Après deux courts voyages aux Etats-Unis et en Inde début 2012, que je n’ai pas mentionné sur ce blog (ayant déjà abondamment parlé de mon voyage 2011 en Inde et de mon séjour de 3 mois aux Etats-Unis), j’ai décidé d’explorer un peu l’Europe en allant dans un pays qui m’a toujours intéressé de par ses caractéristiques qui le rendent à part des autres pays européens : son influence historique déterminante dans la création de la pensée Occidentale, son éloignement, son passé trouble qui bien qu’étant de religion résolument orthodoxe lui fait partager de nombreux points communs culturels avec des pays arabes, son climat qui est légèrement plus agréable que celui de Lille, ses innombrables ruines à visiter et ses tout aussi innombrables îles à explorer. Bref, la Grèce. J’y suis allé début mai avec ma copine, quelques jours seulement avant les premières élections législatives qui ont fait craindre que nous fassions parti des derniers touristes à payer en euro. Fidèle à ma diète médiatique, je ne connaissais pas trop les détails de la vie économique et politique là-bas, mais suffisamment pour que la crise présentée comme effroyable qui sévissait me fasse hésiter à venir. Finalement je me suis dit “on s’en fout” et bien m’en a pris : si effectivement la crise est un grand sujet de conversation pour les Grecs, dont j’ai pu avoir un avant-goût dès mon arrivée à Athènes avec le chauffeur de taxi qui nous en a parlé pendant tout le trajet, cela ne veut pas dire pour autant que la Grèce est devenue un pays du tiers-monde. Elle reste un pays occidental et est bien, bien plus riche économiquement que l’Inde par exemple. Comme le disait un de mes lecteurs “la crise c’est une simple baisse de vitesse sur une courbe ascendante (vue sur 50 ans), pas de quoi avoir le mal de mer”. De plus il est évident qu’un pays subissant une crise économique a davantage besoin encore de ses touristes. Ce qui est clair en tout cas, c’est que crise ou pas crise, les Grecs savent accueillir les touristes : j’ai été bluffé par la largesse des sourires et la qualité des services, la prévenance et le professionnalisme. Ce qui peut se comprendre vu que le tourisme compte pour 15% du PIB grec, ce qui est énorme. A titre de comparaison, le tourisme compte pour 6.7% du PIB en France, alors même que notre pays est la première destination du monde en nombre de touristes ! Décidé d’explorer un maximum des différentes saveurs de ce pays, j’ai opté pour un programme simple : Athènes, puis les îles de Santorin, Rhodes et Lesbos, toutes trois très différentes les unes des autres. Athènes Je commence donc mon périple par Athènes, non sans une certaine appréhension. Certains nous l’ont décrite comme sale, bruyante et polluée, et je découvre pourtant au fur et à mesure une ville à la température idéale, aux quartiers typiques et colorés parsemés de ruines charmantes et de bars agréables dans lesquels il fait bon faire une partie de dames ou de backgammon à l’ombre des auvents (les jeux sont fournis par les bars et les Grecs en semblent friands).
Une partie de dames un après-midi dans un bar ombragé d’Athènes. What else ?
Le voyage est en tout cas court (3H environ) et le décalage horaire minimal (+1H), c’est l’avantage de voyager en Europe. Nous arrivons donc en pleine forme dans la capitale. Pour la première fois dans mes voyages, je ne suis pas allé dans un hôtel ou dormi chez un Couchsurfeur mais j’ai utilisé AirBnB pour loger chez l’habitant. Pour un prix inférieur à celui d’une chambre d’hôtel classique, nous avons été accueillis par une charmante artiste photographe qui logeait à quelques pas de l’Acropole, et qui nous a régalés avec son gâteau fait maison ! J’ai utilisé 3 fois AirBnB lors de ce voyage et l’expérience a été géniale 2 fois sur 3, moyenne à la troisième. C’est clairement quelque chose d’intéressant à tester puisque quand vous tombez bien vous bénéficiez à la fois d’un lieu sympa, bien situé et peut-être même moins cher que l’hôtel, et surtout d’une personne locale qui saura vous conseiller sur ce qu’il faut faire et ne pas faire. Evidemment il y a un risque de tomber sur un endroit ou une personne qui ne nous plaisent pas, mais les notes sur le site sont là pour ça ! Dès notre arrivée, une fois nos affaires déposées nous allons immédiatement voir l’Acropole qui n’est qu’à quelques minutes de marche. Après avoir erré un peu carte à la main, elle se dévoile soudainement au coin d’une rue qui débouche sur une large allée bordée de cafés. Leurs terrasses permettent d’admirer le lieu tout en se désaltérant.
L’acropole, un champ de ruines et une oasis de verdure en plein coeur d’Athènes C’est magnifique, et surprise : la chaleur n’est pas écrasante (c’est tout le contraire) et il n’y a pas trop de monde. Début mai semble être une excellente période pour se rendre en Grèce, car en faisant cela vous arrivez avant la plupart des touristes. Il y a plus de place pour vous . Si l’agora est magnifique vue de l’extérieur, l’intérieur est une déception tant le Parthénon est en mauvais état. Le musée de l’acropole lui est excellent, tout comme sans doute de nombreux autres musées dans cette ville qui déborde de ruines et d’objets à voir, et que nous n’aurons pas le temps d’aller voir. Nous ne restons que quelques jours à Athènes, le temps de faire le tour du centre et de visiter quelques ruines, puis nous prenons l’avion pour notre première île : Santorin, l’île volcanique emblématique des Cyclades. Mais avant de vous y emmener, voici quelques traits culturels intéressants que j’ai pu constater en Grèce : Traits culturels Nourriture La nourriture grecque est en général excellente, constituée de nombreux petits plats que l’on commande séparément, de manière semblable aux tapas. Viande, poisson, légumes, il y en a pour tous les goûts ! L’alcool par contre laisse souvent à désirer, avec des bières vraiment pas terribles (mais bon, je vis à coté de la Belgique ) et des vins dont le goût est souvent assez différent de ce dont on a l’habitude en France, mais qui sont parfois l’occasion de belles découvertes. L’ouzo est une sorte de pastis grec sympathique si vous aimez l’anis (dans un restaurant demandez à ce qu’on vous fasse un “ouzorijito”, un mojito avec de l’ouzo à la place du rhum ! Les Grecs ne connaissent pas en général mais seront ravis de le faire pour vous si vous leur indiquez quoi mettre dedans, c’est délicieux )
Voilà un exemple de la diversité des plats grecs Les cafés grecs ressemblent beaucoup aux cafés turcs (ne leur dites surtout jamais ça !) et il y autant à boire qu’à manger dedans ! A essayer au moins une fois en tout cas . Ne manquez pas le café “frappé” aussi, qui est un café glacé délicieux à déguster en terrasse. Animaux Une des premières choses qui frappe en se baladant dans les rues c’est le nombre de chats et de chiens en totale liberté. Les chats sont souvent en meutes, tandis que les chiens portent des colliers bleus qui indiquent qu’ils ont été vaccinés et stérilisés par une association de défense des animaux. J’ai retrouvé ces chiens et chats vivants en liberté et apparemment nourris par les passants et les touristes dans les trois îles que j’ai visitées ensuite, ce qui montre je pense une vision des animaux culturellement différente de la nôtre. Les animaux traînent dans la rue mais sont nourris et, pour les chiens, soignés.
“Meute” de chats dans les rues d’Athènes Langue Les Grecs ont bien conscience que très peu d’étrangers apprennent leur langue et ils sont nombreux à bien parler anglais, à tel point que je n’ai pas vraiment senti de barrière linguistique durant mon séjour. J’ai toutefois été très surpris par le nombre de Grecs qui parlent français : ils sont certes beaucoup moins nombreux que ceux parlant anglais, mais loin d’être aussi rares que dans d’autres pays. Apparemment apprendre le français est bien vu, tout comme le fait d’aller faire une partie de ses études à Paris. Nous avons donc eu le plaisir d’échanger quelques mots avec des serveurs et serveuses qui étaient ravis de pouvoir s’entraîner (poser le Guide du Routard sur la table aide ). Dans Athènes et dans les lieux touristiques les panneaux sont souvent écrits à la fois en alphabet grec et en alphabet latin, ce qui est vraiment très utile étant donné la différence assez importante entre les deux. Voici par exemple comme s’écrit Athènes en alphabet grec : . Vous voyez qu’il est utile d’avoir des panneaux en alphabet latin… Religion Une chose qui frappe chez les Grecs, plus dans les îles qu’à Athènes quand même, c’est l’importance de la religion (orthodoxe). Ici la séparation de l’Eglise et de l’Etat n’a pas eu lieu, et les nombreux prêtres sont des fonctionnaires payés par l’Etat, tout comme les églises sont entretenues par lui. Il n’est donc pas rare de voir un peu partout des églises orthodoxes rutilantes, parfois à coté d’une école décrépie… Les Grecs sont également encore très religieux, et sur ce point le pays fait penser à la France de nos arrières-grands-parents, ce qui ajoute au dépaysement. Santorin
Maisons d’une blancheur éclatante et haut perchées, caldeira et volcan : c’est Santorin ! Santorin est une île très particulière, puisque c’est la plus grand île d’un archipel de 4 dont le centre n’est rien d’autre qu’un volcan encore actif. Elle est en forme de croissant de lune, vestige d’une île qui auparavant était complètement circulaire et qui a littéralement explosée lors d’une énorme éruption volcanique qui a eu lieu vers 1600 avant JC. Cette explosion a créé un tsunami qui a ravagé la Méditerranée, mettant à mal la civilisation minoenne et sans doute de nombreuses autres civilisations, et a peut-être donné naissance au mythe de l’Atlantide. Cette particularité ainsi que son architecture faite de maisons d’une blancheur éclatante en fait une île de toute beauté, qu’il faut clairement avoir vu au moins une fois dans sa vie. Je me suis extasié devant ses falaises, sa caldeira, son volcan qui fume encore, les vestiges de ses cités grecques, romaines et minoennes et j’ai goûté avec curiosité son vin acide produit localement à partir d’une vigne rare qui n’a que 10% du rendement des vignes françaises (!). Car ce n’est pas vraiment pour la plage que l’on vient à Santorin – ses plages de sable noir ne sont vraiment les plus belles de la Grèce – mais pour toutes ces raisons et je peux vous dire que nous sommes servis : j’en ai pris les yeux, j’ai rêvé devant les magnifiques fresques murales retrouvées dans la ville enfouie d’Akrotiri (ensevelie comme Pompéi par l’éruption volcanique de -1600), j’ai savouré avec délice les poissons et le vin local. Et ici comme à Athènes ce n’était pas encore le plus fort de la saison touristique et nous avons bénéficié d’une relative tranquillité. Santorin est également le seul endroit de mon périple en Grèce où j’ai utilisé le Couchsurfing. Qui plus est, hasard des disponibilités des couchsurfeurs, je n’ai pas rencontré de locaux mais des étrangers vivant à Santorin (une Hongroise et un Roumain), ce qui m’a permit également de rencontrer quelques-uns de leurs amis, étrangers eux aussi (dont mon tout premier Tadjik !). Ils m’ont dressé un portrait un peu moins rose que celui que l’on peut voir en tant que touriste, en me parlant des horaires difficiles de leur métier et du salaire très bas qu’ils reçoivent en contrepartie. Ils ont le sentiment que les Grecs sont beaucoup moins accueillants avec les immigrés qu’avec les touristes (ce qui peut se comprendre car la Grèce accueille contre son gré 80 à 90% des immigrés clandestins de l’Union Européenne – il y a environ un million d’immigrés clandestins pour une population de 11 millions d’habitants !). Le coté positif outre le cadre idyllique de Santorin, c’est que le travail se fait seulement pendant la saison touristique : lors de l’hiver rien ne se passe à Santorin et nombre de travailleurs en profitent pour prendre des vacances en Grèce continentale. Malgré cela j’ai passé quelques moments “couchsurfing” très agréables avec eux .
Moment couchsurfing. What else ? Mais trêve de bavardages, Santorin est avant tout un régal pour les yeux, donc voici quelques images pour vous faire découvrir cette île fabuleuse :
Des villages blancs perchés en haut d’une falaise stratifiée
Le port de la capitale Fira, et la caldeira (à gauche le volcan)
Le volcan est encore actif, on peut y voir notamment des fumées s’échapper du sol
Un paysage serein dont on ne se lasse pas
Le soleil couchant au-dessus d’Oia
Des ruines grecques et romaines au milieu des coquelicots à Théra
La capitale Fira vue de la caldeira Rhodes Après Santorin, direction Rhodes pour un voyage de nuit en ferry. Rhodes est à la fois le nom de l’île et le nom de sa capitale, une ville médiévale façonnée par l’Ordre des Hospitaliers et dont on a l’impression qu’elle est restée quasi en l’état depuis leur départ de l’île en 1522 (ils partirent s’établir à Malte). Hautes murailles, château fort, rues étroites, larges “auberges” créées par ces chevaliers pour abriter les membres de leur ordre, une par langue : tout y est. J’ai utilisé encore une fois AirBnb pour trouver un logement en plein coeur de la vieille ville, ce qui est absolument à faire au moins une fois si vous y allez : l’impression de vivre au coeur d’une ville médiévale est très présente, et c’est un plaisir de se perdre dans les dédales de rues tortueuses et de tomber sur les ruines d’une vieille église, d’un hammam ou d’une maison…
Les rues tortueuses de Rhodes nous plongent dans une ambiance médiévale…
La “rue des chevaliers”, où se trouvent les auberges dans lesquelles se retrouvaient les chevaliers de l’ordre des Hospitaliers
Une auberge vue de près
Les murailles de Rhodes et son château
Une des nombreuses ruines que vous découvrirez en vous perdant dans la vieille ville Je n’ai que très peu visité l’île, profitant davantage de la vieille ville. Le peu que j’en ai vu m’a cependant semblé sympathique :
Un des paysages de la côte nord-est de l’île
Un château qui mêle ruines médiévales et ruines grecques… original !
Les ânes sont très utilisés pour faire monter les touristes sur divers sites d’intérêts en hauteur
Dans les coulisses du tournage d’une vidéo, ou comment joindre l’utile et l’agréable ! (Le résultat final est ici) Après y être restés quelques jours (Rhodes est l’île où notre séjour a été le plus court), nous avons pris l’avion pour Lesbos, l’île au nom évocateur… Lesbos Si Lesbos vous rappelle un tant soit peu “lesbienne”, c’est normal : c’est dans cette île qu’est née Sappho, considérée comme une poétesse lesbienne (bien que cela soit sujet à controverse). Très différente de Santorin et Rhodes, Lesbos (aussi appelée du nom de sa capitale Mytilène) est une île verdoyante où pas moins de 11 millions d’oliviers poussent, soit 126 par habitant ! C’est une île très sauvage, aux paysages sublimes dont la plupart semblent avoir traversé les millénaires sans jamais être touchés par l’homme. Elle a été mon île “coup de coeur” de ce voyage, et ses montagnes, ses deux lagons, sa forêt pétrifiée, ses quelques ruines, ses monastères orthodoxes disséminés dans ses recoins, ses plages et ses paysages sont un véritable appel à la méditation et à la contemplation.
Cet aqueduc romain près de la capitale nous a accueilli dès notre arrivée
11 millions d’oliviers poussent à Lesbos, soit 126 par habitant !
Mon bureau…
Ceci est un arbre pétrifié de plusieurs millions d’années. Oui, il a été littéralement changé en pierre après avoir été enseveli après une éruption, comme des dizaines de ses congénères.
Des paysages qui invitent à la méditation…
Lesbos, c’est la mer, la montagne et la forêt tout à la fois…
Pause lecture sur une plage de galets, c’est sympa d’avoir sa bibliothèque avec soi !
Un paon qui profite de l’ambiance d’un des nombreux monastères orthodoxes de l’île
Evidemment, tous les poissons et fruits de mer sont très frais. Derrière ce calamar qui sèche au soleil, on aperçoit les côtes de la Turquie toute proche qui enserrent l’île
Après avoir bien profité du cadre sauvage et spirituel de Lesbos, nous avons pris l’avion à nouveau pour Athènes, où nous avons passé deux jours supplémentaires avant de repartir pour Paris. Nous en avons surtout profité pour visiter le musée de l’acropole, qui est vraiment excellent et que je vous recommande fortement. Mais bon, il y a tellement de musées a voir à Athènes…
Conclusion
J’ai beaucoup aimé ce court voyage de 20 jours en Grèce qui m’a permit de découvrir une culture européenne très intéressante à bien des égards. J’ai été surpris par la diversité des trois îles que j’ai visité, et qui pourtant ne représentent qu’un petit aperçu de toutes les îles grecques (il y a 9841 îles en Grèce, mais seules 169 sont habitées dont un tiers ont moins de 50 habitants !).
La beauté volcanique de Santorin, le charme médiéval de Rhodes, les paysages sublimes et sauvages de Lesbos et les ruines si symboliques d’Athènes sont des spectacles qui ne laissent pas indifférents et qui à coup sûr forgeront des souvenirs dont vous pourrez profiter toute votre vie.
La découverte de la culture grecque, à la fois si proche de nous par certains cotés (nous ne sommes pas sur une autre planète comme en Inde) et si différente par d’autres (les animaux, la nourriture, la religion omniprésente, le fort patriotisme, l’alphabet, etc.) est envoûtante, sans compter bien sûr le rôle essentiel que les Grecs ont joué dans la naissance de la civilisation occidentale et dont les symboles visibles presque partout ne peuvent que fasciner un européen un tant soi peu cultivé. Evidemment, 20 jours c’est bien trop peu pour en apprécier toute la richesse, mais un séjour même aussi court suffira déjà à vous dépayser, à condition de ne pas rester dans un club Med bien sûr .
Quoi qu’il en soit, si ce que les médias disent de la Grèce en ce moment vous refroidit, vous pouvez balayer ces craintes d’un revers de main : les Grecs sont naturellement très accueillants avec les touristes étant donné le poids hallucinant du secteur dans l’économie, et c’est d’autant plus vrai en temps de crise. Un pays en crise a besoin de ses touristes, et vous verrez sur place que la Grèce reste un pays occidental avec un niveau de vie élevé.
Et un dernier conseil : y aller début mai était vraiment très agréable, donc si vous avez l’occasion d’y aller hors-saison, ce sera le « concombre sur le tzatzíki » !
Olivier, en partance pour le Maroc