer le potentiel de chacun des collaborateurs. En tant que manager, vous invitez chacun à sortir de sa zone de confort pour aller vers plus de créativité et vers la recherche de solutions dans l’esprit d’un travail partagé. Vous vous mettez en retrait pour laisser les échanges se faire. En revanche, vous pouvez intervenir pour réguler des débordements, synthétiser, relancer les échanges, insuffler de la bonne humeur. Vous assurez un cadre « léger, mais suffisant » (Management situationnel, p. 57). L’auteur rappelle ici les principes de base de quelques méthodes de management existantes. Il montre comment elles peuvent contribuer à un « management collaboratif moderne ». → Le brainstorming Un animateur enregistre tout ce qui se dit pendant une réunion, chacun est encouragé à collaborer et à donner des idées, à rebondir sur celles des autres, dans un esprit constructif. Le tri des idées est fait ultérieurement. → Le lean management Il se caractérise par une organisation très structurée et visuelle avec différentes méthodes de mesure du temps de travail et des tâches effectuées. Les méthodes collaboratives y ont aussi toute leur place. L’expérience a montré que des chantiers d’améliorations associant tous les types de collaborateurs, notamment les postes opérationnels, sont les plus performants. → Le scrum C'est la plus connue des « méthodes agiles ». Le client joue un rôle de pilote dans les équipes. Des outils visuels permettent de planifier et d’organiser le travail collaboratif de l’équipe. Dans des réunions quotidiennes, chacun s’exprime sur ses réalisations et les difficultés qu’il rencontre. Une base de temps courte (deux semaines) permet de faire apparaître rapidement des résultats. L’équipe est accompagnée, et non pas dirigée. → Le design thinking Celui-ci consiste à s’immerger dans l’expérience des utilisateurs (de produits ou de services) par des méthodes d’observation. Les informations recueillies sont ensuite analysées et restituées sous la forme de visuel, de photo, de récit. Cette méthode donne des résultats très efficaces et créatifs qui permettent d’aller vers plus d’innovation. → Le mentoring Il s'agit ici d'aider la personne à trouver par elle-même des réponses à des situations complexes. En tant que manager, vous pouvez vous positionner temporairement en position de mentor. Vous ne donnez pas à la personne les solutions auxquelles vous pensez, mais vous élaborez un questionnaire qui lui permet d’analyser la situation et de formuler ses propres solutions. Ainsi vous accompagnez la personne vers plus d’autonomie. Ce rôle est à distinguer de celui de tuteur (qui enseigne en guidant) et de coach (qui aborde les dimensions personnelles et psychologiques). À la page 64, vous trouvez un tableur listant précisément des actions que vous pouvez mettre en place pour associer les personnes et renforcer le travail collaboratif transverse des équipes au quotidien. Le management de type 4 (M4) : Responsabiliser/déléguer Pour bien déléguer, définissez les domaines d’action que vous souhaitez conserver et ceux que vous souhaitez confier à d’autres. L’auteur vous conseille de clarifier vos activités futures et de réaliser un compromis entre les besoins de l’entreprise et vos goûts et plaisirs personnels. « Quels sont donc ces sujets que vous pourriez choisir de ne pas déléguer ?

Les changements d’ampleur, les virages stratégiques ;

Les opérations majeures concernant les personnes (recrutement ou départ de collaborateurs directs, orientations de la politique salariale) ;

Une partie du management de l’équipe directe ;

Les activités de représentation extérieures à l’organisation, à l’entreprise, les relations publiques ;

L’innovation, le métier dans son excellence. » (Management situationnel, p. 66-67)

La délégation vous permettra de vous concentrer davantage sur la réalisation de ces activités stratégiques. Le mode responsabilisation est plus ambitieux que le mode délégation. Chaque équipe a la responsabilité de nombreux sujets qui sont discutés collectivement (sécurité, planning de travail, congés, recrutements, environnements de travail, etc.). Chaque équipe doit garder une taille relativement limitée. Si l’organisation croît, plutôt que d’agrandir la taille des équipes, on crée de nouvelles équipes de taille équivalente. Attention, certains managers ne sont pas prêts à passer en mode M4 dans un délai court. Il faudra parfois leur laisser le temps de s’approprier cette démarche et ses objectifs. Certains peuvent même refuser cette démarche. Toutefois, rassurez-vous : d’autres vous suivront. À la page 74, vous trouvez un tableur listant précisément des actions que vous pouvez réaliser pour créer et mettre en place un environnement de travail favorable à la délégation vers les personnes et à la responsabilisation des équipes. Premier dépouillement : Êtes-vous un manager situationnel ? Dominique Tissier vous propose un dépouillement du questionnaire que vous avez réalisé à la fin du chapitre 1. Vous analysez vos résultats à la lumière des éléments qui viennent de vous être présentés dans le chapitre 2. L’auteur présente également une analyse des modes mixtes, c’est-à-dire qui combinent différents modes de management :

Les secteurs voisins : M1/M2, M2/M3, M3/M4 ; Les secteurs « croisés » : M1/M3, M2/4, M1/M4.

Pour finir, la « dominante » idéale est exposée.

Chapitre 3 – Les voies de l’autonomie. Comment adapter le mode aux situations « L’autonomie professionnelle se définit dans l’entreprise comme la combinaison de la compétence et de l’engagement d’une personne ou d’un groupe dans le cadre d’un objectif, d’une mission, d’un projet. Elle est relative à une situation précise, ce qui signifie qu’une même personne possède des degrés d’autonomie professionnelle variés selon les situations qu’elle rencontre. Le rôle du manager est de s’adapter en permanence à l’autonomie des individus ou des groupes et de faire progresser cette autonomie vers les niveaux les plus élevés compatibles avec les contraintes de l’environnement de travail » (Management situationnel, p. 83). Dans ce chapitre, l’auteur annonce qu’il étudie les pièges à éviter pour amener vers plus d’autonomie en référence aux quatre modes étudiés dans le chapitre précédent. Plusieurs facteurs de l’environnement de travail jouent un rôle dans le mode de management adopté :

la culture de l’entreprise ; la nature des activités exercées ; les attentes de la hiérarchie et des collègues ; l’autonomie des collaborateurs.

Dans un premier temps, il est nécessaire de s’adapter à l’environnement tel qu’il existe. Puis il est intéressant de chercher à le faire évoluer pour aller vers plus de collaboration et de délégation. L’acquisition des conduites autonomes dès la petite enfance Les conduites autonomes s’acquièrent dès la petite enfance à travers l’éducation que l’on reçoit de la part des personnes adultes qui s’occupent de nous. Ces personnes nous enseignent le respect de certaines règles de sécurité (pour traverser la route, utilisation de l’électroménager) et à prendre soin de nous-mêmes (se laver, s’habiller, aller à l’école, faire ses devoirs, etc.). Des règles de politesse sont enseignées et des limites sont posées. L’enfant acquiert aussi progressivement de l’autonomie en vivant avec les personnes chargées de son éducation. Il analyse et reproduit les comportements qu’il observe. L’accompagnement et les encouragements des éducateurs jouent un rôle central. Les règles enseignées sont sociales : elles permettent d’adopter un comportement adapté à la vie en société. Dans le cas où l’on ne suit pas ces règles, des sanctions apparaissent. L’acquisition de l’autonomie par la socialisation Dominique Tissier indique que la socialisation commence, comme l’acquisition de l’autonomie, dès la petite enfance. La socialisation correspond à l’envie d’être avec d’autres personnes, d’échanger, de partager, de passer du temps, de collaborer à des projets collectifs. Au cours de l’enfance et de l’adolescence, une socialisation réussie passe par la recherche d’un compromis réussi entre la socialisation et la différenciation. La socialisation C'est le fait d’appartenir à un groupe qui exige que l’on se conforme (du moins en partie) à ses normes. Plus généralement dans la vie collective, une socialisation réussie se traduit par le respect des :

Lois et des réglementations ; Autres personnes avec qui l’on communique ; Règles du jeu (souvent implicites) des activités collectives.

Une bonne socialisation permet aussi de transgresser certaines règles intelligemment, lorsque le contexte le permet et si cela est justifié par un intérêt plus grand. La différenciation C'est la capacité à exprimer ses propres opinions et désirs, à affirmer sa personnalité propre. Il s’agit ici de trouver et d’affirmer sa place à travers la construction d’un espace personnel propre et l’affirmation de différents rôles :

par rapport aux autres dans différents groupes (délégué, animateur, joueur de tel instrument, gardien de but, etc.) ; en relation aux proches (parents, amis, petit-ami, etc.) ; dans l’espace virtuel des réseaux sociaux.

Cette quête d’autonomie est complexe et difficile. Des phases de dépression et de dévalorisation de soi peuvent apparaître, tout comme des conduites à risque (alcool, drogues, etc.). Avoir de l’espace pour agir Expérimenter et pouvoir proposer du neuf est indispensable à la conquête de l’autonomie. Les évaluations que nous recevons sur nos agissements (compliments, valorisations, encouragements) jouent un rôle très important. Elles contribuent au fait que l’on se sent « utile » pour des actions collectives (société, famille, groupe sportif ou politique, etc.). Si les bons éléments de l’autonomie et de la socialisation sont mis en place dans l’enfance et l’adolescence, il y a de fortes chances que la personne, devenue adulte, bénéficie d’une socialisation réussie au niveau professionnel. Elle a alors « la capacité à agir, même en situation compliquée, tendue, exigeante, à chercher des moyens d’action pour obtenir un résultat avec les autres, à s’autoriser à dire “je”, à prendre des risques, à entreprendre. » (Management situationnel, p. 88). À l’inverse, si tous les éléments de l’autonomie et de la socialisation ne sont pas là — ou que certains sont en excès par rapport à d’autres —, l’adulte peut rencontrer des difficultés importantes dans sa vie professionnelle. L’auteur résume ainsi les fondamentaux de l’acquisition de l’autonomie :

Respecter des cadres et des limites, les fondamentaux de la vie collective ; Trouver sa place physiquement, humainement, virtuellement ; Pouvoir agir et se savoir utile ; Accompagner selon le besoin, de manière dosée.

L’autonomie dans l’organisation, dans l’entreprise Selon Dominique Tissier, les personnes arrivent dans l’entreprise « porteuses de leur histoire d’autonomie ». En tant que manager, vous devez être attentif aux besoins de la personne pour la guider vers plus d’autonomie. Demandez-vous alors :

Quels sont les attendus de la mission de cette personne, quelles sont les capacités qu’elle démontre et en conséquence quels sont ses besoins ; Comment l’accompagner dans son apprentissage et lui laisser la possibilité d’expérimenter et d’explorer par elle-même.

À la page 90, Dominique Tissier liste un ensemble de conseils pratiques et de points d’attention pour favoriser l’adaptation à l’entreprise d’une nouvelle personne, « débutante ou expérimentée », pour favoriser « la montée en autonomie », notamment :

Faire le point sur les expériences de la personne et les écarts possibles avec la culture d’entreprise ; noter les points de vigilance ; Poser le cadre, donner les informations nécessaires, observer comment la personne décode la culture d’entreprise et les règles ; Faciliter l’accueil physique avec les personnes de l’équipe et de l’entreprise et l’accès aux outils de communication virtuelle.

De son côté, si vous êtes nouveau collaborateur, vous devrez rester attentif au respect des règles et à la nécessité de « rester vous-même ». Vous devrez éviter deux écueils :

Celui du conformisme qui vous amènera à être simple exécutant sans jamais apporter de contribution ; Celui de la déviance qui pourrait vous amener à une transgression complète du cadre et des règles et à la rupture avec les autres collaborateurs.

Évaluer l’autonomie professionnelle de tous pour mieux accompagner Chacun, en fonction de son histoire personnelle et de son parcours professionnel, se situe à un niveau différent sur l’axe de l’autonomie. L’auteur commence par préciser les caractéristiques de chacune des extrémités de l’axe de l’autonomie.

Très faible autonomie = grandes difficultés à intégrer et à respecter un cadre, à suivre des règles, à être à l’heure, à écouter, à se concentrer. Beaucoup d’attention et un encadrement très précis et spécifique sont alors nécessaires. Très forte autonomie = grande facilité à intégrer le cadre et à comprendre les codes explicites et implicites de l’entreprise, à répondre aux attendus. Le danger est une progression en décalage avec les autres et la naissance de tensions et de jalousies.

Entre ces deux extrêmes, la plupart des collaborateurs répondent globalement aux attendus de leurs missions pour acquérir les fondamentaux, trouver leur place et agir. Toutefois, des différences importantes peuvent exister entre les personnes. C’est pourquoi le manager doit adapter son mode de management aux besoins des personnes. Il doit observer la progression de chacun, dimensionner les missions, mettre en place des mesures d’accompagnement qui permettent d’aller vers plus d’autonomie. Les trois dimensions de l'autonomie professionnelle Dominique Tissier identifie alors trois dimensions de l’autonomie professionnelle.

Dimension 1 – La situation : le périmètre à l’intérieur duquel l’autonomie se manifeste (poste, rôle, mission, projet, etc.). Dimension 2 – La compétence : forgée à la fois à partir des expériences de la personne qui lui ont permis d’acquérir un ensemble de savoirs. Elle est aussi alimentée à partir de sa capacité à mobiliser pour obtenir des aides et des informations utiles. Le manager ou d’autres professionnels (coach, mentor, tuteur, formateur, etc.) peuvent accompagner chacun pour améliorer sa compétence. Dimension 3 – L’engagement : pour être bien engagé, chaque collaborateur doit se sentir en accord et enthousiaste vis-à-vis des missions globales de l’entreprise et des missions locales auxquelles il participe. Des marques de reconnaissance, la visibilité sur les perspectives et de bonnes relations contribuent à alimenter l’énergie et l’envie de chacun.

Ces dimensions sont à prendre en compte « pour poser un diagnostic et déterminer le mode de management approprié ». Le triangle de l’autonomie : les principes du management vers l’autonomie croissante À la page 96, un schéma représente le triangle de l’autonomie. Chaque sommet du triangle correspond à chacune des dimensions (situation, compétence, engagement). Le savoir-faire se situe entre l’autonomie et la compétence. Le vouloir faire se situe entre l’autonomie et l’engagement. Entre les pages 96 et 98, vous trouverez un récapitulatif complet des différentes composantes du management situationnel abordées jusqu’alors.

Chapitre 4 – Les cycles de management : la personne, l’équipe Pour mener des personnes vers de hauts niveaux d’autonomie, le manager a une triple tâche. Il doit adapter son mode de management en fonction des contraintes de l’environnement et des niveaux d’autonomie déjà existants des personnes et des équipes. Il a aussi pour tâche d’établir des cycles pour faire évoluer l’autonomie. Le cycle de la personne À la page 102, deux schémas présentent les caractéristiques des cycles progressifs et régressifs. À chaque type d’autonomie (consulter le chapitre 3) correspond un mode de management (consulter chapitre 2) :

Très faible autonomie = M1 — structurer/piloter Faible autonomie = M2 — dynamiser/entraîner Autonomie modérée = M3 — associer/faire collaborer Forte autonomie = M4 — responsabiliser/déléguer

Le cycle progressif de la personne Il se caractérise par le passage progressif entre les différents types d’autonomie et de management pour aller d’une très faible vers une forte autonomie. Pour une même personne, il est possible d’adopter des types de management différents en fonction du niveau d’autonomie de la personne pour la mission ou la tâche qui lui est confiée. Vous observez comment la personne évolue dans l’environnement professionnel et sur les différentes tâches qui sont les siennes. Vous pouvez alors planifier différentes étapes pour accompagner la progression de la personne vers plus d’autonomie. L’auteur, Dominique Tissier, identifie deux parties dans le cycle progressif.

Première partie du cycle progressif : vous, manager, avez un « rôle moteur » dans le groupe et vous êtes « décideur, pédagogue, initiateur ». Au début d’un projet, vous vous concentrez sur l’organisation. Vous dosez les missions confiées à chacun, ni trop faciles, ni trop difficiles pour stimuler et encourager les réussites justifiées. Deuxième partie du cycle progressif : elle commence lorsque la personne managée manifeste son autonomie. Vous, manager, avez un « rôle accompagnateur ». Dans ce cas, vous passez en mode M3 (associer/faire collaborer). Vous valorisez alors les idées et les propositions du collaborateur et redirigez celles qui s’éloignent trop du cadre de la mission. Progressivement, vous diminuez les échanges.

À la fin du cycle progressif, la personne est complètement autonome sur l’activité et sollicite le manager lorsqu’elle le juge nécessaire. Le cycle régressif de la personne Vous constatez qu’un collaborateur ou son équipe semblent démotivés, moins engagés et que les résultats ne sont plus au rendez-vous comme dans une période précédente. Vous établissez alors un dialogue subtil avec le collaborateur pour comprendre les raisons de ce changement. Dans ce cadre, vous lui laissez de la place pour exprimer ses raisons et les solutions qu’il envisage. Enfin, vous définissez ensemble les actions à mettre en œuvre. Il est important d’effectuer le changement du mode de management le plus rapidement possible pour éviter de revenir à un management plus directif et organisationnel. Le cycle de l’équipe L’auteur se place ici au moment où un manager constitue une équipe de collaborateurs. Comment mettre en place une équipe performante où tout le monde travaille ensemble en bénéficiant des compétences de chacun ? Dominique Tissier décrit alors les quatre niveaux d’autonomie (de 1 à 4) et propose un ensemble d’actions de transition à réaliser pour passer d’un niveau à un autre. Autonomie 1 L’équipe est en cours de formation et les relations sont superficielles. Il n’y a pas encore de véritable confiance et de dialogue établi entre les membres. Les problèmes ne sont pas évoqués. Le manager pose plusieurs fondamentaux :

Espace ; Temps ; Méthode ; Rythme de travail ; Echanges entre les membres ; Modes de communication ; Activités pour insuffler une dynamique dans l’équipe.

Autonomie 2  Les relations progressent au sein de l’équipe (confiance, solidarité) et des objectifs communs sont envisagés. Pour renforcer l’engagement et les compétences, le manager organise des séquences de travail en commun courtes, puis plus longues. Il mixe habilement le mode informatif/consultatif (afin de permettre à l’équipe de s’approprier les objectifs de l’entreprise/M2) et le mode collaboratif (en étant à l’écoute de différentes propositions/M3). Attention : si trop de M2 = sentiment pour les collaborateurs de n’être qu’associés aux détails ; si trop de M3 = sentiment de flou pour les collaborateurs qui peuvent se retirer des échanges ou exprimer des prises de position trop personnelles. « Le but essentiel de cet apprentissage progressif bien dosé est d’obtenir des résultats en commun, et de démontrer à tous la valeur ajoutée réelle du travail d’équipe pour maîtriser les sujets partagés et les sujets plus difficiles qui demandent la contribution de tous. Lorsque cette démonstration est faite, un cap important est passé et le dosage M2/M3 va clairement évoluer vers le M3. » (Management situationnel, p. 116) Autonomie 3  Chacun a une place dans l’équipe et des modes de fonctionnement en commun ont été établis. Le manager régule les confrontations qui émergent et qui sont le plus souvent constructives. L’équipe recherche des solutions communes, exerce de la créativité. Vous, manager, devez alors bien définir pour quels domaines et sujets vous continuez d’agir. Et vous pouvez alors laisser l’équipe passer en autonomie sur les autres sujets. Des rencontres, moins fréquentes, continuent à avoir lieu. Toutefois vous restez attentif au fonctionnement des membres des équipes entre eux. Vous n’hésitez pas à jouer différents rôles et à faire intervenir des professionnels extérieurs si cela est nécessaire pour assurer certaines compétences. Vous continuez à accompagner les parcours individuels. Autonomie 4 Les membres de l’équipe agissent de manière coordonnée par rapport aux objectifs communs. Le dialogue entre les membres est ouvert, constructif, dynamique et permet de réévaluer avec succès les modes de fonctionnement et les objectifs. Vous, manager, restez vigilant pour assurer le bon fonctionnement de l’équipe. Vous pouvez décider de revenir en M3, puis en M2 ou en M4 en fonction de la situation. Grâce au travail déjà effectué pour faire progresser l’autonomie, tout retour à un niveau d’autonomie antérieur sera plus bref que lors de la phase précédente. Second dépouillement : Adaptation du mode à l’autonomie des individus et des groupes Cet exercice pratique est composé de deux parties :

Quelques rappels sur l’autonomie des équipes Analyse des réponses au questionnaire sur 8 cas

Chapitre 5 — Comment évaluer l’autonomie professionnelle en situation Les éléments présentés dans les chapitres précédents ont permis de comprendre que l’autonomie d’une personne en situation professionnelle est relative. Elle dépend de l’objectif, de la compétence et de l’engagement. Dans ce chapitre, Dominique Tissier présente et analyse un dialogue entre un manager et un collaborateur. Il distingue quatre niveaux d’autonomie du collaborateur :

A1 – très faible = il sait peu et ne veut pas plus A2 – faible = il sait peu et veut plus A3 – modérée = il sait, mais veut à certaines conditions A4 – forte = il sait, mais veut à certaines conditions

Chaque niveau d’autonomie est illustré par un extrait du dialogue entre le manager et le collaborateur et par une liste d’éléments concrets regroupés en trois sections :

Caractéristiques du comportement Facteurs possibles d’engagement Actions qui peuvent lui permettre de progresser

Chapitre 6 — Mettre en œuvre : pour devenir un manager situationnel Partir d’un autodiagnostic ou, mieux, d’un diagnostic partagé À vous de jouer pour observer, analyser et définir quel est votre style de management. Par exemple, suivez le guide d’autodiagnostic proposé par l’auteur à la suite de ce chapitre (pages 149 à 160). Vous pouvez aussi partager ce bilan de votre expérience de management avec des personnes de confiance et des personnes de votre équipe pour définir des axes de progression et de développement. Envie d'inspiration ? Prenez connaissance de ces citations pour devenir un bon (un grand) manager ! Se donner un but à moyen terme Cet autodiagnostic va vous permettre de définir vos objectifs sur quelques années à venir et la ligne directrice à suivre. Pour cela, vous allez établir un lien entre cette évaluation, vos propres envies et les besoins de l’entreprise ou de l’équipe que vous dirigez. Vous allez ainsi actualiser la définition de votre mode de management. S’occuper de chacun : le contrat annuel « Sur une base annuelle, semestrielle, trimestrielle, selon votre activité et votre organisation des entretiens de performance, examinez les activités ou objectifs de chacun et réfléchissez au mode de management que vous allez adopter. Parlez-en avec chaque personne, demandez-lui de réfléchir à l’avance à la manière dont vous allez travailler ensemble pendant la période concernée (rappelez-vous, cela va changer d’une période à l’autre). Passez un contrat sur cette manière de travailler ensemble. » (Management situationnel, p. 147). À la fin de chaque période, réalisez un bilan, avec la personne ou l’équipe concernée. Observez et analysez ensemble les difficultés et les progrès qui ont surgi pendant la période que vous aviez déterminée ensemble. Vous pouvez alors réévaluer votre mode de management pour la période à venir et adapter les missions. Pour adapter les missions, distinguez ce qui relève de trois domaines différents.

L’activité courante : répondre à des objectifs quantifiés, suivre des indicateurs de performance. Le progrès : faire évoluer les façons de travailler. Le développement : acquérir de nouvelles compétences, suivre une formation.

Guide d’autodiagnostic : Quelles sont vos pratiques managériales ? Dominique Tissier propose dans ces pages (149 à 160) un guide d’autodiagnostic et de bilan personnel de vos activités de manager. Il vous aide à définir « un plan de développement de votre management pour les mois à venir ». Vous pouvez aussi le consulter pour réaliser des diagnostics réguliers pour suivre vos progrès et préparer des échanges avec des collaborateurs. Le guide est organisé suivant les quatre modes du management situationnel :

Structurer, piloter, organiser ; Dynamiser, entraîner, mobiliser, faire adhérer ; Associer, faire collaborer et participer ; Responsabiliser, déléguer.

À chaque mode correspond un tableur à remplir. Sur la colonne verticale du tableur, l’auteur propose une série d’actions détaillées à évaluer en fonction de vos :

Points forts et vos points faibles ; Points d’amélioration ; Priorités.

À la page 60, une feuille de synthèse vous propose de noter « les priorités que vous retenez pour faire évoluer vos pratiques de management ». Ce dernier tableur vous permet de visualiser et d’ordonner les priorités et d’établir des liens entre elles.

Chapitre 7 — Conduire le développement des managers à partir du management situationnel Dominique Tissier recommande aux grands groupes d’associer le management situationnel aux programmes déjà mis en place pour accompagner le management (instituts, universités). Pour les entreprises de taille plus réduite, il conseille le recours à des intervenants extérieurs. Afin d'aller vers des modes de management plus collaboratifs et adaptés aux enjeux actuels. Cela permet de répondre à des questions éthiques (accompagnement des employés), mais aussi à des questions de performance. En effet, le management M3/M4 crée de l’engagement et produit plus de résultats. L’auteur définit deux options pour aller vers un management M3/M4. Option 1 : profitez des changements, provoquez-les pour accélérer le processus « Les changements sont de très belles opportunités pour repenser le management lors d’une nouvelle stratégie de croissance, d’une acquisition, d’un changement d’équipe de direction, de déménagement dans de nouveaux bureaux. » (Management situationnel, p. 162). La plongée vers, ou dans, un nouvel environnement de travail est alors l’occasion de nombreux réexamens et redéfinitions de questions centrales du management concernant les missions, les postes, l’autonomie, les marges de manœuvre laissées aux acteurs de terrain, les besoins communs et individuels. Option 2 : profitez des insatisfactions en cours, des tensions pour faire évoluer le management Cette option existe lorsqu’il n’est pas possible d’envisager des changements importants, mais plutôt des lignes de progression vers plus de collaboration et d’autonomie.

Établissez un diagnostic des critiques adressées par différentes parties prenantes de l’entreprise et des évolutions possibles envisagées. Vous pouvez vous appuyer sur des comparaisons avec d’autres entreprises, solliciter des interventions d’experts extérieurs. Ce diagnostic peut se réaliser rapidement. Dominique Tissier cite le cas d’un diagnostic réalisé en deux jours. Définissez des lignes de progrès en collaboration avec l’équipe de direction et quelques groupes de travail en mode M3 : défis, orientations des métiers, organisations, rôles, processus, etc. Définissez les points d’ancrage prioritaires pour pérenniser les processus collaboratifs et autonomisant. L’auteur définit ici un ensemble de propositions, comme la formation de « pôles de compétence » à l’intérieur des équipes dans différents domaines.

Les valeurs du management situationnel Pour finir, à la page 166, l’auteur rappelle les valeurs du management situationnel. Il énonce concrètement le rôle et la responsabilité du manager et notamment :

Le manager doit accompagner le développement des personnes tout en cherchant à atteindre les objectifs de l’organisation ; Il est toujours possible de progresser dans l’exercice du management ; Le mode de management adopté provient à la fois de facteurs personnels et de l’environnement de travail ; L’évolution doit se faire de façon progressive, étape par étape ; Tous les modes de management gardent une valeur, notamment pour faire face aux changements toujours plus rapides appelant à des réactions variées et immédiates.

« L’efficacité à long terme consiste à faire progresser l’autonomie professionnelle des individus et des équipes dont on a la responsabilité et à faire évoluer son environnement de manière à pouvoir adopter des modes de plus en plus collaboratifs et délégatifs » (Management situationnel, p. 166). Bibliographie À la fin de l’ouvrage, le lecteur trouvera des liens web (vidéos et site de l’auteur notamment) et une bibliographie commentée et sélective.

Parmi les pionniers, l’incontournable Peter Drucker Le management situationnel L’école française Livres portant sur les différentes parties (M1, M2, M3, M4) Ouvrages portant sur le développement des équipes Regards d’hommes d’expérience

L’ouvrage se termine par un index. Conclusion sur « Management situationnel. Vers l’autonomie et la responsabilisation » de Dominique Tissier : Un ouvrage alliant théorie et mise en pratique : Voici un ouvrage de référence pour qui veut découvrir ou renforcer sa connaissance théorique et pratique du management situationnel. L’auteur, Dominique Tissier, est ingénieur des Mines et diplômé en psychologie. Il a été responsable de la Direction de Développement du groupe Michelin jusqu’en 2015. Actuellement il intervient en tant qu’expert, journaliste et consultant auprès de programmes de management et d’entreprises. Fort de ses études et de son expérience professionnelle, Dominique Tissier nous guide ainsi entre les différentes facettes et étapes du management situationnel tout en variant les explications. Il propose des exercices pratiques à partir de questionnaires qui sont dépouillés. Ce qu’il faut retenir de « Management situationnel. Vers l’autonomie et la responsabilisation » de Dominique Tissier : La pratique du management situationnel est exigeante, mais très stimulante et enrichissante. Elle vous invite à vous questionner sur vos pratiques de management et à les adapter aux situations et aux personnes. En faisant preuve d’une bonne méthodologie, d’observation et d’analyse, vous y parviendrez ! Vous mènerez ainsi vos équipes vers plus d’autonomie et collaboration pour de meilleurs résultats. Et ceci, à la fois sur le plan du développement humain et des performances de l’entreprise. En suivant une progression précise et bien documentée, ce livre vous présente les différentes composantes du management situationnel et les écueils à éviter. De nombreux conseils judicieux, des méthodes précises et des schémas enrichissent le texte. Pour comparer les approches et aller plus loin, consultez aussi la chronique sur Le management bienveillant. Points forts :

Des explications claires et détaillées accompagnées de schémas éclairants ; Une série de questionnaires invitant à la réflexion sur ses pratiques de management ; Des points de résumé et de synthèse réguliers.

Point faible :

Quelques répétitions et un langage parfois abstrait et technique.

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Thu, 13 Oct 2022 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/12082/Le-management-situationnel
Les lettres de Jeff Bezos http://www.olivier-roland.fr/items/view/12014/Les-lettres-de-Jeff-Bezos

Résumé de « Les lettres de Jeff Bezos. 14 principes pour faire croître votre entreprise comme Amazon » de Steve Anderson : un livre passionnant issu d’une lecture approfondie et originale des lettres envoyées par Jeff Bezos à ses actionnaires — laissez-vous convaincre par ces quatorze thèses claires qui n’ont qu’un seul but, vous aider à faire décoller votre entreprise ! Par Steve Anderson (avec Karen Anderson), 2020, 237 pages. Titre original : The Bezos Letters. 14 Principles to Grow your Business Like Amazon. Chronique et résumé de « Les lettres de Jeff Bezos. 14 principes pour faire croître votre entreprise comme Amazon » de Steve Anderson

L’auteur et l’ouvrage Steve Anderson est un spécialiste du risque, de la technologie et de la productivité. Avec plus de 340 000 followers, il a notamment été choisi parmi les 150 personnalités à suivre sur LinkedIn. Sa femme, Karen Anderson, est écrivaine et journaliste. Elle a également contribué à l’écriture de cet ouvrage. Ils ont créé un site internet qui accompagne le livre et permet de réaliser les exercices qui se trouvent en fin de chapitres : TheBezosLetters.com. N’hésitez pas à y faire un tour et, éventuellement, à contacter le couple par ce biais.

Partie introductive. Le risque et la croissance Selon Steve Anderson, Jeff Bezos est le « maître du risque ». Pourquoi ? Parce que celui-ci a su lier le risque à son activité commerciale de façon positive, intuitive et intentionnelle. Contrairement à de nombreuses autres entreprises, le créateur d’Amazon pense que le risque est une occasion d’apprendre et qu’il vaut la peine de suivre son intuition, à condition d’avoir clairement ses objectifs en tête. Les débuts C’est à 30 ans que Jeff Bezos crée Amazon. Nous sommes alors en 1994 et internet n’est encore qu’une technologie d’initiés, ou presque. Il souhaite créer la plus grande librairie du monde, non pas physique, mais en ligne. Or, cela lui a réussi, puisqu’il fait aujourd’hui partie des multinationales les plus florissantes des États-Unis et du monde. En 2018, Amazon a atteint et dépassé la valeur de mille milliards de dollars. Comment a-t-il transformé son projet de librairie en ligne en l’affaire la plus lucrative du siècle ? C’est ce que Steve Anderson se propose d’étudier en examinant les lettres que son fondateur a envoyé aux actionnaires durant toutes les années de développement de l’entreprise. Retour sur risque Au lieu de parler de retour sur investissement, l’auteur propose le concept de « retour sur risque ». Que faut-il entendre par là ? Simplement l’idée selon laquelle le risque lui-même est un investissement. Oser peut rapporter gros ! Première partie. Le cycle de croissance : testez « Chez Amazon, tester est une façon de vivre ; cela signifie encourager tous les membres des équipes à essayer de nouvelles choses pour améliorer la façon dont Amazon fait des affaires. Si quelque chose ne fonctionne pas, ils ne sont pas punis — ils sont encouragés à examiner ce qui ne fonctionne pas et à apprendre de cela. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 29) Autrement dit, le risque, ici, n’est pas vu comme quelque chose de négatif, comme un échec, mais bien comme une occasion d’aller plus loin. Comme nous allons le voir, c’est ce qui rend Amazon si créatif. Chapitre 1 : Encouragez l’« échec réussi » L’échec réussi désigne précisément ce que l’échec vous a appris et la manière dont vous allez transformer cet apprentissage en action. Risque et espace Selon Steve Anderson, il n’est pas impossible que Jeff Bezos, né en 1964, ait été influencé par la conquête de l’espace. Les missions Apollo sont un exemple d’échecs réussis. La première mission fut un drame ; mais ce fut aussi ce qui poussa la NASA à se surpasser. Un pas de géant pour l’humanité… C’est ainsi que durant la décennie des années 60, la NASA réussit progressivement à faire mieux, avec les missions Apollo suivantes. Lorsque les astronautes états-uniens foulèrent le sol lunaire le 20 juillet 1969, cela marqua l’accomplissement de tous ces efforts. « Houston, on a un problème… » Après ce premier alunissage humain, les missions devinrent plus routinières. Pourtant, un jour, un problème survint… C’est à cette occasion qu’on entendit ce fameux : « Houston, on a un problème ». Il y avait un véritable péril pour les personnes à bord de la navette Apollo 13. Le retour fut l’occasion d’un intense suspense, mais aussi d’un apprentissage essentiel. Bien sûr, vous pouvez apprendre autrement. Mais c’est dans l’échec que vous apprendrez le mieux, c’est-à-dire le plus profondément. Jeff Bezos sait maîtriser cette dynamique ; en d’autres termes, il prend des risques de façon intentionnelle. C’est une sorte d’expérimentation continue au sein de son business model. Les échecs les plus réussis d’Amazon Le premier fut Amazon Auctions, une tentative de l’entreprise pour concurrencer eBay. Cela ne fonctionna pas, parce que les clients des deux enseignes ne souhaitaient pas agir de la même façon (les clients d’Amazon comptaient sur des prix fixes). Le second fut zShops, qui permettait à des vendeurs tiers d’utiliser la plateforme d’Amazon contre une petite taxe. Ce qui fut un échec, c’est l’idée de séparer ces vendeurs d’Amazon en créant des pages distinctes. Ce qui fonctionna en revanche — et qui fait encore une partie de la fortune de l’entreprise — c’est de permettre à ces vendeurs tiers de proposer leurs produits sur la Marketplace d’Amazon. Un échec à 178 millions de dollars Il en fut de même pour le Fire Phone, un mobile spécialement conçu pour faire des achats sur Amazon. Il était destiné à aider ses utilisateurs à faire du shopping sur le site en ligne. Mais ce fut un échec retentissant ! Tant que cela ? Pas vraiment… Malgré la fortune investie — 178 millions de dollars, donc — cette technologie fut utilisée pour la création de Echo et Alexa, deux dispositifs promis à de grands succès. L’échec réussi comme état d’esprit pour le succès Retenez ce point : il ne s’agit certainement pas d’incompétence — Amazon n’aime pas beaucoup cela — ni d’absence de peur d’ailleurs, mais simplement de la volonté de réaliser le meilleur possible. Mise en pratique. Encouragez l’« échec réussi » Première question : faites un inventaire de la « tolérance à l’échec » de votre entreprise. Comment l’échec est-il géré ? Deuxième question : quand avez-vous utilisé pour la dernière fois un échec comme « étude de cas » pour améliorer votre affaire ? Troisième question : Que pouvez-vous faire, dans votre commerce ou dans votre entreprise, pour communiquer sur le fait que l’échec est une occasion d’apprendre et de s’améliorer ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 41)

Chapitre 2 : Pariez sur les grandes idées Ce qui fut un succès, ce fut l’idée de mettre les vendeurs tiers sur la même page qu’Amazon (à la différence de zShops). Cela permet au vendeur tiers d’accéder à la clientèle gigantesque d’Amazon, aux clients de comparer et d’avoir le choix, et à Amazon de gagner des commissions, tout en satisfaisant le client (même lorsque ce n’est pas lui, mais un vendeur tiers, qui empoche la vente). Un point important à souligner : les vendeurs tiers sont sélectionnés par Amazon qui exige d’eux un niveau de qualité équivalent à celui qu’il offre. Finalement, ces commissions rapportent énormément à Amazon. « En 2018, 58 % des produits vendus sur Amazon dans le monde venaient des vendeurs tiers… créant des milliards de dollars de revenus pour Amazon. » (Les lettres de Jeff Bezsos, p. 45) Parier sur la livraison gratuite : Super Save Shipping et Amazon Prime Pour les clients d’Amazon, le coût de la livraison était l’une des barrières les plus importantes à l’achat. Et ce, même si les avantages de la vente en ligne étaient assurés. Il fallait donc innover pour changer cette situation. Super Save Shipping fut le premier dispositif introduit : il permettait de se faire livrer gratuitement à partir de 25 $ d’achat. Amazon Prime arriva ensuite. Le système d’abonnement permettait aux clients de se débarrasser des coûts de transport et de bénéficier d’avantages divers : livraison en un jour, pas de limite minimum d’achat. Ce pari fut largement gagnant parce que, entre autres, les clients Prime dépensent en moyenne à peu près le double des clients non Prime par an (1 400 $ dollars contre 600). Parier sur l’effet de levier de l’infrastructure : les services web d’Amazon Amazon web services (AWS) a été créé aux alentours de 2003. Il s’agissait au départ de répondre à des enjeux informatiques en interne. En utilisant la technologie du cloud, Amazon souhaitait permettre à chacun de ses départements de bénéficier de services d’infrastructure à la fois personnalisés et communs. Finalement, cette idée sortit de son cadre initial pour devenir un vrai business. AWS propose des services de cloud à des individus, à des entreprises et à des gouvernements en optant pour une formule simple : le pay-as-you-go (paiement au fur et à mesure). Voici ce que Jeff Bezos lui-même pense du succès de cette entreprise : « Je crois que AWS est l’un de ces business de rêve qui offre ce qui peut servir aux clients et permettre des retours financiers pour de nombreuses années à venir. Pourquoi suis-je optimiste ? D’abord, l’étendue des possibilités est grande, puisqu’elle s’étend à tous les serveurs, les réseaux, les centres de données, l’infrastructure logicielle, les bases de données, les dépôts de données et bien plus. De façon similaire à Amazon, qui fait de la vente au détail sur tous les sujets, AWS ne connaît pas de contrainte au niveau de la taille du marché. » (Cité dans Les lettres de Jeff Bezos, p. 50) Parier petit sur les grandes idées Cela ne peut se dire que de façon relative, bien sûr, mais on peut dire qu’Amazon n’investit pas gros au départ. Par contre, plus il voit que l’idée paie, et plus il investit en elle. Plus il ajoute des services complémentaires aussi qui permettent d’attacher le client et d’augmenter le prix de vente. Les prochains grands paris Jeff Bezos le dit : il veut une quatrième grande idée, après celles de Marketplace (vendeurs tiers), Prime (abonnement et livraison gratuite) et AWS (infrastructures). L’une des pistes prometteuses est la création de magasins physiques. Mais ce pari sera-t-il gagnant ? Il faut s’assurer que les clients y trouvent leur compte. Quoi qu’il en soit, Jeff Bezos a déjà commencé à parier petit, notamment en créant des librairies physiques et des Amazon Go Stores, ainsi qu’en rachetant les magasins Whole Foods. Mise en pratique. Parier sur les grandes idées Première question : Quand avez-vous parié sur une grande idée pour la dernière fois ? Deuxième question : Que pouvez-vous faire pour encourager votre équipe (ou même vous-même) à explorer de nouvelles grandes idées ? Troisième question : Citez une grande idée là, tout de suite, sur laquelle vous pourriez miser ! (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 53) Chapitre 3 : Dynamique pratique de l’invention et de l’innovation Pour avoir du succès, il ne convient ni de s’enfermer dans une seule idée ni de travailler seul. En réalité, il faut constamment innover sans craindre l’erreur, et bien s’entourer. Thomas Edison le savait ; Jeff Bezos aussi, 200 ans plus tard. Chez Amazon, l’expérimentation est encouragée à tous les niveaux de l’organisation et dans tous les départements. Chacun cherche l’amélioration, constamment. Peu importe que vous soyez une nouvelle recrue ou un cadre, la culture du travail d’Amazon fait de vous un innovateur ou un inventeur potentiel. Peu importe d’échouer. L’important est d’essayer avec sincérité. Et si cela réussit, vous serez encouragé à le développer et à le partager avec les autres. L’invention dynamique aide la créativité déchaînée C’est ainsi que vous reconnaîtrez les employés qui sont les plus créatifs ; c’est aussi de cette manière que vous les motivez davantage et que vous les poussez à agir de façon autonome. Les meilleures inventions viennent de ceux qui réalisent les tâches au quotidien ! Agir de façon délibérée en faveur de l’invention dynamique Cette culture interne est réellement mise en œuvre chez Amazon, alors qu’elle reste lettre morte dans d’autres compagnies. L’entreprise tente vraiment de convaincre ses employés que l’échec n’est pas mortel : les conséquences ne seront pas graves pour eux (ni licenciement, ni perte de salaire, etc.). Exploiter ses avantages Amazon connaît ce que les gens lisent et il doit être capable de tirer avantage de cela. C’est ce qu’il fait avec les librairies physiques. L’entreprise, ici, ne cherche pas à vendre un livre en particulier (le client qui sait ce qu’il veut lire achète directement sur Amazon en ligne). Elle cherche à proposer à son client ce qu’il veut lire ensuite. Pour cela, il lui propose un grand nombre d’informations et organise son magasin de façon particulière (en présentant, par exemple, chaque ouvrage face « couverture » et non sur la tranche). Pourquoi la pratique de l’invention dynamique et de l’innovation est essentielle Comme le dit Jeff Bezos : « Ces plateformes (Prime, AWS, etc.) […] créent des situations gagnant-gagnant et créent de la valeur pour les développeurs, les entrepreneurs, les clients, les auteurs et les lecteurs. » (Cité dans Les lettres de Jeff Bezos, p. 62) Lab126 — Le laboratoire d’invention d’Amazon Amazon détient son propre laboratoire d’invention et d’innovation. Le 1 est lié au A de Amazon (la première lettre de l’alphabet) et le 26 au Z de Amazon (la 26e lettre de l’alphabet et le lieu où se termine le logo en sourire de la marque). C’est là que se sont développés les projets du Kindle, du Fire Phone, d’Echo, etc. Et c’est là que bien  d’autres projets verront le jour ! Mise en pratique. La pratique de l’invention dynamique et de l’innovation Première question : Prenez du temps dans les trente prochains jours pour vous demander quelle serait la prochaine chose que vous voudriez essayer dans votre business. Deuxième question : Comment mettre en place un « Lab126 » dans votre entreprise ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 64) Deuxième partie. Construire « Chez Amazon, construire signifie faire d’une idée prometteuse une initiative stable. Amazon construit en s’assurant que chaque investissement soit basé sur ce que les clients veulent. La bonne nouvelle, c’est que les risques à court terme aident à découvrir les initiatives gagnantes et à éliminer les perdantes (et à apprendre d’elles) — ce qui est une façon de sauver du temps, de l’énergie et du capital. Amazon utilise la pensée à long terme pour assurer une fondation solide à chaque initiative (et chaque risque), afin que celle-ci puisse durer plusieurs années, voire au-delà, même si cela signifie faire des sacrifices dans l’immédiat. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 65) Chapitre 4 : Soyez obsédé par vos clients L’obsession est souvent considérée comme une caractéristique psychologique négative. Pourtant, c’est bien l’idée que veut transmettre Jeff Bezos : il s’agit d’avoir la satisfaction du client constamment à l’esprit, comme un mantra ou une idée fixe. Être une entreprise obsédée par ses clients C’est une question pratique. Il faut se mettre à la place du client. Parfois, vous pouvez répondre facilement ; parfois, vous avez besoin de données sur ce qu’il préfère. Quelles sont les solutions à leur proposer — si possible avant même qu’ils ne se rendent compte qu’il y avait un problème ? Amazon a conçu trois piliers de l’expérience client :

Les prix bas ; La meilleure sélection ; La délivrance rapide et pratique.

Que veut vraiment le client ? Bien souvent, les entreprises ne savent pas exactement ce que les clients veulent. À la place, ils s’imaginent que leur façon de communiquer avec eux au sujet de leurs nouveaux produits est inadéquate. En fait, ces entreprises sont obsédées par le produit qu’elles vendent, plutôt que par le client. Voici les questions à se poser — celles qu’Amazon ne manque pas de se poser :

« Qui est le client ? Quel est le problème ou l’occasion du client ? Quel est le bénéfice le plus important pour le client ? (Au singulier) Comment savez-vous ce dont le client a besoin ? À quoi ressemble l’expérience du client ? » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 71)

Le service Client comme une extension de l’obsession à l’égard du client Lorsqu’un client appelle le service Client, il souhaite une réponse rapide et qui convienne à son mode de communication (mail, téléphone, etc.). Amazon laisse très peu attendre ses clients. L’entreprise cherche surtout à éviter au client d’avoir à chercher longtemps comment résoudre son problème (chat, mail, téléphone, etc.). Le plus important est de faire sentir au client qu’il est compris et qu’une solution en profondeur est recherchée. L’employé est placé en situation d’autonomie : il doit être capable de trouver les causes et les solutions du problème de façon indépendante. C’est ce qu’Amazon cherche également à implanter dans la culture des vendeurs tiers, en leur faisant notamment signer un Pack anti-frustration (Frustration-Free Packaging). La puissance des systèmes automatisés Ces systèmes permettent de détecter les produits ou services défaillants (par exemple, un film en streaming) et de rembourser le client de façon proactive. Cette façon d’aller au-devant d’une expérience client défectueuse (par exemple, si le visionnage du film est de mauvaise qualité) garantit le succès d’Amazon. Au-delà de l’attendu Être obsédé par le client a des effets sur la culture d’innovation de l’entreprise. Cette obsession pousse à aller toujours plus loin, au-delà des normes. Mise en pratique. Être obsédé par ses clients Première question : Asseyez-vous et écrivez une description de votre (bon) client typique. Quelles sont ses trois ou quatre caractéristiques principales ? Quels sont ses principaux problèmes que vous pourriez résoudre ? Deuxième question : Que pouvez-vous faire aujourd’hui pour améliorer l’expérience du client vis-à-vis de votre entreprise ? Troisième question : Mettez votre équipe au défi d’amener une nouvelle idée chaque semaine pour servir encore mieux les clients, quel que soit le coût de celle-ci. (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 77)

Chapitre 5 : Appliquez la pensée à long terme « Nous sommes en train de travailler à quelque chose d’important, quelque chose qui importe à nos clients, quelque chose dont nous pourrons parler à nos petits-enfants. » (Jeff Bezos cité dans Les lettres de Jeff Bezos, p. 79) Être un « bon ancêtre » pour ses futurs successeurs et pour ses employés L’idée d’être un bon ancêtre, c’est-à-dire d’avoir participé favorablement au monde de demain (qui inclura peut-être vos petits-enfants), est une très bonne manière de se représenter le long terme pour votre entreprise. Que voulez-vous avoir réalisé dans 50 ans, voire plus ? Ruer dans Wall Street — Amazon donne l’exemple à Apple Certaines entreprises coupent court à l’obsession de Wall Street pour le court terme. Amazon est en première ligne de cette façon de faire. Apple suit également cette tendance en refusant de publier ses revenus trimestriels auprès des agents de la bourse de Wall Street. Tous deux considèrent que ces mesures à court terme ne sont pas adéquates. « Amazon veut casser la tendance, et donc sacrifier les profits de cette année pour investir dans la loyauté des clients à long terme et dans la création de produits qui créeront des profits plus importants l’année prochaine et pour les années à venir. La pensée à long terme permet à Amazon de focaliser son attention sur les chiffres qui comptent. Dans le cas d’Amazon, ces chiffres sont la croissance des clients et des revenus. Investir — en améliorant — dans l’expérience du client améliore la réitération des achats et la force de la marque de l’entreprise. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 85) Penser au long terme même quand le monde récompense la pensée à court terme Revenir à une pensée du long terme peut être difficile, lorsqu’on s’est habitué au court terme. Sur la base de son analyse des lettres aux actionnaires, Steve Anderson propose quelques points résumant l’approche à long terme qui prévaut chez Amazon, au niveau du management et de la prise de décision :

Se focaliser sur le client ; Mesurer l’efficacité des programmes et des investissements sur le long terme ; Apprendre des erreurs et trier régulièrement les bons et les mauvais projets ; Réaliser des investissements courageux ; Privilégier la maximisation de la valeur actuelle de la trésorerie ; Partager ses procédures de décision ; Maintenir une culture du changement, consciente des coûts ; Équilibrer la focalisation sur la croissance et l’attention au long terme ; Engager des personnes motivées et talentueuses.

Mise en pratique. Appliquer la pensée à long terme Première question : Avez-vous une liste d’objectifs à long terme (ou à plus long terme) pour votre entreprise — à la fois sur les plans financier et stratégique ? Deuxième question : Votre équipe est-elle seulement récompensée pour sa performance annuelle ou trimestrielle ou est-elle valorisée lorsqu’elle propose des actions qui donnent des résultats à long terme ? Troisième question : Comment pouvez-vous modifier les récompenses à court terme pour encourager la pensée à long terme ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 90) Chapitre 6 : Comprenez votre volant d’inertie Le volant d’inertie est une métaphore qui vient de la mécanique : il s’agit d’une roue difficile à faire tourner au départ, mais qui, une fois mise en mouvement et prenant de la puissance, devient presque impossible à arrêter. Comment une entreprise passe-t-elle d’un état « bon » à un état « excellent » ? Comment gagne-t-elle en puissance et en inertie ? Telle est la question que cette image permet de poser. « Dans les affaires, pensez votre “volant d’inertie” comme un engrenage avec des rayons tout autour. Chaque rayon de l’engrenage est quelque chose qui apporte de la force pour faire tourner la roue — un élément clé de votre activité qui crée de l’élan et qui permet à votre entreprise d’aller là où vous voulez. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 92) Les activités initiatrices d’élan doivent, bien sûr, aller dans le même sens. Par exemple, si au niveau personnel vous souhaitez maigrir, le régime et l’exercice seront deux activités (deux rayons) qui permettront à votre volant d’inertie de la perte de poids de se mettre en branle de plus en plus rapidement. Voici les rayons du volant d’inertie (ou cercle vertueux) d’Amazon :

Un plus grand choix et un plus grand confort d’achat ; L’expérience du client ; Le trafic sur le site internet ; Le nombre de vendeurs ; La baisse des coûts de structure ; Des prix plus bas.

Ces rayons s’entretiennent mutuellement et vont dans le sens voulu par Amazon : à savoir la croissance. Comment les avantages principaux d’Amazon ont été conçus pour faire tourner le volant d’inertie d’Amazon Steve Anderson prend l’exemple d’Amazon Prime. Bien qu’étant un investissement risqué au départ, Amazon Prime avait pour vocation à améliorer l’expérience du client, à améliorer le confort d’achat et à attirer davantage de trafic sur le site, trois piliers du cercle vertueux. En outre, le succès de Prime a permis de faire baisser les coûts de livraison. En d’autres termes, Amazon Prime permet à Amazon de croître, ce qui permet à Amazon d’améliorer les services offerts par Prime, et donc de croître encore et encore, etc. Comment comprendre votre propre volant d’inertie Référez-vous aux livres de Jim Collins Good to Great (2001) et Turning the Flywheel (2019). L’auteur y pose les questions suivantes, reprises par Steve Anderson :

Comment votre volant d’inertie tourne-t-il ? Quels en sont les composants ? Quelle est la séquence de votre cercle vertueux ?

Mise en pratique. Comprendre votre volant d’inertie Première question : Qu’est-ce qui se trouve au centre du volant d’inertie de votre compagnie ? Deuxième question : Quels sont les facteurs clés ou les activités qui tournent votre volant d’inertie ? Troisième question : Comment ces moteurs se renforcent l’un l’autre pour faire tourner votre volant d’inertie plus rapidement ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 98) Troisième partie. Cycle de croissance : accélérez « Pour Amazon, l’accélération est la façon dont vous faites quelque chose qui a été testé et construit et qui booste ensuite votre croissance. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 99) Chapitre 7 : Générez des décisions ultrarapides Le premier principe à mettre en œuvre est la prise de décision rapide. Cela signifie : éviter le temps perdu. Jeff Bezos résout le paradoxe de la décision rapide et de la vue à long terme en distinguant deux types de décisions :

Les décisions de type 1 qui sont essentielles et ont des conséquences majeures sans retour en arrière possible ; Celles de type 2 qui peuvent être changées ou annulées sans que le monde s’arrête pour autant.

Il encourage ses équipes à prendre des décisions de type 2, en insistant sur le fait que ces décisions ont un caractère singulier (il n’y a pas de décision toute prête), qu’elles se font en l’absence relative d’information et de consensus. Le plus important en la matière, pour un chef ou un cadre, consiste à savoir distinguer les décisions de type 1 et 2. Une fois qu’il a pris une décision, il importe que tous, même ceux qui n’étaient pas d’accord, s’engagent dans la même direction : c’est le principe du « disagree and commit » (désaccord et engagement). Comment accélérer la croissance en prenant des décisions ultrarapides Avec les décisions de type 2, les risques pris sont réversibles. Les employés ont suffisamment d’autonomie et de confiance pour rendre leur travail plus efficace, sans être sclérosés par la peur d’être puni ou de ne pas pouvoir revenir en arrière. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille accepter toutes les décisions ! Toutefois, il importe de laisser la porte ouverte au risque et aux décisions à impact limité, en faisant confiance à la compétence des équipes. Ce n’est pas pour rien que le processus de recrutement est si soigné chez Amazon. Les membres de l’entreprise doivent savoir prendre des risques intelligents, calculés rationnellement. La méthodologie de Bezos : l’histoire des six pages Cela peut paraître contreproductif, mais Jeff Bezos demande à chaque employé souhaitant prendre une décision de créer un mémo de six pages. Pourquoi ? Parce qu’il est essentiel de ralentir avant d’accélérer. Et cela vaut surtout pour les décisions de type 1. « L’histoire des six pages est un document créé autour de la nouvelle idée, écrit dans la forme d’une histoire. C’est une façon de raconter clairement l’idée ou le projet, comme si vous en discutiez avec quelqu’un et lui expliquiez ce que vous avez derrière la tête. Quand les gens parlent ensemble, ils ne parlent pas avec des bullet points. La narration est descriptive et se lit comme un livre, non comme un graphique en camembert. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 108) Les six pages vont servir tout au long du projet. Chacun des participants va pouvoir intervenir sur l’histoire, et on pourra y revenir si on se rend compte que l’idée ne fonctionne pas comme prévu, afin de faire le point sur ce qui a dérapé. C’est un processus collaboratif et itératif qui réduit le nombre des réunions et les rend plus efficaces. Les composants de l’histoire des six pages Voici le squelette d’une histoire de six pages proposé par Sandy Carter, VP des services web d’Amazon et reproduite par l’auteur des Lettres de Jeff Bezos (p. 113) :

Rédigez le communiqué de presse (celui dans lequel vous voudriez présenter votre projet au monde) ; Écrivez les FAQs (répondez à l’avance aux questions qui pourraient vous être posées) ; Définissez les interactions entre les utilisateurs (expliquez comment cela fonctionne) ; Concevez le manuel (donnez les instructions pour que ça marche) ; Répondez à ces questions :

Qui est le client ? Quel est le problème du client ou son opportunité ? Quel est son bénéfice le plus important ? (N’en choisissez qu’un, le plus significatif) Comment connaissez-vous les besoins du client ? (Assurez-vous qu’ils soient aux sources du projet) À quoi ressemble l’expérience du client ? (Anticipez les réactions et les réponses du client.)

Pourquoi cette méthodologie fonctionne-t-elle si bien pour Amazon ? Parce que nous aimons écouter des histoires, comme nous l’apprend d’ailleurs le succès du storytelling. Cela rend les participants à une réunion plus efficace, et cela oblige le rédacteur à placer son idée de façon plus globale, en l’intégrant dans le processus du cercle vertueux d’Amazon. D’un autre côté, comme les décisions de type 2 sont facilitées, cela laisse plus de temps pour mûrir les décisions de type 1. Mise en pratique. Générer des décisions ultrarapides Première question : Avez-vous un mécanisme pour distinguer entre des décisions de type 1 et de type 2 — et est-ce que quelqu’un dans votre équipe comprend cette différence ? Deuxième question : Avez-vous un système en place pour prendre des décisions de type 1 ? (Quelle est votre version du mémo de six pages ?) Troisième question : Avez-vous un mécanisme en place pour prendre rapidement des décisions de type 2 ? (Source : Les lettres de Bezos, p. 115)

Chapitre 8 : Simplifiez ce qui est complexe Créer Kindle pour simplifier la collection de livres et la portabilité Avec Kindle, Amazon facilite la vie des lecteurs, en leur permettant d’augmenter le nombre de livres qu’ils peuvent emporter partout avec eux. De ce fait, ils sont plus enclins à acheter plus de livres. En 2007, lors de la création de Kindle, 88 000 titres pouvaient être téléchargés. Aujourd’hui, ce sont des millions de livres qui peuvent être téléchargés en moins d’une minute sur le dispositif. De nouvelles fonctionnalités voient le jour également. Il ne s’agit pas d’imiter à tout prix le livre, mais de créer une expérience de lecture à la fois riche, comme celle d’un livre, et nouvelle. À l’heure actuelle, par exemple, vous pouvez également écouter des audiolivres. Créer Echo et Alexa pour rendre le quotidien plus simple Le Kindle est le fruit du Lab126. Mais celui-ci ne s’est pas arrêté là. Il a également développé Alexa, un robot ménager qui facilite la vie du quotidien. Comment ? Par la puissance de la reconnaissance vocale et du logiciel d’apprentissage qui permet à cette machine de s’améliorer avec l’usage. Echo (l’enceinte d’entrée de gamme) dispose également de cette technologie qui allie la puissance du hardware (pour l’écoute) et du software (pour la compréhension et la réponse aux questions). L’internet des objets permet d’aller encore plus loin. Ce à quoi Jeff Bezos n’avait pas pensé au départ. « L’impact d’Echo (Alexa) a été fortement influencé par le développement de l’internet des objets (IoT) — à savoir des dispositifs qui incluent tout depuis les lumières de votre chambre à coucher jusqu’à la liste de courses de la porte du réfrigérateur et qui peuvent être gérés depuis de simples commandes vocales. L’enceinte Echo peut service de centrale pour une myriade de dispositifs domestiques intelligents qui arrivent sur le marché. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 125) Self-Service Checkout et Amazon Go Jeff Bezos insiste souvent sur la nature de self-service d’Amazon. Les internautes achètent par eux-mêmes ce dont ils ont besoin, sans l’aide de vendeurs. C’est ce qu’il a voulu reproduire physiquement avec les magasins Amazon Go. Dans un magasin de ce type, vous entrez après vous être connecté à votre compte Amazon, puis commencez à parcourir et à mettre les produits dans votre panier (physique). Vous sortez sans passer par la caisse : sans vous en rendre compte, vous avez payé dès que vous avez effectué l’action de mettre le produit dans le panier. Vous recevez votre note par mail quelques minutes plus tard. La vie n’est-elle pas plus simple ? Vous n’avez qu’à faire un tour dans le magasin et sortir. Le reste est pris en charge. Utiliser les plans de compétence (skill blueprints) d’Alexa Alexa vous offre un autre service qui vous facilite le quotidien. Vous pouvez déléguer à Alexa des choses à faire ou à faire faire par d’autres membres de la famille. Par exemple, vous pouvez demander à Alexa de conserver un mot de passe et de le transmettre aux invités qui occupent votre maison, ou lui soumettre une liste de tâches à réaliser par les enfants. Quel est l’avantage de ce système ? Le gain de temps. Comme le dit Steve Anderson : « Amazon a utilisé la technologie pour accélérer le temps au bénéfice de ses clients. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 128) Commencer à simplifier les soins de santé L’une des dernières acquisitions d’Amazon, qui date de 2018, est PillPack. Que fait cette entreprise et en quoi rend-elle la vie de ses clients plus aisée ? Elle se charge de délivrer les médicaments aux personnes ayant des prescriptions complexes, en triant pour eux les cachets à prendre et en les fournissant en sachets uniques. Au lieu d’avoir à gérer plusieurs boites de médicaments différents, PillPack fournit la dose exacte des médicaments à prendre par jour. Ce service est gratuit pour les médicaments couverts par les assurances. Il facilite ainsi la gestion des recharges, des questions d’assurance et de prescription. Mise en pratique. Rendre simple ce qui est complexe Première question : Quelles sont les plus grosses « barrières à l’entrée » pour les nouveaux clients qui font affaire avec vous ? Deuxième question : Que pouvez-vous faire pour faciliter le commerce entre vous et vos clients existants ? Troisième question : Quelle est la partie de l’expérience client la plus compliquée ou la plus complexe et comment pouvez-vous la simplifier ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 130) Chapitre 9 : Accélérez le temps avec la technologie « L’invention est dans notre ADN et la technologie est un outil fondamental que nous manions pour évoluer et améliorer chaque aspect de l’expérience que nous offrons à nos clients. Nous avons encore beaucoup à apprendre, j’espère et je m’attends à ce que nous continuions à avoir autant de plaisir à apprendre. » (Jeff Bezos, cité dans Les lettres de Jeff Bezos, p. 131) Pourquoi accélérer le temps avec la technologie est-il plus facile que jamais La numérisation des données et la puissance des ordinateurs s’accroît à une vitesse exponentielle. La compétition autour de ces technologies est elle aussi acharnée. Amazon reste modeste, mais veut avoir son mot à dire dans ce développement. Même si votre entreprise n’en est pas à ce stade, demandez-vous simplement si ses technologies ne sont pas obsolètes. Autrement dit, assurez-vous d’être toujours dans une logique de prise de risque et d’innovation. Une chose est sûre : aujourd’hui, ne rien faire serait pire que d’agir. Comment utiliser la technologie pour « accélérer le temps » Certaines entreprises prennent de l’avance et de la force grâce à des technologies nouvelles, tandis que d’autres ralentissent et doivent s’adapter. L’un des points forts de Jeff Bezos est qu’il est capable d’identifier les technologies qui surgissent et qui peuvent servir les principes fondateurs d’Amazon (comme l’obsession à l’égard du client). AWS et le lead de sept ans C’est à peu près ce qu’il s’est passé avec les AWS (Amazon web services), autrement dit le service de cloud d’Amazon, vendu aux autres entreprises, ainsi qu’aux gouvernements. Qu’a fait ici Jeff Bezos ? Il a transformé la technologie qui avait été utilisée pour développer la propre infrastructure d’Amazon en un service à proposer à d’autres secteurs. Un service qui est devenu très, très rentable ! « Tout à coup, c’était là » La technologie peut parfois donner l’impression d’arriver lentement, et de ne montrer ses effets que progressivement. Mais c’est trompeur. En fait, une technologie peut croître de façon exponentielle et s’implanter si rapidement qu’elle paraît soudainement évidente. « Il y a de nombreux exemples de technologies et de plateformes qui deviennent perturbatrices en peu de temps. On peut évidemment parler d’Uber et de Airbnb. Mais il y a encore beaucoup d’autres entreprises qui changent des industries entières du tout au tout. La perturbation ne survient pas toujours au niveau de l’industrie entière […], mais peut affecter une partie de vos affaires, en donnant à des entreprises qui adoptent ces technologies un avantage sur les autres. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 137) Centres de distribution On a vu qu’il avait développé, en interne, une infrastructure de cloud. Mais ce n’est pas tout. L’intelligence artificielle et la robotique sont mises à profit à d’autres niveaux. Amazon utilise notamment la technologie pour organiser la distribution des paquets, livrer rapidement et ainsi satisfaire le client. Depuis l’achat de Kiva System en 2012, Amazon perfectionne ses techniques de stockage et de distribution. Amazon dispose aujourd’hui de 175 centres de distribution en opération dans le monde. Il a déjà équipé 25 de ceux-ci de robots qui viennent en aide au travail des humains, comme dans le centre de Jeffersonville par exemple. Mise en pratique. Accélérer le temps avec la technologie Première question : Comment utilisez-vous la technologie pour accélérer la croissance de votre entreprise ? Deuxième question : De quelle façon pourriez-vous utiliser la technologie pour rendre une partie de votre affaire obsolète (avant que vos compétiteurs le fassent pour vous) ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 140) Chapitre 10 : Faites la promotion de la propriété Un shareowner, en anglais, c’est-à-dire un actionnaire, prend des parts dans une société en les achetant. Il devient ainsi un propriétaire de la société, et non un locataire. Cela a des conséquences pour Jeff Bezos. À savoir, en premier lieu, celui de se préoccuper de la société. Vous ne pouvez pas vous comporter à l’égard d’une propriété comme à l’égard d’un bien quelconque. En d’autres mots, vous devez vous comporter avec votre propriété selon une logique de long terme. Il s’agit, en fin de compte, d’un état d’esprit très différent. Prendre possession Il en va de même pour les employés, et surtout les cadres. Jeff Bezos les encourage à se concevoir eux-mêmes comme des propriétaires de l’entreprise, à penser et à agir de cette façon. Un propriétaire ne peut pas dire : « Cela n’est pas mon problème ». Il se sent impliqué et investi dans la résolution dudit problème. Comment promouvoir la propriété Voici les règles pour promouvoir la propriété parmi les investisseurs et les employés :

Les traiter comme des propriétaires en utilisant un langage approprié ; Donner aux employés des actions dans la société ; Faciliter la prise de décision ; Faire des réunions permettant de partager une « cause commune » ; Fournir à chacun des occasions d’inventer et d’innover ; Offrir la possibilité de se désengager quand ils le souhaitent ; Accepter le désaccord au sein du processus de prise de décision (et avancer quand même).

Les clients peuvent sentir « la propriété » aussi — Amazon Smile Il ne s’agit pas de propriété à proprement parler, mais du sentiment d’agir avec Amazon. Avec Amazon Smile, vous pouvez donner en faveur d’une association de charité de votre choix. À chaque achat, vous participez ainsi à renforcer une bonne cause, grâce et main dans la main avec Amazon. Ce geste donne un sentiment de communauté. Mise en pratique. Promouvoir la propriété Première question : Offrez-vous une compensation à votre équipe sous la forme d’une « propriété » de l’entreprise — celle-ci incluant un partage des profits ou de la croissance ? Deuxième question : Communiquez-vous régulièrement avec votre équipe sur les objectifs à court terme et sur les objectifs à long terme de votre affaire ? Troisième question : Y a-t-il une incitation (ou une barrière), pour les employés, à améliorer ou à réparer certains domaines de l’entreprise en dehors de leur propre département ou de leurs responsabilités ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 147) Quatrième partie. Cycle de croissance : mesurez « Chez Amazon, la mesure est la manière par laquelle vous réalisez une croissance exceptionnelle sans sacrifier qui vous êtes ou ce que vous offrez. Cela requiert de créer et de maintenir une culture de l’innovation — une culture capable de prendre de risques au service du client [et] implique une concentration accrue sur les standards élevés et de ne pas sacrifier la qualité sur l’autel d’une plus grande profitabilité. Cela implique de mesurer ce qui compte et de questionner de façon continue ce que vous mesurez afin d’être sûr d’être focalisé sur les bonnes statistiques — mais sans oublier votre intuition dans le processus. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 149) Chapitre 11 : Maintenez votre culture Comment l’entreprise de Jeff Bezos a-t-elle maintenu sa culture en atteignant le nombre de 600 000 employés ? Probablement grâce à son leadership personnel, mais aussi au fait de rester concentré sur les objectifs clés de l’entreprise, la croissance en tête. Bien sûr, il est difficile de rester humble et focalisé sur le client à partir d’une certaine taille, mais c’est l’enjeu. La culture du « premier jour » est pour cela ardemment défendue par les équipes d’Amazon. C’est l’état d’esprit que les employés doivent avoir. Amazon a par ailleurs développé 14 principes que les cadres doivent toujours garder en tête. Les 14 principes de direction d’Amazon

L’obsession à l’égard du client ; La propriété ; L’invention et la simplification ; La justice ; L’apprentissage et la curiosité ; L’engagement et le développement d’employés ; La focalisation sur les plus hauts standards ; L’ambition (penser grand) ; Le biais pour l’action ; La frugalité (faire plus avec moins) ; La confiance acquise par l’écoute ; Le scepticisme et le goût du détail (à l’égard des données) ; L’engagement, même dans le désaccord ; La concentration sur le résultat.

Les innovations intérieures : une approche pour construire et conserver sa force de travail Amazon développe des techniques pour éviter le turn-over de ses équipes et ainsi conserver sa force de travail. Il a développé plusieurs programmes, tels que :

« Choix de carrière », qui permet aux employés d’employer une part de leur temps dans des formations ; « Payer pour arrêter », qui permet à un employé de partir d’Amazon de façon simplifiée, s’il ne se sent pas à l’aise avec ses missions ; « Virtual contact center » qui permet à un employé de travailler depuis la maison.

Les bénéfices de se souvenir des « premiers jours » Amazon cherche à rappeler son histoire à ses employés pour conserver sa culture d’entreprise. Jeff Bezos a par exemple nommé son bâtiment de Seattle, « Day 1 ». Mais ce n’est pas tout. L’entreprise cherche de façon répétée à montrer que c’est encore le « premier jour ». Ses principes de gestion en sont imprégnés ; les fameux « bureaux-portes » des débuts (Jeff Bezos avait construit son bureau en installant des pieds à une porte) se sont multipliés dans les bâtiments, rappelant aux employés (les « Amazoniens ») la frugalité et l’innovation des débuts. Mise en pratique. Maintenir sa culture Première question : Pouvez-vous articuler/expliciter ce qu’est votre culture d’entreprise ? Deuxième question : Si vous posiez la même question à vos employés, leur réponse serait-elle identique à la vôtre ? Troisième question : Quels sont les éléments clés positifs de votre culture d’entreprise que vous pourriez renforcer ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 162-162)

Chapitre 12 : Focalisez-vous sur des standards élevés Steve Anderson cite le proverbe suivant pour résumer l’idée : « Si vous pensez qu’il est cher d’engager un professionnel, attendez d’avoir engagé un amateur. » « Les rehausseurs de barre » et les demandeurs d’emploi d’Amazon Lors des entretiens d’embauche, Amazon fait appel à des « rehausseurs de niveau » qui sont des responsables ayant démontré des compétences dans le choix des employés engagés. De façon plus générale, avant d’embaucher quelqu’un, le cadre doit se poser trois questions :

Admirez-vous cette personne ? Cette personne augmentera-t-elle le niveau moyen d’efficience du groupe dans lequel il entrera ? Dans quelle dimension (compétence, intérêt, etc.) cette personne pourrait-elle devenir une superstar ?

Investir en maintenant des standards élevés pour les parties tierces Il en va de même pour ceux qui travaillent pour Amazon, sans pour autant faire partie de l’entreprise. C’est le cas de certains livreurs qui travaillent en freelance. En 2018, Amazon a cherché à attirer de nouveaux entrepreneurs en leur offrant des conditions très intéressantes. À quatre conditions :

Être focalisé sur le client ; Diriger et motiver une équipe de délivreurs ; Travailler dur et démontrer des résultats ; Être résilient, c’est-à-dire capable de changer et de s’adapter.

Des standards élevés pour les « non amazoniens » Il en va de même pour les vendeurs tiers qui profitent de la Marketplace d’Amazon, comme on l’a vu plus haut. « Sous plusieurs aspects, l’investissement d’Amazon dans les vendeurs tiers opère à la façon dont les franchises assurent aux franchisés de maintenir les standards de la marque. […] Les clients savent exactement à quoi s’attendre lorsqu’ils vont dans une entreprise franchisée […]. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 172) Comment investir dans des standards élevés pour votre entreprise Focalisez-vous sur l’expérience du client. Cela requiert une approche holistique. Commencez par définir les standards que vous souhaitez atteindre et maintenir. Investissez-y ensuite de façon constante, jusqu’à atteindre ce que vous voulez de meilleur pour vos clients. Pour ce faire, vous devrez aussi garder cette mentalité du premier jour. Cela signifie simplement éviter de perdre de vue la croissance et l’innovation. Comme le dit Jeff Bezos : « Le Jour 2 est l’arrêt du mouvement. Suivi par l’inutilité. Suivi à son tour par l’atrocité et le pénible déclin. [Puis] la mort. Et c’est pourquoi c’est toujours le Jour 1. » (Jeff Bezos, cité dans Les lettres de Jeff Bezos, p. 173) Mise en pratique. Se focaliser sur des standards élevés Première question : Quelles sont les trois ou quatre caractéristiques importantes de vos employés les plus performants ? Deuxième question : Vous focalisez-vous (ainsi que vos responsables de recrutement) sur ces caractéristiques lorsque vous engagez du personnel ? Troisième question : Qui est responsable du « contrôle qualité » dans votre compagnie — et comment s’en occupent-ils ? (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 174) Chapitre 13 : Mesurez ce qui compte, interrogez ce qui doit être mesuré et faites confiance à votre instinct « Un grand nombre de décisions importantes que l’on réalise sur Amazon.com peuvent être faites grâce aux données. Il y a une bonne et une mauvaise réponse, une meilleure réponse et une pire, et les maths peuvent nous dire laquelle est laquelle. Ce sont nos décisions préférées. » (Jeff Bezos, cité dans Les lettres de Jeff Bezos, p. 175) La mesure ne concerne pas seulement les données financières Les données ne concernent pas seulement l’argent dépensé ou récolté (bien que cela soit important pour Amazon également !). Non, l’information la plus anecdotique peut être utilisée pour connaître la meilleure manière de servir le client et lui fournir une meilleure expérience du site internet (en lui proposant des articles pertinents, par exemple). Le design web est devenu une véritable science chez Amazon, au point que l’entreprise a développé un Weblab qui analyse tous les changements graphiques et ergonomiques possibles en vue de choisir les meilleurs. Des tests peuvent être effectués pour savoir si les clients préfèrent ou non les changements opérés sur la plateforme de vente en ligne. Mesurer les finances La méthode de calcul financière d’Amazon est propre à Jeff Bezos. Celui-ci ne calcule pas bénéfice, bénéfice par action, taux de croissance des bénéfices, mais par « flux de trésorerie disponibles ». « Les flux de trésorerie disponibles (free cash flows) sont définis comme les flux de trésorerie nets générés par les activités d’exploitation moins les achats d’immobilisations, y compris les logiciels à usage interne capitalisés et le développement de sites web, tous deux présentés dans nos états des flux de trésorerie. » (Jeff Bezos, cité dans Les lettres de Jeff Bezos, p. 179) Ce concept n’a rien de simple. Mais le plus important à retenir, pour une société petite ou grande, est de se focaliser sur une seule mesure : celle qui correspond le mieux au type de progrès que vous voulez engranger pour votre organisation. Définissez des données que vous pourrez utiliser pour calculer cette mesure et savoir si vous avancez dans la bonne direction. Faire confiance à son instinct Les données chiffrées ne sont pas les seuls guides valables pour autant ! La curiosité, la remise en question, l’attention à la moindre anecdote — qui sont souvent révélatrices et précieuses — peuvent vous permettre de sentir l’évolution de votre entreprise et l’état de satisfaction de votre clientèle. Et même lorsque vous analysez les données — une étape cruciale et obligatoire, surtout quand l’entreprise grandit en taille — vous devez vous servir de votre intuition. Les données ne sont pas toujours (voire jamais) compréhensibles d’elles-mêmes, il faut les interpréter. En alliant votre sens de l’observation et votre instinct aux données, vous deviendrez capable de leur donner sens et de prendre de meilleures décisions. La confiance de ses clients Les clients savent que vous utilisez les données pour améliorer leur expérience de navigation. Ils sont intelligents et ils vous font confiance. C’est donc à vous d’honorer ce crédit qu’ils vous offrent pour améliorer constamment votre service ou votre proposition commerciale. Mise en pratique. Mesurez ce qui compte, questionnez ce que vous mesurez et faites confiance à votre instinct Première question : Avez-vous identifié les principales données clés de votre affaire ? Deuxième question : Êtes-vous capable de trier effacement toutes les données, de mesurer et d’arriver à comprendre quelles sont les données qui comptent vraiment ? Troisième question : (Vous êtes en train de mesurer quelque chose, pas vrai ?) (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 184) Chapitre 14 : Croyez que c’est toujours le Jour n° 1 Le Jour n° 1 est moins une date qu’un concept et un état d’esprit. L’obsession du client est la caractéristique principale de ce concept. C’est ce qu’il s’agit de ne jamais oublier et de maintenir, au-delà de toute routinisation des procédures. Jeff Bezos a commencé toute son entreprise en ligne et il avait un besoin impérieux de changer d’échelle, en convainquant toujours plus de clients (puisque ses marges n’étaient pas très importantes). En outre, ce concept lui a permis de créer une mythologie autour du commencement, puisqu’à la différence d’une entreprise physique, aucune inauguration grandiose n’a été organisée pour célébrer le début de l’aventure. Résister aux excuses Le Jour n° 1 est une idée qui permet également d’éviter les excuses qui dérivent de l’habitude et du relâchement qu’induit la création d’une procédure. Souvent, l’on accuse la méthode ou les procédés, plutôt que soi-même. En rappelant à ses employés que les choses sont toujours en mouvement et commencent, ici et maintenant, Jeff Bezos souhaite leur rappeler qu’ils sont responsables de leurs actes. Il ne s’agit pas, bien sûr, de défendre l’anarchie et de nier tout intérêt à l’ordre et à la standardisation. Chaque entreprise a besoin de créer des routines pour avancer et se développer. Celles-ci doivent aider à la prise de décision, mais elles ne peuvent se substituer à l’obsession de l’entreprise : servir le client. Embrasser les tendances externes C’est une autre raison qui pousse à se sentir toujours au premier jour ! Être toujours le Jour n° 1, c’est être encore attentif à l’environnement duquel on émerge et qui nous entoure. Autrement dit, c’est ne pas oublier qu’il peut exister des forces qui peuvent rendre votre modèle obsolète, et c’est aussi être capable de prendre des risques pour rester dans la course et vous adapter. La vitesse l’emporte sur la perfection L’important pour Jeff Bezos et Amazon, nous l’avons dit, c’est la croissance (qui passe par une attention de tous les instants à la satisfaction du client). Pour croître rapidement, il importe de ne pas viser la perfection, mais plutôt la vitesse. Il faut agir vite, quitte à commettre quelques erreurs, et apprendre tout aussi rapidement. Évitez les atermoiements de la culpabilité ; apprenez et agissez en conséquence. Cela fonctionne tout particulièrement pour les décisions de type 2. S’engager en faveur du « Jour 1 » en agissant et en pensant comme une start-up Voici la conclusion de Steve Anderson au sujet du Jour n° 1. « L’état d’esprit du Jour n° 1 promu par Jeff Bezos peut être appliqué à n’importe quel type d’entreprise dans n’importe quelle industrie, depuis la start-up jusqu’aux compagnies grandes et matures. Il n’est pas facile d’être une entreprise du Jour n° 1, mais il importe avant tout de se rappeler qu’il s’agit d’un état d’esprit. L’appliquer au sein d’une grande entreprise vous aide à éviter a déchéance et à rester focalisé sur ce qui fait de vous une entreprise couronnée de succès. » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 190) Mise en pratique. Penser que c’est toujours le « Jour n° 1 » Première question : Si votre entreprise a plus de cinq ans, demandez-vous ce que vous faisiez au commencement et que vous voulez encore continuer à faire. Deuxième question : Si votre affaire a moins de cinq ans, demandez-vous ce que, dans dix ans, vous aimeriez continuer à faire (en plus de gagner davantage d’argent). Troisième question : Peu importe que votre entreprise soit jeune ou vieille, demandez-vous ce que vous pouvez faire de façon régulière pour conserver cet état d’esprit du « Jour 1 ». (Source : Les lettres de Jeff Bezos, p. 192) Chapitre 15. Un état d’esprit du risque et de la croissance De la Marketplace d’Amazon aux services web (Amason web Services), en passant par Kindle et par Prime, Amazon innove. Non pas en prenant des risques à l’aveuglette, mais en apprenant de ses échecs et en osant, de façon intentionnelle, aller à contre-courant en croyant en ses idées. Aujourd’hui, Jeff Bezos n’est plus aux manettes du quotidien d’Amazon. Il cherche à anticiper la trajectoire sur le long terme, à identifier les voies dans lesquelles il estime qu’il sera profitable de s’engager. Comment Jeff Bezos a-t-il développé un état d’esprit du risque et de la croissance ? Parti d’un investissement de 300 000 $ (un don de ses parents), Bezos est devenu, 20 ans plus tard, l’homme le plus riche du monde (selon le magazine Forbes, qui l’a déclaré tel en 2018). Élevé avec amour et respect par son grand-père dans un ranch du Texas, parti ensuite à Princeton pour étudier la physique — qu’il abandonne au profit de l’informatique et de l’électricité —, il crée sa famille à New York et prend le pouls de la révolution technologique en cours. Mais c’est à Seattle — siège de Microsoft et Baker & Taylor, un célèbre centre de distribution de livres — qu’il concrétise le rêve de créer sa propre entreprise. Amazon naît en juillet 1994 dans un garage de la ville. Curieux, à l’écoute des évolutions, aimant le risque et le changement, Jeff Bezos a patiemment réfléchi à ce qu’il pouvait faire de mieux. Il a ensuite consacré toute son énergie à développer son projet en utilisant toutes les ressources à sa disposition. Des chevaux plus rapides Steve Anderson raconte cette anecdote liée à Henri Ford, le célèbre constructeur automobile : si celui-ci avait demandé aux gens ce qu’ils voulaient, dit H. Ford, ils lui auraient répondu qu’ils voulaient des chevaux plus rapides. Ce n’est pas tout à fait ce qu’il leur a donné : il a créé la voiture (le Modèle T) avec, à l’intérieur, la puissance de plusieurs chevaux. C’est la marque d’un état d’esprit de croissance et de risque. Henri Ford a innové en allant contre les préjugés du temps. Chapitre 16. Au-delà d’Amazon Connaissez-vous Blue Origin ? C’est le projet d’exploration spatiale de Jeff Bezos, créé en 2000. Celui-ci veut prendre exemple sur les leçons de l’aviation commerciale pour construire les bases d’un commerce spatial en bonne et due forme, aux côtés des initiatives d’Elon Musk et de Richard Branson. Comment Jeff Bezos a-t-il identifié le rôle incalculable de l’infrastructure ? Jeff Bezos l’a toujours reconnu : il a bénéficié d’infrastructures ou de technologies parallèles qui ont considérablement aidé sa propre entreprise. C’est le cas de Fedex, qui organisait des livraisons express bien avant lui ; mais c’est le cas aussi du développement du paiement électronique par carte de crédit et de l’explosion des smartphones. Jeff Bezos sait qu’il ne construira pas de ses propres mains l’entreprise de l’espace. Ce que veut faire le fondateur d’Amazon aujourd’hui, c’est plutôt créer une infrastructure, semblable à celle dont il a lui-même profité, pour permettre aux générations futures de créer eux-mêmes ce projet. Le slogan de Blue Origin (appelé comme cela en référence à la Terre, la planète bleue, bien sûr) est Gradatim Ferociter : pas à pas, férocement. « Nous ne sommes pas dans une course, et il y aura de nombreux acteurs dans cette entreprise humaine pour aller dans l’espace au profit de la Terre. La part de Blue Origin dans ce voyage est de construire une route vers l’espace avec nos lanceurs réutilisables, afin que nos enfants puissent construire l’avenir. Nous allons procéder étape par étape, car c’est une illusion de croire que sauter des étapes nous y amènera plus rapidement. La lenteur est régulière [smooth], et ce qui est régulier est rapide. » (Jeff Bezos, cité dans Les lettres de Jeff Bezsos, p. 205) Quel est le plus grand risque ? Après avoir appliqué rapidement ses quatorze principes au projet Blue Origin, Steve Anderson conclut son ouvrage par ces mots : « Lorsque vous suivez les cycles de croissance et les 14 principes de croissance, vous pouvez, vous aussi, faire croître votre entreprise comme Amazon. Car oui, envoyer des personnes dans l’espace est risqué. La croissance d’une entreprise est une affaire risquée. La vie est risquée. Mais telle est la question : et si le plus gros risque était de ne pas prendre suffisamment de risques ? » (Les lettres de Jeff Bezos, p. 208)

Conclusion sur « Les lettres de Jeff Bezos. 14 principes pour faire croître votre entreprise comme Amazon » de Steve Anderson : Un livre de marketing à la gloire d’Amazon Ce livre est intéressant par sa méthode, d’abord. En utilisant les lettres aux actionnaires écrites par Jeff Bezos, Steve Anderson (et sa femme) parvient à dégager des principes restés implicites dans les discours du fondateur d’Amazon. Le contenu mérite également l’attention, puisque l’on apprend — même si c’est sous le prisme d’une appréciation unilatéralement positive de l’entreprise états-unienne — beaucoup de choses sur l’entreprise et sur l’homme qui se trouve à sa tête. Si vous voulez en savoir plus, n'hésitez pas à aller jeter un œil du côté des Secrets de la réussite de Jeff Bezos. Enfin, le livre offre au lecteur une sorte de schéma ou de marche à suivre pour questionner sa propre croissance commerciale et le développement de son entreprise. Ce qu’il faut retenir de « Les lettres de Jeff Bezos. 14 principes pour faire croître votre entreprise comme Amazon » de Steve Anderson : Voici, en résumé, le cycle et les 14 principes dégagés par l’auteur. A) Testez

  1. Encouragez l’échec réussi
  2. Pariez sur les grandes idées
  3. Pratiquez l’invention et l’innovation dynamiques

B) Construisez

  1. Soyez obsédé par vos clients
  2. Pensez à long terme
  3. Comprenez votre volant d’inertie

C) Accélérez

  1. Générez des décisions très rapides
  2. Simplifiez la complexité
  3. Accélérez le temps avec la technologie
  4. Promouvez la propriété

D) Mesurez

  1. Maintenez votre culture
  2. Focalisez-vous sur des standards élevés
  3. Mesurez ce qui compte, questionnez ce qui est mesuré et faites confiance à votre instinct
  4. Croyez que c’est toujours le Jour n° 1

Points forts :

14 thèses limpides pour faire progresser votre affaire ; Une plongée dans les méthodes du géant de la distribution en ligne ; Des questions claires, en fin de chaque chapitre, pour vous aider à avancer.

Point faible :

Ce livre ne prend aucun recul critique vis-à-vis des défauts d’Amazon. Bien sûr, on pourra s’informer ailleurs !

Ma note :                  Avez-vous lu le livre de Steve Anderson « Les lettres de Jeff Bezos. 14 principes pour faire croître votre entreprise comme Amazon » ? Combien le notez-vous ? [ratings] Visitez Amazon afin de lire plus de commentaires sur le livre de Steve Anderson « Les lettres de Jeff Bezos. 14 principes pour faire croître votre entreprise comme Amazon » Visitez Amazon afin d’acheter le livre de Steve Anderson « Les lettres de Jeff Bezos. 14 principes pour faire croître votre entreprise comme Amazon »

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Thu, 01 Sep 2022 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/12014/Les-lettres-de-Jeff-Bezos
La règle ? Pas de règles ! http://www.olivier-roland.fr/items/view/11928/La-rgle-Pas-de-rgles-

Résumé de « La règle ? Pas de règles ! Netflix et la culture de la réinvention » de Reed Hastings et Erin Meyer : un livre à deux voix, très original et qui a remporté un franc succès dans les librairies - un ouvrage pratique, surtout, grâce auquel vous apprendrez à diriger votre entreprise comme Reed Hastings, le patron de Netflix ! Par Reed Hastings et Erin Meyer, 2020, 293 pages. Titre original : No rules rules. Netflix and the Culture of Reinvention. Chronique et résumé « La règle ? Pas de règles ! Netflix et la culture de la réinvention » de Reed Hastings et Erin Meyer 

Les auteurs Cofondateur de Netflix en 1997, Reed Hastings en est désormais le président-directeur général depuis 1999. Venu du monde des logiciels (il avait créé la société Pure Software en 1991, rachetée en 1997), le PDG du géant états-unien a conservé le goût des systèmes flexibles et adaptatifs. Reed Hastings est diplômé de Stanford et du Bowdin College. En plus de ses activités commerciales, il s’intéresse notamment beaucoup à l’éducation. Reed Hastings est également membre du conseil d’administration de Facebook. Erin Meyer est professeure dans l’une des écoles de commerce les plus réputées d’Europe : l’INSEAD (Institut européen d’administration des affaires) basé à Fontainebleau, Paris. Elle est l’auteur d’un petit livre pratique sur les meilleures façons de « franchir les frontières invisibles du commerce international » (c’est son sous-titre) : The Culture Map, sorti en 2014. Elle a été identifiée par la Thinkers50 Radar list comme l’un des cinquante penseurs commerciaux les plus influents au monde. À noter avant de lire cette chronique L’ouvrage est composé de 4 parties, appelées sections, et de 10 chapitres. Vous en trouverez le récapitulatif complet à la fin de cette chronique, mais voici déjà le plan des quatre sections principales :

Premières étapes vers une culture de la liberté et de la responsabilité ; Étapes suivantes ; Techniques pour renforcer la culture de la liberté et de la responsabilité ; Devenir global.

Remarque : afin de simplifier la lecture de cette chronique, j’ai modifié la plupart des sous-titres de l’ouvrage. À l’exception des derniers intertitres de chaque chapitre (que j’ai raccourcis et simplement intitulés « À emporter »), les sous-titres que vous rencontrerez dans ce résumé ne correspondent donc pas à ceux que vous pourrez retrouver dans le texte original.

Introduction Une culture d’entreprise sans règles ! Alors que la plupart des entreprises ont tendance à multiplier les règles et les processus à mesure qu’elles grandissent, Netflix est allée dans la direction opposée. Au fur et à mesure de sa croissance, l’entreprise a construit une culture qui consiste à avoir moins de règles. Comment y est-elle arrivée ? Elle a utilisé un processus en 3 étapes qui a été répété, encore et encore. Ce processus ressemble à ceci (on l’appelle aussi « le cycle Netflix ») :

Construire une densité de talents ; Augmenter le niveau de sincérité ; Trouver des moyens d’éliminer le contrôle.

Une croissance progressive Au cours de son développement, Netflix est passé par plusieurs étapes :

Une petite affaire de location de DVD par courrier ; La diffusion en continu du contenu d’autres personnes sur Internet ; La création de son propre contenu ; Une entreprise mondiale implantée dans 190 pays.

Tout au long de son évolution, la société a favorisé la flexibilité des employés et l’innovation.

Section 1. Premières étapes vers une culture de la liberté et de la responsabilité Pour créer une culture d’entreprise telle que celle de Netflix, vos actions initiales devraient être :

Créer un lieu de travail épatant pour les collègues ; Laisser les gens dirent ce qu’ils pensent ; Arrêter de contrôler les vacances et les dépenses.

Cela vous paraît surprenant ? On détaille cela tout de suite. Chapitre 1. Un excellent lieu de travail épate les collègues Des licenciements causés par la bulle Internet Officiellement lancé en 1997, Netflix a rapidement subi les conséquences de la bulle Internet de 2001, durant laquelle de nombreux entrepreneurs du web ont fait faillite. Pour survivre, l’entreprise a été contrainte de licencier un tiers de ses employés. Cela signifiait réduire son effectif de 120 à 80 personnes. Le jour de l’annonce des licenciements a été terrible, mais quelques semaines plus tard, quelque chose d’étrange s’est produit. En fait, selon Reed Hastings, l’ambiance s’est considérablement améliorée. Il y avait plus de « passion, d’énergie et d’idées. » Au début de l’année 2002, l’activité d’abonnement aux DVD par courrier était à nouveau en pleine croissance. Or, tout ce travail pouvait être réalisé par un nombre plus restreint de personnes à la fois plus motivées et plus dynamiques. Reed Hastings en a tiré une leçon managériale. En fait, les licenciements ont créé une augmentation spectaculaire de la « densité de talents ». Ce qui signifie que :

La quantité moyenne de talents par employé était plus élevée ; Les employés peu performants qui faisaient perdre du temps et de l’énergie à leur responsable avaient disparu ; Comme ceux qui restaient étaient excellents dans leur travail, cette nouvelle norme de performance est devenue contagieuse.

Résultat : moins de personnel, mais un environnement de travail plus dynamique Pour Erin Meyer, l’apprentissage clé de ceci est que : « Si vous avez une équipe entièrement composée de personnes très performantes, chacune d’entre elles pousse les autres à se dépasser ». » (Erin Meyer, La Règle ? Pas de règles !, chapitre 1) La création d’un lieu de travail dynamique est donc la première marche d’évolution à viser. Vous devez chercher à entourer vos meilleurs employés (comparés ici à des superstars) de personnes à la fois talentueuses et collaboratives. Un processus d’apprentissage réciproque se met alors en branle. Les employés commenceront à apprendre les uns des autres. Mieux, ils se motivent mutuellement sans avoir besoin directement des impulsions de l’équipe dirigeante. En tant que leader, vous devez donc chercher en premier lieu à mettre en place un tel environnement de travail. Bien sûr, cela implique de se séparer des personnes fainéantes et pessimistes qui freinent cette dynamique vertueuse. La culture de « la liberté et de la responsabilité » (appelée par les employés « F&R ») est une culture dans laquelle vous pouvez vous permettre de réduire les contrôles. Pourquoi ? Parce que les personnes talentueuses et dynamiques souhaitent un traitement en tant qu'adultes et veulent démontrer qu’elles peuvent faire les choses bien. Dans ce contexte, vous n’avez pas besoin d’établir des règles contraignantes, mais simplement d’agir en toute franchise. À emporter

« Votre rôle numéro 1 en tant que chef d’entreprise est de développer un environnement de travail composé exclusivement de collèges épatants.

Les collègues épatants accomplissent plus de tâches et sont exceptionnellement créatifs et passionnés.

Les idiots, les fainéants, les personnes douces qui ne performent pas, ou encore les pessimistes qui sont conservés dans l’équipe diminueront la performance de chacun. » (La règle ? Pas de règles! p. 11)

Chapitre 2. Dites ce que vous pensez réellement (avec une intention positive) « Ne dites de quelqu’un que ce que vous lui diriez en face » Chez Netflix, les gens sont encouragés à dire ce qu’ils pensent. Reed Hastings a vraiment mis tout en œuvre pour encourager les gens à s’exprimer. Les commentaires francs, transparents et constructifs sont toujours accueillis de façon positive. L’honnêteté, plutôt que les manigances et les non-dits, permet d’être plus rapide et donc plus efficace. La raison est simple : l’information est plus rapidement disponible et à moindre coût. C’est l’objectif de l’expression : « Ne dites de quelqu’un que ce que vous lui diriez en face ». Autrement dit, il s’agit d’énoncer systématiquement aux autres ce qu’on pense, de façon constructive (ce dernier point est évidemment essentiel). Ces retours constructifs sont encouragés aussi bien vers le haut de la hiérarchie, que vers le bas et de façon croisée au sein de l’entreprise. Voyons maintenant comment s’y prendre. Les directives 4A : des feedbacks qui augmentent la productivité Lorsque chacun s’exprime avec franchise, le groupe en apprend davantage. Ces retours d’information fréquents augmentent la rapidité et l’efficacité de chacun. Pour obtenir ce résultat, Netflix a conçu les « directives 4A ». La première mesure peut sembler contre-intuitive, tant elle est inhabituelle dans le monde de l’entreprise : les employés étaient activement encouragés à donner un feedback honnête à leurs patrons. Lors de chaque réunion individuelle, ces retours sont encouragés. Les dirigeants, pour leur part, sont tenus d’indiquer aux employés qu’ils ne seront pas punis pour avoir donné un avis honnête. Voici la signification des 4 A.

A1 : Objectif d’assistance (aim of assist) — le feedback doit être donné avec une intention positive plutôt qu’être le lieu de laisser échapper (venting of frustrations) ses frustrations. A1 : Utile et agissant (actionnable) – Le feedback doit se focaliser sur ce que la personne peut faire différemment. Il doit être spécifique et dirigé vers l’action. A3 : Appréciatif (appreciate) – La personne recevant le feedback doit reconnaître qu’elle écoute attentivement et avec un esprit ouvert. A4 : Accepter ou laisser de côté (accept or discard) – La personne recevant le feedback doit montrer qu’elle a écouté, mais peut soit appliquer soit ignorer les avis.

Les dirigeants doivent apprendre à donner et à recevoir de tels feedbacks 4 A. En fait, cette façon de faire détend l’atmosphère. Grâce à l’instauration de cette culture de la transparence et de la franchise, les gens parlent entre eux dès qu’ils constatent des problèmes, plutôt que de rester assis là sans rien faire. Reed Hastings analyse cela comme une boucle de rétroaction. Il s’agit en effet d’un retour d’information (un apprentissage) qui nous permet de fonctionner de façon plus efficace, car nous savons désormais comment mieux faire les choses. Cette rétroaction crée un sentiment de responsabilité mutuelle et réduit le besoin de verticalité et de normes strictes. Être à l’écoute Ces feedbacks constructifs ne fonctionnent que si les personnes s’écoutent mutuellement. C’est pourquoi, ici encore, il faut oser se débarrasser des personnes incapables d’écouter l’avis des autres et de le prendre en compte. Même s’il est brillant, quelqu’un lève les yeux au ciel lorsqu’une autre personne s’exprime difficilement ou insulte les plus faibles que lui empoisonnera la culture de groupe. En tant que leader, vous devez donc vous débarrasser de ces « abrutis ». En fait, comme le dit Reed Hastings, une culture de la franchise « exige que chacun réfléchisse attentivement aux directives des 4 A. Cela nécessite une réflexion et parfois une préparation avant de donner un feedback, ainsi qu’un suivi et un accompagnement de la part des responsables. » (Reed Hastings, La Règle ? Pas de règles ! chapitre 2) À emporter

« Avec de la franchise, les meilleurs performeurs deviennent des performeurs sensationnels. Des retours fréquents et honnêtes augmentent exponentiellement la vitesse et l’efficacité de votre équipe ou de votre force de travail.

Faites place à la sincérité en créant des moments de feedbacks dans vos réunions habituelles.

Coachez vos employés afin qu’ils donnent et reçoivent des retours de façon efficace, suivant les guidelines 4 A.

En tant que leader, sollicitez des retours fréquemment et répondez avec des indices d’appartenance [c’est-à-dire des paroles qui permettent de renforcer le sentiment d’appartenance au groupe] lorsque vous les recevez.

Débarrassez-vous des imbéciles lorsque vous installez une culture de la franchise. » (La Règle ? Pas de règles! p. 37)

Chapitre 3.a. Supprimez la politique de vacances Faire confiance Une fois que la densité de talents est élevée et que la franchise règne, vous pouvez commencer à relâcher certains contrôles et à offrir plus de liberté sur le lieu de travail. Le meilleur point de départ est de supprimer les contrôles sur les vacances et les dépenses. Cette liberté accordée donnera aux gens plus de contrôle sur leur vie et leur indiquera que vous faites confiance à vos employés dans la réalisation de leurs tâches. Par ailleurs, cette confiance en soi améliorera leur sentiment d’appartenance à l’entreprise, ce qui est une excellente chose. Des vacances illimitées La plupart des entreprises exigent que les employés effectuent des demandes de vacances. Le nombre de jours de congé autorisés chaque année est contrôlé : la direction cherche à s’assurer que vous ne prenez pas plus de temps que ce à quoi vous avez droit. Chez Netflix, vous pouvez prendre autant de temps que vous le souhaitez pour vos vacances. Aucune approbation n’est requise et personne ne contrôle le temps que vous prenez chaque année. Selon Reed Hastings, cette politique a plusieurs avantages :

Attraction des meilleurs talents, et en particulier les membres de la génération Z et les milléniaux, qui n’aiment pas beaucoup pointer à l’heure ; Suppression de la bureaucratie et des coûts administratifs liés au suivi de la politique de vacances ; Augmentation du niveau de confiance et de la responsabilité.

Les dirigeants eux-mêmes doivent prendre de grandes vacances afin de donner l’exemple ! Reed Hastings prend généralement six semaines de congés par an et parle beaucoup de ses vacances. Se sentir plus libre Cette attitude est liée à un autre principe en vogue dans l’entreprise du divertissement : « diriger en fonction du contexte, pas du contrôle ». Chaque manager est invité à expliquer à son équipe quelles sont les périodes tendues et celles qui le sont moins. De cette façon, chacun sait qu’il est bon d’être à son poste à telle époque, mais qu’il peut être libre à telle autre. Résultat ? Les gens sont plus satisfaits. Cela redonne aux employés du contrôle sur leur vie. Chapitre 3.b. Supprimez les approbations de voyage et de dépenses « Agissez dans le meilleur intérêt de Netflix » L’autre contrôle qui peut être supprimé une fois que vous avez instauré une atmosphère de franchise concerne les approbations des voyages et des dépenses. Il est étonnant de voir combien d’heures de gestion sont consacrées à ces questions. Tout d'abord, Netflix présente une directive sur les dépenses avec cette formulation :

« Dépensez l’argent de l’entreprise comme si c’était le vôtre ». Le problème est qu’il y a trop de variabilité. C’est pourquoi Netflix a évolué vers une autre formule ; « Agissez dans le meilleur intérêt de Netflix ».

Certes, il faut éradiquer les dépenses inconsidérées. C’est pourquoi, à la fin de chaque mois, l’équipe financière envoie aux managers un lien listant tous les reçus par employé. Les managers examinent les demandes de remboursement des dépenses des membres de leur équipe et discutent avec ceux qui dépensent trop. Ils parlent du contexte et informent leurs employés de ce qui est approprié et de ce qui ne l’est pas. Punir visiblement les abus Si ces responsables ou l’équipe financière découvrent que des personnes effectuent des dépenses inappropriées, ces employés sont licenciés ouvertement et sans ambages, afin que les autres comprennent les conséquences. C’est la contrepartie de la responsabilité. En fait, comme l’affirme Reed Hastings, les employés responsables veilleront entre eux à s’assurer que les actions de leurs coéquipiers sont conformes au bien de l’entreprise. À emporter

« Quand vous abandonnez vos politiques de frais de voyage et de dépenses, encouragez vos dirigeants à établir, en amont, le contexte permettant de savoir comment dépenser l’argent et, en aval, encouragez-les à vérifier les reçus. Si les gens dépensent trop, actualisez le contexte.

Sans contrôle des dépenses, vous aurez besoin d’un département des finances pour auditer les reçus accumulés annuellement.

Lorsque vous trouvez des gens qui abusent du système, renvoyez-les et parlez des abus de façon ouverte — même s’il s’agit de “performeurs stars”. Cela est nécessaire afin que les autres comprennent les conséquences d’un comportement irresponsable.

Certaines dépenses peuvent augmenter avec la liberté. Mais les coûts de la surdépense ne sont pas aussi élevés que les gains que la liberté vous apportera.

Avec cette liberté en matière de dépense, les employés seront capables de prendre des décisions financières rapidement qui aideront l’entreprise.

Sans le temps et les coûts administratifs liés aux bons de commande et aux processus d’approvisionnement, vous gaspillerez moins de ressources.

De nombreux employés répondront à cette nouvelle liberté en dépensant moins que s’ils étaient dans un système avec des règles. Lorsque vous dites aux personnes que vous avez confiance en elles, elles montrent qu’elles sont dignes de confiance. » (La Règle ? Pas de règles!, p. 70-71)

Section 2. Étapes suivantes Si vous voulez aller encore plus loin, vous devriez, encore et toujours :

Vous assurer de payer très bien vos meilleurs employés ; Ouvrir vos livres (de compte, notamment) ; Faire en sorte qu’aucune approbation ne soit requise.

Chapitre 4. Payez-vous les meilleures compétences du marché Les « rock stars » Reed Hastings vient de l’industrie des logiciels, où le « principe de la rock star » est bien connu. C’est l’idée selon laquelle les meilleurs talents sont vingt fois plus performants que les talents moyens, voire plus. Chez Netflix, il a divisé la force de travail en deux catégories :

les rôles opérationnels, qui reçoivent un salaire moyen ; les rôles créatifs, qui sont payés aux tarifs les plus compétitifs du marché.

Netflix préfère rémunérer très fortement un employé exceptionnel, plutôt que d’engager une douzaine de personnes aux performances moyennes. Cette approche permet d’augmenter le niveau d’innovation de l’entreprise. Un salaire élevé garanti Netflix refuse d’utiliser les primes de rémunération au rendement. Au lieu de cela, les employés talentueux reçoivent un salaire de base élevé garanti, et ces salaires sont ajustés chaque année pour refléter la façon dont le marché valorise ces compétences spécifiques. La rémunération est donc garantie dès le départ. Ceci dit, il n’y a aucune limite aux augmentations de salaire d’une année sur l’autre. Si un employé très innovant peut fournir des données montrant qu’il obtiendrait davantage chez un concurrent, Netflix s’alignera sur cette offre, voire la surpassera. En règle générale, si vous êtes approché par un chasseur de têtes, vous gardez cette information confidentielle. Vous n’aimez pas trop la divulguer à votre patron. Mais Netflix va dans la direction opposée ! Montrez l’offre qui vous est faite afin d’obtenir une augmentation. En agissant de la sorte, Netflix s’engage à conserver ses meilleurs éléments et à les rémunérer à la valeur réelle du marché. Engager moins, mais mieux « Afin de renforcer la densité de talents au sein de votre personnel, pour tous les rôles créatifs, engagez un employé exceptionnel au lieu de dix ou plus, de niveau moyen. Embauchez cette personne exceptionnelle au sommet de la fourchette qu’elle vaut sur le marché. Adaptez son salaire au moins une fois par an afin de continuer à lui offrir plus que ses concurrents. Si vous ne pouvez pas vous permettre de payer vos meilleurs employés au niveau le plus élevé du marché, laissez partir certaines des personnes les moins fabuleuses pour pouvoir le faire. De cette façon, les talents deviendront encore plus denses ». » (Reed Hastings, La Règle ? Pas de règles! chapitre 4) À emporter

« Les méthodes utilisées par la plupart des entreprises pour rémunérer les employés ne sont pas idéales pour une force de travail créative et à haute densité de talent.

Divisez votre force de travail entre les créatifs et les opérationnels. Payez les travailleurs créatifs au niveau le plus haut du marché. Cette façon de faire signifie engager un individu exceptionnel plutôt que dix personnes adéquates ou plus.

Ne payez pas en fonction de bonus liés à la performance. Placez plutôt ces ressources directement dans les salaires.

Apprenez aux employés à développer leurs réseaux et à investir du temps, régulièrement, dans la prise en compte de leur propre valeur et de celle de leurs équipes. Cela peut impliquer qu’ils prennent des appels de recruteurs, voire qu’ils aillent faire des interviews dans d’autres entreprises. Ajustez les salaires en fonction. » (La Règle ? Pas de règles ! p. 99)

Chapitre 5. Ouvrez les livres « Le soleil se lève » : privilégier la transparence La plupart des entreprises parlent de transparence, mais enferment ensuite leurs secrets et ne les partagent qu’en cas de nécessité. Netflix fait le contraire. Cette politique a un nom : « sunshining » (lever du soleil). Autrement dit, l’entreprise ouvre ses livres. Les gens apprennent à lire les comptes des profits et des pertes, et chacun reçoit toutes les données financières qu’il souhaite. Bien entendu, ces informations restent strictement confidentielles : aucun employé ne peut ensuite aller les divulguer à l’extérieur en vue, par exemple, d’en faire commerce. Ce faisant, l’entreprise traite ses employés comme des adultes. Elle leur offre la connaissance et l’occasion de contribuer à l’entreprise de manière significative. Les membres de Netflix voient aussi, de cette façon, qu’il n’y a pas de cercle restreint, pas d’élite qui détient des informations supérieures et cachées. Encore une fois, la transparence crée de la confiance. Les symboles de l’ouverture L’entreprise utilise beaucoup d’autres symboles pour renforcer ce message. Par exemple :

Il n’y a pas d’espaces fermés dans les bureaux de Netflix ; Reed Hastings, le PDG de Netflix, se rend facilement à pied au bureau d’une personne qu’il souhaite rencontrer, plutôt que de la convoquer dans son bureau ; Il n’y a pas d’assistants personnels, qui font souvent office de gardiens ; Personne n’a de casiers, parce que tout le monde est censé se faire entièrement confiance.

Cette politique de transparence est une manière, pour les employés, de se sentir propriétaires de l’entreprise, et donc d’accroître leur motivation et leur responsabilité dans le succès de l’entreprise. Mais Reed Hastings note une autre conséquence positive : cela rend le personnel plus intelligent. Pourquoi ? Car ils réfléchissent en adultes et prennent des décisions mûrement pensées par eux-mêmes, sans avoir besoin de l’avis de la hiérarchie. Désavantages et limites Un inconvénient potentiel de la transparence radicale est que les gens apprennent parfois à l’avance que leur emploi pourrait disparaître. Bien sûr, cela peut causer du stress, mais il est finalement préférable de pouvoir se préparer, plutôt que d’apprendre la nouvelle de façon abrupte. Autre point d’achoppement : la transparence doit-elle aussi s’appliquer à la vie privée d’une personne ? L’approche adoptée par Netflix est la suivante :

Si l’information concerne un événement survenu au travail, la transparence est de mise ; Si l’information concerne autre chose, il faut dire aux gens qu’ils n’ont pas à la partager et qu’ils peuvent la demander à la personne concernée.

Il est bon de parler de ses erreurs C’est un autre volet de la transparence. Reed Hastings, par exemple, parle ouvertement et longuement des erreurs qu’il a commises. Ce faisant, il se rend accessible et il stimule aussi la créativité en faisant comprendre à ses équipes que les erreurs sont acceptables, si elles sont commises ouvertement et avec de bonnes intentions. « Si vous avez les meilleurs employés sur le marché et que vous avez instauré une culture du retour d’information ouvert, le fait de révéler les secrets de l’entreprise augmente le sentiment d’appartenance et d’engagement du personnel. Si vous faites confiance à votre personnel pour traiter des informations sensibles de manière appropriée, la confiance dont vous faites preuve suscitera des sentiments de responsabilité et vos employés vous montreront à quel point ils sont dignes de confiance ». » (Reed Hastings et Erin Meyer, La Règle ? Pas de règles ! chapitre 5) À emporter

« Afin d’implanter une culture de la transparence, prenez en considération les messages symboliques que vous envoyez. Débarrassez-vous des bureaux fermés, des assistants qui agissent comme des gardes, et des espaces verrouillés.

Ouvrez les livres à vos employés. Apprenez-leur à lire le P&L. Partagez les informations financières et stratégiques sensibles avec chacun, au sein de l’entreprise.

Lorsque vous prenez des décisions qui impacteront le bien-être des employés, comme des réorganisations ou des mises à pied, divulguez l’information assez tôt à votre force de travail, avant que les choses ne soient solidifiées. Cela causera de l’anxiété et de la distraction, mais la confiance que vous construirez ainsi surpasse ces désavantages.

Lorsque la transparence entre en tension avec la vie privée d’un employé, suivez cette ligne directrice : si l’information concerne quelque chose qui s’est passé au travail, optez pour la transparence et parler honnêtement de l’incident. Si l’information concerne la vie personnelle de l’employé, dites aux personnes que ce n’est pas la place de la partager et dites qu’elles peuvent s’adresser directement à l’intéressé si elles le souhaitent.

Aussi longtemps que vous vous montrez compétent, parlez ouvertement et largement de vos propres erreurs — et encouragez tous les chefs d’équipe à faire de même — cela augmentera la confiance, la bonne volonté, et l’innovation au sein de l’organisation. » (La Règle ? Pas de règles ! p. 126)

Chapitre 6. Maintenant, relâchez davantage les commandes Encourager la prise de décision La suppression des limites de vacances et des politiques de dépenses était une première étape symbolique, mais l’étape suivante consiste à générer un lieu de travail où aucune approbation décisionnelle n’est requise. Dans un tel cadre, vous êtes censé faire confiance à chacun pour agir dans le sens favorable à l’entreprise. Lorsqu’une personne est engagée chez Netflix, le principe fondamental suivant lui est enseigné : « N’essayez pas de plaire au patron. Faites ce qui est bon pour l’entreprise ». On apprend également aux nouveaux employés la chose suivante. À leur arrivée, ils disposent d’un tas métaphorique de jetons avec lesquels ils peuvent faire des paris. Certains de ces paris seront réussis, d’autres échoueront. Leurs performances seront jugées en fonction de la taille de ce tas, et non en fonction de la réussite ou de l’échec d’un seul pari. Pour Reed Hastings, c’est la meilleure façon d’encourager l’innovation et la prise de décision. Le cycle d’innovation de Netflix Chaque fois que vous avez une nouvelle idée qui vous passionne, vous devez faire ceci :

Socialiser ; Tester ; Décider ; Célébrer.

C’est ce que Netflix appelle le « cycle de l’innovation ». Détaillons-la. Socialiser, c’est-à-dire faites connaître votre idée et laissez vos collègues vous dire s’ils l’aiment ou la détestent. En bref, obtenez des commentaires et des retours constructifs. S’il s’agit d’une grande idée, testez-la et analysez ce que les données montrent. Trouvez d’autres personnes qui font déjà ce que vous proposez, et essayez de tirer des enseignements de leur expérience. Faites un essai et demandez leur avis aux clients. Sur ces bases, pariez en partant du principe que vous choisissez d’aller de l’avant ou non et que vous êtes seul responsable du résultat. Aucune approbation n’est requise. Si le projet vous plaît, allez-y. Si votre pari se révèle gagnant, célébrez-le. Mais faites de même s’il échoue ! Mettez-le en lumière pour que tout le monde en tire les leçons. Netflix ne s’attend pas à ce que tous les paris réussissent : l’entreprise souhaite que les gens partagent ce qu’ils apprennent. « Nous ne devons pas avoir peur de nos échecs. Nous devrions les embrasser. Et ensoleiller encore plus les erreurs ! » (Reed Hastings, La Règle ? Pas de règles ! chapitre 6) À emporter

« Dans une entreprise innovante et rapide, l’appropriation des décisions critiques et importantes devrait être dispersée au sein de la force de travail à différents niveaux, et non pas allouée à un certain type de statut hiérarchique.

Afin que ceci fonctionne, le chef d’équipe doit apprendre à son groupe le principe de Netflix : “Ne cherchez pas à faire plaisir à votre chef.”

Lorsque de nouveaux employés rejoignent l’entreprise, dites-leur qu’ils ont un sac rempli de jetons métaphoriques qu’ils peuvent utiliser pour faire des paris. Certains auront du succès, d’autres non. La performance d’un travailleur sera jugée sur le résultat global de ses paris, non sur les résultats d’une simple mise.

Pour aider votre force de travail à faire de bons paris, encouragez-les à cultiver le dissentiment, à socialiser leurs idées et à tester leurs gros paris.

Apprenez à vos employés que lorsqu’un pari échoue, ils devraient s’en réjouir ouvertement [sunshine it openly]. » (La Règle ? Pas de règles ! p. 160)

Section 3. Techniques pour renforcer la culture de la liberté et de la responsabilité Vous souhaitez désormais renforcer votre culture de la liberté et de la responsabilité. Mais comment ? Suivez ce chemin :

Vivez selon le test du gardien ; Maximisez votre honnêteté en utilisant des cercles de feedbacks ; Dirigez en fonction du contexte, ne contrôlez pas.

Chapitre 7. Le test du gardien La métaphore de l’équipe sportive En 2008, Netflix était en pleine croissance. Des dizaines de nouveaux employés rejoignaient l’entreprise chaque semaine. Pour structurer cette augmentation, l’équipe de direction a commencé à utiliser la métaphore de l’équipe sportive professionnelle. Les questions à se poser Pour renforcer l’éthique et l’état d’esprit de l’équipe sportive, les managers sont invités à appliquer le « test du gardien ». En pratique, cela signifie que chaque manager doit régulièrement se demander s’il a la meilleure personne dédiée à chaque poste. Les chefs d’équipe doivent donc se poser la question : « Si un membre de votre équipe devait démissionner demain, essaieriez-vous de le faire changer d’avis ? Ou seriez-vous soulagé de le voir partir ? Dans ce dernier cas, vous devriez lui verser une indemnité de départ dès maintenant et chercher une star, une personne pour laquelle vous vous battriez. » (La Règle ? Pas de règles ! Chapitre 7) Netflix essaie d’appliquer ce test à l’ensemble de l’entreprise. Il ne s’agit pas de créer des systèmes de classement et de compétition, qui nuisent à la culture de la collaboration, de la liberté et de la responsabilité, mais de renforcer l’honnêteté. Les employés eux-mêmes sont encouragés à aller voir leur patron à tout moment et à lui demander : « Si j’envisageais de partir, jusqu’où iriez-vous pour me faire changer d’avis ? ». Cette démarche désamorce en grande partie les tensions et l’anxiété. La transparence, même en matière de licenciement Netflix fait également quelque chose d’intéressant lorsque des personnes sont licenciées. L’équipe se réunit et commence par noter les principales forces de l’employé licencié. Le manager explique ensuite pourquoi il a estimé que cet employé n’était plus le meilleur choix pour son poste. Les membres de l’équipe peuvent alors interroger le manager sur ce qui a été fait pour aider cette personne, et ainsi de suite. En mettant tout sur la table, tous les membres de l’équipe peuvent comprendre ce qui se passe. Netflix offre également une généreuse indemnité de départ à tout employé licencié. De nombreux anciens employés de Netflix ont utilisé ces indemnités pour démarrer leurs prochains projets. L’indemnité de départ comprend généralement plusieurs mois de salaire pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille, pendant que les ex-employés cherchent un nouvel emploi. Chaque année, Netflix enregistre en moyenne un taux de rotation volontaire de 3 à 4 % et un taux de rotation involontaire (personnes licenciées) d’environ 8 %. À emporter

« Afin d’encourager vos chefs d’équipe à se focaliser sur la performance, apprenez-leur à utiliser le test du gardien […].

Éviter les systèmes de classement qui créent de la compétition Internet et découragent la collaboration.

Pour une culture de la performance, la métaphore de l’équipe sportive est meilleure que celle de la famille. Encouragez vos managers à développer l’engagement, la cohésion et la camaraderie, tout en vous assurant que chaque joueur est à la bonne place.

Lorsque vous réalisez que vous devez laisser partir quelqu’un, au lieu de le mettre sur un certain type de PIP (performance improvement plan), ce qui est humiliant et coûteux sur le plan organisationnel, prenez tout cet argent et donnez-le à l’employé sous la forme d’une généreuse indemnité de départ.

L’inconvénient d’une culture de haute performance est que les employés peuvent avoir l’impression que leur emploi est en jeu. Pour réduire cette peur, encouragez-les à utiliser le test du gardien avec leurs managers […].

Lorsqu’un employé s’en va, parlez-en ouvertement avec l’équipe et répondez à leurs questions avec franchise. Cela diminuera leur peur d’être le suivant et augmentera la confiance envers l’entreprise et la direction. » (La Règle ? Pas de règles ! p. 186)

Chapitre 8. Maximisez la franchise « La franchise, c’est comme aller chez le dentiste » Les nouvelles personnes qui rejoignent Netflix sont souvent stupéfaites de voir à quel point la franchise fait partie intégrante de la culture de l’entreprise. Pour ces personnes qui viennent d’entreprises où l’on commande et contrôle, il n’est pas évident de se mettre soudain à signaler à son patron ce qu’il fait bien ou mal ! Mais comme le dit Reed Hastings : « La franchise, c’est comme aller chez le dentiste. Même si vous encouragez tout le monde à se brosser les dents quotidiennement, certains ne le feront pas. Ceux qui le font risquent quand même de ne pas voir les endroits inconfortables. Je ne peux pas garantir que la franchise que nous encourageons se produise tous les jours ». (Reed Hastings, La Règle ? Pas de règles ! chapitre 8) Dans de nombreuses entreprises, l’examen annuel des performances est le mécanisme qui permet de donner du feedback aux employés, mais celui-ci ne va que dans une seule direction et ne provient que d’une seule personne. Netflix a choisi d’utiliser un autre mécanisme : les feedbacks à 360°, écrits et en direct. Des évaluations écrites à 360 degrés Un 360 écrit est un rapport auquel n’importe qui chez Netflix peut ajouter ses commentaires. Sa préparation se fait dans le cadre d’un exercice annuel. En moyenne, les employés de Netflix reçoivent un retour d’information sur leurs performances de la part d’au moins 10 de leurs pairs. Ces commentaires sont signés par la personne qui les donne. Si vous voulez plus de détails, vous pouvez ainsi aller les voir pour en discuter. Par ailleurs, les employés sont amenés à évaluer leur patron dans le cadre de ces évaluations écrites à 360°, ce qui donne lieu à des discussions animées ! Les 360 degrés en direct En plus des évaluations écrites, Netflix organise des évaluations en direct. Comme leur nom l’indique, il s’agit de séances de feedback en présentiel durant lesquelles il est possible d’identifier et de désamorcer les tensions latentes au sein de l’équipe. Voici quelques caractéristiques de ces Live 360 :

Elles ont souvent lieu au cours d’un dîner ; Un groupe de 10 à 12 employés est la taille optimale ; Il est préférable de mandater un modérateur fort qui peut intervenir si la discussion s’écarte du sujet ; Les participants sont invités à donner un feedback constructif de type 4A ; Un équilibre d’environ 25 % de feedback positif et de 75 % de feedback de développement (choses à améliorer) est souhaité.

Voici quelques astuces supplémentaires données par Reed Hastings : « Les premières interactions de feedback donneront le ton de la soirée. Choisissez un récepteur de feedback qui recevra un feedback difficile avec ouverture et appréciation. Choisissez un donneur de feedback qui donnera le feedback difficile, tout en respectant les directives des 4 A. Souvent, le patron choisit d’être le premier à recevoir. Les 360° en direct fonctionnent en raison de notre forte densité de talents et de notre politique “pas d’abrutis brillants”. Si vos employés sont immatures, ont une mauvaise attitude ou manquent de confiance en eux pour montrer leur vulnérabilité en public, vous n’êtes peut-être pas prêt à organiser ces événements. Et même si vous êtes parfaitement prêt, vous aurez besoin d’un modérateur solide qui s’assurera que tous les commentaires s’inscrivent dans le cadre des 4 A et interviendra si quelqu’un dit quelque chose de déplacé ». » (Reed Hastings, La Règle ? Pas de règles ! Chapitre 8) À emporter

« La franchise, c’est comme aller chez le dentiste. Même si vous y encouragez tout le monde, certains ne le feront pas. Et même ceux qui le font peuvent encore avoir des soucis. Une séance approfondie tous les six à douze mois garantit des dents propres et un système de rétroaction en parfait état.

Les évaluations de performance ne sont pas le meilleur mécanisme pour un environnement de travail franc, principalement parce que les commentaires ne vont généralement que dans un sens (vers le bas) et ne proviennent que d’une seule personne (le patron).

Un rapport écrit à 360 degrés est un bon mécanisme de rétroaction annuelle. Toutefois, évitez l’anonymat et les notes numériques, ne liez pas les résultats à des augmentations ou des promotions, et ouvrez les commentaires à quiconque est prêt à les donner.

Les dîners en direct à 360 degrés sont un autre processus efficace. Prenez plusieurs heures, loin du bureau. Donnez des instructions claires, suivez les directives de retour d’information A4 et utilisez la méthode “Démarrer, Arrêter, Continuer” en cherchant à obtenir environ 25 % de positifs, 75 % de développement, tous exploitables et sans peluches. » (La Règle ? Pas de règles ! p. 204)

Chapitre 9. Dirigez en fonction du contexte, ne contrôlez pas Informer ses employés de la situation La plupart des organisations ont des dirigeants qui contrôlent tout ce qui se passe. Un patron approuve les initiatives à poursuivre et gère le temps de ses subordonnés directs. Un patron peut vérifier fréquemment pour corriger un travail qui n’est pas conforme aux normes, ou donner aux employés le pouvoir d’utiliser leur discrétion dans le cadre des contrôles mis en place. Diriger avec le contexte est beaucoup plus difficile car cela donne beaucoup plus de liberté et de discrétion aux employés. En tant que manager ou chef d’équipe, vous fournissez suffisamment d’informations pour que les employés comprennent la situation, puis vous leur faites ensuite confiance pour prendre de bonnes décisions et travailler sans surveillance. Le principal avantage de diriger en tenant compte du contexte est que chacun apprend à prendre de bonnes décisions par lui-même. Les trois conditions réunies chez Netflix Netflix a toujours suivi la philosophie selon laquelle il est préférable de diriger en fonction du contexte plutôt que de contrôler. Cela a été rendu possible chez Netflix grâce à ces trois conditions :

L’entreprise a une forte densité de talents. Elle est remplie de personnes qui sont motivées et extrêmement talentueuses. Ils n’ont pas besoin qu’on leur dise ce qu’ils doivent faire heure par heure et jour par jour. L’objectif de l’entreprise est d’être une force créative et d’innover, et non d’empêcher une erreur dans un système de production qui fabrique des millions de produits chaque année. Le PDG de Netflix est un ingénieur en logiciel et comprend que l’entreprise doit être un système à couplage lâche. Dans ce type de système, la conception des composants se fait de manière à pouvoir s'adapter sans devoir revenir en arrière et modifier la base. Cela rend Netflix flexible, avec une prise de décision décentralisée.

L’étoile Polaire de l’entreprise Quelques fois par an, Reed Hastings réunit les dirigeants de Netflix du monde entier pour une réunion de deux jours afin de s’assurer que tout le monde comprend l’« étoile polaire » de l’entreprise, c’est-à-dire la direction générale prise par Netflix. Des mémos sont ensuite envoyés via Google Docs à chaque employé de l’entreprise pour expliquer le contexte partagé lors de ces réunions. Tous les employés de l’entreprise ont ainsi le même accès à ces informations contextuelles. Puis, entre ces grandes réunions, l’équipe dirigeante organise des réunions individuelles avec chaque employé, une fois par an. Cela lui permet de comprendre le contexte en détail et cela permet aussi de mettre en évidence tout ce qui ne fonctionne pas (excès de dépenses, par exemple). La métaphore de l’arbre, plutôt que celle de la pyramide La plupart des organisations ont un organigramme qui ressemble à une pyramide. Netflix, quant à lui, ressemble à un arbre plutôt qu’à une pyramide. Le PDG est à la racine de l’arbre et le nourrit en lui fournissant un contexte. Il soutient les cadres supérieurs, qui à leur tour soutiennent les branches extérieures où les décisions sont prises. Par exemple :

En octobre 2017, Reed Hastings a déclaré aux hauts dirigeants de l’entreprise que la croissance internationale était la priorité absolue de Netflix et son plus gros moteur de revenus. Ted Sarandos, le directeur du contenu de Netflix, a décidé que, par conséquent, Netflix devait « prendre de gros risques et apprendre beaucoup » sur ces marchés internationaux. Il a déclaré à ses collaborateurs que Netflix devait devenir une machine à apprendre internationale. Melissa Cobb, qui rend compte à Ted Sarandos, a décidé que la seule façon d’y parvenir était que Netflix fournisse du matériel de qualité provenant du monde entier. Pour elle, il s’agit de « faire venir des cabanes de glace et des huttes de terre à Bangkok ». Dominique Bazay, qui rend compte à Melissa Cobb, a fait part de ses réflexions sur le contenu mondial et a décidé de viser haut pour tout contenu d’animation préscolaire qu’elle développe. Aram Yacoubian, qui rend compte à Dominique Bazay, était responsable de l’acquisition de contenu en Inde. Il a tenu compte de cette idée lorsqu’on lui a présenté une émission produite localement intitulée Mighty Little Bheem. Aram a acheté l’émission pour Netflix, mais a également donné de l’argent aux créateurs locaux pour améliorer l’animation. L’émission a été lancée en avril 2019, et en trois semaines, elle était devenue l’une des séries animées les plus regardées de Netflix. Elle compte désormais 27 millions de vues.

« La décision d’Aram d’acheter Mighty Little Bheem est un exemple clair de la manière dont Netflix dirige en fonction du contexte. Chaque leader, de moi-même à la racine de l’arbre jusqu’à Dominique au niveau de la branche intermédiaire, établit un contexte qui éclaire la décision d’Aram. Mais c’est Aram lui-même, en tant que capitaine informé, qui décide des émissions à acheter. Chez Netflix, il y a beaucoup d’histoires d’employés de niveau inférieur qui prennent des décisions financières de plusieurs millions de dollars sans l’approbation du patron. Les personnes extérieures sont souvent perplexes quant à la manière dont cela peut fonctionner dans une organisation financièrement responsable. La réponse est simple : c’est à cause de l’alignement ». » (Reed Hastings, La Règle ? Pas de règles ! Chapitre 9) À emporter

« Afin de diriger avec le contexte, vous devez avoir une densité de talents élevée, votre objectif doit être innovant (pas de prévention des erreurs) et vous devez fonctionner dans un système à couplage lâche.

Une fois ces éléments en place, au lieu de dire aux gens quoi faire, alignez-vous au pas de course en fournissant et en débattant de tout le contexte qui leur permettra de prendre de bonnes décisions.

Quand l’un des vôtres fait quelque chose de stupide, ne blâmez pas cette personne. Au lieu de cela, demandez-vous quel contexte vous n’avez pas réussi à définir. Êtes-vous suffisamment cohérent et inspirant au moment d’exprimer vos objectifs et votre stratégie ? Avez-vous clairement expliqué toutes les hypothèses et les risques qui aideront votre équipe à prendre les bonnes décisions ? Êtes-vous aligné avec vos employés sur la vision et les objectifs ?

Une organisation faiblement couplée devrait ressembler à un arbre plutôt qu’à une pyramide. Le patron est à la racine, soutenant le tronc des cadres supérieurs qui soutiennent les branches extérieures où se prennent les décisions.

Vous savez que vous dirigez avec succès avec le contexte lorsque vos employés font avancer l’équipe dans la direction souhaitée en utilisant les informations qu’ils ont reçues de vous et de ceux qui vous entourent pour prendre eux-mêmes d’excellentes décisions. » (La Règle ? Pas de règles ! p. 254)

 

Section 4. Devenir global Chapitre 10. Apportez tout au monde ! Une entreprise « sans règles » peut-elle se développer facilement à l’international ? Entre 2011 et 2015, Netflix s’est développé en s’implantant dans plusieurs pays à la fois. En 2016, l’entreprise a pris la décision de se lancer dans 130 pays en un jour ! La grande question était de savoir si la culture d’entreprise « sans règles » de Netflix fonctionnerait dans le monde entier. Pour s’adapter à la croissance internationale, Netflix a établi une carte culturelle d’entreprise en fonction de sept dimensions et comportements. Cette méthodologie était basée sur l’ouvrage de Erin Meyer, The Culture Map. Une fois que Netflix a identifié sa propre culture d’entreprise, l’entreprise a pu la comparer aux cultures des pays dans lesquels la société s’implantait. Cette carte comparative a ensuite servi de guide pour adapter la culture d’entreprise de Netflix aux préférences locales. Par exemple, dans certains pays, les employés sont naturellement prédisposés à consulter des guidelines ou à demander la permission lorsqu’ils prennent des décisions, plutôt que d’utiliser leur propre jugement. La carte culturelle l’a mis en évidence, et c’est pourquoi Netflix a pris soin de former les employés locaux sur la manière de procéder. Une fois qu’ils ont pris le coup de main, ces employés ont généralement aimé la liberté que cela leur donnait, même si cela était contraire à leurs habitudes. Ces cartes culturelles ont aidé Netflix à anticiper et à gérer les problèmes d’adaptation locale au fur et à mesure que l’entreprise se mondialisait. Les défis pour l’avenir C’est un premier défi : apprendre à adapter la culture de la liberté et de la responsabilité dans d’autres pays, tout en prenant en compte les différences culturelles. Voici la conclusion du PDG de Netflix, Reed Hastings. « À l’ère de l’information, dans de nombreuses entreprises et au sein de nombreuses équipes, l’objectif n’est plus la prévention des erreurs et la reproductibilité. Au contraire, c’est la créativité, la vitesse et l’agilité. À l’ère industrielle, l’objectif était de minimiser la variation. Mais aujourd’hui, dans les entreprises créatives, la maximisation de la variation est plus essentielle. Dans ces situations, le plus grand risque n’est pas de commettre une erreur ou de perdre la cohérence ; c’est de ne pas réussir à attirer les meilleurs talents, à inventer de nouveaux produits ou à changer rapidement de direction lorsque l’environnement se modifie. La cohérence et la répétitivité ont plus de chances d’étouffer les idées nouvelles que d’apporter des bénéfices à votre entreprise. Un grand nombre de petites erreurs, bien que parfois douloureuses, aident l’organisation à apprendre rapidement et constituent un élément essentiel du cycle d’innovation. Dans ces situations, les règles et les processus ne sont plus la meilleure réponse. Une symphonie n’est pas ce que vous recherchez. Laissez le chef d’orchestre et les partitions derrière vous. Créez plutôt un groupe de jazz. Le jazz met l’accent sur la spontanéité individuelle. Quand tout s’assemble, la musique est magnifique. » (Reed Hastings et Erin Meyer, La Règle ? Pas de règles ! Chapitre 10)

Conclusion sur « La Règle ? Pas de règles ! Netflix et la culture de la réinvention » de Reed Hastings et Erin Meyer : Un livre qui vous dévoile la culture d’entreprise de Netflix et qui vous propose de l’appliquer à votre organisation

« Netflix est différent. Nous avons une culture où aucune règle ne prévaut. » (Reed Hastings, La Règle ? Pas de règles ! Introduction)

Ce livre intéressera tous les entrepreneurs qui cherchent de nouvelles méthodes de gestion. Le présupposé du livre est simple : c’est en considérant ses collaborateurs comme des adultes, à la fois libres et responsables, qu’une entreprise peut atteindre des sommets et se renouveler sans cesse. Autrement dit, il faut privilégier la communication et tout faire pour que les employés soient conscients des enjeux de l’entreprise. À partir du moment où ceux-ci sont talentueux et intelligents, ils auront à cœur de faire évoluer votre affaire et de stimuler les autres à faire de même. Ce qu’il faut retenir de « La Règle ? Pas de règles ! Netflix et la culture de la réinvention » de Reed Hastings et Erin Meyer : Voici votre plan d’action, si d’aventure vous souhaitez placer vos pas dans ceux de Netflix et créer une culture de liberté et de responsabilité pour votre propre entreprise. Tout d’abord (section 1) :

Créez une pépinière de talents parmi vos collaborateurs (chapitre 1) ; Faites croître la franchise (chapitre 2) ; Supprimez les contrôles (vacances, voyages, dépenses - chapitres 3 a et b).

Ne vous arrêtez pas ! Continuez exactement dans ce sens (section 2) :

Améliorez sans cesse le niveau de talents dans vos équipes (chapitre 4) ; Gonflez à bloc la sincérité (chapitre 5) ; Éliminez les contrôles restants et instaurez l’autonomie dans la prise de décision (chapitre 6).

Oui, oui, une seule recette, aller encore plus loin dans cette direction. Voici quelques outils (section 3) :

Le test du gardien vous permettra d’atteindre des taux d’excellence records (chapitre 7) ; Les feedbacks constructifs à 360 degrés garantiront un maximum d’honnêteté (chapitre 8) ; L’explication du contexte, plutôt que le contrôle, vous permettra de gérer vos équipes (chapitre 9).

Vous vous sentez pousser des ailes ? Passez donc à la vitesse supérieure et devenez global (section 4) :

En exportant votre modèle tout en prenant en compte les différences culturelles des pays dans lesquels vous vous implantez (chapitre 10).

Points forts :

Un livre bien écrit et original ; Une entrée dans les coulisses du géant de nos salons ; Des conseils pour croître comme Netflix et transformer sa culture d’entreprise.

Point faible :

Le format de l’ouvrage, qui fait dialoguer les deux auteurs en proposant une citation après l’autre, peut surprendre au départ. Mais une fois qu’on s’y est habitué, c’est plutôt agréable.

Ma note :    Avez-vous lu le livre de Reed Hastings et Erin Meyer  « La Règle ? Pas de règles ! Netflix et la culture de la réinvention »? Combien le notez-vous ? [ratings] Visitez Amazon afin de lire plus de commentaires sur le livre de Reed Hastings et Erin Meyer  «La Règle ? Pas de règles ! Netflix et la culture de la réinvention » Visitez Amazon afin d’acheter le livre de Reed Hastings et Erin Meyer  « La Règle ? Pas de règles ! Netflix et la culture de la réinvention »

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Thu, 09 Jun 2022 17:00:00 +0200 http://www.olivier-roland.fr/items/view/11928/La-rgle-Pas-de-rgles-